Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.448/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

8C_448/2019

Arrêt du 20 novembre 2019

Ire Cour de droit social

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Maillard, Président, Heine et Abrecht.

Greffière : Mme von Zwehl.

Participants à la procédure

A.________,

représenté par Me Christian Dandrès, avocat,

recourant,

contre

Conseil d'Etat de la République et canton de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 2,
1204 Genève,

agissant par le Département de l'instruction publique, de la formation et de la
jeunesse,

rue de l'Hôtel-de-Ville 6, 1204 Genève,

intimé.

Objet

Droit de la fonction publique,

recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre administrative, du 21 mai 2019 (A/3463/2018-FPUBL ATA/913/
2019).

Faits :

A.

A.a. A.________ a été engagé le 22 août 2005 en qualité d'assistant social au
service de protection des mineurs (ci-après: le SPMi) du canton de Genève.

Le 2 août 2016, alors qu'il travaillait comme intervenant en protection de
l'enfant dans l'unité "accueil et première intervention" (ci-après: API) du
Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi), A.________ a été chargé du
dossier de B.________ et de ses quatre enfants, qui avaient été recueillis par
l'Unité mobile d'urgence sociale le même jour dans la rue, sans moyen de
subsistance. Après avoir été hébergée quelques jours à l'Armée du Salut, la
famille a été logée dans un foyer.

Le 28 septembre 2016, A.________ a saisi le Tribunal de protection de l'adulte
et de l'enfant (ci-après: le TPAE) d'une requête de mesures
superprovisionnelles tendant à ce qu'interdiction soit faite à B.________ de
quitter le territoire suisse avec ses enfants, à ce que la prénommée doive
déposer en mains du SPMi son passeport et ceux de ses enfants, à ce que ces
derniers et leur mère soient inscrits dans les bases de données des recherches
informatisées de police (RIPOL) et du système d'information Schengen (SIS) et,
enfin, à ce qu'un mandat d'évaluation soit ordonné. Il a exposé que B.________,
de nationalité C.________, et dont les deux enfants aînés avaient un père
différent de celui des cadets, avait quitté le pays C.________ en octobre 2015
et qu'à la suite de son départ et de plusieurs audiences en son absence, les
autorités judiciaires du pays C.________ avaient décidé d'attribuer à titre
provisoire la garde des deux enfants cadets à leur père. Par décision du 5
octobre 2016, le TPAE a ordonné les mesures superprovisionnelles requises.

Dans un rapport du 15 mars 2017 adressé au TPAE, A.________ a indiqué, en sus
des éléments déjà communiqués, que quand B.________ avait appris que la garde
de ses deux enfants cadets lui était retirée, elle avait décidé de demander
l'asile en Europe. Elle avait déposé une telle demande aux Pays-Bas et en
Serbie, puis elle avait traversé l'Italie et s'était arrêtée en Suisse. Si elle
n'obtenait pas de soutien, elle tenterait sa chance en Roumanie. Un mandat
d'arrêt avait été délivré contre elle dans le pays C.________. En cas de retour
dans ce pays, la fratrie serait séparée, les cadets attribués à leur père et
les aînés placés en foyer. Si l'accueil en Suisse était interrompu, B.________
tenterait à nouveau de trouver de l'aide dans un autre pays. Les enfants
seraient alors à nouveau entraînés dans un parcours d'errance. A.________
concluait ainsi au maintien des mesures superprovisionnelles jusqu'à la
communication des décisions judiciaires du pays C.________ et, selon l'issue de
celles-ci, jusqu'à l'obtention de la garantie qu'un retour dans le pays
C.________ puisse s'organiser dans des conditions qui répondent aux besoins de
protection des enfants. Le 26 avril 2017, le TPAE a fait droit à ces
conclusions.

A.b. Le 11 août 2017, B.________ a pris contact avec une collaboratrice du
foyer dans lequel elle résidait pour solliciter un changement d'intervenant au
sein du SPMi, justifiant sa demande par le fait qu'elle entretenait une
relation intime avec A.________. B.________ a confirmé le 14 août 2017 ses
déclarations devant la directrice du foyer, à qui elle a également montré des
échanges WhatsApp qu'elle avait eus avec A.________ et dont une copie d'écran a
été effectuée avec son accord. Les faits ont été portés à la connaissance du
directeur du SPMi, qui a convoqué A.________ à un entretien de service fixé au
31 août 2017. Dans la convocation, l'intéressé était informé que dans l'attente
des suites à donner audit entretien, il était immédiatement déchargé du suivi
de la situation familiale de B.________ et de tout contact professionnel avec
le foyer, et qu'il lui était fait interdiction de prendre contact avec elle.

