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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.244/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_244/2019

Arrêt du 10 avril 2019

Cour de droit pénal

Composition

M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Jametti.

Greffière : Mme Klinke.

Participants à la procédure

X.________,

représenté par Me Pierre-Xavier Luciani, avocat,

recourant,

contre

1. Ministère public central du canton de Vaud,

2. A.________,

3. B.________,

4. C.________,

intimés.

Objet

Homicide par négligence; arbitraire; présomption d'innocence,

recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du
canton de Vaud du 27 novembre 2018 (n° 424 PE15.013658-AFE).

Faits :

A. 

Par jugement du 28 juin 2018, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
Lausanne a condamné X.________ à 60 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis
pendant 2 ans, pour homicide par négligence. Par ce même jugement, Y.________
et Z.________ ont été condamnés pour la même infraction. Le tribunal de
première instance les a condamnés, solidairement entre eux, au paiement
d'indemnités à titre de tort moral en faveur de A.________, B.________ et
C.________, respectivement parents et fils du défunt, ainsi qu'au remboursement
des frais de déplacement et des frais d'obsèques.

B. 

Par jugement du 27 novembre 2018, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté les appels formés par X.________, Y.________ et Z.________ et
a confirmé le jugement de première instance.

En substance, le jugement repose sur les faits suivants.

En 2015, l'entreprise D.________ SA, active depuis 2010 dans le domaine de
travaux de construction, a été mandatée afin d'effectuer certains travaux de
transformation d'une villa à E.________. X.________, directeur de la société
D.________ SA, avait la responsabilité du suivi des chantiers et de la
formation des employés de l'entreprise. Il était également chargé de faire
appliquer les normes de sécurité établies par la SUVA, mais n'avait pas informé
ses employés de celles-ci, ni établi de directives en ce sens. Y.________ était
le responsable/technicien de chantier et Z.________ le contremaître.

Le 13 juillet 2015, vers 11h30, F.________ et G.________, employés, et
Z.________ étaient occupés à creuser une fouille pour remplacer une
canalisation des eaux usées à proximité de la villa. La fouille, d'une largeur
de 80 cm, atteignait une profondeur en rigole d'environ 260 cm au niveau de la
rue et était profonde de 190 cm à l'endroit de l'événement. G.________ était
aux commandes d'une pelle rétro de 2,8 tonnes et creusait la fouille
verticalement. Celle-ci n'était pas étayée et aucune mesure n'avait été prise
contre le risque d'effondrement des parois. Une partie des gravats était
chargée sur une camionnette stationnée à 90/100 cm du bord droit de la fouille.
Les autres gravats étaient entreposés sur le côté gauche de la fouille.
F.________ et Z.________ se trouvaient debout, entre la camionnette et le bord
droit de la fouille, en attendant de pouvoir installer des panneaux de bois
pour sécuriser les parois de la tranchée. Soudain, la terre de la berge située
du côté de la camionnette s'est effondrée. F.________ a été entraîné vers le
fond de la fouille, le sol se dérobant sous ses pieds. Il a été presque
entièrement enseveli sous les gravats et a d'emblée perdu connaissance.
F.________ est décédé d'un polytraumatisme extrêmement sévère, combiné à une
asphyxie mécanique.

Dans un rapport du 15 juillet 2015, les experts de la SUVA ont conclu que
l'accident était dû à une absence d'étayage et à un manquement au niveau de la
formation du personnel. Ils ont relevé que le terrain était de mauvaise qualité
et que du matériel d'étayage non adéquat, composé de panneaux de coffrage, se
trouvait sur le chantier.

