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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.259/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_259/2019, 6B_286/2019

Arrêt du 2 avril 2019

Cour de droit pénal

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,

Oberholzer et Jametti.

Greffier : M. Graa.

Participants à la procédure

6B_259/2019

Ministère public de la République et canton de Neuchâtel,

recourant,

contre

X.________,

représenté par Me Freddy Rumo, avocat,

intimé,

et

6B_286/2019

X.________,

représenté par Me Freddy Rumo, avocat,

recourant,

contre

1. Ministère public de la République et canton de Neuchâtel,

2. A.________,

3. B.________,

4. C.________,

5. D.________,

tous les quatre représentés par

Me Pierre Heinis, avocat,

intimés,

Objet

6B_259/2019

Meurtre par dol éventuel (art. 111 CP),

6B_286/2019

Droit d'être entendu; arbitraire,

recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de
Neuchâtel du 13 novembre 2018 (CPEN.2018.36).

Faits :

A. 

Par jugement du 8 novembre 2017, le Tribunal criminel des Montagnes et du
Val-de-Ruz a condamné X.________, pour infractions à l'art. 90 al. 2 LCR en
lien avec l'art. 31 al. 1 LCR et pour homicide par négligence, à une peine
privative de liberté de 14 mois, avec sursis durant deux ans.

B. 

Par jugement du 13 novembre 2018, la Cour pénale du Tribunal cantonal de la
République et canton de Neuchâtel, statuant sur l'appel du ministère public et
sur l'appel joint formé par X.________ contre ce jugement, a réformé celui-ci
en ce sens que le prénommé est condamné à une peine privative de liberté de
deux ans, avec sursis durant deux ans.

La cour cantonale a retenu les faits suivants.

B.a. X.________ est né en 1990. Son casier judiciaire ne comporte pas
d'inscription.

Il ressort du registre administratif que le prénommé a conduit un cyclomoteur à
l'âge de 16 ans, alors qu'il n'avait pas de permis de conduire. En 2011, il a
été sanctionné par un avertissement pour un excès de vitesse. La même année,
son permis de conduire lui a été retiré pour une durée d'un mois pour un nouvel
excès de vitesse.

B.b. Le 1er septembre 2016, sur la route cantonale à E.________, X.________ se
rendait à son travail au volant de sa voiture. Durant ce trajet, il a manipulé
à diverses reprises son téléphone portable. A la hauteur de l'entreprise
F.________, il a bifurqué à gauche afin de gagner le parking de ladite
entreprise. Lors de cette manoeuvre, il n'a pas accordé la priorité à
G.________, qui circulait en sens inverse au guidon de son scooter. Ce dernier
a freiné énergiquement et a chuté sur la chaussée. Il a glissé sur plusieurs
mètres pour venir heurter, avec l'avant de son motocycle, la roue avant droite
et l'angle du pare-chocs du véhicule de X.________. G.________ s'est trouvé
coincé sous l'avant de l'automobile, laquelle lui a passé sur le corps et l'a
traîné sur une longueur de plus de 16 m avant de s'immobiliser contre la
bordure sise à droite du parking de l'entreprise F.________. G.________ est
décédé sur place.

C. 

Le Ministère public de la République et canton de Neuchâtel (ci-après :
recourant 1) forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral (6B_259/
2019) contre le jugement du 13 novembre 2018, en concluant, avec suite de
frais, principalement à sa réforme en ce sens que X.________ est condamné, pour
meurtre par dol éventuel et infraction grave à la LCR, à une peine privative de
liberté de cinq ans et demi. Subsidiairement, il conclut à son annulation et au
renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision.

X.________ (ci-après : recourant 2) forme également un recours en matière
pénale au Tribunal fédéral (6B_286/2019) contre le jugement du 13 novembre
2018, en concluant, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens
qu'il est condamné, pour homicide par négligence et violation simple des règles
de la circulation routière, à une peine pécuniaire ou à une peine privative de
liberté réduite et compatible avec le sursis à l'exécution. "Eventuellement",
il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente
pour nouvelle décision.

