Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.395/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

5A_395/2019

Arrêt du 16 décembre 2019

IIe Cour de droit civil

Composition

M. et Mmes les Juges fédéraux Herrmann, Président,

Escher et Truttmann, Suppléante.

Greffier : M. Braconi.

Participants à la procédure

A.________ Ltd,

représentée par Me G.________, avocat,

recourante,

contre

B.________,

représentée par Me Benoît Fournier, avocat,

intimée.

Objet

capacité d'ester en justice (mainlevée provisoire de l'opposition),

recours contre la décision de la Chambre civile du Tribunal cantonal du Valais
du 3 avril 2019 (C3 18 175).

Faits :

A. 

En 2014, B.________ et A.________ Ltd ont signé deux contrats de prêt pour un
montant total de 425'000 USD, dont l'échéance a été prorogée au 15 février
2016. Celle-là n'ayant pu rembourser les prêts à la date convenue, elle a
constitué une cédule hypothécaire en second rang, d'une valeur de 450'000 fr.,
grevant un immeuble sis à U.________, qu'elle a remise en garantie à la société
prêteuse. Les crédits n'ayant toujours pas été remboursés, celle-ci a, le 25
octobre 2017, dénoncé la cédule au remboursement pour fin janvier 2018.

B. 

Le 27 février 2019, A.________ Ltd a fait notifier à B.________ un commandement
de payer la somme de 414'588 fr. plus intérêts, auquel la poursuivie a formé
opposition totale ( poursuite n° xxxxxxx de l'Office des poursuites du district
de Conthey).

Statuant le 11 juillet 2018 sur la requête de mainlevée déposée par la
poursuivante, le Juge suppléant du Tribunal des districts d'Hérens et Conthey a
levé provisoirement l'opposition de la poursuivie, tant en ce qui concerne la
créance que le gage, à concurrence de 414'588 fr. plus intérêts à 6,5% dès le
15 août 2015.

Par décision du 3 avril 2019, la Chambre civile du Tribunal cantonal du Valais
(Juge unique) a admis le recours de la poursuivie et modifié le jugement
attaqué en ce sens que la requête de mainlevée d'opposition est irrecevable,
avec suite de frais et dépens des deux instances à la charge de la
poursuivante.

C. 

Par acte expédié le 14 mai 2019, la poursuivante exerce un recours en matière
civile au Tribunal fédéral; sur le fond, elle conclut à l'annulation de la
décision de la juridiction précédente et à la constatation que la mainlevée
provisoire prononcée en sa faveur en première instance est devenue définitive
conformément à l'art. 83 al. 3 LP, subsidiairement à l'admission de sa requête
de mainlevée.

Des observations n'ont pas été requises.

Considérant en droit :

1.

1.1. Le recours a été déposé dans le délai légal (art. 46 al. 1 let. aet 100
al. 1 LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF, en relation avec
l'art. 59 al. 2 let. c CPC) prise en matière de poursuite pour dettes (art. 72
al. 2 let. a LTF, en relation avec l'art. 82 LP) par le tribunal supérieur d'un
canton ayant statué sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF). La valeur litigieuse
atteint le seuil légal (art. 74 al. 1 let. b LTF; ATF 133 III 399 consid. 1.3).
La poursuivante, qui a succombé devant la juridiction précédente et possède un
intérêt digne de protection à l'annulation ou la modification de la décision
entreprise, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).

1.2. Le chef de conclusions subsidiaire visant à l'octroi de la mainlevée
provisoire est irrecevable. L'autorité précédente n'étant pas entrée en matière
sur la requête, le Tribunal fédéral ne saurait statuer lui-même au fond, sauf à
priver les parties d'un degré de juridiction (ATF 140 III 234 consid. 3.2.3).

1.3. La recourante a rédigé - valablement (art. 42 al. 1 LTF) - son acte de
recours en allemand. Comme la décision attaquée a été rendue en français, c'est
dans cette dernière langue que sera rédigé le présent arrêt (art. 54 al. 1
LTF).

1.4. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel
qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le
droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de la
juridiction précédente, ni par les moyens des parties; en conséquence, il peut
admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments que ceux qu'a invoqués
la partie recourante, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de
motifs (ATF 144 III 462 consid. 3.2.3 et les arrêts cités). Cela étant, eu
égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine
en principe que les moyens soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4); il ne
connaît, en outre, de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a
été expressément invoqué et motivé de manière claire et détaillée (art. 106 al.
2 LTF; ATF 143 II 283 consid. 1.2.2; 142 II 369 consid. 2.1).

2.

