Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.395/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

4A_395/2019

Arrêt du 2 mars 2020

Ire Cour de droit civil

Composition

Mmes les Juges fédérales

Kiss, Présidente, Hohl et Niquille.

Greffier : M. Thélin.

Participants à la procédure

X.________ SA,

représentée par Mes Nicolas de Gottrau, Homayoon Arfazadeh et Mathieu Granges,

recourante,

contre

Z.________ SA,

représentée par Mes Matthias Scherer, Eléonore Caroit et Laura Azaria,

intimée.

Objet

arbitrage interne; contrat d'entreprise, avance des frais de substitution,
conditions et fixation de son montant (art. 366 al. 2 CO par analogie)

recours contre la sentence arbitrale du Tribunal arbitral avec siège à Genève
du 21 juin 2019

(SCAI n° 300372-2016).

Faits :

A.

A.a. Le 16 mai 2012, Z.________ SA (ci-après : la propriétaire et maîtresse de
l'ouvrage, ou la demanderesse ou l'intimée), dont le siège est à Genève, a
conclu avec X.________ SA (ci-après : l'entreprise ou la défenderesse ou la
recourante), à Dietlikon, un contrat d'entreprise générale à prix forfaitaire
pour la construction d'un bâtiment à Genève. Ce contrat a fait l'objet de
plusieurs avenants.

La livraison de l'ouvrage a eu lieu le 11 août 2015.

A.b. Dès le mois de février 2016, la propriétaire s'est plainte de défauts
affectant principalement la façade.

A la suite de l'appel à garantie invoqué par la propriétaire, l'entreprise lui
a communiqué qu'elle suspendait les travaux de réfection.

B. 

Le 7 juin 2016, conformément à la clause compromissoire de l'art. 14-4 du
contrat, la propriétaire a initié la présente procédure arbitrale, sous l'égide
de la Swiss Chambers' Arbitration Institution.

Le tribunal arbitral composé de trois membres a son siège à Genève. Le droit
suisse est applicable au contrat. Les art. 353 ss CPC sont applicables à la
procédure arbitrale. En outre, le tribunal arbitral a conduit la procédure
selon le Règlement suisse d'arbitrage international des Chambres de commerce
suisse (version 2012).

Le 30 janvier 2017, la propriétaire, maître de l'ouvrage, a déposé son mémoire
de demande et, dans ses dernières conclusions du 16 avril 2018, a conclu
notamment et principalement au versement d'une avance, pour les frais des
travaux de réfection non encore exécutés au 13 novembre 2017, d'un montant de
55'779'483 fr. 25.

Le 26 mai 2017, l'entrepreneur a déposé son mémoire en défense et de demande
reconventionnelle et, dans ses dernières conclusions du 29 juin 2018, a conclu
notamment au rejet de la demande d'avance de frais de réfection.

Le tribunal arbitral a rendu plusieurs ordonnances de procédure.

Par sentence arbitrale du 21 juin 2019, le tribunal arbitral a notamment, sur
demande principale, dit que la défenderesse est condamnée à verser à la
demanderesse une avance de 25'375'097 fr. 67 (35'600'839 fr. 80 - 10'000'000
fr. - 225'742 fr. 13) et prononcé qu'après la réfection par un tiers, celle-ci
devra rendre compte à celle-là des frais et qu'en fonction des travaux de
substitution effectués, l'entreprise sera condamnée à payer les coûts des
travaux de substitution non couverts par l'avance versée ou se verra rembourser
la part excédentaire de cette avance.

Le tribunal arbitral a rejeté les demandes reconventionnelles, puis a statué
sur les frais.

C. 

