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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.350/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_350/2019

Arrêt du 29 mai 2019

Cour de droit pénal

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,

Jacquemoud-Rossari et Rüedi.

Greffière : Mme Musy.

Participants à la procédure

A.________,

représenté par Me Pascal Junod, avocat,

recourant,

contre

Ministère public central du canton de Vaud,

intimé.

Objet

Discrimination raciale; arbitraire, violation du principe in dubio pro reo,

recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du
canton de Vaud du 8 janvier 2019 (n° 50 PE16.006073-HRP/MPCEN/LCB).

Faits :

A. 

Par jugement du 16 août 2018, le Tribunal de police de l'arrondissement de
Lausanne a constaté que A.________ s'était rendu coupable de discrimination
raciale (art. 261bis al. 4 in fine CP), l'a condamné à une peine pécuniaire de
90 jours-amende à 50 fr. le jour, a suspendu l'exécution de la peine pécuniaire
avec un délai d'épreuve de 4 ans et l'a condamné à une amende de 500 fr, la
peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement étant de 10
jours.

B. 

Par jugement du 8 janvier 2019, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté l'appel formé par A.________ à l'encontre de la décision de
première instance. Elle a considéré en substance ce qui suit.

B.a. Entre les mois de février 2015 et de janvier 2016, A.________ a écrit
divers articles dans le journal " B.________ ", dont la lecture est librement
accessible au public sur le site Internet du périodique.

B.b. Au mois de février 2015, dans un article intitulé " Peut-on punir la
négation d'un génocide? " (B.________ n° 442), faisant référence à un article
paru sous le même titre dans le quotidien C.________ du 19 février 2015, dans
lequel l'avocat Robert Ayrton analysait la position de la Cour européenne des
droits de l'homme (ci-après: CourEDH) sur l'affaire Perinçek, A.________ a
notamment écrit: " Le professeur Robert Faurisson, sans mettre en doute les
souffrances des Juifs ni la réalité des camps d'internement, croit pouvoir
démontrer l'impossibilité de fonctionnement des chambres à gaz homicides, et
dès lors leur inexistence et l'inexistence d'une volonté exterminatrice de la
part du régime nazi. Compte tenu de l'abondance des témoignages contraires,
c'est assurément une thèse audacieuse, qui voit se dresser contre elle la
presque unanimité des bonnes gens qui croient ce qu'on leur a appris. Mais ces
conclusions lui sont-elles dictées par la haine? Certainement pas. Dispose-t-on
pour le contredire d'innombrables preuves? Alors pourquoi les garder secrètes?
Pourquoi ne pas mettre sur pied un colloque où ces preuves seront produites? La
raison en est simple et Me Ayrton nous la dévoile: M. Faurisson est un méchant
négationniste et donc, doit être condamné. La question de savoir s'il a raison
ou pas ne doit pas se poser ".

B.c. Au mois d'avril 2015, dans un article intitulé " Parricide " (B.________
n° 444), revenant sur la déclaration de Jean-Marie Le Pen selon laquelle les
chambres à gaz n'étaient, à son avis, qu'un détail de la seconde guerre
mondiale, A.________ a notamment écrit: " Cette fois-ci pourtant, le vieux lion
a tort: les chambres à gaz ne sont pas un détail, parce que, si elles ont
réellement existé, elles sont la preuve d'une volonté exterminatrice dont la
responsabilité incombe aux plus hautes instances du Reich. Et si elles n'ont
jamais existé, comme le proclament et prétendent le démontrer le professeur
Faurisson et ses disciples, elles ne sont pas un détail, mais un bobard, un
mensonge, une légende, une mystification ".

B.d. Au mois de juin 2015, dans un article intitulé " Mille coups de fouet "
(B.________ n° 446) relatif au traitement juridico-médiatique réservé aux
négationnistes, qui seraient les seuls à ne pas bénéficier de la liberté
d'expression dès lors que leurs propos seraient assimilés à de l'incitation à
la haine, A.________ a notamment écrit: " Les nombreux prisonniers
révisionnistes, c'est-à-dire les chercheurs qui mettent en doute la réalité
historique des chambres à gaz homicides durant la seconde guerre mondiale,
n'ont pas ce privilège. Le résultat de leurs recherches, de leurs travaux, de
leurs expertise heurte la religion de l'Holocauste, laquelle est, semble-t-il,
en Occident la seule dont il est interdit de douter. [...] La seule religion à
laquelle il est interdit de toucher est la religion holocaustique: elle a ses
saints, ses miracles, ses martyrs, ses prêtres et son Inquisition: Malheur à
celui qui ne croit pas ! ".

