Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.35/2020
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_35/2020

Arrêt du 21 janvier 2020

Cour de droit pénal

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,

Jacquemoud-Rossari et Muschietti.

Greffier : M. Graa.

Participants à la procédure

A.________,

représenté par Me Loïc Parein, avocat,

recourant,

contre

1. Ministère public central du canton de Vaud,

2. Banque B.________,

3. C.________ Ltd,

4. D.________ SA,

tous les trois représentés par

Me Marc Gilliéron, avocat,

intimés.

Objet

Décision de renvoi; irrecevabilité du recours en matière pénale,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des
recours pénale, du 26 novembre 2019 (n° 837 PE18.021347-YGL).

Faits :

A.

A.a. Le Ministère public central vaudois, division criminalité économique, a
ouvert une instruction pénale contre A.________ et E.________ pour abus de
confiance, escroquerie et faux dans les titres, notamment à la suite de
plaintes déposées par la Banque B.________, par D.________ SA et par C.________
Ltd.

La cause dirigée contre E.________ a été disjointe par décision du 2 novembre
2018, de sorte que le prénommé est désormais poursuivi séparément.

A.b. Par ordonnance pénale du 14 mars 2019, le ministère public a, dans ce
cadre, condamné A.________, pour faux dans les titres, à une peine pécuniaire
de 180 jours-amende à 50 fr. le jour, avec sursis durant deux ans.

A.c. Par ordonnance du 14 mars 2019, il a classé la procédure dirigée contre le
prénommé concernant les chefs de prévention d'abus de confiance et
d'escroquerie.

B. 

Par arrêt du 26 novembre 2019, la Chambre des recours pénale du Tribunal
cantonal du canton de Vaud, statuant sur les recours formés par la Banque
B.________ et par C.________ Ltd contre l'ordonnance de classement du 14 mars
2019, a annulé celle-ci et a renvoyé le dossier de la cause au ministère public
pour complément d'instruction.

Il en ressort notamment ce qui suit.

B.a. La société F.________ SA, sise à G.________ et ayant pour but le négoce et
le courtage international de matières premières, a été fondée en 2006 par
quatre associés ressortissants ou originaires de Russie, soit H.________,
E.________, A.________ et le fils de ce dernier, I.________. Depuis le 15 juin
2011, E.________ a été le seul actionnaire de F.________ SA. Ce dernier et
H.________ sont demeurés administrateurs jusqu'en juillet 2015. Depuis lors et
jusqu'en août 2017, A.________ - qui s'était établi en Suisse en 2007 - est
resté seul administrateur avec signature individuelle.

L'activité de F.________ SA consistait à acquérir des céréales en Russie afin
de revendre cette marchandise à l'exportation. Pour ce faire, la société se
faisait financer par des établissements financiers, lesquels, au bénéfice de
différents droits sur la marchandise en question, étaient remboursés au moment
de la revente. F.________ SA ne disposait que de deux collaborateurs, soit
A.________ - qui gérait les relations avec les banques suisses et assurait les
différentes tâches administratives - et I.________. Toute la partie de
l'activité se rapportant à l'achat des céréales en Russie et à la logistique
était assurée depuis ce pays par E.________ et ses collaborateurs locaux.

B.b. Le 9 janvier 2009, la Banque B.________ et F.________ SA - représentée par
H.________ et A.________ - ont signé un contrat de crédit, par lequel la banque
s'engageait à mettre à disposition de la société une facilité de crédit d'au
maximum 8'000'000 USD. Cette ligne de crédit devait permettre à l'emprunteuse
d'acquérir des céréales sur le marché russe en vue d'une revente à
l'exportation. Aux termes de cet accord, la banque devait recevoir plusieurs
confirmations et documents avant tout décaissement. Parmi ceux-ci figuraient
notamment des rapports d'inspection établis par J.________ SA, à K.________. Le
bureau de cette société en Russie était, si nécessaire, chargé de confirmer la
présence d'une certaine quantité de céréales dans des silos déterminés.

En application de la procédure prévue dans le contrat de crédit, les parties
ont procédé à plusieurs dizaines d'opérations de financement entre 2009 et
2017. F.________ SA a remboursé régulièrement sa créancière jusqu'en avril
2017. Au vu des retards de paiement intervenus dès cette époque, la Banque
B.________ a mandaté J.________ SA pour procéder à une contre-inspection des
stocks. Le 22 mai 2017, cette dernière société a informé la banque que ses
inspecteurs s'étaient vu refuser l'accès au port dans lequel les marchandises
étaient censées être stockées. Par courriel du 13 juillet 2017, A.________ a
indiqué à la banque que E.________ lui avait avoué que tout remboursement était
impossible, la marchandise financée n'existant pas et l'argent prêté n'étant
plus disponible.

