Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.72/2020
Zurück zum Index Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2020
Retour à l'indice Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2020


TypeError: undefined is not a function (evaluating '_paq.toString().includes
("trackSiteSearch")') https://www.bger.ch/ext/eurospider/live/de/php/aza/http/
index.php?highlight_docid=aza%3A%2F%2Faza://08-04-2020-6B_72-2020&lang=de&zoom=
&type=show_document:1859 in global code 
 

Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_72/2020

Arrêt du 8 avril 2020

Cour de droit pénal

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,

Jacquemoud-Rossari et Muschietti.

Greffier : M. Graa.

Participants à la procédure

A.________,

représenté par Me Yaël Hayat, avocate,

recourant,

contre

Service de l'exécution des sanctions pénales et de la probation du canton de
Fribourg,

intimé.

Objet

Libération conditionnelle de l'internement, expertise psychiatrique; assistance
judiciaire gratuite,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Ie Cour
administrative, du 27 novembre 2019 (601 2019 105+106).

Faits :

A. 

Par arrêt du 2 octobre 2015, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal du
canton de Fribourg a condamné A.________, pour diffamation, injure, menaces,
contrainte, tentative d'instigation à lésions corporelles graves et délit
contre la législation sur les armes, à une peine privative de liberté de trois
ans et demi ainsi qu'à une mesure d'internement.

Cette décision a par la suite été confirmée par le Tribunal fédéral (cf. arrêt
6B_1187/2015 du 12 septembre 2016).

B. 

Le 22 janvier 2019, le Service pénitentiaire des Etablissements pénitentiaires
de B.________ a émis un préavis défavorable concernant la libération
conditionnelle de l'internement de A.________.

Le 4 février 2019, la Commission consultative de libération conditionnelle et
d'examen de la dangerosité du canton de Fribourg (ci-après : CCLCED) a
également émis un préavis négatif s'agissant de la libération conditionnelle de
l'internement et d'un changement de sanction.

Par décision du 23 avril 2019, le Service de l'exécution des sanctions pénales
et de la probation (ci-après : SESPP) a refusé la libération conditionnelle de
l'internement de A.________ et a renoncé à déposer une demande de changement de
sanction.

C. 

Par arrêt du 27 novembre 2019, la Ie Cour administrative du Tribunal cantonal
fribourgeois a rejeté le recours formé par A.________ contre la décision du 23
avril 2019 et a rejeté sa demande d'assistance judiciaire totale.

D. 

A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre
l'arrêt du 27 novembre 2019, en concluant principalement à sa réforme en ce
sens que l'assistance judiciaire complète lui est accordée pour la procédure de
recours devant l'autorité cantonale, que la décision précitée est annulée et la
cause renvoyée au SESPP pour nouvelle décision sur la base d'une expertise
indépendante. Subsidiairement, il conclut à son annulation et à l'octroi de
l'assistance judiciaire complète pour la procédure de recours devant l'autorité
cantonale, la cause étant renvoyée au SESPP pour nouvelle décision sur la base
d'un complément d'expertise. Plus subsidiairement, il conclut à son annulation
et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il
sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.

Considérant en droit :

1. 

Aux termes de l'art. 78 al. 2 let. b LTF, sont notamment sujettes au recours en
matière pénale les décisions sur l'exécution de peines et de mesures.

2. 

Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 64b CP.

2.1. Aux termes de l'art. 64b al. 1 CP, l'autorité compétente examine, d'office
ou sur demande, au moins une fois par an et pour la première fois après une
période de deux ans, si l'auteur peut être libéré conditionnellement de
l'internement et, si tel est le cas, quand il peut l'être (let. a). Elle
examine au moins une fois tous les deux ans et pour la première fois avant le
début de l'internement, si les conditions d'un traitement thérapeutique
institutionnel sont réunies et qu'une demande en ce sens doit être faite auprès
du juge compétent (let. b). Selon l'al. 2 de cette disposition, l'autorité
prend la décision selon l'al. 1 en se fondant sur un rapport de la direction de
l'établissement (let. a), une expertise indépendante au sens de l'art. 56 al. 4
CP (let. b), l'audition d'une commission au sens de l'art. 62d al. 2 CP (let.
c) et l'audition de l'auteur (let. d).