Contre cette sentence arbitrale, la défenderesse a interjeté un recours en
matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut, sur demande principale, à
l'annulation de certains chiffres du dispositif et, sur demande
reconventionnelle, à son annulation, ainsi qu'à l'annulation du dispositif sur
les frais de la procédure arbitrale. Subsidiairement, elle conclut à
l'annulation intégrale de la sentence et au renvoi de la cause au tribunal
arbitral pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

La demanderesse intimée conclut à l'irrecevabilité du recours en tant qu'il est
dirigé contre le dispositif sur la demande principale, sur les demandes
reconventionnelles et sur les frais de la procédure, respectivement à son rejet
en tant qu'il est dirigé contre le dispositif ch. II b dans la mesure de sa
recevabilité.

Le tribunal arbitral a déclaré s'en remettre à justice.

Alors que l'échange d'écritures était terminé, les parties ont encore déposé
chacune à deux reprises des observations sur les écritures de leur partie
adverse, qui pour simplifier seront dénommées réplique, duplique, triplique et
quadruplique.

La requête d'effet suspensif a été rejetée par ordonnance présidentielle du 29
octobre 2019.

Considérant en droit :

1. 

Dans l'arbitrage interne, le recours en matière civile est recevable contre les
décisions arbitrales aux conditions prévues aux art. 389 à 395 CPC (art. 77 al.
1 let. b LTF).

Seuls les motifs de recours de l'art. 393 CPC sont recevables. Il est donc
exclu de faire valoir, dans un tel recours, que la sentence viole le droit
fédéral, au sens de l'art. 95 let. a LTF, qu'il s'agisse de la Constitution
fédérale ou de la législation fédérale (arrêts 4A_422/2015 du 16 mars 2016
consid. 2, non publié aux ATF 142 III 284; 4A_355/2016 du 5 août 2016 consid.
2.1).

La procédure est régie par la LTF, sauf disposition contraire du CPC contenue
aux art. 389 à 395 (art. 389 al. 2 CPC).

2. 

L'entreprise recourante conclut à l'annulation des ch. II a, b et c, III et IV
du dispositif de la sentence attaquée. La propriétaire intimée conclut à
l'irrecevabilité des ch. II a et c, III et IV, comme aussi du chef de
conclusions subsidiaire en annulation de l'entier de la sentence arbitrale,
pour défaut de motivation. Dans sa réplique, la recourante fait valoir qu'elle
a développé ses griefs à l'appui du ch. II b de la sentence et que, même si
elle n'a pas exposé de griefs en relation avec ces ch. II a et c et III et VI,
l'annulation du ch. II b aurait pour conséquence inévitable de conduire à la
modification des ch. II a et c, III et IV puisqu'ils dépendent dans une mesure
plus ou moins grande du ch. II b.

Comme elle l'admet elle-même, la recourante n'a pas exposé de griefs motivés en
relation avec les ch. II a et c et III. Dès lors que toutes ses critiques
concernent l'avance des frais de 30 millions de francs relative aux frais de
réfection de la façade, l'admission de son recours ne pourrait entraîner que
l'annulation du montant de 30'000'000 fr. inclus dans le calcul découlant des
n. 934 et 933 de la sentence et, partant, l'annulation du ch. II b. On ne voit
pas en quoi les montants qu'elle a été condamnée à payer ou à avancer pour
d'autres objets non critiqués seraient dépendants et, partant, devraient
automatiquement entraîner l'annulation du ch. II a et c et III.

Le chef de conclusions en annulation du ch. IV s'entend comme conséquence de
l'admission du recours en annulation de la sentence et est recevable dans cette
mesure.

Il n'y a pas lieu de se prononcer sur les autres critiques de l'intimée.

3. 

Seule l'avance des frais de substitution pour les travaux de réfection de la
façade du bâtiment du montant de 30'000'000 fr. fait l'objet de griefs motivés
de la recourante. Celle-ci se plaint tout d'abord d'une violation de l'art. 393
let. e CPC, se plaignant de constatations arbitraires des faits et de
violations manifestes du droit, puis de violation de l'art. 393 let. d CPC,
sous son aspect de violation du droit d'être entendu.

4. 