Considérant en droit :

1. 

Les deux recours en matière pénale au Tribunal fédéral sont dirigés contre la
même décision. Ils concernent le même complexe de faits et posent des questions
juridiques connexes. Il y a donc lieu de joindre les causes et de les traiter
dans un seul arrêt (art. 24 al. 2 PCF et 71 LTF).

I. Recours de X.________ (recourant 2)

2. 

Le recourant 2 fait grief à l'autorité précédente d'avoir violé son droit
d'être entendu en refusant l'administration de la preuve qu'il avait requise.

2.1. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur les
preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de
première instance. L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires.
Ainsi, la juridiction de recours administre, d'office ou à la demande d'une
partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours. Le
droit d'être entendu, consacré par l'art. 107 CPP, garantit aux parties le
droit de déposer des propositions relatives aux moyens de preuves (al. 1 let.
e). Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des
preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà
suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la
règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 Cst. en matière
d'appréciation anticipée des preuves (arrêts 6B_1280/2018 du 20 mars 2019
consid. 1.1; 6B_1025/2018 du 12 mars 2019 consid. 2.2; 6B_1093/2018 du 12
décembre 2018 consid. 1.1). Le refus d'instruire ne viole ainsi le droit d'être
entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen
de preuve offert, à laquelle le juge a procédé, est entachée d'arbitraire (ATF
141 I 60 consid. 3.3 p. 64; 136 I 229 consid. 5.3 p. 236).

2.2. Dans une ordonnance du 31 octobre 2018 (cf. pièce 470 du dossier
cantonal), l'autorité précédente a refusé de mettre en oeuvre l'expertise
technique réclamée par le recourant 2 afin de déterminer si les pages Internet
consultées durant le trajet ayant précédé l'accident auraient pu être affichées
sans manipulations de la part de l'intéressé. Elle a considéré que le dossier
de la cause comprenait divers rapports de la police scientifique concernant
l'utilisation du téléphone par le recourant 2 et qu'elle était, partant,
suffisamment renseignée sur ce point pour statuer.

2.3. Le recourant 2 suggère tout d'abord - sans présenter de véritable grief à
cet égard - que les rapports de la police scientifique manqueraient
d'impartialité ou n'auraient pas été rédigés avec la rigueur nécessaire. Ses
critiques tombent à faux, dès lors que les rapports en question se limitent
essentiellement à décrire les pages Internet affichées par le téléphone ainsi
que les heures correspondantes, aspects qui ne sont pas contestés par le
recourant 2. La seule question litigieuse était celle de savoir si le téléphone
aurait pu afficher les pages Internet consultées sans intervention de ce
dernier. La police scientifique a traité cet aspect dans son rapport
complémentaire du 25 octobre 2017 (cf. pièce 339 du dossier cantonal), dont il
ressort en substance que l'écran tactile du téléphone portable ne pouvait être
activé que par un élément électriquement conducteur d'électricité, comme le
corps humain, un objet métallique ou de l'eau, que les intervalles entre les
requêtes des différentes pages Internet étaient "humainement cohérents" et que
la phase de recherche sur le site Internet "H.________" et la phase de commande
avaient été entrecoupées par l'envoi de deux sms à la compagne du recourant 2,
si bien qu'il avait été nécessaire d'ouvrir à nouveau le navigateur afin
d'afficher le site précité. Le recourant 2 se borne pour sa part à soutenir que
sa version des événements serait plausible, sans expliquer en quoi une
expertise technique aurait permis d'invalider les conclusions du rapport de
police ou de confirmer ses allégations. Il ne démontre ainsi pas en quoi il
aurait été arbitraire, de la part de la cour cantonale, de considérer que les
éléments au dossier permettaient de retenir qu'il avait alors bien utilisé son
téléphone, sans qu'il soit besoin de mettre en oeuvre une expertise visant à
déterminer si un tel appareil était susceptible, sans intervention humaine,
d'afficher la succession de pages concernées. L'argumentation du recourant 2
revient, pour le reste, à contester l'établissement des faits par l'autorité
précédente, ce qu'il convient d'examiner dans le cadre de ce grief (cf. consid.
3 infra).