Lors de l'entretien de service, A.________ a admis avoir entretenu une relation
intime avec B.________. Il a déclaré qu'il l'avait rencontrée plusieurs fois
dans le cadre professionnel jusqu'au 23 novembre 2016, jour de l'anniversaire
de celle-ci, où ils étaient allés se promener, avaient pris un café et
s'étaient embrassés. Leur relation avait débuté à ce moment-là et avait duré
jusqu'à début août 2017, avec de nombreuses interruptions. Il avait conscience
que son comportement n'était pas acceptable et contrevenait à l'éthique
professionnelle, mais il lui avait été impossible de demander de l'aide et d'en
parler à sa cheffe de groupe, tout comme il avait été incapable de se dessaisir
du dossier.

A.c. Par décision du 15 novembre 2017, la Conseillère d'État en charge du
département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse a
ouvert une enquête administrative contre A.________.

L'enquêteur a rendu son rapport le 14 juin 2018. Sa mission avait consisté à
déterminer les circonstances dans lesquelles la relation entre A.________ et
B.________ s'était nouée, la manière dont elle avait évolué et les raisons pour
lesquelles elle avait pris fin; il avait également cherché à établir si
A.________ avait, d'une manière ou d'une autre, exercé une forme de contrainte
ou d'incitation à l'égard de B.________ en profitant de sa situation
professionnelle. A cet égard, l'enquêteur a conclu que les relations intimes
entre les intéressés n'avaient pas eu d'impact sur la manière dont le dossier
des enfants de B.________ avait été traité, et que A.________ n'avait pas
cherché à faire comprendre à celle-ci qu'elle devait se soumettre à ces
relations si elle voulait que son dossier soit correctement traité. Toutefois,
il relevait que A.________ avait pris le risque que B.________ se sente à
nouveau prise au piège d'une relation victime-bourreau: non seulement parce que
son propre sort et celui de ses enfants pouvait lui apparaître comme étant lié
aux décisions du fonctionnaire mais également parce que ce dernier avait par
moments joué de sa position, fût-ce dans un contexte d'excitation sexuelle.
Cela ressortait par exemple des messages WhatsApp échangés entre les prénommés
le 3 août 2017. B.________ s'était plainte de ne plus supporter les conditions
d'existence du foyer qui l'hébergeait et A.________ lui avait répondu "Et tu
vas partager ton corps avec l'homme qui va t'interdire de partir"; lorsque
B.________ avait demandé combien de temps cela allait durer et si elle était en
enfer, il lui avait répondu "Oui! Le mien".

Invité à se déterminer sur ce rapport, A.________ a notamment soutenu que
l'enquête était incomplète, l'affaire ne pouvant selon lui pas être appréciée
sans tenir compte des circonstances du départ de B.________ de Suisse; il
sollicitait un complément d'information en ce sens qu'il lui soit permis
d'accéder au dossier actualisé des enfants de B.________.

A.d. Par décision du 5 septembre 2018, le Conseil d'État a rejeté la demande de
complément d'information présentée par A.________ et a prononcé la révocation
de celui-ci avec effet au 31 décembre 2018.

B. 

Par jugement du 21 mai 2019, la Chambre administrative de la Cour de justice du
canton de Genève a rejeté le recours interjeté par A.________ contre cette
décision.

C. 

A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement,
en concluant principalement à sa réforme en ce sens que la décision de
révocation du 5 septembre 2018 soit annulée. A titre subsidiaire, il conclut à
l'annulation du jugement et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour
qu'elle statue dans le sens des considérants.

L'autorité cantonale déclare s'en remettre à justice sur la recevabilité du
recours et persister dans les considérants et le dispositif de son arrêt.
L'intimé conclut au rejet du recours.

Considérant en droit :

1. 