Il ressort d'une expertise technique du 13 février 2017, que la fouille aurait
dû être étayée au plus tard à 150 cm de profondeur et que les emplacements de
la camionnette du côté droit de la fouille ainsi que de la terre extraite du
côté gauche de la fouille ne respectaient pas les règles de sécurité. Les
experts ont exposé que l'affaiblissement progressif du terrain et son
effondrement subséquent avaient été provoqués par les allées et venues de la
camionnette et par la surcharge du poids des deux ouvriers positionnés entre la
camionnette et le bord de la fouille. Ils ont relevé que l'effondrement s'était
produit brusquement, sans signe avant-coureur visible, ce qui était
caractéristique d'un sol sablo-graveleux tel que celui de la parcelle
concernée, et que le matériel d'étayage qui devait être installé n'était pas
conforme.

C. 

X.________ forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral contre
le jugement cantonal. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à sa réforme
en ce sens qu'il est libéré du chef d'accusation d'homicide par négligence et
des condamnations en paiement.

Considérant en droit :

1. 

Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir violé son droit d'être
entendu en ne réadministrant pas les preuves en appel. Il invoque une violation
des art. 29 al. 2 Cst., 343, 389 et 405 CPP.

1.1. Aux termes de l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur
les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de
première instance. Ce principe n'est toutefois applicable que si les preuves
sur lesquelles l'autorité de recours veut s'appuyer ont été administrées
conformément aux règles de procédure (ATF 143 IV 288 consid. 1.4.1 p. 290).
L'administration des preuves du tribunal de première instance doit ainsi être
répétée par l'autorité d'appel si les dispositions en matière de preuves ont
été enfreintes, l'administration des preuves était incomplète ou les pièces
relatives à l'administration des preuves ne semblent pas fiables (art. 389 al.
2 CPP; ATF 143 IV 288 consid. 1.4.1 p. 290). L'administration directe du moyen
de preuve doit également être réitérée durant la procédure orale d'appel
conformément aux art. 343 al. 3 CPP, applicable par renvoi de l'art. 405 al. 1
CPP à la procédure d'appel, lorsque la connaissance directe du moyen de preuve
apparaît nécessaire au prononcé du jugement (ATF 143 IV 288 consid. 1.4.1 p.
290; arrêt 6B_1469/2017 du 18 juin 2018 consid. 1.3). Tel est le cas si la
force du moyen de preuve dépend de manière décisive de l'impression suscitée au
moment de sa présentation, notamment quand des déclarations constituent
l'unique moyen de preuve - à défaut de tout autre indice - et qu'il existe une
situation de " déclarations contre déclarations " (cf. ATF 140 IV 196 consid.
4.4.2 p. 199 s.; arrêts 6B_535/2018 du 15 novembre 2018 consid. 4.1; 6B_800/
2016 du 25 octobre 2017 consid. 9.2 non publié à l'ATF 143 IV 397). Le juge
dispose d'un pouvoir d'appréciation afin de déterminer si la réadministration
de la preuve, par lui, est nécessaire (ATF 140 IV 196 consid. 4.4.2 p. 199 s.;
arrêt 6B_800/2016 du 25 octobre 2017 consid. 9.2 non publié à l'ATF 143 IV
397).

Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst.,
n'accorde pas de droits plus étendus en matière d'administration de preuves que
ceux découlant des art. 343 et 389 CPP (arrêts 6B_1469/2017 du 18 juin 2018
consid. 1.3; 6B_1251/2014 du 1er juin 2015 consid. 1.4) ou de la maxime de
l'instruction (arrêts 6B_1266/2018 du 12 mars 2019 consid. 1.3; 6B_128/2018 du
8 février 2019 consid. 3.2).