Enfin, dans la mesure où, en divers endroits de son mémoire de recours, le
recourant 2 affirme que l'instruction n'aurait pas été menée "à décharge", que
la cour cantonale aurait commis un déni de justice ou l'aurait privé d'un
procès équitable - sans préciser quelle mesure d'instruction aurait
spécifiquement été refusée par l'autorité précédente -, il ne présente aucun
grief recevable, répondant aux exigences de motivation découlant des art. 42
al. 2 et 106 al. 2 LTF.

3. 

Le recourant 2 reproche à la cour cantonale d'avoir apprécié les preuves et
établi les faits de manière arbitraire. Il se plaint en outre, à cet égard,
d'une violation du principe "in dubio pro reo".

3.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les
faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de
fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient
été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens
des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire
au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle
apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement
insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son
résultat (ATF 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244). Le Tribunal fédéral n'entre pas
en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 142 III 364 consid.
2.4 p. 368 et les références citées). La présomption d'innocence, garantie par
les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi
que son corollaire, le principe "in dubio pro reo", concernent tant le fardeau
de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345
consid. 2.2.3.1 p. 348 s.; 127 I 38 consid. 2a p. 40 s.). En tant que règle sur
le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de
la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu.
Comme règle d'appréciation des preuves (sur la portée et le sens précis de la
règle sous cet angle, cf. ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 p. 351 s.), la
présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu
de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif,
il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il
subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours
possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de
doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à
l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l'appréciation des
preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence au principe
"in dubio pro reo", celui-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de
l'arbitraire (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 p. 351 s.; 143 IV 500 consid. 1.1
p. 503; 138 V 74 consid. 7 p. 82).

3.2. La cour cantonale a exposé que, selon les données extraites du téléphone
portable du recourant 2, ce dernier avait appelé police-secours à 07:17:26.
L'appel avait été réceptionné par la centrale de police à 07:17:25 selon ses
propres données, de sorte que l'heure du téléphone et celle de police-secours
coïncidaient à une seconde près. Selon l'heure de la caméra de
vidéo-surveillance de l'entreprise F.________, l'accident s'était produit à
07:16:32. Le visionnement de la vidéo montrait que le recourant 2 avait composé
le numéro de police-secours à 07:17:09 et avait porté le téléphone à son
oreille à 07:17:11. Vers 07:17:20, la communication avec police-secours devait
être établie, ce qui ressortait des mouvements de tête du recourant 2. Compte
tenu de l'heure à laquelle la communication avait été établie selon la centrale
de police, soit 07:17:25, il existait une différence maximale de 5 secondes
entre l'heure de la police et l'heure affichée par la vidéo de surveillance.
Ainsi, au vu de ce décalage et en considérant comme exacte l'heure de la
centrale de police, l'accident avait eu lieu au plus tard à 07:16:37 (07:16:32
+ 5 secondes). Selon les données extraites du téléphone, le recourant 2 avait
envoyé deux sms à sa compagne à 07:12:47 puis 07:13:26. 3 minutes et 50
secondes s'étaient écoulées entre le premier sms et le choc, ou 3 minutes et 11
secondes entre le second sms et l'accident. La distance entre le point de
départ du recourant 2 et le point de choc était de 3,1 km et correspondait,
selon le site Internet "via Michelin", à un temps de trajet de 7 minutes. Selon
le site Internet "google", la distance était identique et le temps de trajet
était estimé à 6 minutes. Ainsi, il n'était pas possible que les sms fussent
envoyés avant que le recourant 2 eût circulé au volant de son véhicule pour
effectuer le trajet. L'intéressé n'avait pu accomplir le trajet en 3 minutes
comme il l'avait soutenu. Il aurait dû, dans cette hypothèse, circuler à plus
de 60 km/h, ce qui n'était pas compatible avec la configuration des lieux. Le
recourant 2 devait en particulier traverser cinq giratoires. La majeure partie
du trajet était située en zone urbaine, avec passage d'un feu, où la
circulation était limitée à 50 km/h. En outre, l'intéressé circulait à 20 km/h
à l'approche du lieu de l'accident, ce qui n'appuyait pas sa version des
événements, selon laquelle il aurait été pressé et aurait dépassé la vitesse
autorisée. Lors de ses premières auditions, le recourant 2 n'avait aucunement
déclaré avoir dépassé la vitesse prescrite, ni exclu avoir envoyé un sms après
avoir démarré. L'autorité précédente a ainsi retenu que les deux sms litigieux
avaient été écrits et envoyés alors que le recourant 2 circulait au volant de
son véhicule.

