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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.401/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_401/2019

Arrêt du 1er juillet 2019

Cour de droit pénal

Composition

M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président,

Jacquemoud-Rossari et Jametti.

Greffier : M. Dyens.

Participants à la procédure

X.________,

représenté par Me Y.________, avocat,

recourant,

contre

Ministère public de la République et canton de Genève,

intimé.

Objet

Refus de restituer le délai d'opposition à une ordonnance pénale; arbitraire,
etc.,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre pénale de recours, du 25 février 2019 (P/3511/2014 ACPR/146/
2019).

Faits :

A.

A.a. Durant l'année 2014, une procédure pénale (P/3511/2014) a été ouverte
contre X.________ pour violation d'une obligation d'entretien.

Par courrier du 9 mai 2014, l'avocat Y.________ a indiqué au ministère public
qu'il était "chargé de la défense des intérêts" du prénommé et qu'il se
"constitu[ait]" dans le cadre de la procédure pénale précitée.

En raison d'incertitudes concernant le domicile de X.________ à l'étranger, un
avis de recherche a été délivré à son encontre. Il a été interpellé à
l'aéroport de Genève, le 11 novembre 2015, puis interrogé par la police. Lors
de son audition, X.________ n'a pas souhaité la présence d'un avocat et a
déclaré qu'il était domicilié à Dubaï. Il a indiqué, comme adresse de
notification, celle de son avocat, Y.________.

A.b. Par ordonnance pénale du 21 mars 2016, le ministère public a condamné
X.________, pour violation d'une obligation d'entretien, à une peine pécuniaire
ferme (120 jours-amende à 150 fr. l'unité), tout en révoquant deux sursis
antérieurs (portant sur 40 jours-amende à 350 fr. l'unité et 15 jours amende à
150 fr. l'unité).

Cette ordonnance pénale a été adressée à l'avocat Y.________, pour le compte de
X.________, par courrier du 21 mars 2016, retiré le lendemain.

A.c. Par pli du 4 avril suivant, l'avocat Y.________ a exposé au procureur que,
s'il était en charge de la défense des intérêts de X.________, aucune élection
de domicile n'avait été faite en son étude. Il avait néanmoins fait suivre
l'ordonnance pénale à son mandant, lequel l'avait reçue "ce jour". Le prénommé
y formait opposition, contestant la validité de la notification, sa culpabilité
et la révocation des deux sursis.

En date du 18 octobre 2016, le ministère public a rendu une ordonnance sur
opposition tardive et transmis le dossier au Tribunal de police.

A.d. Par ordonnance du 9 janvier 2017, le Tribunal de police de la République
et canton de Genève a constaté l'irrecevabilité, pour cause de tardiveté, de
l'opposition formée le 4 avril 2016 par X.________ contre l'ordonnance pénale
du 21 mars 2016 et a renvoyé la cause au ministère public pour que ce dernier
statue sur une éventuelle demande de restitution de délai.

B. 

Par arrêt du 27 avril 2017, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice
genevoise a rejeté le recours formé par X.________ contre l'ordonnance du 9
janvier 2017.

C. 

Par arrêt du 16 mai 2018 (6B_644/2017), la cour de céans a confirmé la décision
du 27 avril 2017.

D. 

Après avoir invité X.________ à lui exposer les motifs pour lesquels il avait
été empêché de former opposition dans le délai légal, le ministère public a,
par ordonnance du 6 décembre 2018, refusé de lui restituer le délai
d'opposition à l'ordonnance pénale du 21 mars 2016.

E. 

Par arrêt du 25 février 2019, la Chambre pénale de recours de la Cour de
justice genevoise a rejeté le recours formé par X.________ à l'encontre de la
décision susmentionnée.

F. 

X.________ forme un recours en matière pénale et un recours constitutionnel
subsidiaire contre l'arrêt du 25 février 2019 de la Chambre pénale de recours
de la Cour de justice genevoise. Il conclut avec suite de frais et dépens,
principalement, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause au
ministère public pour que celui-ci poursuive l'instruction de la cause,
subsidiairement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à
l'autorité inférieure pour nouvelle décision.

Considérant en droit :

1. 

