Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Revision 4F.7/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

4F_7/2019

Arrêt du 27 août 2019

Ire Cour de droit civil

Composition

Mmes les Juges fédérales

Kiss, présidente, Klett et Hohl.

Greffier: M. O. Carruzzo.

Participants à la procédure

A.________,

requérant,

contre

B.________,

intimé,

Objet

arbitrage interne,

demande de révision de l'arrêt rendu le 27 mars 2019 par la Ire Cour de droit
civil du Tribunal fédéral dans la cause 4A_539/2018.

Faits :

A. 

Les avocats B.________ et A.________ ont convenu de s'associer dans l'exercice
de leur profession au début de l'année 2008.

Un différend ayant surgi au terme de leur collaboration, B.________, se fondant
sur la clause d'arbitrage insérée dans la convention d'association conclue le 8
janvier 2008, a initié, le 1 ^er février 2011, une procédure arbitrale aux fins
d'obtenir le paiement par A.________ d'un montant de 40'329 fr. 50, intérêts en
sus. 

Par sentence du 30 août 2018, le tribunal arbitral a condamné A.________ à
payer à B.________ la somme de 34'329 fr. 50 avec intérêts à 5% l'an dès le 1 ^
er février 2011. 

B. 

Le 1 ^er octobre 2018, A.________ a formé un recours en matière civile au
Tribunal fédéral en vue d'obtenir l'annulation de ladite sentence (cause 4A_539
/2018). Dénonçant une violation de son droit d'être entendu, l'intéressé
faisait grief au tribunal arbitral d'avoir totalement omis de mentionner et de
discuter le moyen tiré de la compensation (art. 120 CO) dans la sentence
finale. 

Invités à se déterminer sur le recours, B.________ a conclu au rejet du
recours, tandis que le tribunal arbitral a déclaré s'en remettre au Tribunal
fédéral en ce qui concerne l'issue du recours.

Par ordonnance du 29 octobre 2018, la Cour de céans a transmis à A.________ la
réponse de B.________ et les observations du tribunal arbitral. Ladite
ordonnance précisait notamment ce qui suit:

" (...) Aucun échange d'écritures supplémentaire n'est ordonné. D'éventuelles
observations doivent être déposées jusqu'au 13 novembre 2018(...). "

A.________ a déposé une réplique le 13 novembre 2018, suivie d'une duplique de
B.________ datée du 22 novembre 2018.

Par arrêt du 27 mars 2019, le Tribunal fédéral a rejeté le recours et a mis les
frais judiciaires à la charge du recourant. En substance, il a nié toute
violation du droit d'être entendu du recourant en considérant notamment ce qui
suit:

" (...). La créance compensante ainsi invoquée était donc une prétention en
dommages-intérêts. Le défendeur n'a pas cru utile de la chiffrer. La preuve du
dommage lui incombait à teneur de l'art. 42 al. 1 CO; néanmoins, il n'a pas
allégué de dommage d'un montant déterminé et il n'a non plus allégué aucun
élément propre à permettre l'estimation réservée par l'art. 42 al. 2 CO. Le
défendeur n'a fait aucune allusion à un éventuel préjudice moral et il a moins
encore cherché à démontrer une atteinte à sa personnalité, suffisamment grave
pour justifier une réparation en argent à allouer sur la base de l'art. 49 CO.
L'exception de compensation, certes soulevée, n'était donc pas motivée, sinon
par la seule allégation d'un acte illicite. Cela n'était de toute évidence pas
suffisant. Dans ce litige entre avocats, emprunt d'un puissant esprit
d'animosité et de polémique, le tribunal arbitral pouvait voir dans l'exception
une simple récrimination supplémentaire plutôt qu'un moyen de défense sérieux
et apte à influencer l'issue de la cause. Il s'ensuit que le tribunal pouvait
se dispenser de mentionner et de discuter l'exception, sans violer, par là, le
droit du défendeur d'être entendu en procédure contradictoire. La sentence
finale échappe donc au grief tiré de l'art. 393 let. d CPC. " (arrêt 4A_539/
2018 consid. 7).

C. 

Le 24 mai 2019, A.________ (ci-après: le requérant) a adressé au Tribunal
fédéral un mémoire, accompagné de pièces, dans lequel il sollicite la révision
de l'arrêt du 27 mars 2019. Il conclut, sous suite de frais et dépens, à
l'annulation de cet arrêt et, cela fait, à l'annulation de la sentence
arbitrale rendue le 30 août 2018. Il requiert également la récusation du
greffier ayant participé au prononcé de l'arrêt fédéral objet de la présente
demande de révision.