Le jugement entrepris a été rendu en matière de rapports de travail de droit
public. Dans la mesure où la contestation porte sur une décision de révocation,
il s'agit d'une contestation de nature pécuniaire, de sorte que le motif
d'exclusion de l'art. 83 let. g LTF ne s'applique pas (voir par exemple l'arrêt
8C_24/2017 du 13 décembre 2017, consid. 1.1). En outre la valeur litigieuse
atteint manifestement le seuil de 15'000 fr. ouvrant la voie du recours en
matière de droit public en ce domaine (art. 51 al. 1 let. a et 85 al. 1 let. b
LTF). Pour le surplus, déposé en temps utile et dans les formes requises, le
recours est recevable au regard des art. 42, 90 et 100 al. 1 LTF.

2. 

Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, le recours ne peut pas
être formé pour violation du droit cantonal en tant que tel. En revanche, il
est toujours possible de faire valoir que la mauvaise application du droit
cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est
arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres principes
constitutionnels (ATF 138 I 143 consid. 2 p. 149; 137 V 143 consid. 1.2 p.
145). Appelé à revoir l'application ou l'interprétation d'une norme cantonale
ou communale sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de
la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si
celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation
effective, adoptée sans motif objectif et en violation d'un droit certain (ATF
139 I 57 consid. 5.2 p. 61). En revanche, si l'application de la loi défendue
par l'autorité cantonale n'est pas déraisonnable ou manifestement contraire au
sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette
interprétation sera confirmée, même si une autre solution éventuellement plus
judicieuse paraît possible (ATF 140 III 167 consid. 2.1 p. 168 et l'arrêt
cité). En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée
soient insoutenables; encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans
son résultat (ATF 140 III 167 consid. 2.1 précité).

3.

3.1. Dans un grief formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, le
recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2
Cst.). Il reproche tout d'abord à la cour cantonale d'avoir rejeté sa requête
tendant à l'apport du dossier des enfants de B.________ pour la période
postérieure à son dessaisissement de celui-ci. En effet, s'il n'avait pas été
en mesure de transmettre le dossier, c'est qu'il craignait que les mesures
qu'il avait obtenues du TPAE soient réduites à néant et que les enfants soient
à nouveau entraînés dans un parcours d'errance. Or l'administration de la
preuve requise aurait, selon lui, permis de vérifier si cette crainte était
fondée. Il s'agissait par ailleurs d'un élément pertinent pour apprécier le
degré de sa faute. Le recourant reproche également à la cour cantonale de ne
pas avoir donné suite à sa demande d'audition de B.________. Il était
indispensable de lever tout doute sur le contexte dans lequel cette dernière
avait émis sa plainte à son encontre, en examinant si elle n'avait pas fait
l'objet de pressions du SPMi pour l'accuser. Cette audition s'imposait
également afin de rétablir une image correcte de son comportement et de sa
personne. En effet, au cours de la procédure, il aurait été présenté comme une
personne imposant des rapports sexuels empreints de violence et cherchant à
jouir d'une position de contrôle sur une femme vulnérable, ou encore comme un
"prédateur" (voir le courrier du 23 septembre 2017 du directeur du SPMi).

3.2. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu
comprend notamment le droit pour le justiciable d'offrir des preuves
pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves
pertinentes (ATF 132 II 485 consid. 3.2; 129 II 497 consid. 2.2). Le droit de
faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à
l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une
appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la
certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait
à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285
consid. 6.3.1; 136 I 229 consid. 5.2; 134 I 140 consid. 5.3).

3.3. En l'espèce, la cour cantonale a considéré que la manière dont le dossier
des enfants de B.________ avait été géré après que le recourant en eut été
dessaisi en août 2017 n'était pas pertinente pour l'issue du litige. Ce point
de vue n'est pas critiquable au regard du droit d'être entendu. En effet, comme
on le verra plus avant (cf. consid. 4.3.2 et 5.3.2 infra), la crainte exprimée
par le recourant pour expliquer son incapacité à se dessaisir du dossier
n'était pas susceptible de justifier le manquement qui lui est reproché. Par
ailleurs, on ne voit pas comment B.________ aurait pu faire l'objet de
pressions du SPMi pour "accuser" le recourant puisque ce service ignorait tout
de la relation qui s'était nouée entre eux avant que celle-ci prenne contact
avec une collaboratrice du foyer le 11 août 2017. Son audition apparaissait
donc inutile, étant précisé que le recourant n'indique pas quelles déclarations
faites postérieurement par B.________ auraient joué un rôle dans l'appréciation
de la situation par l'intimé ou par la cour cantonale. Enfin, l'objectif d'une
procédure disciplinaire n'est pas de rétablir l'image du fonctionnaire impliqué
quant à des propos qui ont pu être émis à son sujet, mais d'établir les faits
pertinents pour décider d'une éventuelle sanction disciplinaire. Quoi qu'il en
soit, les propos incriminés, notamment le terme de "prédateur", n'ont joué
aucun rôle en l'espèce dans le prononcé de la sanction.

