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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.354/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_354/2019

Arrêt du 22 juillet 2019

Cour de droit pénal

Composition

M. le Juge fédéral Denys, Président.

Greffière : Mme Paquier-Boinay.

Participants à la procédure

A.________,

recourante,

contre

Ministère public de l'Etat de Fribourg,

intimé.

Objet

Ordonnance de classement (actes d'ordre sexuel avec des enfants, calomnie,
etc.); indemnités; droit à un procès équitable, etc.,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Chambre
pénale, du 1er février 2019

(502 2017 282, 283 et 284).

Faits :

A.

Par ordonnance du 13 octobre 2017, le ministère public a prononcé le classement
de la procédure pénale ouverte contre B.________ pour actes d'ordre sexuel avec
des enfants, voies de fait ou lésions corporelles simples, violation de
domicile, calomnie, discrimination raciale, insoumission à une décision de
l'autorité, violation du secret professionnel et contrainte.

B.

Par arrêt du 1 ^er février 2019, la Chambre pénale du Tribunal cantonal
fribourgeois a rejeté dans la mesure de sa recevabilité le recours formé par
A.________ contre cette ordonnance. 

Les faits à l'origine de la procédure sont en substance les suivants.

A.________ et B.________ ont vécu quelques années ensemble et sont les parents
de C.________, née le 20 mai 2015. Depuis leur séparation, en juillet 2015, un
lourd conflit les oppose quant à la garde et aux relations personnelles avec
l'enfant, générant, de part et d'autre, l'ouverture de procédures tant civiles
que pénales.

Les 24 août et 22 octobre 2015, A.________ a déposé à l'encontre de B.________
deux plaintes pénales, qui ont fait l'objet d'une ordonnance de non-entrée en
matière le 12 juillet 2016. A.________ a recouru contre cette ordonnance par un
courrier du 25 juillet 2016, formulant de nouveaux griefs à l'encontre du père
de son enfant. Une nouvelle procédure a été ouverte par le ministère public et
la partie plaignante a complété sa dénonciation du 25 juillet 2016 par courrier
du 24 octobre 2016.

C.

A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre
l'arrêt de la Chambre pénale. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, à
titre préliminaire à la suspension de la procédure dans l'attente de l'issue de
la procédure pénale dirigée contre la procureure qui a rédigé l'ordonnance de
classement du 13 octobre 2017. A titre principal, elle conclut à l'annulation
de l'arrêt attaqué, à ce que soit ordonnée la mise en accusation de B.________,
le dossier étant confié à un procureur indépendant et neutre, hors du ministère
public fribourgeois. A titre subsidiaire, elle demande le renvoi de la cause à
l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau. La recourante a par
ailleurs sollicité l'assistance judiciaire, qui a été refusée par ordonnance de
la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral du 16 avril 2019.

Considérant en droit :

1.

1.1. Conformément à l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante
qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à
recourir au Tribunal fédéral, si la décision attaquée peut avoir des effets sur
le jugement de ses prétentions civiles. Constituent de telles prétentions
celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être
déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement
des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41
ss CO (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4). La notion d'influence du jugement pénal
sur les prétentions civiles est conçue strictement. La partie plaignante ne
peut pas s'opposer à une décision parce qu'elle ne facilite pas son action sur
le plan civil. Il faut que la décision attaquée ait pour conséquence qu'elle
rencontrera plus de difficultés à faire valoir ses prétentions civiles (arrêt
6B_405/2018 du 7 août 2018 consid. 1.1 et les références citées; ATF 127 IV 185
consid. 1a p. 188).

1.2. Selon l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe à la recourante d'alléguer les faits
qu'elle considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir (ATF 138 III
537 consid. 1.2 p. 539; 133 II 353 consid. 1 p. 356). Lorsque, comme en
l'espèce, le recours est dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou
de classement de l'action pénale, la partie plaignante n'a pas nécessairement
déjà pris des conclusions civiles (ATF 137 IV 246 consid. 1.3.1 p. 248). Quand
bien même la partie plaignante aurait déjà déclaré des conclusions civiles (cf.
art. 119 al. 2 let. b CPP), il n'en reste pas moins que le procureur qui refuse
d'entrer en matière ou prononce un classement n'a pas à statuer sur l'aspect
civil (cf. art. 320 al. 3 CPP). Dans tous les cas, il incombe par conséquent à
la partie plaignante d'expliquer dans son mémoire au Tribunal fédéral quelles
prétentions civiles elle entend faire valoir contre l'intimé. Comme il
n'appartient pas à la partie plaignante de se substituer au ministère public ou
d'assouvir une soif de vengeance, la jurisprudence entend se montrer
restrictive et stricte, de sorte que le Tribunal fédéral n'entre en matière que
s'il ressort de façon suffisamment précise de la motivation du recours que les
conditions précitées sont réalisées, à moins que l'on puisse le déduire
directement et sans ambiguïté compte tenu notamment de la nature de
l'infraction alléguée (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4 s. et les références
citées). Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que les proches de la victime ne
peuvent se constituer partie plaignante que s'ils font valoir des prétentions
civiles propres dans la procédure pénale (ATF 139 IV 89 consid. 2.2 p. 91).