Le 27 avril 2016, A.________ a signé un formulaire concernant différents
comptes ouverts au nom de F.________ SA auprès de la Banque B.________. Sur ce
document, il a indiqué que I.________ et E.________ détenaient chacun 25% des
actions de la société, alors que ce dernier en était seul actionnaire depuis
juin 2011.

La Banque B.________ a déposé plainte le 20 octobre 2017. Au 31 juillet 2017,
un montant total de 9'195'687 USD 80 n'avait pas été remboursé par
l'emprunteuse à la banque.

B.c. Le 10 octobre 2013, F.________ SA - agissant par A.________ - et
D.________ SA ont signé un contrat cadre de crédit, aux termes duquel la
seconde mettait à disposition de la première une facilité de crédit de
1'200'000 fr., toujours pour permettre à F.________ SA d'acheter des céréales
en Russie. La facilité de crédit a par la suite - grâce à des avenants négociés
par A.________ - été portée à 1'700'000 fr., puis à 3'000'000 francs.
Conformément au contrat cadre, la prêteuse ne devait libérer les fonds qu'à
réception de divers documents attestant l'achat de la marchandise et son
stockage. D.________ SA a régulièrement reçu des documents de cette nature et
a, sur cette base, financé plusieurs dizaines d'opérations menées à terme entre
2013 et 2017. Elle a été régulièrement remboursée jusqu'en avril 2017.

Aucun remboursement n'étant intervenu à l'échéance de chacun des quatre
derniers crédits octroyés, D.________ SA a adressé à F.________ SA une première
commination en mai 2017. Elle a en outre mandaté des employés en Russie afin
que ceux-ci vérifient la présence de la marchandise dans les silos concernés.
Les intéressés s'en sont toutefois vu interdire l'accès. Par courriel du 13
juillet 2017, A.________ a indiqué à D.________ SA que E.________ lui avait
récemment avoué que tout remboursement était impossible, la marchandise
n'existant pas et l'argent n'étant plus disponible.

D.________ SA a déposé plainte le 26 juin 2017, évoquant un dommage total de
2'485'854 USD.

B.d. Le 4 mai 2017, C.________ Ltd et F.________ SA - représentée par
A.________ - ont conclu une convention par laquelle la première accordait à la
seconde un crédit portant au maximum sur un montant de 10'000'000 fr., afin de
financer l'achat de céréales en Russie. Le décaissement des sommes prêtées
était subordonné à la présentation des documents standards en la matière.

En application du contrat d'inspection périodique signé entre les deux sociétés
précitées et J.________ SA, cette dernière devait faire inspecter la
marchandise hebdomadairement. Le 26 mai 2017, J.________ SA a indiqué à
C.________ Ltd que l'accès aux entrepôts concernés lui avait été refusé. Par
courriel du 13 juillet 2017, A.________ a indiqué à C.________ Ltd que
E.________ lui avait avoué que la marchandise n'existait pas et que l'argent
n'était plus disponible.

C.________ Ltd a déposé plainte le 19 juillet 2017, faisant état de
financements non remboursés à hauteur de 1'595'074 USD 89.

B.e. La quasi-totalité de la marchandise concernée a été acquise par E.________
auprès de la société L.________ Ltd, constituée en 2016. M.________ Ltd était
propriétaire, respectivement locataire, d'un grand nombre de silos dans le port
où les céréales acquises par F.________ SA ont été stockées. N.________ se
chargeait de l'affrètement des navires et de l'émission de la documentation y
relative.

Il est apparu que E.________ était seul propriétaire, soit ayant droit
économique, de la société N.________, qui avait la même adresse que M.________
Ltd.

C. 

A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre
l'arrêt du 26 novembre 2019, en concluant, avec suite de frais et dépens,
principalement à sa réforme en ce sens que l'ordonnance de classement du 14
mars 2019 est confirmée et, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de
la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Il sollicite par
ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.

Considérant en droit :

1.

1.1. L'arrêt attaqué est de nature incidente (cf. art. 93 LTF), dès lors qu'il
ne met pas fin à la procédure pénale et aboutit au renvoi de la cause au
ministère public afin que ce dernier complète son instruction.

Cette décision ne porte pas sur la compétence ni sur une demande de récusation
(cf. art. 92 LTF) et ne peut donc faire l'objet d'un recours en matière pénale
- au sens des art. 78 ss LTF - qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1 LTF, soit
si elle peut causer un préjudice irréparable à son destinataire (art. 93 al. 1
let. a LTF) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une
décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse
(art. 93 al. 1 let. b LTF). A moins que ces conditions soient manifestement
remplies, il appartient au recourant d'en démontrer la réalisation, sous peine
d'irrecevabilité (ATF 136 IV 92 consid. 4 p. 95; arrêt 6B_1414/2019 du 7
janvier 2020 consid. 1.1).