4.

4.1. Les devoirs des membres du personnel de la fonction publique du canton de
Genève sont énoncés dans le titre III du règlement d'application de la loi
générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir
judiciaire, et des établissements publics médicaux (RPAC; RSG B 5 05.01). Les
membres du personnel sont tenus au respect de l'intérêt de l'État et doivent
s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 RPAC). Ils se
doivent, par leur attitude: (a) d'entretenir des relations dignes et correctes
avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés, ainsi que de
permettre et de faciliter la collaboration entre ces personnes, (b) d'établir
des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public et (c) de
justifier et de renforcer la considération et la confiance dont la fonction
publique doit être l'objet (art. 21 RPAC). Ils se doivent de remplir tous les
devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (art. 22 al. 1
RPAC).

Ainsi, un fonctionnaire a l'obligation, pendant et en dehors de son travail,
d'adopter un comportement qui inspire le respect et qui soit digne de
confiance, et il doit s'abstenir de tout ce qui peut porter atteinte aux
intérêts de l'État. En particulier, il doit s'abstenir de tout comportement de
nature à entamer la confiance du public en l'intégrité de la fonction publique
et des fonctionnaires ou à le rendre moins digne de confiance aux yeux de son
employeur. Il est sans importance que le comportement répréhensible ait été
connu ou non du public et ait attiré l'attention (arrêts 8C_252/2018 du 29
janvier 2019 consid. 5.2; 8C_146/ 2014 du 26 juin 2014 consid. 5.5).

4.2. En résumé, les juges cantonaux ont considéré que quels qu'aient été les
motifs du recourant pour justifier le fait qu'il ne s'était pas dessaisi du
dossier, sa conduite constituait une violation de ses devoirs de service.
Celui-ci avait la responsabilité, en sa qualité d'intervenant en protection de
l'enfant auprès de l'unité APl, d'assurer la prise en charge et le suivi du
dossier de personnes particulièrement vulnérables. Dans ce cadre, il pouvait
être amené à requérir des autorités judiciaires des mesures incisives. Or ces
autorités devaient pouvoir compter sur l'impartialité et la probité du
fonctionnaire présentant un rapport sur la situation des enfants. Quand bien
même la relation que le recourant avait entretenue avec B.________ n'avait pas
eu de répercussions sur la gestion du dossier des enfants de celle-ci ni
n'avait été utilisée pour obtenir les faveurs de l'intéressée, le recourant
n'en avait pas moins, en conservant le dossier, laissé courir le risque d'une
telle éventualité. En effet, sa position d'intervenant était susceptible de
placer B.________ dans la délicate situation où elle pouvait craindre que son
éventuel refus de poursuivre leur relation porte préjudice au suivi de son
dossier. Cette situation avait d'ailleurs généré une confusion chez le
recourant entre les pouvoirs rattachés à sa fonction et la relation privée
qu'il entretenait, comme le montraient certains de ses échanges WhatsApp avec
B.________ (notamment ceux envoyés le 3 août 2017 où il avait fait allusion au
pouvoir qu'il avait d'influencer la décision de maintenir l'interdiction faite
à celle-ci de quitter la Suisse). En sortant du cadre professionnel sans se
dessaisir du dossier, situation qu'il avait lui-même qualifiée de "pente
dangereuse", le recourant avait adopté un comportement mettant à mal la
confiance et le respect dont la fonction publique devait faire l'objet.

4.3.