1.2. Il ressort expressément du jugement entrepris que le recourant a été
entendu en appel. Il a alors confirmé les déclarations faites durant l'enquête
et en première instance et a affirmé n'avoir " rien de nouveau à dire " 
(jugement entrepris, p. 5). Aucune requête d'administration de preuve n'a été
formulée (jugement entrepris, p. 4 et 8). Le recourant ne prétend ni ne tente
de démontrer que l'administration des preuves était incomplète ou que la
connaissance directe de certains moyens de preuve apparaissait nécessaire. La
condamnation repose sur l'appréciation de plusieurs moyens de preuve, non de
deux déclarations contradictoires. En tant que le recourant se contente
d'affirmer que la cour cantonale aurait dû faire administrer des preuves
complémentaires, sans autre développement, son moyen est irrecevable. En
définitive, faute pour le recourant d'indiquer en quoi la cour cantonale aurait
violé les dispositions relatives à l'administration des preuves en appel, il
n'y a pas lieu d'entrer en matière sur ce point (art. 42 al. 2 LTF).

2. 

Le recourant conteste sa condamnation du chef d'homicide par négligence. Il
estime que l'autorité précédente a établi certains faits de la cause de manière
arbitraire et contraire à la présomption d'innocence. Il invoque une violation
de l'art. 117 CP.

2.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les
faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de
fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient
été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens
des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon
arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul
fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit
manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi
dans son résultat (ATF 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244). En matière
d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire
que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un
élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe
manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur
les éléments recueillis, elle en tire des conclusions insoutenables (ATF 143 IV
500 consid. 1.1 p. 503; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266 et les références
citées). Le Tribunal fédéral n'entre ainsi pas en matière sur les critiques de
nature appellatoire (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368). La présomption
d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU
II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe " in dubio pro reo
", concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF
127 I 38 consid. 2a p. 40 s.). Lorsque l'appréciation des preuves et la
constatation des faits sont critiquées en référence au principe " in dubio pro
reo ", celui-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire
(ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3 p. 348 ss; 138 V 74 consid. 7 p. 82).

2.2. Aux termes de l'art. 117 CP, celui qui, par négligence, aura causé la mort
d'une personne sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus
ou d'une peine pécuniaire. Selon l'art. 12 al. 3 CP, agit par négligence
quiconque, par une imprévoyance coupable, commet un crime ou un délit sans se
rendre compte des conséquences de son acte ou sans en tenir compte.
L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas usé des précautions
commandées par les circonstances et par sa situation personnelle. Une
condamnation pour homicide par négligence au sens de l'art. 117 CP suppose
ainsi la réalisation de trois éléments constitutifs, à savoir le décès d'une
personne, une négligence, ainsi qu'un rapport de causalité naturelle et
adéquate entre les deux premiers éléments (ATF 122 IV 145 consid. 3 p. 147; cf.
arrêts 6B_704/2018 du 2 novembre 2018 consid. 4.1; 6B_1371/2017 du 22 mai 2018
consid. 1.1).

Deux conditions doivent être remplies pour qu'il y ait négligence. En premier
lieu, il faut que l'auteur viole les règles de la prudence, c'est-à-dire le
devoir général de diligence institué par la loi pénale, qui interdit de mettre
en danger les biens d'autrui pénalement protégés contre les atteintes
involontaires. Un comportement dépassant les limites du risque admissible viole
le devoir de prudence s'il apparaît qu'au moment des faits, son auteur aurait
dû, compte tenu de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte de
la mise en danger d'autrui (ATF 136 IV 76 consid. 2.3.1 p. 79). Pour déterminer
le contenu du devoir de prudence, il faut donc se demander si une personne
raisonnable, dans la même situation et avec les mêmes aptitudes que l'auteur,
aurait pu prévoir, dans les grandes lignes, le déroulement des événements et,
le cas échéant, quelles mesures elle pouvait prendre pour éviter la survenance
du résultat dommageable (ATF 134 IV 255 consid. 4.2.3 p. 262 et les références
citées). Lorsque des prescriptions légales ou administratives ont été édictées
dans un but de prévention des accidents, ou lorsque des règles analogues
émanant d'associations spécialisées sont généralement reconnues, leur violation
fait présumer la violation du devoir général de prudence (ATF 143 IV 138
consid. 2.1 p. 140; 135 IV 56 consid. 2.1 p. 64; 134 IV 255 consid. 4.2.3 p.
262). S'il y a eu violation des règles de la prudence, encore faut-il que
celle-ci puisse être imputée à faute, c'est-à-dire que l'on puisse reprocher à
l'auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, d'avoir fait preuve
d'un manque d'effort blâmable (ATF 134 IV 255 consid. 4.2.3 p. 262 s.).