Concernant l'utilisation du téléphone portable par le recourant 2 entre
07:14:33 et le moment de l'accident, la cour cantonale a indiqué que, lors de
l'instruction, celui-ci avait admis avoir passé des commandes sur le site
Internet "H.________". Il avait aussi reconnu avoir envoyé un sms alors qu'il
conduisait et avait déclaré :

"Si les preuves sont là, c'est que j'étais sur internet."

L'autorité précédente a considéré que ces premières déclarations étaient plus
crédibles que les dénégations exprimées devant le tribunal de première
instance. En outre, le rapport de la police scientifique du 25 octobre 2017
permettait d'exclure une activité "spontanée" du téléphone portable, qui aurait
passé les commandes auprès du site d'achat par frottement de l'appareil sans
intervention du recourant 2. Un autre rapport, daté du 10 novembre 2016,
décrivait dans le détail l'activité de l'intéressé et les nombreuses
manipulations du téléphone portable accomplies pour se connecter au site
Internet, choisir un article et procéder au paiement par le site "I.________".
L'extraction des données avait révélé que la connexion avec le site
"H.________" avait eu lieu à 07:14:33, soit 2 minutes et 4 secondes avant
l'accident. La dernière connexion au site précité avait eu lieu à 07:16:22 et
le choc s'était produit au plus tard à 07:16:37. Selon la cour cantonale, de
nombreuses manipulations étaient nécessaires pour effectuer une commande sur le
site concerné puis payer celle-ci. Par ailleurs, le fait que le recourant 2 eût
parcouru, après le choc, une distance de 16,8 m avant de s'immobiliser
constituait un indice supplémentaire de son manque d'attention dans la
circulation.

3.3. Le recourant 2 développe une argumentation purement appellatoire et,
partant, irrecevable, par laquelle il rediscute intégralement l'appréciation
des preuves à laquelle s'est livrée la cour cantonale, sans démontrer en quoi
celle-ci serait arbitraire. L'intéressé soutient en substance qu'il aurait été
possible de parcourir la distance entre son point de départ et le lieu de
l'accident, soit 3,1 km, en 3 minutes, ce qui rendrait plausible sa version des
événements selon laquelle les deux sms n'auraient pas été envoyés à sa compagne
tandis qu'il conduisait. Ce faisant, le recourant 2 perd de vue que la solution
de l'autorité précédente ne saurait être qualifiée d'arbitraire parce qu'elle
reste discutable. Encore faudrait-il qu'elle s'avère manifestement
insoutenable, ce que l'intéressé ne démontre aucunement. Au demeurant, on ne
voit pas en quoi il aurait été arbitraire, pour la cour cantonale, de retenir
que le trajet en question, effectué vers 7 h un jour ouvrable et dans une zone
essentiellement urbaine, n'avait pu être accompli à une vitesse constante - et
pour partie excessive - de 60 km/h. L'envoi des deux sms en question confirme
que le recourant 2 manipulait son téléphone portable en conduisant. Le fait que
celui-ci eût utilisé cet appareil immédiatement avant l'accident a par ailleurs
été déduit de l'extraction des données du téléphone portable.