L'art. 93 al. 1 let. b LTF n'est généralement pas applicable en matière pénale
(ATF 144 IV 127 consid. 1.3 p. 130; 141 IV 284 consid. 2 p. 286). En principe,
une décision de renvoi n'est pas susceptible de causer un préjudice irréparable
aux parties, le seul allongement de la durée de la procédure ou le seul
accroissement des frais de celle-ci n'étant pas considérés comme des éléments
constitutifs d'un tel dommage (ATF 141 III 395 consid. 2.5 p. 400; 138 III 190
consid. 6 p. 192; arrêt 6B_1080/2019 du 23 septembre 2019 consid. 2.2).
Cependant, si le renvoi ne laisse aucune latitude de jugement à l'autorité
inférieure appelée à statuer (à nouveau), il est assimilé à une décision finale
et peut faire l'objet d'un recours immédiat au Tribunal fédéral (ATF 140 V 282
consid. 4.2 p. 285 s.; arrêt 6B_411/2019 du 13 mai 2019 consid. 1.1.3).

1.2. La cour cantonale a considéré en substance qu'il était possible que, à
tout le moins par son silence délibéré depuis le mois de mars 2017, le
recourant eût déterminé en toute connaissance de cause les sociétés créancières
de F.________ SA à remettre à celle-ci des fonds supplémentaires, alors même
que l'activité se trouvait à l'arrêt en Russie et que les gages n'existaient
pas ou plus. Le recourant était aussi susceptible d'avoir agi notamment en
produisant de fausses attestations. Ainsi, pour l'autorité précédente, on ne
pouvait exclure que l'intéressé eût créé une apparence contraire à la réalité,
ayant conforté les autres parties dans leur conviction de l'existence de
sûretés garantissant les prêts concédés ou sollicités ainsi que dans leur
confiance en la loyauté des affréteurs. C'était sur la base de cette apparence
que les sociétés prêteuses avaient continué à allouer des crédits, qu'elles
auraient refusés en l'absence de certains agissements du recourant. Les
affirmations du recourant, respectivement ses dissimulations, pouvaient être de
nature à tromper astucieusement - au sens de l'art. 146 al. 1 CP - les
partenaires contractuels de F.________ SA. Selon l'autorité précédente, le
ministère public devait donc compléter son instruction, dans la mesure jugée
nécessaire, avant de rendre une nouvelle décision.

1.3. Le recourant soutient que l'admission de son recours conduirait au
prononcé d'une décision finale qui éviterait une procédure probatoire longue et
coûteuse. Il se borne à signaler que certains agissements liés à la cause ont
pris place en Russie et qu'il serait nécessaire de procéder à l'audition de
diverses personnes dans ce pays. S'agissant de l'audition de E.________ sur
commission rogatoire, évoquée par le recourant, il apparaît que le prénommé
fait également l'objet d'une instruction pénale et qu'une telle mesure
probatoire devrait en conséquence de toute manière être entreprise afin de
mettre à jour ses agissements dans l'affaire. Quoi qu'il en soit, le seul fait
que E.________ se trouve en Russie ne permet pas au recourant de se plaindre,
par avance, de la longueur de la procédure qui devra être conduite (cf. dans le
même sens l'arrêt 6B_1207/2016 du 1er juin 2017 consid. 1.4.1). Pour le reste,
il apparaît que la cour cantonale a laissé au ministère public une liberté
complète s'agissant des mesures d'instruction à diligenter, si bien que le
recourant ne peut, en l'état, justifier d'éventuelles craintes en matière de
coûts ou de durée de la procédure. L'intéressé ne peut davantage tirer argument
des preuves dont il déclare qu'il réclamera l'administration dans le cadre de
l'instruction - notamment l'audition de diverses personnes en Russie -, puisque
l'obtention de tels moyens probatoires n'a pas été ordonnée par la cour
cantonale dans la décision attaquée et qu'il appartiendra par conséquent à
l'autorité de poursuite ou - cas échéant - aux autorités de jugement de
déterminer si ceux-ci s'avèrent nécessaires.

Au vu du caractère très restrictif de l'application de l'art. 93 al. 1 let. b
LTF en matière pénale, force est de constater que les conditions posées par
cette disposition ne sont pas remplies.

2. 

Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable. Comme
ses conclusions étaient dépourvues de chances de succès, l'assistance
judiciaire ne peut être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Par conséquent, le
recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF),
dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière, laquelle
n'apparaît pas favorable. Les intimées, qui n'ont pas été invitées à se
déterminer, ne sauraient prétendre à des dépens.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est irrecevable.

2. 

La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.

4. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Chambre des recours pénale.

Lausanne, le 21 janvier 2020

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

Le Greffier : Graa