B.e. Au mois d'octobre 2015, dans un article intitulé " Il faudra chercher les
motifs " (B.________ n° 448), dans lequel il se penche sur l'affaire Perinçek,
A.________ a notamment écrit que le jugement de la CourEDH avait suscité des
réactions vives, qu'il fallait abroger l'art. 261bis CP comme il était possible
que cela soit fait avec la loi française dite " Gayssot " qui réprime la
contestation de faits " prétendument définitivement établis par le Tribunal
international de Nuremberg ", qu'il était un " journaliste révisionniste " et
que le révisionniste était, aux yeux des gens, comparable à un pédophile en
raison de " la manière très orientée dont est traitée la controverse historique
qui divise les historiens " officiels " et les chercheurs ayant eu la curiosité
- ou l'inconscience - de porter un regard neuf et critique sur des événements
vieux de moins d'un siècle ".

B.f. Au mois de janvier 2016, dans un article intitulé " Un écolier puni à
Aubonne " (B.________ n° 451), A.________ a notamment écrit: " C'est le
quotidien gratuit D.________ du mercredi 13 janvier qui nous relate cette
croustillante histoire: à l'école communale d'Aubonne (Vaud), un élève
particulièrement bien informé a révélé à ses camarades l'intrigue et le
scénario du septième épisode de Star Wars: le réveil de la force pendant le
cours de gym. Le maître de travaux manuels, fan de la série et présent dans la
salle, a été à ce point irrité d'apprendre la fin de l'épisode avant la sortie
du film qu'il a flanqué quatre heures de colle à l'étourdi. Le directeur n'a
pas maintenu cette punition, mais l'élève devra néanmoins rédiger un compte
rendu du film en quatre pages. Je vois dans cette circonstance une parenté avec
la manière dont sont traités les révisionnistes disciples du professeur
Faurisson. Ce qu'a révélé le jeune adolescent d'Aubonne était la pure vérité,
mais la révélation a heurté le professeur, qui n'avait pas envie de l'entendre.
De même, personne n'a pu démontrer au professeur Faurisson qu'il avait tort sur
le fond, mais une législation ad hoc permet de l'incriminer, parce que la
publication de ses recherches irrite des personnes, met en péril des intérêts
financiers, heurte des sensibilités et, en outre, rend ridicules tous les
historiens qui ont gobé sans y réfléchir des bobards dont on sait aujourd'hui
l'impossibilité et les faux témoins qui ont affirmé pendant septante ans qu'ils
avaient vu, de leurs yeux vu, des licornes vivantes et des pentagones à trois
côtés. Robert Faurisson est un méchant homme, parce qu'il explique aux enfants
de huit ans que le Père Noël n'existe pas. Tout le monde sait (ou peut savoir
en quelques clics de souris) qu'il a raison, mais cette révélation est
inopportune, peut-être prématurée; elle est donc assimilée à une forme
d'incitation à la haine (du malheureux Père Noël ou du maître de travaux
manuels) et donc punissable. Cette mésaventure apprendra au jeune écolier
d'Aubonne que toute vérité n'est pas toujours bonne à dire ".

C.

A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il conclut,
avec suite de frais et dépens, principalement à son acquittement du chef de
discrimination raciale, subsidiairement à l'annulation du jugement du 8 janvier
2019 et au renvoi de la cause à la Cour d'appel pénale du canton de Vaud pour
nouvelle décision. Il sollicite également le bénéfice de l'assistance
judiciaire.

Considérant en droit :

1. 

Le recourant conteste les aspects subjectifs de l'infraction retenue contre
lui.