L'intimé, B.________, et le tribunal arbitral n'ont pas été invités à se
déterminer sur la demande de révision.

Considérant en droit :

1. 

Dans son mémoire, le requérant a sollicité préalablement la récusation du
greffier ayant fonctionné en cette qualité dans la cause 4A_539/2018. Cette
requête de récusation se révèle d'emblée privée d'objet, dès lors que la
présente cause a été attribuée à un autre greffier.

2. 

Selon l'art. 61 LTF, les arrêts du Tribunal fédéral entrent en force dès leur
prononcé. Cela signifie qu'il n'existe pas de voie de recours ou d'opposition à
leur encontre. Seule est envisageable une demande de révision pour les motifs
énumérés aux art. 121 à 123 LTF. La demande de révision est soumise aux
exigences de motivation découlant de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF (arrêts 4F_2/2019
du 28 février 2019 consid. 1.1; 5F_14/2016 du 14 mars 2017 consid. 1.1; 2F_13/
2014 du 14 août 2014 consid. 4; 2F_4/2014 du 20 mars 2014 consid. 2.1).

Le requérant demande la révision de l'arrêt du 27 mars 2019 en invoquant les
motifs prévus à l'art. 121 let. a et d LTF. La demande de révision doit dès
lors intervenir dans les 30 jours suivant la notification complète de l'arrêt
(art. 124 al. 1 let. a et b LTF). En l'espèce, le requérant a agi en temps
utile, compte tenu de la suspension des délais pendant les féries pascales
(art. 46 al. 1 let. a LTF).

3.

3.1. En premier lieu, le requérant se prévaut du motif de révision prévu à
l'art. 121 let. d LTF.

3.2. Aux termes de l'art. 121 let. d LTF, la révision d'un arrêt du Tribunal
fédéral peut être demandée si, par inadvertance, le tribunal n'a pas pris en
considération des faits pertinents qui ressortent du dossier. Ce motif de
révision vise le cas où le Tribunal fédéral a statué en se fondant sur un état
de fait incomplet ou différent de celui qui ressortait du dossier. Il y a
inadvertance lorsque le tribunal a omis de prendre en considération une pièce
déterminée, versée au dossier, ou l'a mal lue, s'écartant par mégarde de sa
teneur exacte, en particulier de son vrai sens littéral. Cette notion se
rapporte au contenu même du fait, à sa perception par le tribunal, mais non pas
à son appréciation juridique. L'inadvertance se distingue en effet de la fausse
appréciation soit des preuves administrées devant le Tribunal fédéral, soit de
la portée juridique des faits établis; la révision n'est pas possible lorsque
c'est sciemment que le juge a refusé de tenir compte d'un certain fait, parce
qu'il le tenait pour non décisif, car un tel refus relève du droit. Par
ailleurs, le motif de révision prévu à l'art. 121 let. d LTF n'est réalisé que
si les faits en cause sont pertinents, c'est-à-dire susceptibles de conduire à
une solution différente de celle qui a été retenue, plus favorable au requérant
(cf. ATF 122 II 17 consid. 3 p. 18; arrêts 4F_6/2017 du 22 mars 2017 consid. 2;
4F_9/2014 du 28 octobre 2014 consid. 2.2; 4F_16/2013 du 7 janvier 2014 consid.
4.2; 5F_7/2012 du 7 septembre 2012 consid. 1).

3.3. Le requérant soutient que le Tribunal fédéral aurait statué sans tenir
compte de sa réplique déposée le 13 novembre 2018. A en croire l'intéressé, le
passage de l'arrêt attaqué selon lequel " Sans y avoir été invitées, les
parties ont déposé une réplique et une duplique " ne permettrait pas de retenir
que la Cour de céans a effectivement pris en considération son écriture. De
l'avis du requérant, l'absence de toute autre allusion aux développements
figurant dans sa réplique démontrerait que celle-ci a été purement et
simplement ignorée.

