Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.1284/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_1284/2019

Arrêt du 28 février 2020

Cour de droit pénal

Composition

M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président,

Jacquemoud-Rossari et van de Graaf.

Greffière : Mme Paquier-Boinay.

Participants à la procédure

A.________,

représenté par Me Michaël Aymon, avocat,

recourant,

contre

1. Ministère public central du canton du Valais,

2. B.________,

intimés.

Objet

Contrainte sexuelle, viol; arbitraire, principe in dubio pro reo,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais Cour pénale
II du 7 octobre 2019 (P1 19 37).

Faits :

A. 

Par jugement du 20 mars 2019, le Tribunal du IIIème arrondissement pour le
district de Martigny a constaté que l'action pénale ouverte contre A.________
pour actes d'ordre sexuel avec des enfants était éteinte par prescription. Il a
en revanche reconnu A.________ coupable de contrainte sexuelle et de viol et
l'a condamné à une peine privative de liberté de 8 ans ainsi qu'à verser à
B.________ 40'000 fr. à titre de réparation du tort moral subi.

B. 

Par jugement du 7 octobre 2019, la Cour pénale II du tribunal cantonal valaisan
a admis partiellement l'appel interjeté par A.________ contre ce jugement,
qu'elle a réformé en ce sens que la durée de la peine privative de liberté a
été ramenée à 6 ans.

Les faits à l'origine de cette condamnation sont en substance les suivants.

A.________, requérant d'asile kosovar né en 1971, a été présenté par C.________
à son mari, lequel l'a accueilli dans son foyer, à une époque où les trois
enfants du couple étaient en bas âge. A.________ s'est souvent occupé des
enfants, avec lesquels il était très attentionné et s'entendait très bien. Même
s'il disposait d'un studio, il dormait fréquemment au sous-sol de la villa
familiale, dans une chambre située sur le même l'étage que celles des enfants,
souvent à la demande de ces derniers, qui sollicitaient sa présence. Après le
décès subit du père de famille, survenu le 12 septembre 2004, A.________ a en
principe passé ses nuits dans son studio; il est venu s'installer dans la villa
familiale six à huit mois après ce décès.

C.________, qui entretenait depuis de nombreuses années une relation amoureuse
avec A.________, a épousé celui-ci le 6 juin 2006 au Kosovo. Cette année-là, il
est resté plusieurs mois au Kosovo dans l'attente des documents lui permettant
de revenir en Suisse. A son retour, peu avant Noël 2006, il a regagné la villa
familiale.

Vers la fin de l'année 2002, A.________ a passé avec la fille de C.________,
B.________ née en 1988, des siestes à l'occasion desquelles il a caressé les
seins et les parties intimes de la jeune fille à même la peau. Elle ne l'a pas
repoussé mais lui a dit qu'il n'était pas correct d'agir ainsi. Après plusieurs
épisodes de ce genre, B.________ a alerté sa mère, qui a interpelé A.________,
lequel a nié tout comportement volontaire mais a admis avoir peut-être agi
ainsi pendant son sommeil. Craignant de créer des tensions dévastatrices au
sein de sa famille, la jeune fille s'est ensuite rétractée.

Entre le décès du père de famille, en septembre 2004, et son départ au Kosovo
au début 2006, A.________ s'est rendu à de nombreuses reprises dans la chambre
de B.________ et l'a caressée, sans que celle-ci n'ose réagir. Il a par
ailleurs obtenu d'elle des fellations; à une occasion, il l'a sodomisée.

Dès son retour en Suisse, à la fin de l'année 2006, A.________ s'est installé
dans la villa familiale. Après quelques semaines, il a recommencé à commettre
des actes de sodomie et a obtenu de B.________ qu'elle lui fasse des
fellations; il a par ailleurs entretenu avec elle des relations sexuelles
complètes. Ces faits se sont déroulés une ou plusieurs fois par semaine.
B.________ demeurait passive et n'opposait aucune résistante physique. Elle
pleurait après chaque acte et répétait à A.________ que ce qu'il faisait
n'était pas correct. A partir d'une certaine époque, elle a commencé, notamment
par dépit, d'exiger une contrepartie, sous forme d'argent ou d'un cadeau, lors
de chaque rapport. Ces actes se sont poursuivis jusqu'en octobre 2011, date à
laquelle B.________ a fait la connaissance de son futur mari et a quitté le
domicile familial pour s'installer avec lui.

C. 

