Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Revision 4F.6/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

4F_6/2019

Arrêt du 18 mars 2020

Ire Cour de droit civil

Composition

Mmes les Juges fédérales

Kiss, présidente, Niquille et May Canellas.

Greffière Monti.

Participants à la procédure

B.________,

représenté par Me Daniel Meyer,

requérant,

contre

A.________,

représentée par Me Thierry Sticher,

intimée,

Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile.

Objet

indemnité pour tort moral; révision propter nova,

demande en révision de l'arrêt rendu le 24 avril 2018

par le Tribunal fédéral (4A_631/2017,

dossier cantonal ACJC/1329/2017).

Faits :

A. 

Le 4 janvier 2014, B.________ et A.________ ont eu une altercation verbale dans
le parking souterrain de leur immeuble. A l'issue de cet échange, au cours
duquel A.________ a proféré les termes "con" et "connard", celle-ci a tourné le
dos à son interlocuteur et s'est dirigée vers la porte de l'immeuble. Le
prénommé est alors revenu à la charge, s'est avancé rapidement vers elle et l'a
violemment poussée contre un mur. A.________ est tombée en heurtant le mur.
Elle a subi une fracture du pouce et une fracture par éclatement de la vertèbre
L2 ayant nécessité deux opérations. Affectée physiquement et psychiquement, la
victime n'a pas pu reprendre le travail.

B.________ a été condamné pénalement pour lésions corporelles graves par
négligence.

B.

B.a. Le 2 décembre 2014, la victime a ouvert action contre son agresseur en
paiement de 50'000 fr. pour le tort moral subi. Elle estimait celui-ci à 70'000
fr., dont à déduire 20'000 fr. pour tenir compte de l'indemnité qu'elle
présumait pouvoir obtenir de l'assureur-accidents (25% de son salaire annuel
assuré, estimé à 68'880 fr.).

Le défendeur a requis sans succès la suspension de la procédure.

Le Tribunal de première instance du canton de Genève a admis la demande par
jugement du 5 janvier 2017.

B.b. Statuant le 17 octobre 2017 sur appel du défendeur, la Cour de justice
genevoise a réformé le jugement et condamné le défendeur à payer à la victime
une indemnité pour tort moral de 18'500 fr. plus intérêts.

Procédant à la méthode dite des deux phases, la cour cantonale a constaté que
la victime avait subi une atteinte à l'intégrité de 25%, aux dires des experts
mandatés par l'assureur-accidents. L'indemnité de base s'élevait à 31'500 fr.
en considération du gain annuel assuré (126'000 fr. x 25%). Ce montant devait
être porté à 63'000 fr. (i.e doublé) au regard des circonstances d'espèce.
Quelque 20% (13'000 fr.) devaient en être retranchés pour tenir compte d'une
prédisposition constitutionnelle liée (état maladif antérieur) dont souffrait
la victime. En revanche, il n'y avait pas matière à retenir une faute
concomitante de la victime. Les bandes de vidéosurveillance montraient que la
victime était en train de quitter les lieux, mettant ainsi fin au conflit,
lorsque l'agresseur était revenu à la charge en la poursuivant, puis en la
bousculant. Le tiers responsable devait une indemnité pour tort moral de 50'000
fr., dont 31'500 fr. étaient dus à l'assureur-accidents (créance subrogatoire)
et 18'500 fr. à la victime (créance directe, 50'000 fr. - 31'500 fr.).

B.c. La victime a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral,
concluant au paiement de 31'500 fr. plus intérêts.

A ce stade, le litige se résumait au point de savoir qui, de
l'assureur-accidents ou de la victime, devait supporter la réduction de quelque
20% (13'000 fr.) due à la prédisposition constitutionnelle liée.