3.4. Pareille argumentation n'emporte pas la conviction de la Cour de céans.

L'argumentation développée par le requérant repose sur une prémisse erronée. En
effet, l'intéressé fait fausse route lorsqu'il fait valoir que le Tribunal
fédéral aurait prétendument considéré à tort sa réplique comme une écriture
spontanée. La loi sur le Tribunal fédéral prévoit qu'il n'y a, en règle
générale, qu'un seul échange d'écritures et qu'un second échange d'écritures
n'est ordonné qu'exceptionnellement (art. 102 al. 3 LTF). Selon la
jurisprudence, les parties possèdent néanmoins un droit de réplique, déduit des
art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH, qui leur confère le droit de se déterminer sur
toute prise de position versée au dossier, quelle que soit sa dénomination
procédurale (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1). Le droit de répliquer n'impose pas
à l'autorité judiciaire de fixer un délai à la partie pour déposer
d'éventuelles observations. L'autorité doit seulement lui laisser un laps de
temps suffisant, entre la remise des documents et le prononcé de sa décision,
pour que la partie ait la possibilité de déposer des observations si elle
l'estime nécessaire (ATF 142 III 48, précité, consid. 4.1.1; 138 I 484 consid.
2.4). Lorsque le Tribunal fédéral impartit un délai pour déposer d'éventuelles
observations, ce délai ne saurait être considéré comme un ordre de se
déterminer mais bien plutôt comme une simple possibilité offerte aux parties.
En l'occurrence, le Tribunal fédéral, par avis du 29 octobre 2018, a transmis
au requérant la réponse de la partie adverse et la prise de position du
tribunal arbitral, en précisant qu'aucun échange d'écritures n'était ordonné et
en impartissant au requérant un délai pour déposer d'éventuelles observations.
Ce faisant, il n'a pas formellement invité le requérant à se déterminer mais il
lui a simplement fixé un délai pour respecter son droit de répliquer. L'arrêt
attaqué retient dès lors à juste titre que les parties ont répliqué et dupliqué
sans y avoir été invitées.

Quoi qu'en dise le requérant, la mention de la réplique, dans l'arrêt attaqué,
démontre que la Cour de céans a effectivement pris en considération cette
écriture. Celle-ci n'a dès lors pas été ignorée. Que le Tribunal fédéral n'ait
pas fait référence à des passages précis de la réplique ou discuté chaque
élément qu'elle contient ne signifie nullement qu'il aurait ignoré
l'argumentation du recourant.

A la lecture du mémoire du requérant, on constate que ce dernier critique les
considérations faites par la Cour de céans dans l'arrêt litigieux à propos du
fondement juridique de la créance opposée en compensation et de la preuve du
dommage, respectivement des conditions d'application de l'art. 42 al. 2 CO.
Aussi, sous couvert d'une prétendue inadvertance du Tribunal fédéral, le
requérant cherche-t-il en réalité à remettre en cause l'appréciation juridique
de la Cour de céans et la motivation retenue dans l'arrêt litigieux. Ce
faisant, il perd de vue que la voie de la révision ne permet pas de rediscuter
l'appréciation juridique contenue dans l'arrêt dont la révision est demandée
(arrêt 1F_12/2015 du 27 avril 2015 consid. 3).

Il s'ensuit le rejet du grief.

4.

4.1. En second lieu, le requérant, invoquant l'art. 121 let. a LTF, fait valoir
que les dispositions concernant la composition du tribunal et la récusation
n'auraient pas été observées.

4.2. Dans une première branche de son grief, l'intéressé se plaint de la
composition irrégulière du Tribunal fédéral. A l'en croire, la Cour de céans se
serait arrogée à tort la compétence de statuer sur le bien-fondé du moyen tiré
de la compensation.

Semblable argumentation tombe à faux et repose sur une lecture manifestement
erronée de l'arrêt litigieux. Contrairement à ce que semble penser le
requérant, le Tribunal fédéral ne s'est pas prononcé sur des questions de fond
en lieu et place du tribunal arbitral. Appelé à examiner l'existence d'une
éventuelle violation du droit d'être entendu, il a simplement considéré que le
tribunal arbitral pouvait voir dans le moyen de la compensation une simple
récrimination supplémentaire plutôt qu'un moyen de défense sérieux et apte à
influencer l'issue de la cause et, partant, se dispenser de le mentionner et le
discuter dans la sentence finale, sans violer, par là, le droit du requérant
d'être entendu. Aussi, est-ce à tort que le requérant affirme, de façon
péremptoire, que la Cour de céans a tranché une question de principe et modifié
sa jurisprudence en décidant " de s'octroyer, pour la première fois depuis que
l'institution de l'arbitrage existe, une compétence nouvelle du ressort
exclusif du Tribunal arbitral ". Au demeurant, le motif de révision allégué
n'est pas réalisé lorsque la composition de la section du tribunal, qui a
statué en l'espèce à trois juges, est déterminée en fonction d'une appréciation
du fond, comme l'existence ou non d'une question de principe (arrêts 5F_7/2016
du 7 juillet 2016 consid. 3.2; 4F_20/2013 du 11 février 2014 consid. 4).