Il faut ensuite qu'il existe un rapport de causalité entre la violation fautive
du devoir de prudence et le décès de la victime.

3. 

Le recourant conteste avoir violé son devoir de prudence en n'instruisant pas
suffisamment ses ouvriers sur les règles de sécurité concernant les travaux de
fouilles et en délégant la sécurité du chantier à Y.________. Il reproche à la
cour cantonale d'avoir fait preuve d'arbitraire dans l'établissement des faits
sur ces points.

3.1. En l'occurrence, il est reproché au recourant d'avoir violé son devoir de
prudence par le fait d'un comportement passif contraire à une obligation d'agir
(art. 11 al. 1 CP).

Reste passif en violation d'une obligation d'agir celui qui n'empêche pas la
mise en danger ou la lésion d'un bien juridique protégé par la loi pénale bien
qu'il y soit tenu à raison de sa situation juridique. L'art. 11 al. 2 CP
énumère plusieurs sources pouvant fonder une position de garant, à savoir la
loi, un contrat, une communauté de risques librement consentie ou la création
d'un risque. N'importe quelle obligation juridique ne suffit pas. Il faut
qu'elle ait découlé d'une position de garant, c'est-à-dire que l'auteur se soit
trouvé dans une situation qui l'obligeait à ce point à protéger un bien
déterminé contre des dangers indéterminés (devoir de protection), ou à empêcher
la réalisation de risques connus auxquels des biens indéterminés étaient
exposés (devoir de surveillance), que son omission peut être assimilée au fait
de provoquer le résultat par un comportement actif (cf. art. 11 al. 2 et 3 CP;
ATF 141 IV 249 consid. 1.1 p. 251 s.; 134 IV 255 consid. 4.2.1 p. 259 s.;
arrêts 6B_315/2016 du 1er novembre 2016 consid. 4.1; 6B_614/2014 du 1er
décembre 2014 consid. 1).

3.2. Selon l'art. 3 al. 5 de l'ordonnance sur la sécurité et la protection de
la santé des travailleurs dans les travaux de construction (OTConst; RS
832.311.141), l'employeur qui exécute des travaux de construction doit veiller
à ce que matériel, installations et appareils adéquats soient disponibles à
temps et en quantité suffisante. Ils doivent être en parfait état de
fonctionnement et satisfaire aux exigences de la sécurité au travail et de la
protection de la santé. A teneur de l'art. 4 al. 1 OTConst, l'employeur doit
désigner sur chaque chantier une personne compétente chargée de la sécurité au
travail et de la protection de la santé; cette personne peut donner des
directives en la matière aux travailleurs. L'art. 55 OTConst fixe des règles de
sécurité en matière de fouilles en particulier. Celles-ci doivent être
aménagées de manière que la chute ou l'éboulement de matériaux ne mette
personne en danger (al. 1). Les fouilles de plus de 1m50 de profondeur qui ne
sont pas étayées doivent être talutées ou assurées par d'autres mesures
adéquates (cf. al. 2). Les bords de la fouille doivent être libres sur au moins
50 cm de largeur lorsqu'elle est étayée ou sur au moins 1m lorsqu'il y a un
talus (al. 5).