Selon la jurisprudence, le juge peut se fonder sur une expertise qui figure
déjà au dossier si celle-ci est encore suffisamment actuelle. L'élément
déterminant pour trancher de cette question n'est pas le temps qui s'est écoulé
depuis le moment où l'expertise a été établie, mais plutôt l'évolution qui
s'est produite dans l'intervalle. Il est ainsi parfaitement concevable de se
fonder sur une expertise relativement ancienne si la situation ne s'est pas
modifiée entre-temps (ATF 134 IV 246 consid. 4.3 p. 254; plus récemment arrêt
6B_658/2019 du 17 juillet 2019 consid. 4.3). Savoir si les circonstances se
sont modifiées depuis la première expertise relève du fait (ATF 106 IV 236
consid. 2a p. 238; plus récemment arrêt 6B_658/2019 précité consid. 4.3).
Déterminer si les circonstances nouvelles dûment constatées imposent de
réitérer l'expertise est une question d'appréciation, soit de droit (ATF 105 IV
161 consid. 2 p. 163; arrêt 6B_658/2019 précité consid. 4.3).

2.2. L'autorité précédente a exposé qu'elle s'était notamment fondée sur une
expertise de 2013 pour rendre sa décision. Cette expertise remontait certes à
près de six ans. L'expert psychiatre avait alors relevé que le recourant se
trouvait dans le déni, soit éprouvait une incapacité à assumer la
responsabilité de ses actes et de prendre en considération les conséquences de
ceux-ci, à l'égard de son ex-compagne ou de lui-même. Il avait ajouté qu'en
l'absence de toute pathologie psychiatrique, aucune thérapie ne pouvait être
proposée, mais que l'intéressé avait cependant la possibilité d'entrer
volontairement dans une démarche psychothérapeutique ayant pour but de modifier
son fonctionnement. Dans son rapport du 28 octobre 2013, l'expert avait
considéré que cette éventualité était plus qu'improbable, car l'entrée dans une
démarche thérapeutique supposait que le recourant eût préalablement pris
conscience des effets néfastes de son fonctionnement pour autrui ou pour
lui-même, ce qui n'était pas le cas. Dans son rapport du 8 janvier 2019, le
Service de médecine et psychiatrie pénitentiaire avait relevé que, jusqu'alors,
le recourant n'avait pas bénéficié d'un suivi psychothérapeutique mais
acceptait volontiers un entretien lorsque celui-ci lui était proposé. Selon la
cour cantonale, les entretiens auxquels le recourant avait pris part n'avaient
pas été tenus à sa demande. Il s'agissait en outre davantage d'un suivi de
soutien dans lequel l'intéressé adoptait une attitude passive que d'un suivi
psychothérapeutique visant à entrer dans une réelle et sincère démarche de
remise en question de son fonctionnement. De surcroît, la seule déclaration
d'intention concernant un éventuel traitement ne pouvait entraîner la
reconnaissance d'un changement significatif et la mise en oeuvre d'une nouvelle
expertise. Une telle démarche ne pourrait être envisagée qu'après avoir pu
vérifier concrètement, sur une certaine durée, le suivi régulier du traitement
et la prise de conscience préalable des effets néfastes du fonctionnement de
l'intéressé. Le recourant, malgré sa prétendue volonté de suivre un traitement
thérapeutique, n'avait nullement l'intention de s'inscrire dans une dynamique
de changement. Il avait en effet déclaré, en janvier 2019, qu'il ne comprenait
pas pourquoi il devrait être soigné mais qu'il suivrait une thérapie "si on lui
disait de le faire". Il avait ajouté que ce n'était "pas à lui de changer" et
avait contesté son internement. Ainsi, selon l'autorité précédente, le
recourant n'avait pas évolué dans sa manière de percevoir les choses depuis son
passage à l'acte. D'ailleurs, il ressortait du rapport du Service pénitentiaire
des Etablissements pénitentiaires de B.________ du 22 janvier 2019 que le
recourant niait intégralement les actes délictueux pour lesquels il avait été
condamné et refusait catégoriquement de rembourser les frais de justice et de
verser des indemnités-victime mensuelles. La CCLCED avait également indiqué, le
4 février 2019, qu'aucune évolution positive n'avait pu être constatée, compte
tenu du déni dont faisait preuve le recourant s'agissant des infractions
commises et de l'absence de suivi thérapeutique. En définitive, en l'absence de
toute volonté avérée du recourant d'entreprendre une démarche thérapeutique,
l'expertise de 2013 conservait toute son actualité.