1.3. La recourante expose qu'elle a un intérêt juridique à l'annulation de
l'arrêt attaqué pour divers motifs et qu'elle entend faire valoir des
prétentions civiles liées au tort moral et aux dommages subis. A ce propos,
elle invoque, s'agissant du dommage, des frais de loyer mis à sa charge par son
ancienne gérance à la suite d'un courrier de l'intimé ainsi qu'une somme, fixée
par elle-même, sensée compenser le manque à gagner dû à l'impossibilité dans
laquelle elle se trouverait de reprendre un emploi en raison du temps qu'elle
doit consacrer à la défense de sa fille. En ce qui concerne le tort moral, elle
se prévaut d'une condamnation prononcée à son encontre dans une autre
procédure, condamnation qui, selon ses dires, se fonde sur le classement de la
plainte à l'origine de la présente procédure et aurait été impossible si
l'intimé avait été mis en accusation.

Il y a lieu de relever tout d'abord que les éléments mentionnés par la
recourante pour justifier son intérêt juridique à l'annulation de la décision
attaquée ne sauraient être assimilés à des prétentions civiles au sens de
l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF et ne sont donc pas propres à fonder sa
qualité pour recourir.

Par ailleurs, la recourante ne prétend pas agir dans le cadre de la présente
procédure au nom de sa fille, en tant que représentante légale. Il y a donc
lieu d'examiner si elle est légitimée à recourir en faisant valoir des
conclusions propres. Les éléments évoqués ci-dessus ne constituent
manifestement pas des conséquences directes des infractions dénoncées. Par
ailleurs, en relation avec les actes d'ordre sexuel prétendument commis sur sa
fille, elle allègue que l'on ne peut pas exclure que l'enfant en subisse des
conséquences sur le long terme, ce qui est source de vive inquiétude pour la
recourante. Une telle motivation ne suffit pas pour établir que l'atteinte
invoquée revêt la gravité exceptionnelle permettant d'allouer une indemnité
pour tort moral aux parents d'une victime d'abus sexuels (cf. arrêt 6B_962/2018
du 14 novembre 2018 et les arrêts cités).

1.4. Selon l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF, la plaignante a qualité pour
former un recours en matière pénale pour autant que la contestation porte sur
le droit de porter plainte. L'hypothèse envisagée par cette disposition n'entre
toutefois pas en considération, dès lors que la recourante ne soulève aucun
grief à cet égard.

2.

Indépendamment des conditions posées par l'art. 81 al. 1 LTF, la partie
plaignante est habilitée à se plaindre d'une violation de ses droits de partie
équivalant à un déni de justice formel, sans toutefois pouvoir faire valoir par
ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés du fond
(cf. ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 5 et les références citées). Le Tribunal
fédéral ne connaît de la violation des droits fondamentaux que si ce moyen est
invoqué et motivé par la recourante (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'il a
été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée.

2.1. Invoquant l'art. 6 CEDH, la recourante reproche à la cour cantonale
d'avoir violé son droit à un procès équitable, plus précisément la garantie
d'un tribunal indépendant et impartial.

2.2. La garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art.
30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH, qui ont, de ce point de vue, la même portée,
permet de demander la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement
est de nature à susciter des doutes quant à son impartialité. Elle vise à
éviter que des circonstances extérieures à l'affaire puissent influencer le
jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Il suffit que les
circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une
activité partiale du magistrat, mais seules des circonstances constatées
objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement
individuelles du plaideur ne sont pas décisives (ATF 139 I 121 consid. 5.1 p.
125 s.; III 120 consid. 321 p. 124; 138 VI 142 consid. 2.1 p. 145 et la
jurisprudence citée).

2.3. La recourante prie tout d'abord le Tribunal fédéral de vérifier s'il
n'existe pas de lien de parenté entre la greffière D.________, qui a signé
l'arrêt attaqué, et la procureure E.________, qui a rendu l'ordonnance de
classement du 13 octobre 2017.

Il n'appartient pas au Tribunal fédéral saisi d'un recours en matière pénale de
procéder à de telles investigations. Par ailleurs, la recourante se contente
d'évoquer le nom de la greffière, sans invoquer le moindre élément susceptible
de constituer un motif de récusation.

2.4. Sur la base d'une argumentation passablement confuse, la recourante
soutient que le fait que l'ordonnance de classement ait été rendue par la
procureure E.________ viole son droit à un procès équitable.

L'arrêt attaqué ne porte pas sur la question d'une récusation de la magistrate
en question et la recourante ne fait pas valoir, avec une motivation
satisfaisant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, que cette omission
constituerait un déni de justice. Elle se limite à affirmer avoir valablement
relevé dans son recours cantonal que son droit à un procès équitable était
violé parce que l'ordonnance de classement avait été rendue par la procureure
E.________, de mentionner que cet argument ne figure pas dans l'arrêt attaqué
et de mentionner " défaut de motivation et déni de justice ", ces deux termes
semblant toutefois se rapporter au point 5.9 de l'ordonnance de classement,
qu'elle cite dans ce contexte et qui n'est pas l'objet du présent recours.

L'irrecevabilité de ce grief rend sans objet la demande faite par la recourante
de suspendre la procédure jusqu'à droit connu sur la procédure pénale dirigée
contre la procureure E.________, le sort de la seconde n'étant pas susceptible
d'avoir une influence sur l'issue de la première.

3.

Enfin, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir violé son droit de
réplique. Son argumentation à ce propos repose principalement sur des éléments
qui ne ressortent pas de l'arrêt attaqué et ne satisfait par ailleurs pas aux
exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF. Elle n'est dès lors pas
recevable.

4.

Le recours ne contient aucun grief recevable. Il doit être déclaré irrecevable
selon la procédure simplifiée prévue par l'art. 108 al. 1 let. a LTF. La
recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1.

Le recours est irrecevable.

2.

Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.

Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'Etat
de Fribourg, Chambre pénale.

Lausanne, le 22 juillet 2019

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

La Greffière : Paquier-Boinay