Selon l'art. 3 al. 1 de l'ordonnance sur la prévention des accidents et des
maladies professionnelles (OPA; RS 832.30), l'employeur est tenu, pour assurer
et améliorer la sécurité au travail, de prendre toutes les dispositions et
mesures de protection qui répondent aux prescriptions de la présente
ordonnance, aux autres dispositions sur la sécurité au travail applicables à
son entreprise et aux règles reconnues en matière de technique de sécurité et
de médecine du travail. L'employeur doit veiller à ce que l'efficacité des
mesures et des installations de protection ne soit pas entravée. Il les
contrôle à intervalles appropriés (al. 2). A teneur de l'art. 6 OPA,
l'employeur veille à ce que tous les travailleurs occupés dans son entreprise,
y compris ceux provenant d'une entreprise tierce, soient informés de manière
suffisante et appropriée des risques auxquels ils sont exposés dans l'exercice
de leur activité et instruits des mesures de sécurité au travail. Cette
information et cette instruction doivent être dispensées lors de l'entrée en
service ainsi qu'à chaque modification importante des conditions de travail;
elles doivent être répétées si nécessaire (al. 1). Les travailleurs doivent
être renseignés sur les tâches et les fonctions des spécialistes de la sécurité
au travail occupés dans l'entreprise (al. 2). L'employeur veille à ce que les
travailleurs observent les mesures relatives à la sécurité au travail (al. 3).
Selon l'art. 7 al. 1, 1ère phrase, OPA, lorsque l'employeur confie à un
travailleur certaines tâches relatives à la sécurité au travail, il doit le
former de manière appropriée, parfaire sa formation et lui donner des
compétences précises et des instructions claires. Le fait de confier de telles
tâches à un travailleur ne libère pas l'employeur de ses obligations d'assurer
la sécurité au travail (al. 2). L'art. 8 al. 1 OPA prévoit que l'employeur ne
peut confier des travaux comportant des dangers particuliers qu'à des
travailleurs ayant été formés spécialement à cet effet. L'employeur fera
surveiller tout travailleur qui exécute seul un travail dangereux.

Il ressort de la " liste de contrôle concernant les fouilles et terrassements
", éditée en février 2014 par la SUVA, que les fouilles de plus de 1,50 m de
profondeur doivent être talutées, étayées ou assurées par d'autres mesures
adéquates (ch. 4). S'agissant de l'organisation et de la formation, il faut
veiller à ce que le personnel soit régulièrement informé sur les risques
spécifiques aux fouilles (notamment être enseveli) et le personnel
d'encadrement doit contrôler le respect des règles en vigueur (ch. 24).

Dans un document intitulé " Sécurité dans les travaux de fouilles " (cf. pièce
108 du dossier), le Bureau pour la Sécurité au travail, géré par la Société
suisse des entrepreneurs, pose comme règles de base, lorsque le terrain est
instable (ex: mauvaise qualité du sol) ou qu'il est rendu instable (ex:
surcharge), de taluter ou étayer, même si la fouille a moins de 1m50 de
profondeur (ch. 2). Aucune machine (ex: pelle, camion) ne doit se situer à
moins d'un mètre du bord de la fouille si celle-ci n'est pas étayée. La
surcharge peut entraîner un éboulement (ch. 6).

3.3. La cour cantonale a retenu que le recourant avait laissé ses
collaborateurs dans l'ignorance des normes de sécurité concernant le travail de
fouille. Selon le jugement entrepris, le recourant avait admis n'avoir donné à
ses employés aucune formation particulière s'agissant des règles de sécurité.
Il ignorait si Y.________ avait déjà participé à des travaux de fouille,
s'étant fondé sur le CV de ce dernier pour considérer qu'il était qualifié
comme conducteur de travaux responsable de la sécurité. Il avait également
reconnu n'avoir pas informé ses employés s'agissant de la profondeur d'une
fouille nécessitant un étayage et des distances de sécurité aux abords de la
fouille. Bien qu'au bénéfice d'une formation d'architecte acquise au Portugal,
Y.________ avait confirmé qu'il n'avait jamais suivi de formation concernant
les normes suisses de sécurité sur les chantiers. Il n'avait ainsi pas été en
mesure d'indiquer au chef d'équipe, Z.________, quel matériel il fallait
prendre pour l'étayage et n'avait donné aucune instruction sur la pose du
matériel d'étayage. Y.________ avait en outre admis qu'il ignorait s'il était
possible ou non d'utiliser des panneaux de coffrage pour étayer la fouille.

