Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.1218/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

6B_1218/2019

Arrêt du 19 décembre 2019

Cour de droit pénal

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,

Rüedi et Jametti.

Greffier : M. Graa.

Participants à la procédure

A.________,

représenté par Me Stéphanie Butikofer, avocate,

recourant,

contre

Ministère public de la République et canton de Genève,

intimé.

Objet

Arbitraire; expulsion (art. 66a CP),

recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 29 août 2019 (AARP/304/2019 P
/251/2019).

Faits :

A. 

Par jugement du 29 mai 2019, le Tribunal de police de la République et canton
de Genève a condamné A.________, pour vol, tentative de vol, dommages à la
propriété, violation de domicile, tentative de violation de domicile, entrée et
séjour illégaux, à une peine privative de liberté de huit mois, peine
complémentaire à celles prononcées les 18 janvier et 27 mars 2019. Il a renoncé
à révoquer la libération conditionnelle qui avait été accordée au prénommé le 7
octobre 2017 et a ordonné l'expulsion de celui-ci du territoire suisse pour une
durée de cinq ans.

B. 

Par arrêt du 29 août 2019, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour
de justice genevoise, statuant sur l'appel formé par A.________ contre ce
jugement, a réformé celui-ci en ce sens que la peine privative de liberté de
huit mois infligée au prénommé n'est pas complémentaire à celles prononcées les
18 janvier et 27 mars 2019. Elle a confirmé le jugement pour le surplus.

La cour cantonale a retenu les faits suivants.

B.a. A.________ a indiqué être né en Algérie, pays dont il est ressortissant,
en 1974. Il y a suivi l'école jusqu'à l'âge de 12 ans, avant de travailler. Les
membres de sa famille vivent toujours en Algérie, à l'exception d'un frère qui
se trouve en France. Le prénommé a vécu en Suisse, sans papiers d'identité ni
permis de séjour, depuis 1993 ou 1994. Il est célibataire et père de deux
enfants - B.________ et C.________ -, nés à D.________ en 1998, respectivement
en 2003, de mères différentes. Ces enfants sont de nationalité suisse et vivent
à D.________. A.________ a vécu avec la mère de B.________ entre 1998 et 2000.
Celle-ci a quitté la Suisse pour l'Algérie en 2000 ou 2001. Après ce départ,
A.________ s'est occupé seul de son fils, avant que B.________ fût placé dans
un foyer durant un an puis dans une famille d'accueil pendant huit ans.
A.________ dit avoir vu son fils chaque samedi durant cette période. B.________
a ensuite été placé dans un foyer à E.________ pendant cinq ou six années,
durant lesquelles A.________ affirme l'avoir vu un week-end sur deux. Lorsque
B.________ a atteint l'âge de 16 ans, il est allé vivre chez sa grand-mère. Il
se trouve actuellement en détention à la prison de F.________. L'autre fils de
A.________, C.________, vit avec sa mère. A.________ n'a pas contribué à
l'entretien de ses enfants. En octobre 2017, en sortant de prison, il a été
renvoyé en Algérie, où il a vécu près d'un an. A.________ dit y avoir été bien
accueilli mais s'y être senti comme un étranger après le temps passé en Suisse.
Lorsque ce dernier se trouvait en Algérie, son fils C.________ l'a rejoint
durant trois semaines durant les vacances scolaires. A.________ a affirmé être
revenu en Suisse en 2018, à la demande de ses enfants. Il a indiqué avoir vécu
à G.________, puis à D.________ depuis octobre 2018. Le prénommé n'a pas
d'emploi ni de ressources financières. Il ne peut accueillir ses fils chez lui
mais appelle souvent ceux-ci.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, A.________ a fait l'objet de
neuf condamnations, entre 2009 et 2017, pour des infractions à la législation
sur les étrangers ou à la LStup, mais principalement pour des vols, des
dommages à la propriété et des violations de domicile.

B.b. Le 17 décembre 2018, A.________ a tenté de pénétrer dans un appartement,
en arrachant le cylindre de la porte palière, sans parvenir à ses fins. Il a
agi de la sorte dans le but d'y dérober des objets et valeurs.

B.c. Le 31 décembre 2018, le prénommé a, avec un acolyte, arraché le cylindre
de la porte palière d'un appartement, puis y a pénétré et y a dérobé divers
effets et valeurs, pour un montant total de 2'800 francs.