A cet égard, l'argumentation du recourant 2 s'avère derechef totalement
appellatoire et, partant, irrecevable. On ne voit pas en quoi la cour cantonale
aurait pu verser dans l'arbitraire en retenant que les pages Internet affichées
sur le téléphone portable durant le trajet en question avaient été sollicitées
par des manipulations de l'intéressé et non - comme le soutient ce dernier sur
la base de ses seules allégations - par l'effet d'un frottement ou d'un
pincement dans l'habitacle de son véhicule. Il apparaît sur ce point que le
téléphone a affiché une succession de pages Internet parfaitement cohérente,
correspondant à l'accès au site "H.________", à la connexion à un compte
client, à l'accès au panier d'achat, avec le choix d'un mode de livraison et
d'un mode de paiement, puis à la confirmation d'une commande, à la validation
de l'achat et enfin au lancement du processus de paiement par le biais du site
"I.________" (cf. pièce 196 du dossier cantonal). Il n'était nullement
insoutenable de retenir qu'une telle succession de commandes n'était pas
fortuite. Surtout, au cours de sa première audition devant le ministère public
- soit avant qu'il ne présentât ses suppositions concernant un trajet effectué
en un temps très réduit ou un fonctionnement de son téléphone portable
indépendant de son intervention -, le recourant 2 a reconnu avoir, le matin des
faits, utilisé cet appareil en conduisant. En effet, lorsqu'il lui a été
demandé à quels risques il avait exposé sa fille et les autres usagers de la
voie publique en conduisant tout en manipulant son téléphone, l'intéressé a
répondu ce qui suit (cf. pièce 113 du dossier cantonal) :

"Je me rendais bien compte que c'était dangereux. Je ne me suis pas rendu
compte sur le moment des risques que je prenais. Je n'étais pas à mon affaire
ce jour-là."

Ensuite, le recourant 2 a ajouté ce qui suit (cf. Ibidem) :

"J'avais bien conscience du risque de causer un accident mortel en utilisant un
téléphone tout en conduisant. Cela étant, le jour de l'accident, je n'étais
vraiment pas à mon affaire au vu des soucis que j'avais."

Compte tenu de ce qui précède, c'est sans arbitraire que la cour cantonale a
retenu que le recourant 2 manipulait son téléphone portable à l'approche de
l'entreprise F.________ et en particulier quelques secondes avant d'accomplir
la manoeuvre ayant entraîné la collision avec G.________.

L'autorité précédente pouvait également, sans arbitraire, écarter l'allégation
du recourant 2 selon laquelle il n'aurait pas aperçu le prénommé - au moment
d'obliquer à gauche - en raison d'un daltonisme et d'un déficit de vision en
trois dimensions. A cet égard, la cour cantonale a relevé que le daltonisme
était sans incidence sur le fait de pouvoir discerner un véhicule circulant en
sens inverse avec un phare allumé. Par ailleurs, le déficit partiel de la
vision en trois dimensions ne pouvait expliquer que l'intéressé n'eût pas
aperçu G.________, puisqu'il avait déclaré avoir bien vu les voitures qui
suivaient le scooter. En outre, le recourant 2 avait admis qu'il n'avait jamais
réalisé souffrir de problèmes de vue, ce qui avait été confirmé par des
proches. Le recourant 2 se contente sur ce point de prétendre - de manière
purement appellatoire - que ses problèmes de vue pourraient expliquer qu'il
n'eût pas aperçu le scooter circulant en sens inverse, sans démontrer en quoi
il aurait été insoutenable de retenir que tel n'était pas le cas.

En définitive, le grief doit être rejeté dans la faible mesure de sa
recevabilité.

4. 