1.1. L'art. 261bis al. 4 CP punit celui qui aura publiquement, par la parole,
l'écriture, l'image, le geste, par des voies de fait ou de toute autre manière,
abaissé ou discriminé d'une façon qui porte atteinte à la dignité humaine une
personne ou un groupe de personnes en raison de leur race, de leur appartenance
ethnique ou de leur religion ou qui, pour la même raison, niera ou minimisera
grossièrement ou cherchera à justifier un génocide ou d'autres crimes contre
l'humanité. En l'occurrence, c'est la seconde partie de la disposition qui
entre en considération en l'espèce.

L'art. 261bis al. 4 in fine CP consacre un délit de mise en danger abstraite de
la paix publique (ATF 145 IV 23 consid. 2.1 p. 25, in SJ 2019 I 157; 129 IV 95
consid. 3.3.1 p. 101 et consid. 3.5 p. 105). La disposition a pour objet de
lutter contre les atteintes discriminatoires (ATF 145 précité p. 25; 126 IV 20
consid. 1c p. 24).

La négation de  l'Holocauste  réalise objectivement l'état de fait incriminé
par l'art. 261bis al. 4 in fine CP parce qu'il s'agit d'un fait historique
généralement reconnu comme établi (ATF 129 précité consid. 3.4.4 p. 104 s.),
notoire, incontestable ou indiscutable (arrêt 6B_398/2007 du 12 décembre 2007
consid. 3.4.3 et références citées). Mettre en doute l'existence des chambres à
gaz revient à contester les crimes commis par le régime nazi, en particulier
l'extermination systématique des juifs dans des chambres à gaz, comportement
susceptible de tomber sous le coup de l'art. 261bis al. 4 CP (cf. ATF 126
précité consid. 1e p. 27; 121 IV 76 consid. 2b/cc p. 85; arrêt 6B_1100/2014 du
14 octobre 2015 consid. 3.1). L'auteur doit agir publiquement, c'est-à-dire en
dehors d'un cercle privé (ATF 130 IV 111 consid. 5.2.2), par des paroles, des
écrits, des images, des gestes ou des voies de fait (ATF 145 précité consid.
2.2 p. 26).

Du point de vue subjectif, le délit est intentionnel, le dol éventuel pouvant
suffire (ATF 145 précité consid. 2.3 p. 26; 6B_734/2016 du 18 juillet 2017
consid. 6.1 non publié in ATF 143 IV 308).

Le Tribunal fédéral a récemment mis fin à une controverse sur la question de
savoir si l'auteur devait avoir agi pour des motifs relevant de la
discrimination raciale. Il a considéré qu'il ne suffisait pas de contester
l'existence ou l'importance d'un génocide ou d'autres crimes contre l'humanité,
respectivement de tenter de les justifier, pour être en présence d'une
discrimination raciale. Il fallait encore que ce comportement soit dicté par
des mobiles particuliers de l'auteur, soit la haine ou le mépris des personnes
appartenant à une race, une ethnie ou une religion déterminée. Le comportement
punissable devait donc consister en une manifestation caractéristique de la
discrimination (ATF 145 précité consid. 2.3 p. 26 s.). Aussi, pour retenir
l'infraction de l'art. 261bis al. 4 in fine CP, convient-il de démontrer, sous
l'angle subjectif, non seulement que l'intention de l'auteur a porté sur tous
les éléments constitutifs objectifs, mais également que l'intéressé était mû
par un mobile discriminatoire.

1.2. S'il soutient qu'il n'a jamais reconnu le caractère illicite de ses écrits
contrairement à ce que la cour cantonale a constaté, le recourant ne paraît
toutefois pas contester avoir réalisé les éléments constitutifs objectifs de
l'infraction avec conscience et volonté. Il se limite en définitive à s'en
prendre à l'existence d'un mobile discriminatoire et invoque à cet égard
l'établissement arbitraire des faits, la violation du principe in dubio pro reo
et la violation de l'art. 261bis al. 4 in fine CP.

1.3. Le mobile est la cause psychologique d'une manifestation donnée de
volonté. Le plus souvent, il représente l'expression de sentiments, conscients
ou inconscients, d'impulsions ou de raisonnements qui ont une influence médiate
ou immédiate sur l'infraction. La détermination du mobile relève de
l'établissement des faits. S'agissant d'un facteur relatif à la volonté interne
de l'auteur, le juge peut établir le mobile en se fondant sur toute preuve
pertinente (ATF 101 IV 387 consid. 2a) ou indice externe (ATF 145 précité
consid. 4.2 p. 32 et les références citées).

