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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.399/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_399/2019

Arrêt du 3 juin 2019

Cour de droit pénal

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et
Oberholzer.

Greffier : M. Dyens.

Participants à la procédure

X.________, représentée par Me Henri Bercher, avocat,

recourante,

contre

Ministère public central du canton de Vaud,

intimé.

Objet

Violation simple des règles de la circulation routière; arbitraire, droit
d'être entendu,

recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du
canton de Vaud du 18 février 2019 (n° 103 PE18.005387-//DAC).

Faits :

A. 

Statuant sur opposition à une ordonnance pénale du Préfet du district de
Morges, le Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte a, par jugement du
28 novembre 2018, libéré X.________ du chef de prévention de violation simple
des règles de la circulation routière. Il lui a alloué une indemnité au sens de
l'art. 429 al. 1 let. a CPP d'un montant de 1'680 fr. et a laissé les frais de
la cause, par 700 fr., à la charge de l'Etat.

B. 

Par jugement du 18 février 2019, le juge unique de la Cour d'appel pénale du
Tribunal cantonal vaudois a admis l'appel formé par le ministère public contre
le jugement précité et l'a réformé, en ce sens que X.________ a été reconnue
coupable de violation simple des règles de la circulation routière et a été
condamnée à une amende de 400 fr., convertible en quatre jours de peine
privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif. Sa demande
d'indemnité au sens de l'art. 429 CPP a été rejetée et les frais de première
instance, par 700 fr., ont été mis à sa charge, ceux d'appel étant quant à eux
laissés à la charge de l'Etat.

Le jugement précité retient, en substance, que le 6 septembre 2017, X.________
a circulé au volant d'un véhicule automobile de marque A.________ immatriculé
xxx sur l'autoroute A1 (B.________-C.________), chaussée lac. A 17h25, au
niveau du km yyy (voie d'entrée de D.________), elle a franchi, alors qu'elle
se trouvait sur la voie de droite, une " double ligne de sécurité " pour se
déporter sur la voie d'accélération et dépasser plusieurs véhicules par la
droite.

C. 

X.________ forme un recours en matière pénale contre le jugement du 18 février
2019 du juge unique de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois.
Elle conclut, avec suite de frais et dépens, principalement, à l'annulation
dudit jugement et à la confirmation du jugement de première instance,
subsidiairement à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à
l'autorité précédente.

Considérant en droit :

1. 

Invoquant les art. 6 ch. 2 CEDH, 32 al. 1 Cst. et 10 CPP, la recourante se
plaint d'une violation de la présomption d'innocence et d'arbitraire dans
l'établissement des faits.

1.1. La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst.,
14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe
" in dubio pro reo ", concernent tant le fardeau de la preuve que
l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 p. 348
s.; 127 I 38 consid. 2a p. 40 s.). En tant que règle sur le fardeau de la
preuve, elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve
incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle
d'appréciation des preuves (sur la portée et le sens précis de la règle sous
cet angle, cf. ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 p. 351 s.), la présomption
d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de
l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il
existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste
des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une
certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et
irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de
la situation objective. Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation
des faits sont critiquées en référence à la présomption d'innocence (art. 6
par. 2 CEDH, 32 al. 1 Cst. et 10 CPP), le principe " in dubio pro reo " n'a pas
de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 144 IV 345 consid.
2.2.3.3 p. 351 s.; 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503).

Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou
même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non
seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 143 IV 241
consid. 2.3.1 p. 244). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement
des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte,
sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la
décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou
encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des
constatations insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503 et les
références citées). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens
fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de
l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art.
106 al. 2 LTF; ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503 et les références citées).

Lorsque, comme en l'espèce, le recours en matière pénale est dirigé contre une
décision d'une autorité de dernière instance cantonale dont le pouvoir d'examen
est limité à l'arbitraire en matière de constatation des faits (cf. art. 398
al. 4 CPP), l'examen du Tribunal fédéral porte concrètement sur l'arbitraire du
jugement de l'autorité inférieure, à la lumière des griefs soulevés dans l'acte
de recours. Pour se conformer aux exigences de motivation rappelées ci-dessus,
le recourant doit exposer pourquoi l'autorité cantonale aurait à tort admis ou
nié l'arbitraire dans l'appréciation des preuves faite par l'autorité de
première instance. Le Tribunal fédéral se prononce librement sur cette question
(arrêt 6B_343/2019 du 11 avril 2019 consid. 1.1 et les références citées; cf.
ATF 125 I 492 consid. 1a/cc et 1b p. 494).

