Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.707/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_707/2019

Arrêt du 29 novembre 2019

Cour de droit pénal

Composition

M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Jametti.

Greffière : Mme Thalmann.

Participants à la procédure

A.A.________,

recourante,

contre

Ministère public de l'Etat de Fribourg,

intimé.

Objet

Ordonnance de classement (lésions corporelles graves, par négligence etc.),

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Chambre
pénale, du 7 mai 2019 (502 2018 134).

Faits :

A. 

Le 4 septembre 2013, A.B.________ a déposé plainte pénale contre son médecin
traitant C.________ en se portant partie plaignante. Dans sa plainte pénale,
elle lui reprochait d'avoir procédé à deux injections du produit Kenacort au
niveau de sa tête, les 15 juin et 20 juillet 2012, qui lui auraient provoqué
des maux de tête insupportables, des malaises, des vertiges, des nausées et
divers autres maux. Le 24 septembre 2013, C.________ a été formellement mis en
prévention de lésions corporelles par négligence.

Le 23 juin 2017, il a été mis en prévention de faux dans les titres.
A.B.________ lui reprochait d'avoir ajouté le mot " majorées " au dossier
médical pour qualifier les céphalées dont l'intéressée se plaignait, après
qu'il a eu connaissance de la volonté de son ancienne patiente de mettre en
cause sa responsabilité.

B. 

Par ordonnance du 15 juin 2018, le Ministère public fribourgeois a classé la
procédure pénale ouverte contre C.________ pour lésions corporelles
(intentionnelles et par négligence) et faux dans les titres.

C. 

Par arrêt du 7 mai 2019, la Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois a
rejeté le recours formé par A.B.________ contre cette ordonnance.

En bref, il en ressort les faits suivants:

C.a. En cours d'instruction, le 8 avril 2016, le ministère public a ordonné une
expertise médico-légale auprès du Centre universitaire romand de médecine
légale (ci-après: CURML). Il a également sollicité l'avis de nombreux médecins
consultés par A.B.________ sur le caractère approprié des injections de
Kenacort. Il ressort de l'expertise judiciaire que la recourante présentait des
céphalées récurrentes qui ont justifié que C.________ procède, en juin et
juillet 2012, à deux injections sous-cutanées de Kenacort dans la région
pariétale droite. Suite aux injections de Kenacort, A.B.________ a notamment
souffert de douleurs d'allure neuropathique, d'une lipoatrophie et d'une
alopécie et a dû consulter de nombreux spécialistes.

C.b. Il ressort de l'expertise judiciaire que A.B.________ a un passé médical
plutôt important et qu'elle a connu de fortes douleurs même avant les
injections litigieuses et les premières consultations auprès de C.________.
Elle s'est notamment rendue aux urgences de l'hôpital D.________ en 2008 pour
des " céphalées non progressives depuis quatre semaines, occipitales avec une
pré-syncope, des fourmillements dans les mains des deux côtés " (arrêt attaqué,
consid. 3.4, p. 8). Elle a également consulté le Professeur E.________ en 2008
et en 2009, qui a rapporté qu'elle avait déjà eu des céphalées avant 2008. En
2008 et 2009, l'intéressée a subi divers examens radiologiques et
neuropsychologiques.

Les experts ont dès lors conclu qu'il était fort probable que les douleurs
présentées par A.B.________ après les injections litigieuses étaient liées à
une péjoration de l'état de santé déjà fragile de l'intéressée. Les experts ont
retenu ce qui suit (rapport d'expertise, p. 18-19; arrêt attaqué, consid. 3.4,
p. 9) :

En ce qui concerne les douleurs neuropathiques, un lien de causalité avec
l'injection de Kenacort est possible mais discutable: Premièrement, ces
manifestations ne sont pas des complications classiques de l'injection locale
de ce type de substance, deuxièmement, l'historique des événements suggère la
préexistence d'anomalies responsables des douleurs antérieurement rapportées
par A.B.________ ayant amené à la réalisation des injections de Kenacort en un
point précis du scalp. Nous ne pouvons donc pas exclure que l'aggravation des
douleurs en ce point et leur caractère neuropathique apparus suite à
l'injection de Kenacort soient une évolution naturelle de la pathologie dont
souffre A.B.________.

Les symptômes généraux de type respiratoire ou articulaire, situés à distance
de la zone d'injection, ne peuvent pas non plus être mis directement en rapport
avec les injections, mais sont susceptibles de représenter la conséquence
indirecte du tableau douloureux chronique.

D. 

A.B.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre
l'arrêt du 7 mai 2019. Elle conclut, avec suite de frais, à son annulation et
au renvoi de la cause à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle
décision au sens des considérants. Elle conclut également à ce que les frais de
la procédure cantonale soient mis à la charge de l'Etat de Fribourg.
A.B.________ requiert, par ailleurs, le bénéfice de l'assistance judiciaire.

Par ordonnance du 19 août 2019, le Tribunal fédéral a rejeté la demande
d'assistance judiciaire présentée par la prénommée.

