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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.384/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

5A_384/2019

Arrêt du 29 août 2019

IIe Cour de droit civil

Composition

MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,

Marazzi et Bovey.

Greffière : Mme Hildbrand.

Participants à la procédure

A.A.________,

représenté par Me Daniela Linhares, avocate,

recourant,

contre

B.A.________,

représentée par Me Magda Kulik, avocate,

intimée.

Objet

mesures protectrices de l'union conjugale (entretien entre époux),

recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de
Genève du 2 avril 2019 (C/10805/2018, ACJC/479/2019).

Faits :

A.

A.a. B.A.________ (1965) et A.A.________ (1968) se sont mariés en 1993 à
U.________ (Genève). Un enfant, désormais, majeur est issu de cette union:
C.________, né en 1996. B.A.________ est également la mère de trois autres
enfants majeurs, issus d'une précédente union; l'un d'eux est décédé en 2014.

A.b. Le 19 mars 2017, B.A.________ a quitté le domicile conjugal suite à des
dissensions dans le couple et s'est installée dans la résidence secondaire des
époux sise à V.________ en France.

B.

B.a. Le 9 mai 2018, l'épouse a déposé une requête de mesures protectrices de
l'union conjugale devant le Tribunal de première instance de Genève (ci-après:
Tribunal), concluant notamment, en dernier lieu, à la condamnation de son mari
à lui verser, par mois et d'avance, une contribution à son entretien de 3'300
fr. dès le 1er janvier 2018, sous déduction des montants déjà versés.

Le mari s'est opposé au versement d'une quelconque contribution d'entretien en
faveur de son épouse.

B.b. Par jugement du 19 novembre 2018, le Tribunal a notamment autorisé les
époux à vivre séparés (ch. 1 du dispositif), a attribué à l'époux la jouissance
exclusive du domicile conjugal sis à W.________ ainsi que le mobilier le
garnissant (ch. 2) et à l'épouse la jouissance exclusive de la résidence
secondaire des époux sise à V.________ ainsi que le mobilier le garnissant (ch.
3), a condamné l'époux à verser en mains de l'épouse, par mois et d'avance, une
contribution à son entretien de 660 fr. à compter du 1er janvier 2018, sous
déduction des sommes déjà versées à ce titre (ch. 4), a prononcé la séparation
de biens des époux avec effet au 9 mai 2018 (ch. 5), et a débouté les parties
de toutes autres conclusions (ch. 7).

B.c. Le 30 novembre 2018, l'épouse a formé appel de ce jugement, concluant à
l'annulation des chiffres 4 et 7 de son dispositif et à ce que son époux soit
condamné à lui verser, par mois et d'avance, une contribution à son entretien
de 3'300 fr. dès le 1er janvier 2018 puis de 4'500 fr. dès le 1er janvier 2019.
A titre préalable, elle a sollicité l'octroi d'une provisio ad litem de 5'000
fr. pour les frais de la procédure d'appel.

L'époux a conclu à la confirmation du jugement entrepris.

B.d. Par arrêt du 2 avril 2019, expédié le 11 suivant, la Cour de justice du
canton de Genève (ci-après: Cour de justice) a notamment annulé le ch. 4 du
dispositif du jugement entrepris et l'a réformé en ce sens que l'époux est
condamné à verser, par mois et d'avance, une contribution à l'entretien de son
épouse de 735 fr. du 1er janvier au 31 décembre 2018 puis de 2'450 fr., sous
déduction des sommes déjà versées à ce titre, confirmé le jugement entrepris
pour le surplus, débouté les parties de toutes autres conclusions, et réglé la
question des frais de la procédure d'appel.

C. 

Par acte posté le 10 mai 2019, l'époux exerce un recours en matière civile au
Tribunal fédéral contre l'arrêt du 2 avril 2019, avec requête d'effet
suspensif. Il conclut à son annulation et à la confirmation de la contribution
d'entretien de 660 fr. fixée par le jugement du Tribunal du 19 novembre 2018.
Subsidiairement, il sollicite le renvoi de la cause à la Cour de justice pour
nouvelle décision dans le sens des considérants.

Des déterminations sur le fond n'ont pas été requises.

D. 

Par ordonnance présidentielle du 4 juin 2019, l'effet suspensif a été octroyé
pour les arriérés de contributions d'entretien dues jusqu'à la fin du mois
d'avril 2019, mais non pour les montants d'entretien courants dus à partir du
1er mai 2019.

Considérant en droit :

1. 

Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme légale (art. 42 al.
1 LTF), le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF; ATF 133
III 393 consid. 4) prise sur recours par une autorité supérieure statuant en
dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 et 2 LTF), dans une affaire
matrimoniale (art. 72 al. 1 LTF; ATF 133 III 393 consid. 2) de nature
pécuniaire dont la valeur litigieuse requise est atteinte (art. 51 al. 1 let.
a, 51 al. 4 et 74 al. 1 let. b LTF). Le recourant a participé à la procédure
devant l'autorité précédente et a un intérêt digne de protection à la
modification ou l'annulation de la décision entreprise (art. 76 al. 1 let. a et
b LTF). Le recours est donc en principe recevable au regard des dispositions
qui précèdent.

2.

2.1. Comme la décision attaquée porte sur des mesures provisionnelles au sens
de l'art. 98 LTF (ATF 134 III 667 consid. 1.1; 133 III 393 consid. 5, 585
consid. 3.3), la partie recourante ne peut dénoncer que la violation de droits
constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont
été invoqués et motivés par le recourant (" principe d'allégation "; art. 106
al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de
manière claire et détaillée (ATF 142 II 369 consid. 2.1; 142 III 364 consid.
2.4). Le recourant ne peut se borner à critiquer la décision attaquée comme il
le ferait en procédure d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre
cognition, notamment en se contentant d'opposer sa thèse à celle de l'autorité
précédente; les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III
364 consid. 2.4).

2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant qui entend invoquer que les faits
ont été établis de manière manifestement inexacte ne peut se limiter à
contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par
l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon
précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst.
(ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à
cette exigence est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF; ATF 141 IV 249 consid.
1.3.1; 140 III 264 consid. 2.3 et les références).

En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a
arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse,
un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe
manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur
les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 143
IV 500 consid. 1.1 et la référence).

3. 

Le recourant se plaint d'arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'appréciation des
preuves sur trois points.

3.1. Il fait premièrement grief à la Cour de justice d'avoir retenu que sa
charge fiscale devait être fixée à 1'500 fr. et non à 1'950 fr. 45 dès le 1er
janvier 2019. Or, conformément aux pièces qu'il avait produites en première
instance (pièces 31 et 32 - soit les bordereaux de taxation ICC et IFD pour
2017), sa charge fiscale s'élevait à 2'408 fr. 35 par mois d'ICC et à 517 fr.
30 d'IFD, soit au total 2'925 fr. 65. Ainsi, en ayant retenu la somme de 1'950
fr. 45, le Tribunal avait " largement " tenu compte du rabais d'impôts (environ
1'000 fr. par mois) lié au versement d'une éventuelle contribution à son
épouse. C'est donc cette somme de 1'950 fr. 45 que la Cour de justice aurait dû
retenir au titre de sa charge fiscale.

Une telle critique est appellatoire, partant irrecevable. Singulièrement, le
recourant ne démontre pas en quoi le montant de 1'500 fr. retenu par la Cour de
justice à compter du 1er janvier 2019 serait insoutenable. En se limitant à
affirmer que le Tribunal avait, pour sa part, pris en considération une charge
fiscale supérieure sur la base des pièces produites devant lui (pour l'année
2017), il n'établit pas encore que l'estimation effectuée par les juges
cantonaux sur la base de la calculette mise à disposition de l'administration
fiscale cantonale serait arbitraire. Cela étant, quand bien même une autre
charge fiscale a été admise en première instance, il incombait à la Cour de
justice de réexaminer celle-ci à la suite de l'appel formé par l'épouse, qui
précisément contestait ce poste de charge (cf. appel, ch. 37 p. 12), étant au
demeurant relevé que la même méthode de calcul a été utilisée pour évaluer la
charge fiscale des deux parties.

3.2. Selon le recourant, la Cour de justice avait par ailleurs arrêté à tort
son salaire mensuel net à 9'835 fr. Il rappelle que le Tribunal avait retenu un
salaire mensuel net de 9'680 fr. en se basant sur le salaire perçu en 2018 et
ce, pour tenir compte notamment du " changement de loi opéré à Genève
concernant le corps de police et vu la fin de certaines indemnités ". La Cour
de justice ne pouvait pas retenir " sans autre forme " la somme de 9'835 fr.
compte tenu des pièces produites - soit ses fiches de salaire des mois de
janvier à novembre 2018 (pièces 12 à 17, 52 et 53) -, lesquelles démontraient
qu'il gagne en réalité 9'406 fr. 15 par mois.