1.2. Il ressort du jugement attaqué que la recourante a fait l'objet d'un
rapport de dénonciation établi par l'appointé E.________ et le gendarme
F.________ en date du 15 septembre 2017. Ces derniers y ont exposé avoir
aperçu, le 6 septembre 2017 vers 17h25, au niveau du km yyy de l'autoroute A1
(voie d'entrée de D.________), le véhicule de la recourante, qui se trouvait
sur la voie de droite de l'autoroute, se déporter sur la voie d'accélération en
franchissant une double de ligne de sécurité. Selon ce même rapport, la
recourante a ensuite " devancé une petite dizaine de véhicules par la voie
d'accélération avant de réintégrer la voie de droite ". Elle a été interpellée
dans la foulée, au terme de sa manoeuvre, sur la bande d'arrêt d'urgence, où
elle a été identifiée.

Devant le préfet puis devant le premier juge, la recourante a contesté s'être
déjà trouvée sur l'autoroute au moment des faits, indiquant qu'elle avait
emprunté la voie d'entrée de D.________ et qu'elle s'était engagée sur la voie
de droite presque à la fin de la voie d'engagement. Le jugement attaqué relève
à cet égard que la recourante a produit une attestation de son employeur de
l'époque, qui certifiait qu'elle avait bien travaillé le jour en question
jusqu'à 17h15. Il y est également relevé que le trajet le plus rapide entre son
lieu de travail d'alors et le lieu où les faits se sont produits est long de 3
km, dure 5 à 6 minutes et qu'elle pouvait ainsi se trouver à 17h25 le jour en
question au km yyy, au niveau de la voie d'entrée de D.________. Lors de
l'audience devant le Tribunal de police, la recourante a déclaré que,
lorsqu'elle était entrée sur l'autoroute, une voiture était arrêtée au travers
de la voie d'engagement pour s'insérer sur la piste de droite. Elle l'avait
alors contournée par la droite comme l'avaient fait les autres véhicules devant
elle, sans empiéter sur la voie de détresse. Elle n'avait pas, sur le moment,
contesté le motif de son interpellation par les gendarmes, soutenant ne pas
avoir compris ce qui lui était reproché, sauf d'avoir contourné par la droite
le véhicule qui se trouvait sur la voie d'engagement.

Sur la base des éléments précités, le premier juge a retenu que la recourante
s'était engagée sur l'autoroute par la voie d'entrée de D.________, mais qu'il
paraissait " saugrenu " qu'elle se fût insérée sur la voie de droite avant de
franchir la double ligne de sécurité pour retourner sur la piste d'engagement
afin d'y dépasser plusieurs véhicule par la droite. La manoeuvre paraissait
aberrante, si bien qu'il existait, selon le premier juge, un doute sérieux sur
les faits décrits par les gendarmes dénonciateurs. Le Tribunal de police a donc
privilégié la version de la recourante et a considéré qu'aucune infraction
n'avait été commise.

1.3. Statuant sur appel du ministère public, la cour cantonale a pour sa part
considéré que les déclarations des gendarmes dénonciateurs étaient claires et
constantes s'agissant de la matérialité des faits qui présentaient une
connotation pénale. Ces derniers avaient rapporté sans ambiguïté que la
conductrice du véhicule, qui se trouvait sur la voie de droite, s'était
déportée sur la voie d'accélération en franchissant une double ligne de
sécurité. La recourante ne contestait pas avoir été la conductrice du véhicule
en question. Le rapport complémentaire du 30 janvier 2018, signé par l'appointé
E.________ et par le gendarme F.________ confirmait de manière précise et
univoque que que les deux représentants des forces de l'ordre avaient
clairement constaté que le véhicule de la recourante, qui se situait environ 30
mètres devant eux, " s'[était] déplacé de la voie de droite sur celle
d'accélération ". Pour la cour cantonale, il importait dès lors peu que les
gendarmes n'aient pas pu établir à quel moment la recourante s'était engagée
sur cette voie de droite, puisqu'il avait été constaté qu'elle s'y trouvait. Au
surplus, le gendarme F.________ avait confirmé les faits pertinents lors des
débats devant le Tribunal de police. Les déclarations des gendarmes, claires et
constantes, ne pouvaient ainsi pas être écartées uniquement pour le motif que
la manoeuvre incriminée paraissait aberrante au yeux du premier juge. Son
appréciation, personnelle et subjective, ne pouvait pas, sans arbitraire,
l'emporter sur les éléments de preuve objectifs du dossier.