En cours d'instance, A.B.________ a changé de nom pour devenir A.A.________
(cf. courrier de A.A.________ du 12 novembre 2019).

Par ordonnance du 3 octobre 2019, le Président de la Cour de droit pénal a
invité la recourante à se déterminer sur la problématique de la prescription de
l'action pénale. Par courrier du 24 octobre 2019, la recourante a conclu que la
prescription de dix ans serait acquise le 21 juillet 2022 et qu'il était "
essentielle que celle-ci n'intervienne pas avant que les autorités pénales
n'aient pu se pencher une nouvelle fois sur les faits incriminés ".

Considérant en droit :

1. 

Le recours en matière pénale est une voie de réforme (art. 107 al. 2 LTF). Le
recourant ne peut se borner à demander l'annulation de la décision et le renvoi
de la cause à l'autorité précédente, mais doit également, sous peine
d'irrecevabilité, prendre des conclusions sur le fond du litige. Il n'est fait
exception à ce principe que lorsque le Tribunal fédéral, s'il admettait le
recours, ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond et ne pourrait
que renvoyer la cause à l'autorité cantonale (cf. ATF 137 II 313 consid. 1.3 p.
317; arrêt 6B_111/2015 du 3 mars 2016 consid. 1.7 non publié aux ATF 142 IV
196).

En l'espèce, la recourante conclut uniquement à l'annulation de l'arrêt attaqué
et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Une
telle manière de faire n'est pas admissible. Les motifs du recours permettent
cependant de comprendre que la recourante souhaite que C.________ soit mis en
accusation du chef de lésions corporelles par négligence en relation avec les
faits qui se sont produits les 15 juin et 20 juillet 2012 et de faux dans les
titres. Cela suffit pour satisfaire aux exigences de forme déduites de l'art.
42 al. 1 et 2 LTF (cf. ATF 137 II 313 consid. 1.3 p. 317; arrêts 6B_376/2019 du
16 avril 2019 consid. 1 et 6B_111/2015 précité consid. 1.7).

2.

2.1. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a
participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à
recourir au Tribunal fédéral, si la décision attaquée peut avoir des effets sur
le jugement de ses prétentions civiles. Constituent des prétentions civiles
celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être
déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement
des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41
ss CO. Selon l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe au recourant d'alléguer les faits
qu'il considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir. Lorsque le
recours est dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou de
classement de l'action pénale, la partie plaignante n'a pas nécessairement déjà
pris des conclusions civiles. Quand bien même la partie plaignante aurait déjà
déclaré des conclusions civiles (cf. art. 119 al. 2 let. b CPP), il n'en reste
pas moins que le ministère public qui refuse d'entrer en matière ou prononce un
classement n'a pas à statuer sur l'aspect civil (cf. art. 320 al. 3 CPP). Dans
tous les cas, il incombe par conséquent à la partie plaignante d'expliquer dans
son mémoire au Tribunal fédéral quelles prétentions civiles elle entend faire
valoir contre l'intimé. Comme il n'appartient pas à la partie plaignante de se
substituer au ministère public ou d'assouvir une soif de vengeance, la
jurisprudence entend se montrer restrictive et stricte, de sorte que le
Tribunal fédéral n'entre en matière que s'il ressort de façon suffisamment
précise de la motivation du recours que les conditions précitées sont
réalisées, à moins que l'on puisse le déduire directement et sans ambiguïté
compte tenu notamment de la nature de l'infraction alléguée (ATF 141 IV 1
consid. 1.1 p. 4 s.; 138 IV 186 consid. 1.4.1 p. 189 et les références citées).
Si la partie plaignante se plaint d'infractions distinctes, elle doit
mentionner, par rapport à chacune d'elles, en quoi consiste son dommage (cf.
arrêts 6B_1050/2019 du 20 novembre 2019 consid. 1.3; 6B_875/2018 du 15 novembre
2018 consid. 1).

2.2. Indépendamment des conditions posées par cette disposition, la partie
recourante est aussi habilitée à se plaindre d'une violation de ses droits de
partie équivalant à un déni de justice formel, sans toutefois pouvoir faire
valoir par ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés
du fond (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4 s. et les arrêts cités).