2.3. Le recourant soutient que, indépendamment de la question de savoir si sa
situation avait évolué, une nouvelle expertise aurait dû être mise en oeuvre en
raison de l'ancienneté excessive de l'expertise de 2013. Contrairement à ce
qu'il affirme - en se référant indirectement à l'arrêt publié aux ATF 128 IV
241 consid. 3.4 -, la jurisprudence n'a jamais tracé une limite absolue de
trois années, au-delà de laquelle la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise
serait en tous les cas nécessaire. L'évolution de l'intéressé depuis la
dernière expertise doit en effet être considérée et s'avère décisive à cet
égard (cf. consid. 2.1 supra). Même s'agissant d'un laps de temps de près de
dix années séparant l'expertise de la décision portant sur la libération
conditionnelle de l'internement, le Tribunal fédéral a considéré qu'une
nouvelle expertise - ou à tout le moins un complément - s'imposait en raison du
changement de situation intervenu, en particulier concernant les régimes de
détention successifs qu'avait connus l'interné depuis l'époque à laquelle
l'expertise en question avait été réalisée (cf. arrêt 6B_1312/2016 du 22 juin
2017 consid. 3.4). Or, en l'espèce, le recourant ne prétend pas qu'un
quelconque changement de sa situation serait à signaler et ne conteste pas les
constatations de la cour cantonale concernant une absence de modification des
circonstances depuis l'expertise de 2013. Il ne ressort pas de l'arrêt attaqué
que le recourant aurait connu des altérations significatives dans son régime de
détention depuis cette expertise. Il apparaît en revanche que l'intéressé
manifeste toujours le même état d'esprit qu'à l'époque de l'expertise, qu'il
n'a entamé aucun processus thérapeutique, qu'il conteste les infractions en
raison desquelles il est interné et estime ne pas devoir changer son
comportement. Il en ressort enfin que tous les acteurs appelés à se prononcer
sur la question ont émis un préavis négatif s'agissant d'une éventuelle
libération conditionnelle de l'internement.

Le fait que le recourant souhaitait voir la cour cantonale se pencher non
seulement sur la question de sa libération conditionnelle de l'internement mais
aussi sur celle de l'instauration d'un éventuel traitement thérapeutique
institutionnel n'y change rien. En effet, dans son rapport du 28 octobre 2013,
l'expert psychiatre avait conclu à l'absence de toute pathologie psychiatrique
chez l'intéressé (cf. pièce 3024 du dossier cantonal, p. 11). On ne voit pas,
partant, comment les conditions au prononcé d'une mesure à titre de l'art. 59
CP - en particulier l'existence d'un grave trouble mental ayant eu un lien avec
les infractions commises - pourraient désormais être remplies, le recourant ne
prétendant au demeurant nullement pouvoir souffrir d'un grave trouble mental au
sens de cette disposition.

Au vu de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en
fondant sa décision sur l'expertise figurant au dossier. On peut cependant
relever que celle-ci est désormais particulièrement ancienne et pourra
difficilement, à l'avenir, répondre aux exigences de l'art. 64b al. 2 let. b
CP.

3. 

Le recourant reproche à l'autorité précédente de ne pas lui avoir accordé
l'assistance judiciaire pour la procédure de recours cantonale.

3.1. Selon l'art. 142 du code fribourgeois de procédure et de juridiction
administrative (CPJA/FR; RS/FR 150.1), a droit à l'assistance judiciaire la
partie qui ne dispose pas de ressources suffisantes pour supporter les frais
d'une procédure sans s'exposer à la privation des choses nécessaires à son
existence et à celle de sa famille (al. 1). L'assistance n'est pas accordée
lorsque la procédure paraît d'emblée vouée à l'échec pour un plaideur
raisonnable (al. 2).