Le recourant 2 soutient qu'il devrait être condamné, pour homicide par
négligence et violation simple des règles de la circulation routière, à une
peine pécuniaire, voire à une peine privative de liberté compatible avec le
sursis. La qualification juridique des faits évoquée - partiellement différente
de celle retenue par la cour cantonale - suppose une modification préalable de
l'état de fait, que le recourant 2 n'a pas obtenue (cf. consid. 3 supra).
Ainsi, l'intéressé ne présente, à cet égard, aucun grief recevable, reposant
sur l'état de fait ressortant du jugement attaqué, par lequel le Tribunal
fédéral est lié (cf. art. 105 al. 1 LTF).

II. Recours du ministère public (recourant 1)

5. 

Le recourant 1 soutient que la cour cantonale aurait dû condamner le recourant
2 pour meurtre par dol éventuel.

5.1. L'art. 111 CP punit d'une peine privative de liberté de cinq ans au moins
celui qui aura intentionnellement tué une personne. Selon l'art. 12 al. 2 CP,
agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience
et volonté. L'auteur agit déjà avec intention, sous la forme du dol éventuel,
lorsqu'il tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte pour
le cas où celle-ci se produirait.

Déterminer ce qu'une personne a su, envisagé, voulu ou accepté relève du
contenu de sa pensée, à savoir de faits "internes", partant, des constatations
de fait (ATF 142 IV 137 consid. 12 p. 152; 141 IV 369 consid. 6.3 p. 375). Est
en revanche une question de droit celle de savoir si l'autorité cantonale s'est
fondée sur une juste conception de la notion de dol éventuel et si elle l'a
correctement appliquée au vu des éléments retenus (ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3
p. 4 s.). Il y a dol éventuel lorsque l'auteur envisage le résultat dommageable
et agit, même s'il ne le souhaite pas, parce qu'il s'en accommode pour le cas
où il se produirait (ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3 p. 4). Parmi les éléments
extérieurs permettant de conclure que l'auteur s'est accommodé du résultat
dommageable pour le cas où il se produirait figurent notamment la probabilité,
connue par l'auteur, de la réalisation du risque et l'importance de la
violation du devoir de prudence. Plus celle-ci est grande, plus sera fondée la
conclusion que l'auteur, malgré d'éventuelles dénégations, a accepté
l'éventualité de la réalisation du résultat dommageable (ATF 138 V 74 consid.
8.4.1 p. 84; 135 IV 12 consid. 2.3.3 p. 18). Ainsi, le dol éventuel peut
notamment être retenu lorsque la réalisation du résultat devait paraître
suffisamment vraisemblable à l'auteur pour que son comportement ne puisse
raisonnablement être interprété que comme une acceptation de ce risque (ATF 137
IV 1 consid. 4.2.3 p. 4; 133 IV 222 consid. 5.3 p. 226).

En cas d'accidents de la circulation routière ayant entraîné des lésions
corporelles et la mort, le dol éventuel ne doit être admis qu'avec retenue,
dans les cas flagrants pour lesquels il résulte de l'ensemble des circonstances
que le conducteur s'est décidé en défaveur du bien juridiquement protégé. Par
expérience, on sait que les conducteurs sont enclins, d'une part, à
sous-estimer les dangers et, d'autre part, à surestimer leurs capacités, raison
pour laquelle ils ne sont pas conscients, le cas échéant, de l'étendue du
risque de réalisation de l'état de fait (ATF 133 IV 9 consid. 4.4 p. 20; arrêt
6B_987/2017 du 12 février 2018 consid. 3.1 et les références citées). En outre,
par sa manière risquée de conduire, un conducteur peut devenir sa propre
victime. C'est pourquoi, en cas de conduite dangereuse, par exemple en cas de
manoeuvre de dépassement téméraire, on admet en principe qu'un automobiliste,
même s'il est conscient des conséquences possibles et qu'il y a été rendu
formellement attentif, pourra naïvement envisager - souvent de façon
irrationnelle - qu'aucun accident ne se produira. L'hypothèse selon laquelle le
conducteur se serait décidé en défaveur du bien juridiquement protégé et
n'envisagerait plus une issue positive au sens de la négligence consciente ne
doit par conséquent pas être admise à la légère (ATF 130 IV 58 consid. 9.1.1 p.
64 s.; arrêt 6B_987/2017 précité consid. 3.1 et les références citées).