B.d. Entre octobre 2018 et janvier 2019, A.________ a pénétré puis séjourné sur
le territoire suisse sans les autorisations nécessaires ni les moyens de
subsistance suffisants, alors qu'il faisait l'objet d'une interdiction d'entrée
valable jusqu'en 2027.

C. 

A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre
l'arrêt du 29 août 2019, en concluant, avec suite de frais et dépens,
principalement à sa réforme en ce sens que son expulsion du territoire suisse
n'est pas ordonnée. Subsidiairement, il conclut à son annulation et au renvoi
de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite par
ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire ainsi que l'octroi de l'effet
suspensif.

Considérant en droit :

1. 

Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir établi arbitrairement les
faits.

1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les
faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de
fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient
été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens
des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire
au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle
apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement
insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son
résultat. Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de
nature appellatoire (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 p. 155 s.).

1.2. Le recourant évoque des éléments - tels que son intégration en Suisse ou
la force des liens avec ses enfants - qui ne relèvent pas du fait mais du
droit. Il ne met par ailleurs en évidence aucune constatation de fait qui
serait insoutenable, mais se borne à affirmer, de manière purement
appellatoire, qu'il a tenté de s'intégrer en Suisse ou qu'il entretiendrait des
relations régulières avec ses enfants. Ce faisant, le recourant ne présente
aucun grief recevable.

Il en va de même dans la mesure où le recourant se borne à relever que la cour
cantonale a refusé d'auditionner les témoins qu'il proposait d'entendre,
l'intéressé ne formulant aucun grief recevable - répondant aux exigences de
motivation découlant des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF - en matière de
violation du droit d'être entendu (cf. à cet égard ATF 143 V 71 consid. 4.1 p.
72) ou d'appréciation anticipée des preuves (cf. sur ce point ATF 144 II 427
consid. 3.1.3 p. 435 ou arrêt 6B_1074/2019 du 14 novembre 2019 consid. 2.1
s'agissant spécifiquement de l'art. 389 al. 3 CPP).

2. 

Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir prononcé son expulsion du
territoire suisse.

2.1. Aux termes de l'art. 66a al. 1 let. d CP, le juge expulse de Suisse
l'étranger qui est condamné pour vol (art. 139 CP) en lien avec une violation
de domicile (art. 186 CP), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à
son encontre, pour une durée de cinq à quinze ans. Selon l'art. 66a al. 2 CP,
le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci
mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts
publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à
demeurer en Suisse. A cet égard, il tiendra compte de la situation particulière
de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse.

2.2. En l'espèce, le recourant a commis des infractions (vol et violation de
domicile) qui tombent sous le coup de l'art. 66a al. 1 let. d CP. Il remplit
donc a priori les conditions d'une expulsion, sous la réserve d'une application
de l'art. 66a al. 2 CP, voire également des normes de droit international.

2.3.

2.3.1. La loi ne définit pas ce qu'il faut entendre par une "situation
personnelle grave" (première condition cumulative) ni n'indique les critères à
prendre en compte dans la pesée des intérêts (seconde condition cumulative).

En recourant à la notion de cas de rigueur dans le cadre de l'art. 66a al. 2
CP, le législateur a fait usage d'un concept ancré depuis longtemps dans le
droit des étrangers. Compte tenu également du lien étroit entre l'expulsion
pénale et les mesures du droit des étrangers, il est justifié de s'inspirer, de
manière générale, des critères prévus par l'art. 31 al. 1 de l'ordonnance
relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative
(OASA; RS 142.201) et de la jurisprudence y relative, dans le cadre de
l'application de l'art. 66a al. 2 CP. L'art. 31 al. 1 OASA prévoit qu'une
autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême
gravité. Elle commande de tenir compte notamment de l'intégration du requérant
selon les critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 de la loi fédérale
sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20), de la situation familiale,
particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité
des enfants, de la situation financière, de la durée de la présence en Suisse,
de l'état de santé ainsi que des possibilités de réintégration dans l'Etat de
provenance. Comme la liste de l'art. 31 al. 1 OASA n'est pas exhaustive et que
l'expulsion relève du droit pénal, le juge devra également, dans l'examen du
cas de rigueur, tenir compte des perspectives de réinsertion sociale du
condamné (ATF 144 IV 332 consid. 3.3.2 p. 340 s.; arrêt 6B_1045/2019 du 18
octobre 2019 consid. 1.3.1). En règle générale, il convient d'admettre
l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque
l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine
importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par
la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en
particulier l'art. 8 CEDH (arrêts 6B_908/2019 du 5 novembre 2019 consid. 2.1;
6B_1045/2019 précité consid. 1.3.1; 6B_925/2019 du 16 octobre 2019 consid.
1.1).