Le recourant forme un "recours en matière pénale et un recours constitutionnel
subsidiaire". L'arrêt attaqué, qui est final, a été rendu dans une cause de
droit pénal. Il peut donc faire l'objet d'un recours en matière pénale (art. 78
ss LTF), qui permet notamment de se plaindre de toute violation du droit
fédéral, y compris des droits constitutionnels (art. 95 let. a LTF). Par
conséquent, le recours constitutionnel subsidiaire est exclu (art. 113 LTF).

2. 

Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir constaté les faits de façon
arbitraire et d'avoir violé l'art. 94 al. 1 et 2 CPP en rapport avec sa demande
de restitution de délai. Il soutient que les conditions formelles et
matérielles d'une restitution du délai d'opposition à l'encontre de
l'ordonnance pénale du 21 mars 2016 étaient réunies.

2.1. Conformément à l'art. 93 CPP, une partie est défaillante si elle
n'accomplit pas un acte de procédure à temps ou ne se présente pas à l'audience
fixée.

Aux termes de l'art. 94 al. 1 CPP, une partie peut demander la restitution du
délai si elle a été empêchée de l'observer et qu'elle est de ce fait exposée à
un préjudice important et irréparable. Elle doit rendre vraisemblable que le
défaut n'est imputable à aucune faute de sa part. Selon l'art. 94 al. 2 CPP, la
demande de restitution, dûment motivée, doit être adressée par écrit dans les
30 jours à compter de celui où l'empêchement a cessé, à l'autorité auprès de
laquelle l'acte de procédure aurait dû être accompli. L'acte de procédure omis
doit être répété durant ce délai.

2.2. Les conditions formelles consistent donc à déposer une demande de
restitution ainsi qu'à entreprendre l'acte de procédure omis dans le délai
légal, d'une part, et à justifier d'un préjudice important et irréparable
d'autre part. Si les conditions de forme ne sont pas réalisées, l'autorité
compétente n'entre pas en matière sur la demande de restitution (ATF 143 I 284
consid. 1.2 p. 287).

2.3. La restitution de délai suppose ensuite que la partie ou son mandataire a
été empêché d'agir sans faute dans le délai fixé (ATF 143 I 284 consid. 1.3 p.
287). Selon la jurisprudence, une restitution au sens de l'art. 94 CPP ne peut
intervenir que lorsqu'un événement, par exemple une maladie ou un accident, met
la partie objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par
elle-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai
(arrêt 6B_365/2016 du 29 juillet 2016 consid. 2.1 et l'arrêt cité).

2.4. En l'espèce, il est constant que l'ordonnance pénale du 21 mars 2016 a
valablement été notifiée, en date du 22 mars 2016 à l'adresse du conseil du
recourant et que l'opposition, formée le 4 avril 2016, était tardive. Ces
questions ont été définitivement tranchées dans le cadre de l'arrêt rendu par
la cour de céans le 16 mai 2018 (6B_644/2017). Il n'y a donc plus lieu d'y
revenir. Il est en outre constant que l'avocat Y.________ était constitué dans
la présente cause, que le recourant a été interpellé et interrogé par la police
à l'aéroport de Genève le 11 novembre 2015 et qu'il a indiqué l'adresse de son
conseil comme adresse de notification, avant que soit rendue l'ordonnance
pénale du 21 mars 2016.

2.5. Le recourant soutient, sur le fond, qu'il se serait trouvé, à l'instar de
son conseil, dans une situation d'empêchement non fautif de procéder. Il
soutient qu'il était en voyage à l'étranger et qu'il ne pouvait s'attendre à ce
qu'une ordonnance pénale soit rendue à son encontre. Le délai d'acheminement,
entre 8 et 12 jours, du courrier prioritaire adressé par son conseil à son
domicile à Dubaï pour lui transmettre l'ordonnance pénale ne lui avait pas
permis de réagir en temps utile. Le courriel par lequel son conseil lui avait
également fait parvenir une copie de l'ordonnance pénale ne lui était pas
parvenu.