5.2. La cour cantonale a considéré qu'il était impossible de retenir que le
recourant 2 se serait décidé en faveur d'une issue fatale, qu'il aurait
envisagé le résultat de son acte comme possible et l'aurait accepté pour le cas
où il se produirait. La faute commise était certes grave puisque l'intéressé
avait circulé entre 07:14:33 et 07:16:37 en faisant usage de son téléphone
portable, à une heure où la circulation pouvait être importante. Le recourant 2
connaissait bien les lieux et le trajet qu'il empruntait quotidiennement depuis
six années. La visibilité était bonne et le trafic dense mais fluide. La
vitesse de son véhicule était plutôt lente au moment où le recourant 2 avait
obliqué à gauche et le clignoteur avait été enclenché. L'intéressé avait en
outre bien dû regarder devant lui pour savoir à quelle hauteur il convenait de
bifurquer à gauche, de sorte qu'il n'avait pas circulé totalement "à
l'aveugle". L'inattention dont avait fait preuve le recourant 2 relevait donc
de la négligence et il ne pouvait être retenu qu'une tournure fatale des
événements devait s'imposer à ce dernier avec une vraisemblance telle que son
comportement ne pouvait être raisonnablement interprété que comme l'acceptation
de ce résultat.

5.3. Le raisonnement de la cour cantonale ne prête pas le flanc à la critique.
Contrairement à ce qu'affirme le recourant 1, il ne ressort pas du jugement
attaqué que le recourant 2 aurait conduit "quasiment à l'aveugle" durant le
trajet ayant précédé l'accident, mais seulement qu'il a été distrait par
l'utilisation de son téléphone portable et qu'il n'a pas aperçu G.________ car
son attention n'était pas entièrement consacrée au trafic. Malgré cette
distraction, le recourant 2 a réduit sa vitesse à 20 km/h en approchant de
l'entreprise F.________ et a enclenché son indicateur de direction. Il a en
outre observé le trafic - à tout le moins brièvement - et remarqué les voitures
qui suivaient directement le scooter de G.________. Il n'apparaît donc pas - et
le recourant 1 ne conteste pas l'établissement des faits sur ce point - que le
recourant 2 aurait obliqué à gauche "à l'aveugle" (cf. arrêt 6B_411/2012 du 8
avril 2013), en laissant dépendre du hasard la survenance d'un usager de la
circulation en sens inverse et une éventuelle collision. Ainsi, malgré le
comportement négligent du recourant 2, on ne saurait considérer que la
perspective d'une collision devait lui paraître suffisamment vraisemblable pour
que la manoeuvre de changement de direction litigieuse dût être interprétée
comme une acceptation de ce risque.

En conséquence, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en refusant de
condamner le recourant 2 pour meurtre par dol éventuel.

L'argumentation du recourant 1 tendant au prononcé d'une peine privative de
liberté plus importante - supposant une condamnation du recourant 2 pour
meurtre par dol éventuel - est irrecevable.

III. Frais

6. 

Le recours du recourant 1 (6B_259/2019) doit être rejeté, tandis que le recours
du recourant 2 (6B_286/2019) doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable. Le recourant 2 supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF),
le recourant 1 n'ayant pas à en supporter (art. 66 al. 4 LTF). Les intimés, qui
n'ont pas été invités à se déterminer, ne sauraient prétendre à des dépens.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Les causes 6B_259/2019 et 6B_286/2019 sont jointes.

2. 

Le recours du ministère public (6B_259/2019) est rejeté.

3. 

Le recours de X.________ (6B_286/2019) est rejeté dans la mesure où il est
recevable.

4. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de X.________.

5. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal
cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 2 avril 2019

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

Le Greffier : Graa