Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Zivilrechtliche Abteilung, Subsidiäre Verfassungsbeschwerde 5D.32/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

5D_32/2019

Arrêt du 7 août 2019

IIe Cour de droit civil

Composition

MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,

Marazzi et Bovey.

Greffière : Mme Jordan.

Participants à la procédure

A.________ SA,

représentée par Me Christophe Gal, avocat,

recourante,

contre

B.________,

représenté par Me Clarence Peter, avocat,

intimé.

Objet

Mainlevée provisoire de l'opposition,

recours contre l'arrêt de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal
cantonal vaudois du 12 décembre 2018 (KC18.015588-181201).

Faits :

A. 

Le 19 octobre 2012, C.________ et D.________ pour E.________ SA ainsi que
F.________ AG et B.________ ont signé une " Convention d'achat d'actions " par
laquelle ce dernier, en tant qu' "acheteur ", et F.________ AG, en tant que "
vendeur ", ont passé un contrat libellé comme suit :

" Il est préalablement exposé ce qui suit :

1. E.________ SA est une société anonyme. (...)

2. A la suite d'une cession d'actions intervenue ce jour, F.________ AG dispose
de la pleine et entière propriété de 8'000'000 actions nominatives de la
société E.________ SA d'une valeur nominale de CHF 0.01 (un centime de franc
suisse) chacune, entièrement libérée.

3. M.B.________ désire acheter 2'570'000 d'actions de E.________ SA société
dont il est déjà actionnaire, et ce, dès qu'il sera revenu à meilleure fortune.

4. Confiant que la vente de sa maison sise (...) à U.________ va se concrétiser
rapidement et/ou que Monsieur G.________, domicilié à V.________, lui avancera
prochainement l'argent nécessaire, M. B.________ accepte de prendre
l'engagement ferme et définitif de racheter 2'570'000 actions à M. F.________
AG aux conditions de cette convention.

5. E.________ SA est représentée dans cette transaction par son Conseil
d'administration.

Cela exposé, les parties conviennent ce qui suit :

Article 1

Le vendeur, vend, cède et transfert à l'acheteur, qui accepte, avec
l'intégralité des droits et obligations qui leurs sont rattachées, la propriété
de 2'570'000 actions nominatives de la société E.________ SA d'une valeur
nominale d'un centime (CHF 0,01) chacune, entièrement libérée.

Article 2

La vente de 2'570'000 actions de E.________ SA par le vendeur est consentie et
acceptée moyennant le paiement au vendeur de CHF 28'000 (...) sous un délai
maximum de 6 mois à compter de la date de la signature de la présente
convention.

Article 3

La propriété des actions présentement cédées sera transférée par le vendeur à
l'acheteur simultanément au paiement effectif de l'intégralité de la somme due
et mentionnée à l'article 2; les droits patrimoniaux afférents aux actions
cédées seront transférés à l'acheteur à la date d'exécution du paiement.

L'acheteur s'engage à payer au vendeur le prix stipulé à l'article 2 par
transfert au crédit du compte (...).

Article 4

Le vendeur certifie qu'il a la pleine et entière propriété des actions objet de
la vente et qu'il n'existe sur ces actions aucun droit de gage (...).

Aucune garantie n'est donnée à l'acheteur, qui déclare en outre parfaitement
connaître la situation comptable de E.________ SA à la date du 30 juin 2012
(...).

E.________ SA déclare que son Conseil d'administration a valablement approuvé
la présente cession d'actions et qu'elle inscrira l'acheteur en qualité
d'actionnaire et procédera à l'endossement des titres pour constater le
transfert des actions cédées à la double condition de (i) recevoir une
déclaration écrite de sa part confirmant que l'acquisition des actions est
faite pour son compte propre exclusivement et de (ii) recevoir une preuve du
paiement effectif et complet des actions. (...) ".

B. 

Selon l'extrait avec radiations du Registre du commerce du canton de Vaud du 19
novembre 2015, E.________ SA a été déclarée en faillite avec effet à partir du
19 février 2015.

C. 

Dans le cadre d'une première poursuite initiée par F.________ AG le 2 octobre
2015, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a, par
arrêt du 19 avril 2017, maintenu l'opposition formée par B.________ au
commandement de payer la somme de 28'000 fr., plus intérêts. Elle a considéré
en substance que la créancière poursuivante n'avait pas établi avoir consigné
les actions vendues ou, à tout le moins, les certificats d'actions regroupant
ces dernières.

Dans l'intervalle, selon l'extrait du 15 août 2018 du Registre du commerce du
canton de Vaud, la procédure de faillite de E.________ SA avait été clôturée le
17 octobre 2016 et la raison de commerce radiée d'office le 24 octobre suivant.

Le 6 février 2018, divers certificats d'actions ont été déposés auprès d'un
notaire.

D. 