En tant qu'il persiste à prétendre qu'il ne pouvait s'attendre à ce qu'une
ordonnance pénale soit rendue à son encontre, son grief est irrecevable
puisqu'il a déjà été tranché dans les précédentes décisions rendues en l'espèce
(cf. arrêt 6B_644/2017 précité consid. 3.3). Il sied au demeurant de rappeler,
en premier lieu, que le recourant ne saurait se prévaloir de l'absence d'avis
de prochaine clôture, puisqu'un tel avis n'entre pas en ligne de compte lorsque
le ministère public clôt l'instruction par une ordonnance pénale (cf. art. 318
al. 1 CPP; arrêts 6B_1032/2015 du 25 mai 2016 consid. 1.4.2; 6B_549/2015 du 16
mars 2016 consid. 2.1). En second lieu, il est de jurisprudence constante que
le prévenu qui, comme en l'espèce, est informé par la police d'une procédure
préliminaire le concernant, de sa qualité de prévenu et des infractions
reprochées, doit se rendre compte qu'il est partie à une procédure pénale et
donc s'attendre à recevoir, dans ce cadre-là, des communications de la part des
autorités, y compris un prononcé (arrêts 6B_233/2017 du 12 décembre 2017
consid. 2.1; 6B_1032/2015 du 25 mai 2016 consid. 1.1; 6B_314/2012 du 18 février
2013 consid. 1.3.2; 6B_281/2012 du 9 octobre 2012 consid. 1.1). De
jurisprudence constante également, celui qui se sait partie à une procédure
judiciaire et qui doit dès lors s'attendre à recevoir notification d'actes du
juge, est tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de
prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins. Une telle
obligation signifie que le destinataire doit, le cas échéant, désigner un
représentant, faire suivre son courrier, informer les autorités de son absence
ou leur indiquer une adresse de notification (ATF 141 II 429 consid. 3.1 p.
431; 139 IV 228 consid. 1.1 p. 230 et les références citées).

En l'espèce, le recourant a, comme relevé plus haut, indiqué à la police
l'adresse de son conseil comme adresse de notification. Toutefois, il
n'apparaît pas que le recourant en a informé son conseil. Or, en pareilles
circonstances, il incombait au recourant, à l'issue de son audition, de l'en
informer, de manière à être en mesure de l'instruire en conséquence. Faute de
l'avoir fait, le recourant a en toutes hypothèses créé les circonstances de
l'empêchement dont il se prévaut. De surcroît, les éléments de fait qu'il
invoque pour le justifier (voyage à l'étranger, délai d'acheminement du
courrier avec son domicile à Dubaï, courriel non reçu) n'ont pas été
expressément constatés par la cour cantonale. En tant qu'il s'y réfère pour
étayer ses griefs, ses critiques sont appellatoires, partant irrecevables. Quoi
qu'il en soit, il appartenait au recourant de prendre, en amont, les
dispositions idoines pour demeurer atteignable ou, à défaut, de s'organiser
avec son conseil afin d'être en mesure de réagir en temps utile. Le recourant
ne fait en définitive état que de circonstances qui sont la résultante de ses
propres manquements, ce qui exclut de considérer l'existence d'un empêchement
non fautif de sa part. Ce constat, qui se rapporte à l'une des conditions de
fond posées par l'art. 94 CPP, suffit à sceller le sort des griefs, y compris
d'arbitraire dans l'établissement des faits, que le recourant soulève également
en relation avec les conditions de forme énoncées par cette même disposition.

3. 

Le recourant invoque également une violation des art. 29a al. 1 Cst., 6 et 13
CEDH et soutient en substance que son droit d'accès au juge n'a pas été
respecté. A l'en croire, le délai d'opposition de 10 jours prévu par l'art. 354
al. 1 CPP ne permettrait pas de tenir compte des circonstances du cas d'espèce,
compte tenu en particulier de son domicile à l'étranger.

Le recourant perd toutefois de vue qu'il a précisément été amené, pour cette
raison, à désigner l'adresse de son conseil comme adresse de notification. Dans
cette mesure, il ne peut rien tirer en sa faveur du domicile étranger dont il
se prévaut. Son grief tombe donc à faux, étant au demeurant rappelé que les
difficultés dont le recourant fait état pour prétendre que le délai de 10 jours
prévu par l'art. 354 al.1 CPP ne lui permettait pas de sauvegarder ses droits
lui sont pleinement imputables.

4. 

Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66
al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre pénale de recours.

Lausanne, le 1er juillet 2019

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

Le Greffier : Dyens