A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le
jugement de la cour pénale II. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à
l'annulation du jugement attaqué, à sa libération de tout chef d'accusation, à
sa relaxe immédiate et à ce qu'une indemnité de 46'200 fr. lui soit allouée en
réparation du tort moral subi. Il sollicite par ailleurs l'assistance
judiciaire et l'effet suspensif.

Considérant en droit :

1. Le recourant invoque le principe " in dubio pro reo " et reproche à la cour
cantonale d'avoir procédé à une appréciation manifestement inexacte des faits
de la cause.

1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les
faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de
la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été
établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des
art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au
sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle
apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement
insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son
résultat.

La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14
par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe "
in dubio pro reo ", concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation
des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 p. 348 s.; 127 I 38
consid. 2a p. 40 s.). Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des
faits sont critiquées en référence au principe " in dubio pro reo ", celui-ci
n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 144 IV 345
consid. 2.2.3.3 p. 351 s.; 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503; 138 V 74 consid. 7 p.
82).

Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation
de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été
invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF). Les critiques de
nature appellatoire sont irrecevables (ATF 145 I 26 consid. 1.3 p. 30; 142 III
364 consid. 2.4 p. 368).

1.2. Le recourant soutient que des erreurs de dates discréditent les
accusations de l'intimée, qui, selon lui, livrerait à chaque interrogatoire une
version des faits totalement différente et décousue.

Se ralliant à l'opinion de l'autorité de première instance, la cour cantonale a
considéré que les déclarations de l'intimée avaient été constantes s'agissant
des faits essentiels. Cette appréciation ne prête pas le flanc à la critique.
En effet, l'intimée a toujours décrit de la même manière le déroulement et
l'évolution des actes qu'elle a dénoncés. Ses déclarations n'ont varié qu'en ce
qui concerne les dates, ce qui ne suffit pas à remettre en question leur
crédibilité, d'autant plus que les faits sont anciens et se sont répétés sur
une longue période.

Par ailleurs, le recourant se prévaut du fait que dans le SMS qu'elle a envoyé
à sa mère avant de s'adresser à la police, l'intimée a fait état d'abus pendant
deux ans, qui avaient pourri son adolescence, sans mentionner l'ensemble des
actes qu'elle lui reproche. Cet élément n'est pas non plus de nature à jeter le
doute sur ses déclarations. Un SMS étant par nature fort bref, il est dans
l'ordre des choses qu'elle se soit limitée à informer sa mère de manière très
lapidaire du comportement qu'avait eu le recourant.

1.3. Le recourant invoque une prétendue coordination au cours de l'instruction
entre l'intimée et sa mère. Son argumentation se fonde sur la relation très
étroite qui liait les deux femmes et sur le soutien que la mère aurait apporté
à sa fille au cours de la présente procédure. Ces éléments ne suffisent pas
pour faire admettre que la version des faits de l'intimée aurait été discutée
entre elles. Par ailleurs, le recourant prétend qu'il est faux de considérer
que la mère n'a pas fait de confidences à sa fille concernant ses pratiques
sexuelles avec lui. Les deux déclarations qu'il invoque dans ce contexte ne
sont pas de nature à remettre en question les déclarations de l'intimée. La
déclaration qui a trait au fait que la mère de l'intimée aurait confié à cette
dernière avoir été blessée parce que le recourant lui aurait dit qu'elle était
trop vieille pour faire l'amour dans la douche n'est d'aucune pertinence
puisque les actes imputés à celui-ci ne se sont pas déroulés à cet endroit. Par
ailleurs, le fait que la mère de l'intimée ait réalisé que son ex-mari
utilisait le même langage avec elle qu'avec sa fille ne suppose pas non plus
que les deux femmes aient échangé des confidences sur le comportement sexuel du
recourant. Les propos en question, que le recourant a tenus tant avec la mère
lorsqu'elle trompait son mari avec lui qu'à la fille lorsqu'il abusait d'elle,
à savoir que ça n'est pas sale si c'est fait avec amour et ça n'est pas mal car
personne ne va le savoir n'ont en effet pas trait à son comportement sexuel
proprement dit.

1.4. Le recourant se prévaut de l'absence d'une tache de naissance à proximité
de son sexe, tache évoquée en premier lieu par la mère de l'intimée puis par
cette dernière et dont l'examen médical du recourant n'a pas établi
l'existence. Non seulement il ressort des déclarations des experts qu'il est
possible de faire disparaître une telle tache par un traitement au laser mais
de plus on ne voit pas pourquoi la mère de l'intimée aurait inventé et fait
confirmer par sa fille un détail qui n'était pas nécessaire pour étayer ses
accusations.