4.3.1. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir fait preuve
d'arbitraire dans l'appréciation des faits ainsi que dans l'application de
l'art. 20 RPAC. Selon lui, les juges cantonaux ne pouvaient faire abstraction
des motifs qui l'avaient conduit à ne pas se dessaisir du dossier, et auraient
dû constater qu'il avait in concreto bien défendu les intérêts de l'État qui
consistaient à respecter l'intérêt supérieur des enfants. Par ailleurs, la
seule éventualité que B.________ ait pu craindre que son éventuel refus de
poursuivre leur relation porte préjudice au suivi de son dossier ne serait pas
un élément pertinent puisqu'il est constant qu'il n'avait pas tenté d'abuser de
son pouvoir pour obtenir ses faveurs. Enfin, le recourant affirme qu'il se
serait trouvé face à un dilemme consistant soit à renoncer à ses sentiments,
soit à se désintéresser du sort d'enfants plus vulnérables encore que leur
mère. Il estime que dans ces circonstances particulières, il ne pouvait pas lui
être reproché de ne pas s'être dessaisi du dossier.

4.3.2. Par cette argumentation, le recourant se contente d'opposer sa propre
appréciation des faits à celle de la cour cantonale sans pour autant démontrer
l'arbitraire de celle-ci. Pour les motifs convaincants exposés dans le jugement
attaqué, le recourant aurait dû se dessaisir du dossier dès le moment où il
avait noué une relation intime avec B.________. Il est en effet impératif qu'un
intervenant du SPMi, dont la tâche est de protéger les personnes en situation
de vulnérabilité et de prendre à cette fin les mesures qui s'imposent en
matière de protection de l'enfant devant les autorités judiciaires, conserve la
distance et l'objectivité nécessaires à ses prises de décision. Il en va de la
préservation de la confiance du public et des administrés concernés dans
l'intégrité du SPMi et de ses employés pour mener à bien leur mission de
protection. Or, dans les circonstances en cause, le recourant n'était plus à
même de garantir cette impartialité - même si aucun abus concret n'a été
constaté de sa part pour obtenir les faveurs de B.________ -, ce qui commandait
qu'il se décharge du dossier la concernant. Il ne l'a pas fait et les premiers
juges ont considéré à raison que ce comportement était incompatible avec ses
devoirs de service. C'est en vain que le recourant voit dans sa crainte que
l'errance des enfants continue s'il se dessaisissait du dossier une
justification valable à son comportement. Outre qu'il semble s'agir d'une
explication a posteriori (le recourant en a seulement fait état devant
l'enquêteur), il ne fait ici que donner sa propre opinion sur la sauvegarde des
enfants de B.________ placés sous la protection du SPMi. Son argumentation
tombe d'autant plus à faux qu'on ne voit pas qu'il aurait été le seul
intervenant du SPMi en mesure de traiter correctement le dossier et que,
contrairement à ce qu'il prétend, il n'avait nullement à opérer un choix entre
ses sentiments pour B.________ et la préservation des intérêts des enfants de
cette dernière. Il aurait dû se dessaisir du dossier et les intérêts des
mineurs concernés auraient été sauvegardés par le transfert du dossier à un
autre intervenant en protection de l'enfant, dont les capacités sont
institutionnellement présumées égales à celles du recourant.

5.

5.1.

5.1.1. Selon l'art. 16 al. 1 de la loi générale relative au personnel de
l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics
médicaux (LPAC; RSG B 5 05), les fonctionnaires et les employés qui enfreignent
leurs devoirs de service, soit intentionnellement soit par négligence, peuvent
faire l'objet, selon la gravité de la violation, des sanctions suivantes: 1° le
blâme, sanction prononcée par le supérieur hiérarchique, en accord avec sa
hiérarchie (let. a); 2° la suspension d'augmentation du traitement pendant une
durée déterminée ou 3° la réduction de traitement à l'intérieur de la classe,
sanctions prononcées, au sein de l'administration cantonale, par le chef du
département ou le chancelier d'État, d'entente avec l'office du personnel de
l'État (let. b); 4° le retour au statut d'employé en période probatoire pour
une durée maximale de trois ans ou 5° la révocation, sanctions prononcées, à
l'encontre d'un fonctionnaire au sein de l'administration cantonale, par le
Conseil d'État (let. c).