Le mobile discriminatoire est pratiquement intrinsèque à toute tentative de
justifier un génocide ou un autre crime contre l'humanité fondés sur
l'appartenance raciale, ethnique ou religieuse des victimes, car un tel
comportement implique nécessairement une forme d'approbation de telles
atrocités et des idéologies qui les inspirent (ATF 145 précité consid. 4.3 p.
32 s. et les références citées). Une telle déduction ne saurait en revanche
être tirée en présence de la négation ou de la minimisation d'un génocide ou
d'un autre crime contre l'humanité et il convient dès lors d'examiner les
circonstances de chaque cas d'espèce, même si de tels comportements ne laissent
que peu de place à des mobiles « respectables » (ATF 145 précité consid. 4.3 p.
32 s. et les références citées).

Cependant, la jurisprudence a implicitement admis un tel automatisme et
considéré comme acquis l'existence d'un mobile discriminatoire dans l'affaire
dite du « mensonge d'Auschwitz » qui représente aujourd'hui l'expression d'un
antisémitisme extrême. Celui qui conteste ou remet en question l'existence des
chambres à gaz dans le contexte de l'extermination des juifs par le régime
national-socialiste donne, à tout le moins implicitement, l'impression que ce
régime n'était pas pire que d'autres et qu'il a fait en réalité beaucoup moins
de victimes que ce que l'on pense. Il porte une accusation plus ou moins voilée
de falsification de l'Histoire en faisant croire à une conjuration qui
profiterait aux victimes elles-mêmes (cf. ATF 145 précité consid. 4.3 p. 33 et
les références citées; arrêt 6S.420/1999 du 21 juin 2000 consid. 3b/bb non
publié in ATF 126 IV 176). Celui qui s'en prend à l'existence des chambres à
gaz est donc en principe guidé par un mobile discriminatoire.

1.4. Le recourant fait valoir que son journal, " B.________ ", se veut
ouvertement transgressif et polémique quels que soient les sujets divers et
variés abordés depuis plus de quarante ans. Le ton provocateur voire
caricatural des propos tenus ainsi que l'insolence des questions posées ne
visaient qu'à coller à l'esprit du journal et à distraire le lecteur qui
recherchait précisément ce style de publication en lisant un journal comme "
B.________ ", ce que la cour cantonale aurait dû prendre en considération. La
cour cantonale n'a non plus tenu compte du témoignage de E.________ qui a
notamment déclaré qu'elle n'avait pas connu le recourant comme quelqu'un de
discriminant ou haineux à l'égard d'un groupe de personnes et que celui-ci
avait tissé des liens paternels avec ses enfants. Pour ces raisons, il ne
pouvait être déduit des écrits litigieux une intention de discrimination
raciale de la part de son auteur, lequel n'avait jamais auparavant fait l'objet
d'une procédure pénale en raison de ses textes.

1.5. Il n'est pas nécessaire d'examiner si des exceptions à l'automatisme
sus-décrit en matière de mobile sont concevables (cf. consid. 1.3 supra, en
particulier l'arrêt 6S.420/1999 précité consid. 3b/bb). En effet, que les
articles incriminés s'inscrivent, par leur ton polémique, dans la ligne
éditoriale du périodique édité par le recourant, ne saurait de toute évidence
suffire à envisager une exception au principe selon lequel celui qui exprime
publiquement la théorie du " mensonge d'Auschwitz " est guidé par un mobile
discriminatoire. La volonté de remettre en cause les lieux communs, la pensée
unique, le politiquement correct, cela " dans le but de plaire à son public "
comme l'affirme le recourant, n'explique en aucune façon la diffusion d'une
thèse véhiculant la haine raciale. Comme la cour cantonale l'a constaté, le
recourant, qui avait publié les textes incriminés pendant près d'un an,
n'oeuvrait pas dans le cadre de recherches scientifiques sérieuses, ni dans
celui de débats politiques ou idéologiques dénués de haine. Enfin, la cour
cantonale n'est pas tombée dans l'arbitraire en n'attribuant pas d'importance
décisive au témoignage d'une proche du recourant, les textes incriminés étant
suffisamment parlants.