2.1. Dans un premier grief, la recourante expose que la cour cantonale ne
pouvait pas annuler le prononcé de première instance, dès lors que la mainlevée
provisoire était devenue définitive conformément à l'art. 83 al. 3 LP,
l'intimée n'ayant pas ouvert action en libération de dette. Cela étant,
l'intimée ne disposait plus d'aucun intérêt à recourir à l'encontre de l'octroi
de la mainlevée provisoire, laquelle était désormais de plein droit définitive.

2.2. Il ne ressort pas de la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF) ni des
observations déposées le 3 septembre 2019 en instance cantonale que la
recourante aurait soulevé l'argumentation tirée du caractère définitif de la
mainlevée provisoire en l'absence d'action en libération de dette et formulé un
chef de conclusions correspondant. Partant, le recours est irrecevable sur ce
point, faute d'épuisement des instances cantonales (ATF 143 III 290 consid. 1.1
et les citations).

3.

3.1. Dans un second grief, la recourante soutient que la juridiction
précédente, en tant que juge de la mainlevée, n'était pas compétente pour se
prononcer sur le moyen de l'intimée pris de l'absence de pouvoirs de
représentation, lequel ressortit à la plainte au sens de l'art. 17 LP.

3.2. Il est vrai que, selon la jurisprudence, c'est par la voie de la plainte,
et non par celle de l'opposition, que le poursuivi doit invoquer le défaut de
pouvoirs de la personne qui agit pour le poursuivant (ATF 84 III 72 consid. 1
et les citations). Ce point n'est toutefois pas litigieux dans le cas présent.
Le juge précédent a retenu à bon droit que la question de savoir quelle
personne est habilitée à représenter la société devant les tribunaux relève de
la " capacité d'ester en justice " de celle-ci (ATF 141 III 80 consid. 1.3);
or, le juge de la mainlevée est bien compétent pour en connaître (parmi
d'autres: ABBET, in : La mainlevée de l'opposition, 2017, n° 27 et 74-75 ad
art. 84 LP; en général: D. STAEHELIN, in : Basler Kommentar, SchKG I, 2e éd.,
2010, n° 50 ad art. 84 LP).

4.

4.1. Dans un troisième grief, la recourante prétend qu'il n'existe aucun
élément permettant de douter de sa capacité d'être partie et d'ester en
justice; l'intimée ferait au surplus preuve de mauvaise foi en invoquant
l'inexistence de la société à ce stade.

4.2. En l'espèce, la décision entreprise a constaté que la poursuivante est une
société sise aux Iles Vierges Britanniques et constituée selon le droit de cet
Etat; elle a mandaté Me G.________ pour la représenter dans la cause qui
l'oppose à la poursuivie en vertu d'une procuration signée le 21 juin 2016 par
D.________, personne qui - à teneur d'un document intitulé " Appointment of
First Director " - occuperait la position de " First DIrector " de la
poursuivante.

Le magistrat cantonal a relevé que ce dernier document émane d'une autre
société (E.________ Ltd); or, les pièces versées au dossier ne permettent pas
de déterminer quels sont ses liens avec la poursuivante, et si elle dispose de
la capacité de nommer D.________ au poste de "First Director" ou d'attester que
la prénommée occupe ce poste. Même si cette attestation émanait de la
poursuivante elle-même, encore faudrait-il savoir qui, dans la société, serait
habilité à l'établir. Enfin, quand bien même les relations entre la
poursuivante et E.________ Ltd seraient établies, il faudrait encore démontrer
que, d'après le droit des Iles Vierges Britanniques, le " First Director " est
habilité à engager la société par sa signature, ce qui n'est pas le cas en
l'occurrence.

Ce dernier motif, indépendant et suffisant pour sceller le sort du grief, n'est
pas réfuté conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, étant rappelé que le Tribunal
fédéral ne revoit que sous l'angle de l'arbitraire l'application du droit
étranger dans un litige de nature pécuniaire (art. 96 let. b LTF, a contrario;
ATF 138 III 489 consid. 4.3 et la jurisprudence citée; arrêt 5A_877/2018 du 25
octobre 2019 consid. 1.2). Il s'ensuit que le grief est irrecevable (ATF 142
III 364 consid. 2.4 et les arrêts cités).

5.

5.1. Dans un quatrième grief, la recourante estime que la question de savoir si
la procuration conférée à son avocat est valable peut rester indécise, car elle
a toléré jusqu'ici l'activité que celui-ci a déployée, de sorte que l'on se
trouve à tout le moins en présence d'une procuration tolérée (" 
Duldungsvollmacht ") ou apparente (" Anscheinsvollmacht "). Au demeurant,
l'intimée s'était constamment adressée à son conseil lors de la phase
pré-contentieuse. Il est par ailleurs incompréhensible que l'autorité
précédente ait refusé d'admettre la production de pièces qui démontraient que
l'intimée n'avait jamais remis en cause l'intervention dudit conseil.