1.4. La recourante ne fait pas en soi grief à la cour cantonale d'avoir méconnu
la notion d'arbitraire en qualifiant comme telle l'appréciation du premier
juge. Elle lui reproche en revanche d'avoir accordé entièrement foi aux
dépositions des deux agents dénonciateurs, dont les déclarations seraient selon
elle approximatives, lacunaires et inconsistantes, tout en relevant de
déductions et non de constatations objectives. Il en résulterait des doutes
sérieux et irréductibles concernant les faits de la cause et les constatations
de la cour cantonale seraient entachées d'arbitraire. Elle soutient de surcroît
avoir prouvé, sans équivoque, qu'il était impossible qu'elle se soit déjà
trouvée sur la voie de droite à l'heure de l'infraction.

1.5. Sur ce dernier point, la recourante échoue à démontrer en quoi les
constatations inverses de la cour cantonale, fondées sur les déclarations des
gendarmes, seraient insoutenables. Au regard des éléments qui ressortent du
jugement attaqué, sa présence sur les lieux de l'infraction à l'heure où elle a
été constatée, soit vers 17h25, demeure compatible avec le trajet d'une durée
de 5 à 6 minutes qu'elle avait à effectuer après avoir quitté son travail à
17h15. En tout état, la séquence à laquelle se rapportent les constatations des
gendarmes débute précisément lorsque la recourante a franchi la double ligne de
sécurité en se déportant de la voie de droite vers la voie d'accélération.
Leurs constatations en tant que telles, reprises par la cour cantonale, sont
circonscrites à cette séquence. Il ne saurait dès lors être question de
spéculer sur les circonstances qui les ont immédiatement précédées.
Contrairement à ce que soutient la recourante, la cour cantonale était dès lors
fondée à considérer qu'il importait peu que les gendarmes n'aient pas pu
établir à quel moment la recourante s'était engagée sur la voie de droite. Ce
pan essentiel de ses griefs s'avère par conséquent mal fondé.

S'agissant des photographies dont se prévaut la recourante, la cour cantonale
était également fondée à considérer que ces dernières révèlent une vue dégagée
et un marquage au sol clairement visible, sur un tronçon relativement
rectiligne à l'endroit où la voie d'engagement rejoint les voies de
circulation. La recourante se méprend à l'évidence lorsqu'elle évoque notamment
une courbe substantielle, propre à exclure formellement la possibilité
d'estimer de façon précise la position d'un véhicule sur la chaussée. En outre,
les éléments dont elle fait état au sujet de divergences dans le témoignage du
gendarme F.________ concernant la couleur de son véhicule n'ont guère de
pertinence, puisque son identification comme conductrice du véhicule incriminé
n'est pas en cause. Il n'en va pas différemment des indications du même
gendarme concernant la distance à laquelle il observé la manoeuvre de la
recourante (" deux à trois véhicule ", respectivement " peut-être 30m "). Comme
l'a retenu à juste titre la cour cantonale, ces dernières ne laissent pas
apparaître un élément de contradiction tel qu'il remettrait en cause la
crédibilité de ses déclarations. Au surplus, l'argumentation de la recourante
se révèle appellatoire, partant irrecevable, lorsqu'elle tente d'opposer sa
propre version des faits, censément plus crédible, à celle retenue par la cour
cantonale.

En définitive, le constat selon lequel les déclarations des gendarmes étaient
claires et constantes ne prête pas le flanc à la critique. C'est donc en vain
que la recourante reproche à la cour cantonale d'être tombé dans l'arbitraire
et d'avoir violé la présomption d'innocence en donnant foi à la version des
faits rapportée par les gendarmes dénonciateurs.

Cela étant, la recourante ne discute, sous l'angle du droit, ni les infractions
retenues à son encontre sur la base des faits retenus, ni la quotité de la
sanction qui lui a été infligée.

2. 

Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 3 juin 2019

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

Le Greffier : Dyens