Selon la jurisprudence, pour se prévaloir du respect au droit de sa vie privée,
l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels
spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui
résultent d'une intégration ordinaire. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une
approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée
de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un
droit de présence dans notre pays. Il procède bien plutôt à une pesée des
intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un
élément parmi d'autres et en n'accordant qu'un faible poids aux années passées
en Suisse dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice d'une simple tolérance
(cf. ATF 134 II 10 consid. 4.3 p. 24; plus récemment arrêt 6B_2/2019 du 27
septembre 2019 consid. 7.2.1 non destiné à la publication).

2.3.2. En l'espèce, il n'apparaît pas que le recourant pourrait se prévaloir
d'un droit au respect de sa vie privée, au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH, dès
lors que l'intéressé ne présente pas des liens sociaux ou professionnels
spécialement intenses avec la Suisse et que son intégration dans ce pays est
inexistante. Le recourant n'a jamais séjourné ou travaillé légalement en Suisse
et a passé plusieurs années en prison. Il ne met, pour le reste, en exergue
aucun élément pouvant laisser penser qu'un quelconque cercle social, amical ou
professionnel y aurait été créé et entretenu. De surcroît, le recourant, qui
reste sans domicile, n'est revenu en Suisse qu'en 2018, après avoir séjourné
près d'un an dans son pays d'origine puis avoir vécu à G.________.

Le recourant se prévaut exclusivement de la présence en Suisse de ses deux
fils. On peut tout d'abord relever que le recourant ne peut fonder un droit au
respect de sa vie familiale sur la relation entretenue avec son fils
B.________, puisque ce dernier est majeur (cf. à cet égard ATF 145 I 227
consid. 5.3 p. 233 et les références citées) et que l'intéressé ne prétend pas
que le prénommé se trouverait dans un état de dépendance particulier par
rapport à lui, en raison par exemple d'un handicap ou d'une maladie grave (cf.
ATF 145 I 227 consid. 3.1 p. 230 s.; 140 I 77 consid. 5.2 p. 80 s.; cf. arrêt
6B_908/2019 précité consid. 2.1.1).

S'agissant de l'enfant C.________, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que le
recourant aurait disposé d'un droit de garde ou de visite à son égard, ni qu'il
aurait jamais contribué à son entretien. Les contacts actuels avec cet enfant
se font, selon l'arrêt attaqué, par téléphone. Partant, on ne saurait admettre
que le recourant entretiendrait avec son fils C.________ une relation étroite
et effective au sens de la jurisprudence (cf. ATF 144 II 1 consid. 6.1 p. 12;
139 I 330 consid. 2.1 p. 336 et les références citées).

Enfin, la cour cantonale a relevé que le recourant avait été bien accueilli
dans son pays d'origine lorsqu'il y avait été renvoyé en 2017, et qu'il avait
même pu y maintenir des contacts avec son fils C.________. Ainsi, compte tenu
de la mauvaise intégration du recourant en Suisse, de l'absence de relations
professionnelles ou sociales dans ce pays et des liens - notamment familiaux -
conservés avec l'Algérie, il n'apparaît pas que l'expulsion ordonnée pourrait
placer l'intéressé dans une situation personnelle grave. La première condition
cumulative permettant au juge de renoncer exceptionnellement à l'expulsion fait
donc défaut. Partant, une application de l'art. 66a al. 2 CP ne pouvait entrer
en ligne de compte.

Le grief du recourant doit être rejeté.

3. 

Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était
dépourvu de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être
rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais
judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de
sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable.

La cause étant jugée, la demande d'effet suspensif n'a plus d'objet. Au
demeurant, le recours en matière pénale interjeté contre un prononcé
d'expulsion déploie de lege un effet suspensif.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.

4. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.

Lausanne, le 19 décembre 2019

Au nom de la Cour de droit pénal

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

Le Greffier : Graa