5.1.2. Au vu de la diversité des agissements susceptibles de constituer une
violation des devoirs de service, le législateur est contraint de recourir à
des clauses générales susceptibles de saisir tous les agissements et les
attitudes qui peuvent constituer des violations de ces devoirs; tout
agissement, manquement ou omission, dès lors qu'il est incompatible avec le
comportement que l'on est en droit d'attendre de celui qui occupe une fonction
ou qui exerce une activité soumise au droit disciplinaire, peut engendrer une
sanction (GABRIEL BOINAY, Le droit disciplinaire de la fonction publique et
dans les professions libérales, particulièrement en Suisse romande, in RJJ
1998, p. 1 ss, n. 50 p. 27 s.). Pour être sanctionnée, la violation du devoir
professionnel ou de fonction en cause doit être imputable à faute,
intentionnelle ou par négligence (JACQUES DUBEY/JEAN-BAPTISTE ZUFFEREY, Droit
administratif général, 2014, n. 2249; ULRICH HÄFELIN/GEORG MÜLLER/FELIX
UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7 ^e éd. 2016, n. 1515; URSULA MARTI/
ROSWITHA PETRY, La jurisprudence en matière disciplinaire rendue par les
juridictions administratives genevoises, RDAF 2007 p. 227 ss, p. 236; BOINAY,
op. cit., n. 55 p. 29). 

5.1.3. Le choix du type et de la gravité de la sanction doit répondre au
principe de la proportionnalité (DUBEY/ZUFFEREY, op. cit., n. 2250). Il doit
être approprié au genre et à la gravité de la violation des devoirs
professionnels et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer
les buts d'intérêt public recherchés (M ARTI/PETRY, op. cit., p. 236; cf. arrêt
8C_24/2017 du 13 décembre 2017 consid. 3.4).

Dans le domaine des mesures disciplinaires, la révocation est la sanction la
plus lourde. Elle implique une violation grave ou continue des devoirs de
service. Il peut s'agir soit d'une violation unique spécialement grave, soit
d'un ensemble de transgressions dont la gravité résulte de leur répétition.
L'importance du manquement doit être appréciée à la lumière des exigences
particulières qui sont liées à la fonction occupée. Toute violation des devoirs
de service ne saurait cependant être sanctionnée par la voie de la révocation
disciplinaire. Cette mesure revêt, en effet, l'aspect d'une peine et présente
un caractère plus ou moins infamant. Elle s'impose surtout dans les cas où le
comportement de l'agent démontre qu'il n'est plus digne de rester en fonction
(arrêts 8C_324/2017 du 22 février 2018 consid. 5.2.2; 8C_24/2017 du 13 décembre
2017 consid. 3.5; 8C_480/2012 du 28 juin 2013 consid. 6.3).

Lorsque l'autorité choisit la sanction disciplinaire qu'elle considère
appropriée, elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation, lequel est
toutefois subordonné au respect du principe de la proportionnalité. Son choix
ne dépend pas seulement des circonstances subjectives de la violation
incriminée ou de la prévention générale, mais aussi de l'intérêt objectif à la
restauration, vis-à-vis du public, du rapport de confiance qui a été compromis
par la violation du devoir de fonction (arrêt 8C_480/2012 du 28 juin 2013
consid. 6.4 et les références).

5.1.4. Le principe de la proportionnalité, bien que de rang constitutionnel, ne
constitue pas un droit constitutionnel avec une portée propre (ATF 136 I 241
consid. 3.1 p. 251 et les arrêts cités). Aussi, lorsque, comme en l'espèce, ce
principe est invoqué en relation avec l'application du droit cantonal (en
dehors du domaine de protection d'un droit fondamental spécial), le Tribunal
fédéral n'intervient, en cas de violation du principe de la proportionnalité,
que si la mesure de droit cantonal est manifestement disproportionnée et
qu'elle viole simultanément l'interdiction de l'arbitraire; autrement dit, le
grief se confond avec celui de l'arbitraire (ATF 141 I 1 consid. 5.3.2 p. 7 ss;
arrêts 8C_220/2010 du 18 octobre 2010 consid. 4.3 et 2C_118/2008 du 21 novembre
2008 consid. 3.1).