5.2. Comme on l'a vu ( cf. supra, consid. 4.2), la recourante ne conteste pas
le motif de l'autorité cantonale selon lequel elle n'a pas démontré que la
signataire de la procuration disposait du pouvoir d'engager la société et de
mandater un avocat. Quant au moyen pris d'une violation de l'art. 33 CO - faute
d'avoir reconnu l'existence d'une procuration tolérée ou apparente -, il
s'avère mal fondé.

A supposer qu'une procuration tolérée ou une procuration apparente soit
concevable en procédure (arrêt 5A_500/2010 du 12 octobre 2010 consid. 6.2.2 et
les citations), la recourante ne démontre pas, en tout état de cause, qu'elle
connaissait ou aurait pu avoir connaissance de l'intervention de son conseil
(arrêt 5A_500/2010 précité ibidem). Quoi qu'il en soit, elle ne prétend pas, ni
ne prouve, avoir ratifié les procédés judiciaires de son avocat (art. 38 al. 1
CO; BOHNET, in : Commentaire romand, CPC, 2e éd., 2019, n° 31 ad art. 68 CPC),
ce qui lui aurait été pourtant aisé de faire. Au demeurant, c'est en vain
qu'elle se réfère au comportement de l'intimée puisqu'une ratification par la
partie adverse n'entre pas en ligne de compte (STERCHI, in : Berner Kommentar,
ZPO I, 2012, n° 16 ad art. 68 CPC). La question de l'admissibilité des pièces
nouvelles produites par la recourante à l'appui de ses déterminations du 3
septembre 2018, à savoir les échanges de correspondance entre l'intimée et le
conseil de la recourante, peut demeurer indécise, dès lors qu'elle est
dépourvue d'incidence sur le sort du grief.

6.

6.1. La recourante reproche encore à l'autorité précédente d'avoir violé l'art.
132 al. 1 CPC en omettant de l'inviter à rectifier les vices dont elle estimait
que la procuration conférée à son avocat était entachée. La négation des
pouvoirs de ce mandataire procède ainsi d'un formalisme excessif (art. 29 al. 1
Cst.).

L'intéressée perd de vue que l'octroi d'un délai aux fins de rectification
suppose que le manquement ne soit pas volontaire (ATF 142 V 152 consid. 4.5;
arrêt 5D_142/2017 du 24 avril 2018 consid. 3.1, avec les références). Or, en
l'espèce, la recourante soutient que le juge doit se fonder uniquement sur les
documents à sa disposition et que ceux-ci ne donnaient nullement à penser que
la procuration en cause ne serait pas valable. Par ailleurs, à aucun moment,
elle n'a tenté d'établir que la procuration contestée était valable, que ce
soit dans son écriture du 3 septembre 2018 ou dans son mémoire au Tribunal
fédéral, dans lequel elle explique que la question peut même rester irrésolue.
Quoi qu'il en soit, une procuration en apparence régulière avait été produite
par la recourante, si bien que la nécessité d'octroyer un délai pour la " 
rectifier " ne s'imposait pas.

7. 

Dans un dernier moyen, la recourante reproche à l'autorité précédente d'avoir
réformé le jugement de première instance, ce qu'elle ne pouvait pas faire en
présence d'une condition de recevabilité. Au surplus, une condamnation aux
frais et dépens ne peut se concevoir si elle n'avait pas été valablement
représentée.

D'emblée, la recourante ne dit pas en quoi le dispositif " réformatoire " de la
décision entreprise lui causerait un quelconque préjudice (art. 76 al. 1 let. b
LTF; sur cette exigence: ATF 120 II 5 consid. 2a, avec les références). De
toute manière, elle oublie que l'absence de la capacité d'ester en justice
conduit à l' irrecevabilité de la requête (art. 59 al. 2 let. c CPC), résultat
auquel ne pouvait parvenir la simple annulation du prononcé de première
instance. S'agissant des coûts de la procédure, l'argumentation est spécieuse.
Le magistrat cantonal a expressément reconnu l'existence juridique de la
recourante, dont seule la capacité d'ester en justice est litigieuse en
l'occurrence ( cf. supra, consid. 3.2); l'irrecevabilité de la requête de
mainlevée étant consécutive à un défaut dans la représentation de l'intéressée,
il appartient bien à celle-ci d'en répondre quant au sort des frais et dépens.

8. 

En conclusion, le présent recours doit être rejeté dans la mesure de sa
recevabilité, aux frais de la recourante (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu
d'allouer de dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à présenter des
observations sur le fond du litige (art. 68 al. 1 et 2 LTF).

 

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 7'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile du Tribunal
cantonal du Valais.

Lausanne, le 16 décembre 2019

Au nom de la IIe Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Herrmann

Le Greffier : Braconi