C'est, partant, sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a conclu que
le comportement du recourant était dicté par un mobile discriminatoire au sens
de l'art. 261bis al. 4 in fine CP.

2. 

Invoquant les art. 19 Pacte ONU II, 10 CEDH et 16 Cst., le recourant soutient
que sa condamnation pour discrimination raciale viole son droit fondamental à
la liberté d'expression.

2.1.

2.1.1. La liberté d'opinion est garantie : toute personne a le droit de former,
d'exprimer et de répandre librement son opinion (art. 16 al. 1 et 2 Cst.). Elle
peut toutefois faire l'objet de restrictions à la condition que celles-ci
soient fondées sur une base légale, qu'elles soient justifiées par un intérêt
public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui et qu'elles soient
enfin proportionnées au but visé (art. 36 Cst.). Au niveau international, la
liberté d'expression est garantie par l'art. 10 CEDH : elle comporte notamment
la liberté d'opinion et la liberté de communiquer des informations ou des idées
sans aucune ingérence de l'autorité publique et sans considération de frontière
(art. 10 ch. 1 CEDH). L'exercice de cette liberté peut être soumis à des
restrictions ou à des sanctions prévues par la loi qui constituent des mesures
nécessaires, dans une société démocratique, en particulier pour le maintien de
l'ordre public et la protection de la réputation ou des droits d'autrui (art.
10 ch. 2 CEDH). Nonobstant une formulation différente, l'art. 10 CEDH n'offre
pas au citoyen des droits plus larges que ceux qui sont garantis par la
Constitution fédérale (ATF 145 précité consid. 5.1 p. 33 s.; 117 Ia 472 consid.
3b p. 477).

2.1.2. L'ancienne Commission européenne des Droits de l'Homme avait été saisie,
sous l'angle de l'art. 10 CEDH, d'un certain nombre de requêtes portant sur la
négation de l'Holocauste et sur d'autres propos concernant les crimes nazis,
qu'elle avait toutes déclarées irrecevables (recensées dans l'arrêt de la
CourEDH Perinçek contre Suisse du 15 octobre 2015 [requête n° 27510/08] Recueil
CourEDH 2015 § 209). Dans l'affaire Marais en particulier, elle a retenu que
l'art. 10 CEDH ne pouvait être invoqué par l'auteur d'une publication qui, sous
couvert d'une démonstration technique, visait en réalité à remettre en cause
l'existence de l'usage de chambres à gaz pour une extermination humaine de
masse (Décision de la Commission européenne des Droits de l'Homme Marais c.
France du 24 juin 1996 [requête no 31159/96] D.R. 86, p. 194).

 Postérieurement au 1er novembre 1998, la CourEDH a elle aussi été saisie de
plusieurs requêtes de ce type, qu'elle a de la même manière déclarées
irrecevables (arrêts de la CourEDH Witzsch c. Allemagne du 20 avril 1999
[requête no 41448/98]; Schimanek c. Autriche 1er février 2000 [requête no 32307
/96]; Garaudy c. France du 24 juin 2003 [requête no 65831/01] CEDH 2003-IX;
Witzsch c. Allemagne du 13 décembre 2005 [requête no 7485/03]; Gollnisch c.
France du 7 juin 2011 [requête no 48135/08]). Ces affaires concernaient des
propos dont les auteurs niaient de différentes façons l'existence des chambres
à gaz, qualifiaient celles-ci d'« imposture » et l'Holocauste de « mythe »,
appelaient leur évocation le « business de la Shoah », des « mystifications à
des fins politiques » ou de la « propagande », ou contestaient le nombre de
personnes tuées et disaient de manière ambiguë que les chambres à gaz étaient
une question qui relevait des historiens (cf. arrêt de la CourEDH Perinçek §
210). Dans l'affaire Garaudy, relative notamment à la condamnation de l'auteur
d'un ouvrage remettant en cause de manière systématique des crimes contre
l'humanité commis par les nazis envers la communauté juive, la CourEDH a conclu
à l'incompatibilité rationae materiae avec les dispositions de la Convention du
grief qu'en tirait l'intéressé sur le terrain de l'art. 10 CEDH. Contester la
réalité de faits historiques clairement établis, tels que l'Holocauste, comme
le faisait le requérant dans son ouvrage, ne relevait en aucune manière d'un
travail de recherche historique s'apparentant à une quête de la vérité et
apparaissait comme l'une des formes les plus aiguës de diffamation raciale
envers les juifs et d'incitation à la haine à leur égard. La plus grande partie
du contenu et la tonalité générale de l'ouvrage du requérant, et donc son « but
», avaient un caractère négationniste marqué et allaient donc à l'encontre des
valeurs fondamentales de la Convention qu'étaient la justice et la paix; la
CourEDH en a déduit que le requérant tentait de détourner l'art. 10 CEDH de sa
vocation en utilisant son droit à la liberté d'expression à des fins contraires
à la lettre et à l'esprit de la Convention (arrêt de la CourEDH Garaudy § 1 i).