Statuant par arrêt du 24 avril 2018 (4A_631/2017), la cour de céans a jugé
qu'il incombait à l'assureur-accidents d'assumer cette réduction. La lésée
pouvait se prévaloir du droit préférentiel dans la forme prévue à l'art. 73 al.
1 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances-sociales
(LPGA; RS 830.1). En présence d'un facteur de réduction motivé par un état
maladif antérieur, il ne se justifiait pas de retenir la forme partielle de
droit préférentiel appliquée à l'ATF 123 III 306. Pouvait demeurer indécise la
question de savoir si la solution adoptée dans ce précédent gardait sa raison
d'être lorsque le facteur de réduction était une faute concomitante du lésé. En
bref, le défendeur a été condamné à payer 31'500 fr. plus intérêts à la
demanderesse (créance directe); le solde de 18'500 fr. représentait la
prétention subrogatoire de l'assureur-accidents.

C. 

Le 19 juillet 2019, le défendeur (ci-après: le requérant) a saisi l'autorité de
céans d'une demande en révision concluant à ce que l'arrêt 4A_631/2017 soit
annulé et à ce que l'indemnité pour tort moral due à la demanderesse (ci-après:
l'intimée) soit réduite à 9'450 fr. plus intérêts. S'appuyant sur l'art. 123
al. 2 let. a LTF, le requérant expose avoir été l'objet d'une prétention
subrogatoire émise par l'assureur-accidents, lequel s'est appuyé sur sa
décision du 30 octobre 2017, dont il lui a remis copie le 30 avril 2019. Le
requérant fait observer que l'assureur-accidents a fixé l'indemnité pour
atteinte à l'intégrité (IPAI, art. 25 LAA [RS 832.20]) sur la base d'une
atteinte de 15% au lieu des 25% retenus par les experts, en raison de l'état
maladif pré-existant. L'assureur a en outre appliqué une réduction de 50% en
raison du comportement de la lésée, laquelle avait fait montre de provocation
par son "langage 'non verbal' [sic!] tout à fait clair" et s'était abstenue de
quitter la zone de danger alors qu'elle en aurait eu la possibilité à plusieurs
reprises. L'indemnité IPAI a été fixée à 18'900 fr. au lieu de 31'500 fr. (15%
de 126'000 fr.), et encore réduite de 50% en raison du danger auquel s'était
exposé la victime (cf. art. 39 LAA et 49 al. 2 OLAA [RS 832.202]).

La requête a été communiquée à l'intimée, qui n'a toutefois pas été invitée à
se déterminer.

Considérant en droit :

1. 

La présente demande de révision, fondée sur l'art. 123 al. 2 let. a LTF, a été
déposée dans les 90 jours qui suivent la découverte du motif de révision (art.
124 al. 1 let. d LTF). Satisfaisant aux exigences de motivation découlant de
l'art. 42 al. 1 et 2 LTF (arrêt 4F_24/2017 du 4 septembre 2018 consid. 1), elle
est recevable au regard de ces dispositions.

2.

2.1. A teneur de l'art. 123 al. 2 let. a LTF, la révision peut être demandée
dans les affaires civiles si le requérant découvre après coup des faits
pertinents ou des moyens de preuve concluants qu'il n'avait pas pu invoquer
dans la procédure précédente, à l'exclusion des faits ou moyens de preuve
postérieurs à l'arrêt.