Pour le surplus, la motivation retenue dans l'arrêt litigieux - que le
requérant qualifie de sommaire - ne permet nullement de retenir que le Tribunal
fédéral aurait statué dans une composition irrégulière.

4.3. Dans une deuxième branche de son moyen, le requérant dénonce une violation
de la garantie d'un tribunal indépendant et impartial. A ses yeux, le texte de
l'arrêt litigieux démontrerait une apparence de partialité. Contrairement à ce
que laisse entendre le requérant, qui se réfère au passage suivant " Dans ce
litige entre avocats, emprunt d'un puissant esprit d'animosité et de polémique,
le tribunal arbitral pouvait voir dans l'exception une simple récrimination
supplémentaire plutôt qu'un moyen de défense sérieux et apte à influencer
l'issue de la cause ", les termes utilisés ne dénotent aucun parti pris envers
le requérant, pas plus qu'une volonté de la Cour de céans de " dénigrer " les
arguments de ce dernier. On rappellera que le conflit qui oppose les parties,
vieux de plusieurs années, a donné lieu à pas moins de trois arrêts du Tribunal
fédéral. Par ailleurs, les termes et le ton employés par les deux protagonistes
dans certains documents versés au dossier et dans le cadre des écritures
adressées à la Cour de céans révèlent effectivement un puissant esprit
d'animosité et de polémique.

Le requérant fait grand cas d'un courrier, daté du 11 avril 2019, signé par le
greffier ayant participé au prononcé de l'arrêt litigieux. Par lettre du 9
avril 2019, l'intéressé a sollicité l'anonymisation du courriel du mois de
décembre 2010, reproduit au considérant 7 de l'arrêt attaqué. Le requérant a
simultanément émis certaines critiques à l'égard de la motivation retenue dans
l'arrêt, mettant notamment en cause sa brièveté. Le 11 avril 2019, par ordre de
la Présidente de la Ire Cour de droit civil, ledit greffier a notamment indiqué
ce qui suit:

" (...) Le passage que vous mentionnez, dont vous demandez la dissimulation
complète, ne contient aucun élément propre à permettre au public d'identifier
les personnes impliquées. Vous invoquez la possibilité d'une utilisation
malveillante de ce passage par votre adverse partie. Cela s'inscrit dans
l'esprit d'animosité et de polémique relevé dans l'arrêt, et ne justifie pas
une restriction plus importante, au delà de la " forme anonyme ", de la
publicité légalement prévue. Vos observations concernant la motivation de
l'arrêt ne sont pas davantage concluantes. En conséquence, nous ne donnerons
pas suite à votre demande. "

Contrairement à ce que soutient - manifestement à tort - le requérant, le
greffier ne s'est pas arrogé une compétence en procédant à une prétendue
interprétation personnelle de l'arrêt litigieux. On relèvera tout d'abord que
le courrier du 11 avril 2019 a été adressé sur ordre de la Présidente de la Ire
Cour de droit civil. Ensuite, le greffier mis en cause n'a pas refusé
d'anonymiser le mail litigieux sur la base d'une interprétation personnelle de
l'arrêt litigieux, comme le prétend le requérant. Il a clairement exposé que le
passage en question ne contenait aucun élément susceptible de permettre au
public d'identifier les parties, ce qui en rendait l'anonymisation superflue.
L'affirmation du requérant selon laquelle " l'esprit d'animosité et de
polémique " mentionné dans le courrier du 11 avril 2019 le viserait
exclusivement relève de la pure conjecture. En tout état de cause, c'est aller
trop loin que de voir, dans les circonstances invoquées par le requérant, des
motifs propres à fonder objectivement une apparence de partialité de la
personne mise en cause.

Pour le reste, le requérant revient à la charge en se bornant, une nouvelle
fois, à critiquer la motivation retenue dans l'arrêt attaqué et à dénoncer les
prétendues inadvertances de la Cour de céans. Or, les considérants de l'arrêt
attaqué ne résultent d'aucune inadvertance et la voie de la révision ne permet
pas de rediscuter l'appréciation juridique contenue dans celui-ci.

Il appert des remarques précédentes que le grief doit être écarté.

5. 

Sur le vu de ce qui précède, la demande de révision est rejetée.

Vu le sort réservé à la demande de révision, les frais judiciaires seront mis à
la charge du requérant (art. 66 al. 1 LTF). L'intimé, qui n'a pas été invité à
se déterminer, n'a pas droit à des dépens.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

La demande de révision est rejetée.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du requérant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal arbitral.

Lausanne, le 27 août 2019

Au nom de la Ire Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

La Présidente : Kiss

Le Greffier : O. Carruzzo