Il s'impose d'examiner tout d'abord le grief de violation manifeste du droit au
sens de l'art. 393 let. e, 2ème hypothèse, CPC, la recourante reprochant au
tribunal arbitral d'avoir manifestement violé les art. 366 al. 2 (par analogie)
et 368 al. 2 CO en déterminant une avance des frais sans avoir tranché au
préalable la question litigieuse de la méthode de réparation et sans avoir fixé
de délai à la propriétaire pour procéder à la réparation.

4.1. Aux termes de l'art. 393 let. e, 2ème hypothèse, CPC, la sentence
arbitrale est arbitraire dans son résultat si elle constitue une violation
manifeste du droit. Selon la jurisprudence, seul le droit matériel est visé par
là, à l'exclusion du droit de procédure (ATF 142 III 284 consid. 3.2; arrêt
4A_378/2014 du 24 novembre 2014 consid. 2.1). Conformément à la définition
générale de l'arbitraire, une décision ne mérite ce qualificatif, s'agissant de
l'application du droit, que si elle méconnaît gravement une norme ou un
principe juridique clair et indiscuté. Il ne suffit donc pas qu'une autre
solution paraisse concevable, voire préférable (ATF 138 III 378 consid. 6.1 et
les arrêts cités). Le choix d'une solution ne peut pas être qualifié
d'arbitraire lorsque la question est controversée en doctrine (ATF 135 III 608
consid. 4.3; 126 III 438 consid. 4b in fine).

4.2. 

4.2.1. Selon l'art. 368 al. 2 CO, en cas d'exécution défectueuse de l'ouvrage,
le maître a notamment le droit d'obliger l'entrepreneur à réparer l'ouvrage à
ses frais. Il n'y a pas lieu d'examiner la condition des dépenses excessives
qui n'est pas critiquée par la recourante.

4.2.2. Ce droit initial du maître en exécution contre l'entrepreneur,
c'est-à-dire en réparation par l'entrepreneur lui-même, est remplacé par un
droit du maître à l'exécution par un tiers (ou par lui-même) (droit à
l'exécution par substitution; Recht auf Ersatzvornahme), en vertu de l'art. 366
al. 2 CO, applicable par analogie (ATF 141 III 257 consid. 3.3), soit lorsque
l'entrepreneur n'exécute pas son obligation de réparer, tarde à le faire ou en
paraît incapable (PIERRE TERCIER/LAURENT BIERI/BLAISE CARRON, Les contrats
spéciaux, 5ème éd. 2016, n. 3891). Le maître renonce définitivement à
l'exécution par l'entrepreneur et il en confie le soin à un tiers (ou y procède
lui-même) aux frais et risques de l'entrepreneur. L'obligation de faire qui
incombait à l'origine à l'entrepreneur en vertu du contrat d'entreprise se
transforme en une obligation de payer les frais de l'exécution par substitution
(ATF 126 III 230 consid. 7a/aa). Le droit du maître de se faire payer les frais
de réparation par un tiers est ainsi une prétention en exécution, et non en
dommages-intérêts (ATF 141 III 257 consid. 3.3; 126 III 230 consid. 7a/aa). Ce
droit du maître à l'exécution par substitution de l'art. 366 al. 2 CO, appliqué
par analogie, n'est soumis ni à une sommation à adresser à l'entrepreneur, ni à
la fixation à celui-ci d'un délai convenable selon l'art. 107 al. 1 CO, ni à
une autorisation du juge, comme c'est le cas du droit à l'exécution par
substitution découlant de l'art. 98 al. 1 CO; pour empêcher une exécution
défectueuse qui est prévisible avec certitude, le maître doit en effet pouvoir,
selon les circonstances, agir rapidement, sans avoir à requérir au préalable
une autorisation du juge (ATF 126 III 230 consid. 7a).

Le maître peut faire procéder à la réfection par un tiers sans s'en faire
avancer les frais. Il devra, après la réparation des défauts, agir contre
l'entrepreneur pour faire valoir à la fois son droit à la réfection par
substitution, ainsi que sa prétention en remboursement des dépenses
effectivement engagées pour cette réfection par le tiers (ATF 141 III 257
consid. 3.3).