5.2. En l'espèce, la cour cantonale a considéré que s'il pouvait certes être
relevé, en faveur du recourant, que son manquement à ses devoirs de fonction
n'avait pas eu d'incidence sur le suivi du dossier des enfants de B.________,
le manquement reproché était néanmoins grave. Le comportement du recourant
s'était étendu sur plusieurs mois et n'avait éclaté au grand jour que parce que
l'administrée avait dénoncé la situation. Pendant toute cette période, le
recourant avait conservé le dossier par devers lui, tu la situation à ses
supérieurs et même fait état, dans ses rapports privés avec l'administrée
concernée, du pouvoir que sa fonction lui conférait lors même que l'administrée
et ses enfants se trouvaient dans une dépendance particulière à son égard. Ces
éléments rendaient la faute commise particulièrement grave. Or les administrés
- ici une mère et ses quatre enfants - devaient pouvoir placer toute leur
confiance dans le recourant, de même que l'État devait pouvoir compter sur la
capacité de celui-ci à éviter toute situation susceptible de mettre à mal
l'apparence de son indépendance. De plus, le poste d'intervenant en protection
de l'enfant, qui impliquait des contacts réguliers avec le public mais
également avec les juridictions civiles et pénales appelées à traiter les
aspects judiciaires des dossiers confiés audit intervenant, devait être occupé
par des personnes au-dessus de tout soupçon. Il en allait de la crédibilité du
SPMi, mais également de celle de l'État de Genève. Une sanction moins incisive
que la révocation n'était ainsi pas envisageable en l'espèce, car inapte à
rétablir le lien de confiance entre l'État et le recourant, et la révocation de
ce dernier apparaissait proportionnée aux actes qui lui étaient reprochés.

5.3.

5.3.1. Le recourant reproche aux juges cantonaux d'avoir violé le principe de
la proportionnalité en faisant abstraction de la motivation qui l'avait poussé
à conserver le dossier par devers lui, en prenant en compte le risque d'abus
purement abstrait auquel B.________ aurait été exposée, ainsi qu'en donnant
davantage de poids à un hypothétique dégât d'image pour l'État de Genève qu'au
résultat concret de son engagement en faveur d'une famille. Il estime que la
révocation prononcée à son encontre serait en parfait décalage avec son
comportement concret et le contexte dans lequel celui-ci s'était inscrit. Il
soutient, enfin, que contrairement à ce qu'a exposé la cour cantonale, une
sanction disciplinaire n'aurait pas pour but de "rétablir le lien de confiance
entre l'État et le recourant".

5.3.2. A cet égard également, le recourant échoue à démontrer le caractère
arbitraire de l'appréciation juridique opérée par les juges cantonaux (cf.
consid. 2 et 5.1.4 supra). Pour les motifs exposés par ceux-ci, la violation
par le recourant de ses devoirs de service apparaît particulièrement grave.
Comme déjà dit (cf. consid. 4.3.2 supra), ni le mobile avancé par le recourant
pour tenter de justifier son comportement, ni l'absence d'abus avéré de sa
position pour obtenir les faveurs de B.________ ne sont susceptibles de
minimiser la gravité de son manquement. Alors qu'il est au bénéfice d'une
longue expérience dans la protection de l'enfance, son incapacité à séparer les
intérêts dont il avait la charge et ses intérêts privés sur plusieurs mois est
propre à faire douter sérieusement de son aptitude à assumer pleinement sa
fonction d'intervenant, laquelle exige confiance et intégrité. Aussi bien, la
cour cantonale n'a-t-elle pas abusé de son large pouvoir d'appréciation en
considérant que toute sanction moins incisive que la révocation serait impropre
à restaurer le rapport de confiance qui a été irrémédiablement compromis par la
violation du devoir de fonction, ce qui, n'en déplaise au recourant, est un
élément tout à fait pertinent (cf. consid. 5.1.3 supra).

6. 

Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté.

7. 

Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF). Bien qu'il obtienne gain de cause, l'intimé n'a pas droit à des dépens
(art. 68 al. 3 LTF; arrêt 8C_151/2010 du 31 août 2010 consid. 6.2 et les
références).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre administrative de
la Cour de justice de la République et canton de Genève.

Lucerne, le 20 novembre 2019

Au nom de la Ire Cour de droit social

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Maillard

La Greffière : von Zwehl