Le 23 février 2018, sur nouvelle requête de F.________ AG, l'Office des
poursuites du district de Nyon a notifié à B.________ un commandement de payer
(poursuite n ^o xxxxxxx) la somme de 28'000 fr., plus intérêts à 5% l'an dès le
20 avril 2013. Etait invoqué comme titre de la créance ou cause de
l'obligation: " Prix de vente selon convention d'achat d'actions du 19 octobre
2012 ". 

Le poursuivi a fait opposition totale.

Par prononcé du 4 juin 2018, la Juge de paix du district de Nyon a levé
provisoirement l'opposition, sous suite de frais et dépens.

Statuant sur le recours de B.________ le 12 décembre 2018, la Cour des
poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a réformé ce jugement en
ce sens que l'opposition formée au commandement de payer " notifié à la
réquisition de F.________ AG, devenue A.________ SA ", a été maintenue. Elle a
par ailleurs statué sur les frais et dépens de la procédure.

E. 

Par écriture du 1 ^er février 2019, A.________ SA exerce un recours
constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral. Elle conclut principalement au
prononcé de la mainlevée provisoire à concurrence de 28'000 fr., avec intérêts
à 5% dès le 20 avril 2013 et à ce qu'il soit dit que la poursuite n ^o xxxxxxx
" ira sa voie " à concurrence de 28'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 12 juin
2017 (sic). Elle demande subsidiairement l'annulation de l'arrêt cantonal et le
renvoi pour nouvelle décision au sens des considérants. 

Des réponses sur le fond n'ont pas été requises.

Considérant en droit :

1. 

Le présent recours est dirigé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une
décision finale (art. 90 LTF; ATF 133 III 399 consid. 1.4) prise par un
tribunal supérieur statuant sur recours. La décision attaquée est en principe
susceptible de recours en matière civile (art. 72 al. 2 let. a LTF). Toutefois,
vu l'insuffisance de la valeur litigieuse (art. 74 al. 1 let. b LTF) et
l'absence de question juridique de principe (art. 74 al. 2 let. a LTF), le
recours constitutionnel subsidiaire est seul ouvert en l'occurrence (art. 113,
114 et 117 LTF), étant encore précisé que la recourante, qui a succombé devant
la juridiction précédente, possède un intérêt juridique à l'annulation ou à la
modification de la décision attaquée (art. 115 LTF).

2.

2.1. Le recours constitutionnel ne pouvant être formé que pour violation des
droits constitutionnels (art. 116 LTF), le Tribunal fédéral ne corrige
l'application des dispositions de droit matériel que si celle-ci est arbitraire
au sens de l'art. 9 Cst. Tel est le cas lorsqu'elle viole gravement une norme
ou un principe juridique clair et indiscuté, ou contredit de manière choquante
le sentiment de la justice et de l'équité. Une motivation n'est pas arbitraire
du seul fait qu'une autre solution que celle de l'autorité cantonale apparaît
concevable ou même préférable (ATF 140 III 16 consid. 2.1). Le Tribunal fédéral
ne recherche pas quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale
aurait dû donner de la disposition légale, mais il se borne à dire si
l'interprétation qui a été faite est défendable (ATF 132 I 13 consid. 5.1; 131
I 217 consid. 2.1). Pour être qualifiée d'arbitraire, la décision doit
également être insoutenable dans son résultat (ATF 141 III 564 consid. 4.1; 140
III 16 consid. 2.1 précité). Le Tribunal fédéral n'examine en outre que les
griefs expressément soulevés et motivés conformément au principe d'allégation
(art. 106 al. 2 et 117 LTF; sur les exigences de motivation, parmi plusieurs:
ATF 139 I 229 consid. 2.2; 134 II 244 consid. 2.2, 349 consid. 3 et les
références). En particulier, les critiques de nature appellatoire sont
irrecevables (ATF 139 II 404 consid. 10.1).

2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 118 al. 1 LTF). Le recourant ne peut obtenir leur
rectification ou leur complètement que s'il démontre la violation de droits
constitutionnels (art. 118 al. 2 et 116 LTF). Il doit ainsi exposer avec
précision, conformément au principe d'allégation susmentionné, en quoi la
constatation d'un fait, pertinent pour l'issue de la procédure, est
manifestement insoutenable, c'est-à-dire en contradiction évidente avec la
situation de fait, repose sur une inadvertance manifeste ou est dénuée de toute
justification objective (ATF 140 III 115 consid. 2; 136 I 332 consid. 2.2).

3.

3.1. Dans son recours cantonal, le poursuivi avait formulé deux griefs.
Invoquant la faillite le 19 février 2015 et la radiation du registre du
commerce le 24 octobre 2016 de E.________ SA, il avait d'abord soutenu que son
inscription en qualité d'actionnaire de cette société ainsi que l'endossement,
respectivement le transfert, des actions nominatives de la société précitée ne
pouvaient désormais plus être réalisés en raison d'une impossibilité objective
qui ne lui était pas imputable (art. 119 al. 1 CO). Il avait ensuite prétendu
que la convention d'achat du 19 octobre 2012 soumettait la vente des actions à
deux conditions respectivement suspensive et résolutoire, à savoir qu'il soit
lui-même revenu à meilleure fortune et qu'il ait versé le montant de 28'000 fr.
dans les six mois à compter de la signature de l'accord. Comme il n'était pas
revenu à meilleure fortune entre le 19 octobre 2012 et le 19 avril 2013,
l'obligation de payer n'était jamais devenue exigible tandis que la convention
était devenue caduque en date du 20 avril 2013.