La CourEDH n'est pas parvenue à un résultat différent dans l'affaire Dieudonné
M'Bala M'Bala (arrêt de la CourEDH Dieudonné M'Bala M'Bala c. France du 20
octobre 2015 [requête n°25239/13]. L'humoriste Dieudonné avait donné, en 2008,
une représentation de son spectacle lors duquel il avait invité sur scène
Robert Faurisson, condamné en France à réitérées reprises notamment en raison
de ses thèses négationnistes consistant à nier l'existence des chambre à gaz
dans les camps de concentration des nazis (arrêt de la CourEDH M'Bala M'Bala §
8). La CourEDH a considéré que le requérant ne pouvait prétendre, dans les
circonstances particulières de l'espèce et au regard de l'ensemble du contexte
de l'affaire, avoir agi en qualité d'artiste ayant le droit de s'exprimer par
le biais de la satire, de l'humour et de la provocation. En effet, sous couvert
d'une représentation humoristique, il avait invité l'un des négationnistes
français les plus connus, condamné un an auparavant pour contestation de crime
contre l'humanité, pour l'honorer et lui donner la parole. En outre, dans le
cadre d'une mise en scène outrageusement grotesque, il avait fait intervenir un
figurant jouant le rôle d'un déporté juif des camps de concentration, chargé de
remettre un prix à Robert Faurisson. Dans cette valorisation du négationnisme à
travers la place centrale donnée à l'intervention de Robert Faurisson et dans
la mise en position avilissante des victimes juives des déportations face à
celui qui nie leur extermination, la CourEDH a vu une démonstration de haine et
d'antisémitisme, ainsi que la remise en cause de l'Holocauste. La CourEDH de
conclure, ici également, que l'expression d'une idéologie allant à l'encontre
des valeurs fondamentales de la Convention, telle que l'exprime son préambule,
à savoir la justice et la paix, ne relevait pas la protection de l'art. 10 CEDH
(arrêt de la CourEDH M'Bala M'Bala § 39-42).

2.2. Le cas d'espèce s'inscrit dans la ligne de l'affaire M'Bala M'Bala. Le
recourant a, à maintes reprises, manifesté son adhésion aux théories
négationnistes de Robert Faurisson et les a valorisées. Il a notamment traité
les victimes et les témoins des chambres à gaz du régime nazi de menteurs,
suggéré que ces " bobards " reposaient sur des intérêts financiers et tourné en
ridicule toute personne y accordant foi. Ainsi, sous couvert d'une prétendue
quête de vérité, le recourant a remis en cause la volonté du régime nazi de
procéder à une extermination humaine de masse et accusé de falsification de
l'Histoire les victimes elles-même. De cette manière, il a diffamé la
communauté juive et incité à la haine à leur égard (cf. consid. 2.1 supra).

Dès lors que les textes litigieux, tant dans leur contenu que dans leur style,
ont un caractère négationniste et antisémite marqué, la condamnation du
recourant constitue une ingérence nécessaire à la sauvegarde de l'intérêt
public (art. 16 Cst. cum 36 Cst.), respectivement une mesure nécessaire, dans
une société démocratique, pour le maintien de l'ordre public et la protection
de la réputation ou des droits d'autrui (art. 10 ch. 2 CEDH, cf. art. 19 al. 3
let. b Pacte ONU II). Par conséquent, le grief de violation de la liberté
d'expression est rejeté.

3. 

Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était
dépourvu de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être
rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais
judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de
sa situation financière.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.

4. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 29 mai 2019

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

La Greffière : Musy