1.5. Le recourant soutient que, contrairement à ce qu'a admis la cour
cantonale, l'intimée avait un intérêt à mentir car sa dénonciation lui a permis
d'une part de se venger de sa mère qui n'avait jamais accepté son compagnon et
d'autre part de se débarrasser de celui qui constituait un élément
perturbateur. Sur ce point, il se contente d'opposer sa version des faits à
celle retenue par la cour cantonale, de sorte que son argumentation n'est pas
recevable.

Dans ce contexte, le recourant fait valoir que la cour cantonale a de manière
erronée considéré que les explications de l'intimée étaient corroborées par
plusieurs témoignages.

Dans la mesure où le recourant soutient que les déclarations de D.________ ne
corroborent pas la version de l'intimée son argument est dénué de pertinence
puisque ce témoignage n'a pas été retenu par la cour cantonale parmi ceux qui
étayaient ses dires.

En ce qui concerne les déclarations de E.________, c'est avec raison que la
cour cantonale a considéré qu'il ressortait de ce témoignage que l'intimée
avait déclaré avoir eu des relations sexuelles avec le recourant et c'est par
ailleurs de manière tout à fait pertinente qu'elle a relevé que le témoin avait
conseillé à l'intimée d'en parler à sa maman, ce qui montre bien que ledit
témoin était conscient que ces relations n'étaient pas librement consenties,
cas dans lequel il n'aurait bien évidemment pas suggéré d'aviser celle qui
était l'épouse de l'un des partenaires et la mère de l'autre.

Enfin, le recourant se prévaut du fait que l'intimée avait déjà dénoncé
certains faits plusieurs années auparavant et s'était rétractée. Cet élément
n'est pas non plus de nature à remettre ses déclarations en question.
L'explication de ce comportement par la crainte de l'effet de ces révélations
est parfaitement plausible.

1.6. Le recourant cherche à tirer argument du fait que, selon lui, il n'a
jamais été établi que l'intimée aurait souffert des abus qu'elle dénonce. Sa
critique à ce propos, qui fait au demeurant fi des constatations selon
lesquelles l'intimée a été suivie par un médecin et une psychologue et a été
hospitalisée pendant un mois dans un établissement psychiatrique, est de nature
purement appellatoire et, partant, irrecevable.

1.7. Le recourant soutient que des mesures d'instruction auraient été
nécessaires pour établir s'il était concevable, compte tenu de la configuration
du sous-sol de la villa familiale où se sont déroulés une partie des faits
dénoncés, que personne n'ait jamais rien vu ni entendu.

Les visites régulières effectuées par le recourant dans la chambre de l'intimée
pour faire des siestes ou fumer des cigarettes ne sont pas contestées. Par
ailleurs, celle-ci n'a jamais prétendu avoir tenté de chercher de l'aide auprès
des personnes qui pouvaient se trouver à proximité ni même d'attirer leur
attention par des cris par exemple, de sorte que même si la configuration des
lieux permettait de percevoir les actes qui se déroulaient dans une des pièces,
le fait que personne n'ait entendu les protagonistes ne suffirait pas à
remettre en question les constatations de la cour cantonale.

1.8. Le recourant se plaint de défauts formels qui entacheraient le
procès-verbal de la première audition de l'intimée par la police.

Le recours en matière pénale au Tribunal fédéral est recevable contre les
décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance et par le
Tribunal pénal fédéral (art. 80 al. 1 LTF). Il s'ensuit que le Tribunal fédéral
n'entre en principe pas en matière, faute d'épuisement des instances
cantonales, sur des griefs formels qui n'ont pas été préalablement examinés,
alors qu'ils l'auraient pu, par l'autorité précédente (cf. ATF 141 IV 269
consid. 2.2.3 p. 272; arrêt 6B_1151/2017 du 22 mai 2018 consid. 2.1). L'arrêt
attaqué ne contient aucune motivation relative à de prétendues carences dans
ledit procès-verbal et le recourant ne se plaint pas d'un déni de justice à cet
égard, de sorte ce grief est irrecevable faute d'épuisement des instances
cantonales (cf. art. 80 al. 1 LTF).

2. 

Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était
dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être
rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais
judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de
sa situation financière, qui n'apparaît pas favorable. Enfin, la cause étant
tranchée, la demande d'effet suspensif devient sans objet.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.

4. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale II du Tribunal
cantonal valaisan.

Lausanne, le 28 février 2020

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

La Greffière : Paquier-Boinay