La Cour des poursuites et faillites a laissé ouverte la question de savoir si
la convention du 19 octobre 2012 pouvait encore faire l'objet d'une exécution
forcée alors même qu'elle portait sur les actions nominatives d'une société
anonyme qui n'existait désormais plus. Elle pouvait en effet considérer que
ledit contrat ne constituait de toute façon pas un titre de mainlevée. Elle a
relevé à cet égard qu'il résultait du dossier que le poursuivi avait, dans un
premier temps, cédé 5'000'000 actions de la société E.________ SA à la
créancière poursuivante. Le préambule de la convention faisait par ailleurs
état du désir du poursuivi de racheter à cette dernière 2'570'000 de ces
actions dès qu'il serait revenu à meilleure fortune. Il était vrai qu'il
mentionnait aussi que, confiant dans le fait que la vente de sa maison pourrait
se concrétiser rapidement ou qu'un tiers lui avancerait prochainement l'argent
nécessaire, le poursuivi avait accepté de prendre l'engagement ferme et
définitif de racheter ces 2'570'000 actions. L'article deux de l'accord
prévoyait toutefois que la vente des titres par la venderesse était consentie
et acceptée moyennant le paiement de 28'000 fr. sous un délai maximum de 6 mois
à compter de la date de la signature de la convention. Littéralement, cette
clause signifiait que la venderesse n'avait accepté de vendre ses actions qu'à
la condition que le prix convenu lui soit versé d'ici le 19 mars 2013 au plus
tard. Elle traduisait visiblement la volonté de cette dernière de pouvoir
retrouver la libre disposition de ses actions dans l'hypothèse où l'acheteur ne
parviendrait pas à réunir les fonds nécessaires dans le délai convenu. Le
contrat du 19 octobre 2012 était ainsi assorti d'une condition suspensive qui
ne s'était manifestement pas réalisée au terme fixé par les parties. A partir
du 20 mars 2013, ces dernières s'étaient donc retrouvées dans la même situation
que si elles ne l'avaient jamais conclu.

3.2. Invoquant l'arbitraire (art. 9 Cst.) dans la " constatation et
l'appréciation des faits ", la recourante reproche à l'autorité cantonale
d'avoir interprété de façon insoutenable la " volonté réelle " des parties en
retenant que la vente des actions était soumise à la condition suspensive du
versement du prix par l'acquéreur dans les six mois au plus tard à compter de
la signature de la convention. Elle estime que ce délai ne constituait qu'une "
simple facilité de paiement " au terme duquel elle était " habilité[e] à exiger
et obtenir, par toute voie de droit nécessaire ", la somme prévue
contractuellement. A l'appui de sa thèse, elle oppose d'abord que
l'interprétation de la Cour des poursuites et faillites laisse à l'acheteur une
" forme d'option d'achat " qui " ne s'accommode guère " avec l'engagement "
ferme et définitif " d'acquérir pris par ce dernier dans le préambule de la
convention. Se prévalant du fait que le 18 octobre 2012, soit la veille de la
signature de la convention, E.________ SA aurait été déclarée en faillite - "
élément factuel " notoire que les juges cantonaux auraient arbitrairement
ignoré -, elle prétend ensuite qu'elle n'a " raisonnablement " pas pu vouloir
conserver, qui plus est par la seule volonté de l'acheteur, la disposition
d'actions dont la valeur pourrait à l'avenir être nulle. Elle allègue encore
que la mention, dans le préambule, du fait que l'intimé était confiant que la
vente de sa villa allait se concrétiser rapidement et/ou qu'un tiers lui
avancerait prochainement l'argent nécessaire démontre que le délai de six mois
imparti pour payer le prix convenu avait pour but de laisser à l'intéressé le
temps nécessaire à la réunion des fonds. Elle affirme enfin que, selon le
Larousse, le terme " moyennant " signifie " grâce à quelque chose " ou " au
moyen de quelque chose ", et non " à la condition que ".

3.3. Ce faisant, la recourante ne démontre pas en quoi l'interprétation du
titre de mainlevée à laquelle la Cour des poursuites et faillites a procédé
serait insoutenable. Elle se borne en effet à opposer sa propre compréhension
des clauses et termes de la convention, ce qui n'est pas suffisant au regard
des exigences de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. supra, consid. 2.1).

4. 

Vu ce qui précède, le recours est irrecevable. La recourante, qui succombe,
supportera les frais de la procédure (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu
d'allouer de dépens à l'intimé qui n'a pas été invité à répondre (art. 68 al. 1
et 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est irrecevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal vaudois.

Lausanne, le 7 août 2019

Au nom de la IIe Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Herrmann

La Greffière : Jordan