Sur cette base, la cour cantonale a considéré que le recourant ne pouvait pas
se prévaloir de la délégation de la sécurité à Y.________, puisque celui-ci
était de toute évidence incompétent en la matière. Il apparaissait, aux yeux
des juges cantonaux, que les questions de sécurité étaient négligées au sein de
l'entreprise du recourant et que le processus accidentel ayant conduit au décès
de la victime résultait d'une accumulation d'ignorances sur les règles de
sécurité de l'étayage, allant du responsable de la sécurité jusqu'à l'ouvrier,
en passant par le contremaître ou le chef d'équipe. En sa qualité de directeur
de la société mandatée pour les travaux, le recourant avait une position de
garant vis-à-vis de ses employés et le devoir de les former ou de veiller à
leur formation sur les règles de sécurité, ce qu'il n'avait pas fait. Son
absence le jour du sinistre ne l'exonérait pas de sa responsabilité quant aux
carences organisationnelles de son entreprise, à l'origine de l'accident mortel
(jugement cantonal consid. 2.3 p. 19 s.).

3.4. Le recourant ne remet pas en cause les conclusions des expertises. Il se
contente de reproduire certaines de ses déclarations aux débats et celles des
employés, sans tenter de démontrer dans quelle mesure la cour cantonale les
aurait appréciées arbitrairement ou en aurait tiré des conclusions
insoutenables. Faute de remplir les exigences de motivation déduites de l'art.
106 al. 2 LTF, son argumentation est irrecevable. En tout état, dans la mesure
où il est établi que Y.________ n'était pas en mesure d'indiquer quel matériel
était nécessaire à l'étayage, peu importe qu'il soit titulaire d'un diplôme
d'architecte, qu'il ait appris les règles de sécurité sur le chantier, qu'il
fut au courant de l'obligation d'étayer dès 1,50 m et qu'il se soit senti
responsable d'informer des consignes de sécurité. L'expérience de Z.________ en
qualité de maçon et celle de la victime, engagée depuis environ 3 mois par le
recourant (jugement de première instance, p. 6) ne sont pas davantage
pertinentes. En effet, ces éléments sont inaptes à démontrer l'arbitraire de la
constatation selon laquelle le recourant n'a pas informé ni instruit les
travailleurs s'agissant des mesures de sécurité, pas plus qu'il n'a formé
Y.________ en lui confiant des tâches relatives à la sécurité. Pour le surplus,
le fait que la victime ait, selon son père, parfois fait des fouilles avec une
pelle retro au Portugal (jugement de première instance, p. 33) ne permet pas de
démontrer l'arbitraire de la constatation selon laquelle il ignorait les règles
de sécurité en matière de fouilles.

En l'espèce, il est établi et incontesté que le recourant, directeur de la
société en charge des travaux, avait la responsabilité du suivi des chantiers,
de la formation des employés et de l'application des normes de sécurité
établies par la SUVA. Sa position de garant l'obligeait à protéger ses employés
sur les chantiers et à empêcher la réalisation des risques liés aux travaux de
construction, cela en vertu des prescriptions légales et règles analogues
édictées afin de prévenir les accidents (cf. supra consid. 3.2). Or, d'après
les faits établis, dont l'arbitraire n'a pas été démontré, le recourant n'a pas
formé spécifiquement le responsable/technicien du chantier, ni le contremaître
et s'est abstenu d'indiquer à ses employés les règles de base de sécurité dans
les travaux de fouille, notamment s'agissant de l'étayage et de la distance
imposée par la surcharge due aux engins. Il ne s'est pas assuré de l'adéquation
du matériel d'étayage ni de la sécurisation des travaux de fouille. Il ne s'est
pas assuré de l'expérience professionnelle de la victime (jugement de première
instance, p. 6). Il a confié certaines tâches à Y.________ et Z.________ sans
les former et sans leur donner d'instructions claires, alors qu'ils ignoraient
quel matériel était adéquat. Il a ainsi violé plusieurs règles en rapport
direct avec l'accident fatal (cf. supra consid. 3.2). Compte tenu de ses
circonstances personnelles, le recourant n'a pas déployé l'attention et les
efforts que l'on pouvait attendre de lui, au contraire, il a fait preuve d'une
négligence fautive.