Aux termes de l'art. 143 al. 2 CPJA/FR, l'assistance judiciaire comprend
notamment, si la difficulté de l'affaire le rend nécessaire, la désignation
d'un défenseur, choisi parmi les personnes habilitées à représenter les
parties.

3.2. Aux termes de l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de
ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de
toutes chances de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre
droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde
de ses droits le requiert.

Cette disposition conditionne notamment l'octroi de l'assistance judiciaire
gratuite à l'existence de chances de succès dans la cause de celui qui réclame
celle-ci (cf. ATF 139 III 396 consid. 1.2 p. 397; 139 I 206 consid. 3.3.1 p.
214; 138 III 217 consid. 2.2.4 p. 18; 133 III 614 consid. 5 p. 616; 129 I 129
consid. 2.3.1 p. 135 s.). Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque
les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de
le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de
sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y
engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; il ne
l'est en revanche pas lorsque les chances de succès et les risques d'échec
s'équilibrent à peu près, ou que les premières ne sont que légèrement
inférieures aux secondes. L'élément déterminant réside dans le fait que
l'indigent ne doit pas se lancer, parce qu'il plaide aux frais de la
collectivité, dans des démarches vaines qu'une personne raisonnable
n'entreprendrait pas si, disposant de moyens suffisants, elle devait les
financer de ses propres deniers (cf. ATF 139 III 396 consid. 1.2 p. 397; 138
III 217 consid. 2.2.4 p. 218; 129 I 129 consid. 2.2 p. 133 ss).

3.3. La cour cantonale a exposé que le recourant pouvait être considéré comme
indigent et que l'assistance d'un avocat était justifiée dans le cadre d'un
recours devant elle. Elle a en revanche considéré que le recours avait été
d'emblée dénué de chances de succès. La problématique de l'ancienneté de
l'expertise avait déjà été soulevée et traitée dans l'arrêt rendu en janvier
2018 par le Tribunal cantonal, même si cette procédure portait sur un
changement de sanction. A défaut de toute évolution survenue depuis lors et en
l'absence de toute volonté avérée de suivre une thérapie de la part du
recourant, son recours avait été voué à l'échec.

3.4. Le recourant soutient que les enjeux de la présente procédure ne seraient
pas les mêmes que dans le cadre de la procédure cantonale évoquée par
l'autorité précédente, puisqu'il s'agit en l'occurrence également d'examiner un
éventuel changement de mesure au sens de l'art. 64b al. 1 let. b CP. Or, comme
relevé précédemment (cf. consid. 2.3 supra), cet aspect n'avait aucune chance
d'aboutir, puisque le recourant ne remet pas en cause les conclusions de
l'expert psychiatre formulées en 2013 - portant sur l'absence de toute
pathologie psychiatrique - ni ne prétend même souffrir d'un quelconque trouble
mental au sens de l'art. 59 CP. L'écoulement du temps, depuis cette expertise,
ne pouvait rien y changer. Pour le reste, le recourant a essentiellement
dénoncé, devant la cour cantonale, l'ancienneté de l'expertise, en mettant
uniquement en avant - à titre de modification des circonstances depuis la mise
en oeuvre de celle-ci - sa prétendue volonté d'entamer un traitement
thérapeutique (cf. dossier cantonal, recours du 24 mai 2019), laquelle n'avait
jusqu'alors aucunement été concrétisée. Ainsi, pour le recourant, les
perspectives d'obtenir gain de cause étaient notablement plus faibles que les
risques de voir ses conclusions rejetées. L'autorité précédente n'a pas, par
conséquent, violé le droit en refusant d'accorder au recourant l'assistance
judiciaire gratuite pour la procédure de recours cantonale.

4. 

Le recours doit être rejeté. Comme il était dépourvu de chances de succès,
l'assistance judiciaire ne peut être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Par
conséquent, le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art.
66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation
financière, laquelle n'apparaît pas favorable.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté.

2. 

La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.

4. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'Etat
de Fribourg, I ^e Cour administrative. 

Lausanne, le 8 avril 2020

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

Le Greffier : Graa