2.3. En l'espèce, la recourante a pris part à la procédure de dernière instance
cantonale. Elle n'a pas pris de conclusions civiles dans la procédure
cantonale. En ce qui concerne l'infraction de faux dans les titres, la
recourante ne démontre pas en quoi elle subirait un préjudice découlant
directement de cette infraction, ce qui n'apparaît pas d'emblée ni sans
ambiguïté de la nature de l'infraction alléguée. La recourante n'a donc pas
qualité pour recourir sur la base de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF sur ce
point. Par ailleurs, l'hypothèse visée à l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF
n'entre pas non plus en considération dans le cas d'espèce, la recourante ne
soulevant aucun grief quant à son droit de porter plainte. En outre, celle-ci
ne dénonce, de manière conforme aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, aucune
violation de ses droits de partie à la procédure équivalant à un déni de
justice formel, ce qui ne lui permettrait d'ailleurs pas de faire valoir par ce
biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés du fond (cf.
ATF 141 IV 1 consid. 1.1 et les réf. cit.). Son recours est donc irrecevable
sur ce point. S'agissant de l'infraction de lésions corporelles, la recourante
indique avoir subi d'importantes et insupportables douleurs neuropathiques et
être au bénéfice de l'assurance invalidité depuis les injections de cortisone
dont elle a fait l'objet. L'infraction dénoncée par la recourante constitue une
infraction grave contre l'intégrité physique. Il apparaît d'emblée que la
décision de classement est, en soi, de nature à influencer négativement le
jugement des prétentions en réparation du tort moral que la recourante pourrait
élever en raison des lésions subies (cf. arrêts 6B_732/2018 du 18 septembre
2018 consid. 2.2 et 6B_179/2018 du 27 juillet 2018 consid. 1.2). Cela étant, au
vu de ce qui suit (infra consid. 3), il apparaît que la recourante ne dispose
plus d'un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision
attaquée (cf. arrêt 6B_479/2018 du 19 juillet 2019 consid. 2.1).

3. 

Il convient tout d'abord de déterminer le délai de prescription de l'action
pénale pour les accusations ayant trait aux faits survenus en juin et juillet
2012, question qu'il convient d'examiner d'office à chaque étape de la
procédure (ATF 139 IV 62 consid. 1 et les références citées).

3.1. Les lésions corporelles par négligence (art. 125 CP) sont sanctionnées par
une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

L'action pénale relative à cette infraction se prescrivait par sept ans selon
le droit applicable du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2013 (art. 97 al. 1 let.
c aCP).

Aux termes de l'art. 97 al. 1 CP, dans sa teneur en vigueur depuis le 1er
janvier 2014, l'action pénale se prescrit par dix ans si la peine maximale
encourue est une peine privative de liberté de trois ans (let. c) et par sept
ans si la peine maximale encourue est une autre peine (let. d).

Il résulte de ce qui précède que l'art. 97 CP dans sa version actuelle est
moins favorable à l'auteur que l'art. 97 aCP. En vertu du principe de la lex
mitior (cf. art. 2 al. 2 et 389 CP; ATF 134 IV 82 consid. 6.2 p. 87 ss; arrêt
6B_476/2019 du 29 mai 2019 consid. 3.1.1), c'est donc l'art. 97 aCP qui est
applicable aux faits survenus en juin et juillet 2012. L'action pénale se
prescrivait ainsi, s'agissant de lésions corporelles par négligence, par sept
ans (cf. arrêts 6B_476/2019 précité consid. 3.1.1 et 6B_287/2015 du 13 avril
2016 consid. 3.1.4).

3.2. Le point de départ du délai de prescription est régi par l'art. 98 CP,
lequel est identique à l'art. 71 aCP (cf. ATF 142 IV 276 consid. 5.1 p. 277).
La prescription court du jour où l'auteur a exercé son activité coupable (let.
a), du jour où le dernier acte a été commis, si cette activité s'est exercée à
plusieurs reprises (let. b) ou du jour où les agissements coupables ont cessé,
s'ils ont eu une certaine durée (let. c).

3.3. En l'espèce, l'arrêt attaqué retient que les injections litigieuses ont eu
lieu les 15 juin et 20 juillet 2012, dates du début de la prescription pénale.
Elle est au vu de ce qui précède atteinte à ce jour, étant précisé que la
prescription de l'action pénale n'a pas été interrompue par l'ordonnance de
classement du 15 juin 2018 qui n'est pas un " jugement de première instance "
au sens de l'art. 97 al. 3 CP (inchangé; cf. arrêts 6B_565/2019 du 12 juin 2019
consid. 3.2 et 6B_614/2015 du 14 mars 2016 consid. 2.2). Ainsi, en cas de
renvoi de la cause à l'instance précédente, celle-ci ne pourrait que constater
que la prescription est acquise.

3.4. Il découle de ce qui précède que la recourante ne dispose pas d'un intérêt
juridique actuel à la contestation de l'arrêt attaqué, une condamnation de
C.________ pour lésions corporelles graves par négligence étant exclue en
raison de la prescription de l'action pénale (cf. arrêt 6B_479/2018 précité
consid. 2.1). Son recours est partant irrecevable.

4. 

Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable. La
conclusion de la recourante tendant à ce que les frais de la procédure
cantonale soient mis à la charge de l'Etat de Fribourg tombe à faux. La demande
d'assistance judiciaire de la recourante a été rejetée par ordonnance du 19
août 2019, faute pour celle-ci d'avoir établi son impécuniosité. La recourante,
qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est irrecevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'Etat
de Fribourg, Chambre pénale.

Lausanne, le 29 novembre 2019

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

La Greffière : Thalmann