Certes, il ressort de l'arrêt publié aux ATF 104 IV 96, auquel se réfère le
recourant, qu'un responsable des travaux peut confier à un collaborateur
expérimenté et capable la tâche d'instruire et de surveiller directement les
ouvriers sur un de ces chantiers afin d'éviter les risques d'accident.
Toutefois, à teneur de ce même arrêt, l'obligation de procéder avec la
diligence voulue au choix, à l'information et à la surveillance de son
personnel reste à sa charge. Au surplus, il est précisé qu'en l'espèce, le
recourant ne s'est pas assuré de l'expérience et des capacités de Y.________ et
ne l'a pas formé ni ne lui a donné d'instructions claires.

Le recourant ne saurait rien déduire en sa faveur de l'arrêt publié aux ATF 117
IV 130, dont il ressort que, lorsqu'un ouvrier sait ce qu'il doit faire et y
renonce, l'employeur ne peut pas être automatiquement rendu responsable sur le
plan pénal. En effet, dans l'arrêt précité, le grutier savait quelles étaient
les manoeuvres à entreprendre pour éviter un accident, ce qui n'est pas le cas
en l'espèce (jugement entrepris consid. 2.3 p. 20).

Par conséquent, c'est sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a
reconnu que le recourant avait violé de manière fautive son devoir de prudence.

4. 

Le recourant conteste l'existence d'un lien de causalité entre ses manquements
et le décès de la victime. Il se prévaut d'une rupture du lien de causalité.

4.1. Les concepts de causalité naturelle et adéquate ont été rappelés récemment
aux ATF 143 III 242 consid. 3.7 p. 249 s. et ont notamment été précisés aux ATF
133 IV 158 consid. 6.1 p. 167 s. et 131 IV 145 consid. 5 p. 147 ss, auxquels on
peut se référer. Selon la jurisprudence, il y a rupture du lien de causalité
adéquate, l'enchaînement des faits perdant sa portée juridique, lorsque une
autre cause concomitante - par exemple une force naturelle, le comportement de
la victime ou celui d'un tiers - propre au cas d'espèce constitue une
circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on
ne pouvait pas s'y attendre. Cependant, cette imprévisibilité de l'acte
concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le lien de causalité adéquate. Il
faut encore que cet acte ait une importance telle qu'il s'impose comme la cause
la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à
l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à amener celui-ci,
notamment le comportement de l'auteur (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.2 p. 265 s.;
133 IV 158 consid. 6.1 p. 168; 131 IV 145 consid. 5.2 p. 148; cf. aussi ATF 143
III 242 consid. 3.7 p. 250).

En cas de violation du devoir de prudence par omission, il faut procéder par
hypothèse et se demander si l'accomplissement de l'acte omis aurait, selon le
cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, évité la survenance du
résultat qui s'est produit, pour des raisons en rapport avec le but protecteur
de la règle de prudence violée. Pour l'analyse des conséquences de l'acte
supposé, il faut appliquer les concepts généraux de la causalité naturelle et
de la causalité adéquate (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.1 p. 265). L'existence de
cette causalité dite hypothétique suppose une très grande vraisemblance;
autrement dit, elle n'est réalisée que lorsque l'acte attendu ne peut pas être
inséré intellectuellement dans le raisonnement sans en exclure, très
vraisemblablement, le résultat (ATF 116 IV 182 consid. 4a p. 185; arrêt 6B_177/
2017 du 6 septembre 2017 consid. 4.1). La causalité adéquate est ainsi exclue
lorsque l'acte attendu n'aurait vraisemblablement pas empêché la survenance du
résultat ou lorsqu'il serait simplement possible qu'il l'eût empêché (arrêts
6B_948/2017 du 8 mars 2018 consid. 4.1; 6B_177/2017 du 6 septembre 2017 consid.
4.1).