Le recourant perd de vue que la Cour de justice ne s'est pas basée sur la seule
année 2018 pour fixer son revenu déterminant. Considérant que son salaire
devait être qualifié de fluctuant puisque certains des éléments le composant
étaient d'un montant irrégulier, elle a jugé qu'il convenait de tenir compte de
la rémunération moyenne qu'il avait perçue ces trois dernières années (9'736
fr. 40 en 2016 + 10'148 fr. 25 en 2017 + 9'620 fr. 35 en 2018). Or, par son
argumentation, le recourant ne tente même pas de démontrer que le procédé
retenu par la Cour de justice serait arbitraire. Le raisonnement de cette
autorité ne pourrait, quoi qu'il en soit, pas être qualifié de tel. En effet,
selon la jurisprudence, en cas de revenus fluctuants ou comportant une part
variable, comme en l'espèce selon les constatations non valablement remises en
cause par le recourant, il convient de tenir compte du revenu net moyen réalisé
durant plusieurs années, en principe trois (arrêts 5A_724/2018 du 14 mars 2019
consid. 5.3.1; 5A_745/2015 du 15 juin 2016 consid. 12.2.2 et les références; DE
WECK-IMMELÉ, in Commentaire pratique, Droit matrimonial, 2016, n° 50 ad art.
176 CC et les références). Il n'était donc pas arbitraire de retenir un salaire
mensuel net de 9'835 fr. dans la mesure où ce montant correspond au salaire
mensuel moyen des années 2016 à 2018, dont il n'est pas allégué - ni a fortiori
démontré - qu'il ne ressortirait pas des fiches de salaire correspondantes.
Autant que recevable, le moyen se révèle infondé.

3.3. Le recourant reproche enfin à la Cour de justice d'avoir tenu pour avéré,
sans aucune preuve, que l'intimée ne percevait plus de salaire à compter du 31
décembre 2018. A part un e-mail - qui ne prouve ni un licenciement ni l'arrêt
du versement des indemnités journalières et qui n'est pas une " décision
formelle " - et un certificat de prévoyance professionnelle - qui est envoyé à
toutes personnes assurées -, l'intimée n'avait produit aucune lettre de
licenciement, aucune fiche de salaire, ni aucun document prouvant qu'elle ne
perçoit plus de revenus. Elle n'avait pas non plus produit de relevés de compte
bancaire attestant qu'elle ne reçoit plus d'indemnités journalières ni de
décision de l'assurance perte de gain. La Cour de justice aurait ainsi dû
retenir un revenu de 4'855 fr. par mois pour l'intimée.

Ce faisant, le recourant ne discute pas de manière conforme aux réquisits
découlant du principe d'allégation (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1)
les motifs ayant conduit la Cour de justice à arrêter les revenus mensuels nets
de l'appelante à 4'855 fr. jusqu'au 31 décembre 2018 puis, sous l'angle de la
vraisemblance, à 1'200 fr. dès le 1er janvier 2019. En particulier, il n'expose
pas en quoi il serait insoutenable de considérer comme vraisemblable le fait
que les revenus de l'intimée ont diminué à compter de cette dernière date sur
la base de l'e-mail du 30 novembre 2018 de son employeur à teneur duquel elle
devrait percevoir des prestations provisoires de la caisse de prévoyance
D.________ dès le mois de janvier 2019. Il ne suffit à cet égard pas de se
limiter à contester la force probante d'un tel document. Ce d'autant que la
Cour de justice a, en l'occurrence, appuyé sa conviction que la baisse de
revenus de l'intimée était plausible sur le fait que l'art. 54 du règlement
d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration
cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux (RPAC),
auquel l'intimée est soumise, prévoit que le versement des indemnités pour
incapacité de travail ne peut excéder 730 jours civils. Or, il a été constaté,
sans que le recourant ne le remette en cause, que l'intimée se trouve depuis le
mois de février 2017 en incapacité totale de travail en raison d'une grave
dépression, notamment liée au décès de son fils. Pour ce qui est du montant des
revenus de l'intimée au 1er janvier 2019, l'argumentation indigente du
recourant ne permet pas davantage de considérer qu'il serait arbitraire de
l'estimer au moyen du certificat d'assurance de la caisse de prévoyance
D.________, qui fixe, au 30 avril 2018, la pension d'invalidité à laquelle
cette dernière peut prétendre à 1'199 fr. 80 par mois. Enfin, le recourant ne
prétend à juste titre pas qu'il serait arbitraire, s'agissant de mesures
protectrices de l'union conjugale, de statuer sous l'angle de la simple
vraisemblance des faits après une administration limitée des preuves (sur ce
point, voir arrêts 5A_165/2018 du 25 septembre 2018 consid. 3.3 et les
références; 5A_855/2017 du 11 avril 2018 consid. 4.3.2 et les références;
5A_883/2015 du 29 février 2016 consid. 2.2 et les références).

4. 

En définitive, le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité, aux
frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens
à l'intimée qui n'a pas été invitée à se déterminer sur le fond et qui, sur
effet suspensif, s'est limitée à ne pas s'opposer à son octroi dans la mesure
usuelle.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 29 août 2019

Au nom de la IIe Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Herrmann

La Greffière : Hildbrand