En l'occurrence, le requérant s'appuie sur une décision de l'assureur LAA qui
est certes antérieure à l'arrêt du 24 avril 2018, par lequel la cour de céans a
admis le recours déposé par l'intimée contre le jugement rendu par la Cour de
justice le 17 octobre 2017. Cela étant, la décision de l'assureur est
postérieure au prononcé dudit jugement, puisqu'elle a été rendue le 30 octobre
2017. Or, il faut garder à l'esprit que dans le cadre d'un recours en matière
civile, les nova proprement dits, soit les faits et moyens de preuve
postérieurs au prononcé de l'arrêt cantonal - ou plus exactement, postérieurs à
l'ultime moment permettant l'introduction d'éléments nouveaux devant le juge
d'appel - sont généralement irrecevables, "à moins de résulter de la décision
de l'autorité précédente" (art. 99 al. 1 LTF; ATF 139 III 120 consid. 3.1.2;
arrêts 5A_739/2019 du 27 janvier 2020 consid. 1.5; 5A_104/2019 du 13 décembre
2019 consid. 1.4; cf. aussi ATF 143 III 272 consid. 2.3.2; POUDRET/
SANDOZ-MONOD, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, 1990,
p. 437 n° 1.5.3.2 ad art. 55 OJ). Entrent notamment dans cette exception les
éléments qui déterminent la recevabilité du recours (ATF 136 III 123 consid.
4.4.3) ou permettent d'identifier les parties à la procédure devant le Tribunal
fédéral, ou encore conduisent à constater que le recours est privé d'objet (ATF
137 III 614 consid. 3.2.1; BERNARD CORBOZ, in Commentaire de la LTF, 2 ^e éd.
2014, n ^os 20 ss ad art. 99 LTF). Pour le surplus, le Tribunal fédéral ne peut
pas tenir compte des nova proprement dits. Sa tâche est en effet de dire si
l'autorité précédente a ou non violé le droit sur la base de la situation qui
prévalait au moment où elle a statué (cf. par ex. arrêt 8F_8/2016 du 5 avril
2017 consid. 3.2). A compter du moment où le Tribunal fédéral ne pouvait pas
prendre en compte un novum proprement dit dans le cadre de la procédure de
recours, ce novum ne saurait, a fortiori, fonder une demande de révision,
puisqu'un tel procédé reviendrait à contourner indûment l'art. 99 al. 1 LTF
(arrêt 2F_3/2019 du 23 juillet 2019 consid. 2.2; arrêt précité 8F_8/2016
consid. 3.2). 

Dans le cas présent, le requérant se prévaut d'un novum proprement dit
(postérieur à l'ultime moment auquel il pouvait être invoqué devant la Cour de
justice), dont il est patent qu'il n'entrait pas dans les exceptions visées par
l'art. 99 al. 1 LTF. Dans le cadre d'une procédure de recours au Tribunal
fédéral, il se heurterait à l'écueil d'irrecevabilité. Aussi est-il a fortiori
exclu de s'en prévaloir à l'appui d'une demande de révision.

2.2. Par surabondance, l'assureur-accidents a apprécié le comportement de la
victime au regard des images de [vidéo]surveillance - à l'instar du juge civil
- et en s'appuyant sur le jugement du Tribunal de première instance. Le
requérant cite vainement certaines constatations de l'assureur; en effet, il ne
saurait utiliser la voie de la révision pour le cas échéant compléter l'état de
fait retenu dans les jugements civils alors qu'il aurait pu et dû le faire dans
la procédure principale. Par ailleurs, dans le procès du lésé contre le tiers
responsable, le juge civil apprécie librement, à l'aune de l'art. 44 CO, si et
dans quelle mesure une faute concomitante peut être reprochée au lésé.
Concernant l'atteinte à l'intégrité subie par la victime, l'assureur-accidents
se réfère - comme le juge civil - aux rapports des experts retenant un taux de
25%. A ce stade, le requérant ne peut pas revenir sur la manière dont le juge
civil a intégré dans son calcul du dommage la prédisposition constitutionnelle
liée dont souffrait la victime, alors que ce point n'était déjà plus discuté
dans la procédure de recours initiée par l'intimée. Au surplus, l'intimée a
adopté la prémisse qu'elle toucherait une pleine indemnité LAA sur la base
d'une atteinte à l'intégrité de 25%, ce point n'étant pas litigieux au stade de
la procédure de recours.

3. 

En bref, la demande de révision se révèle mal fondée et doit être rejetée. Le
requérant supportera les frais judiciaires, fixés à 2'000 fr. Il sera en
revanche dispensé de verser des dépens à l'intimée puisqu'elle n'a pas eu à
déposer de réponse (cf. art. 127 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

La demande de révision est rejetée.

2. 

Les frais judiciaires, fixés à 2'000 fr., sont mis à la charge du requérant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève.

Lausanne, le 18 mars 2020

Au nom de la Ire Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

La présidente : Kiss

La greffière : Monti