4.2. Se fondant sur les observations des experts, la cour cantonale a retenu
que l'étayage de la fouille était absolument indispensable à partir de la
profondeur de 1,50 m et qu'il était évident que si cette mesure de sécurité
avait été prise, le décès de la victime ne se serait pas produit. La cour
cantonale a également retenu que la distance entre le bord de la fouille et la
camionnette n'était pas suffisante.

4.3. Sur la base des faits établis, la formation des employés et la
surveillance des mesures de sécurité de la fouille (étayage et distance
minimale) auraient selon toute vraisemblance empêché l'ensevelissement de la
victime. Si le recourant avait correctement formé ses employés et s'était
assuré que les moyens adéquats étaient disponibles et mis en oeuvre pour
sécuriser la fouille, l'accident aurait, avec une vraisemblance confinant à la
certitude, pu être évité. Aussi, c'est sans violer le droit fédéral que la cour
cantonale a admis la causalité adéquate.

Le recourant souligne le passage de l'expertise selon lequel l'effondrement
s'est produit brusquement, " sans signe avant-coureur visible, ce qui est
caractéristique d'un sol sablo-graveleux ". Il estime que la fatalité ne
pouvait être exclue en tant que cause de survenance de l'accident (mémoire de
recours ch. 6 p. 7). Or le caractère soudain de l'effondrement et la qualité du
sol ne sauraient être qualifiées d'imprévisibles, dès lors que les normes de
l'OTConst et les directives précitées visent précisément à éviter les risques
liés aux fouilles, quel que soit le type de sol (cf. en particulier pièce 108
ch. 2). En tout état, il est rappelé que si l'expertise relève l'absence de
signe avant-coureur visible de l'effondrement, elle précise que cela est
caractéristique du sol en question et exclut ainsi l'imprévisibilité de
l'événement en l'espèce.

Par ailleurs, le recourant semble invoquer la faute concomitante de ses
employés. C'est en vain qu'il se réfère à l'arrêt publié aux ATF 113 IV 58,
traitant de la coactivité dans une affaire d'homicide par négligence, dès lors
qu'il lui est reproché d'avoir réalisé, par ses seuls agissements, les éléments
constitutifs de l'infraction. Par ailleurs, l'existence de causes concomitantes
ne suffit pas à interrompre le lien de causalité entre les omissions du
recourant et le décès de la victime, étant précisé qu'il n'existe pas de
compensation des fautes en droit pénal (ATF 122 IV 17 consid. 2c/bb p. 24).
Aussi, les fautes des autres travailleurs invoquées par le recourant ne
l'exonèrent pas de ses propres manquements. Enfin, il ressort expressément de
l'arrêt publié aux ATF 104 IV 96, mis en exergue par le recourant, que le
concours des fautes de l'entrepreneur et de la victime de l'accident n'exclut
pas la faute de la direction des travaux (cf. consid. 4).

Cela étant, c'est à bon droit que la cour cantonale a écarté toute rupture du
lien de causalité.

5. 

Le recourant ne développe aucun grief contre sa condamnation au paiement
d'indemnités en faveur des proches de la victime, indépendamment de ses
conclusions en acquittement. Au vu du sort du recours, il n'y a pas lieu
d'entrer en matière sur ce point.

6. 

En définitive, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 10 avril 2019

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

La Greffière : Klinke