Le maître peut aussi agir d'abord en paiement d'une avance pour les frais de
réfection par un tiers (sur le fondement de ce droit à une avance, cf. ATF 128
III 416 consid. 4.2.2).

4.2.3. Le droit à une avance des frais de réfection par substitution d'un tiers
représente une nouvelle modification de la prétention initiale en exécution
(ATF 141 III 257 consid. 3.3).

Il suppose donc (1) que le maître ait un droit à la réfection de l'ouvrage au
sens de l'art. 368 al. 2 CO, (2) qu'il ait un droit à l'exécution par
substitution d'un tiers conformément à l'art. 366 al. 2 CO par analogie et (3)
qu'il ait effectivement l'intention de faire réparer l'ouvrage par le tiers
(ATF 128 III 416 consid. 4.2.2; cf. MARTHA NIQUILLE-EBERLE, Probleme rund um
die Ersatzvornahme, insbesondere die Bevorschussung der Kosten, in Neue und
alte Fragen zum privaten Baurecht, St. Galler Baurechtstagung 2004, p. 80 n.
30).

Cette avance est une estimation des frais présumés (ou prévisibles) de
réfection. Elle n'est qu'un acompte, qui est, par définition, versé sous
réserve d'un règlement définitif des frais (ATF 141 III 257 consid. 3.3). Comme
dans le cas où le maître procède à la réfection sans avance de frais, le coût
de la réfection devra être examiné à la fin des travaux; un éventuel excédent
sera remboursé à l'entrepreneur. Le maître est tenu d'adresser un décompte à
l'entrepreneur une fois la réparation terminée par le tiers (ATF 128 III 416
consid. 4.2.2).

Le jugement concernant l'avance de frais ne règle donc ni la prétention de
l'entrepreneur en restitution de l'avance excédentaire, ni la prétention
complémentaire du maître en paiement des coûts non couverts par l'avance (ATF
141 III 257 consid. 3.3). En revanche, la question du droit du maître à la
substitution par un tiers, qui est une condition du droit à l'avance jouit de
l'autorité de la chose jugée et ne peut être revue dans le second procès sur le
décompte des coûts effectifs ( ibidem).

Si, dans l'affaire ayant donné lieu à l'ATF 128 III 416, il a été jugé que la
décision sur la prétention en réparation par substitution incluait le mode de
réparation, c'est parce que la principale question litigieuse était alors de
savoir si le maître était en droit de procéder à la réparation par un tiers
avec le revêtement déterminé " G " et, par suite, de demander une avance pour
cette réparation; jouissant ainsi de l'autorité de la chose jugée, le mode de
réparation ne pouvait donc plus être remis en question dans le procès ultérieur
portant sur le décompte des coûts effectifs. Dans l'ATF 141 III 257 consid.
3.3, le Tribunal fédéral a déjà précisé la formulation équivoque de l'ATF 128
III 416 consid. 4.2.2 in fine dans le sens sus-mentionné.

4.3. Par une décision à la majorité, le tribunal arbitral a considéré que la
méthode de réparation ne doit pas nécessairement être prédéterminée pour qu'une
avance de frais puisse être octroyée. C'est le résultat qui importe : le tiers
doit réaliser l'objet de l'obligation que l'entrepreneur n'a pas réalisé. Dès
lors que le maître de l'ouvrage doit se substituer, il fait appel à ses risques
et périls à une entreprise tierce et, si celle-ci utilise une méthode
inadéquate ou trop onéreuse, il devra en subir les conséquences lorsque les
comptes définitifs seront opérés par le juge ou par l'arbitre. Le tribunal
arbitral a retenu que l'ATF 141 III 257 ne pose pas la condition de la
prédétermination : parce que la question du mode de réparation avait déjà été
jugée dans le cadre d'un premier procès, il se justifiait qu'elle ne puisse pas
être modifiée dans un second. Cela ne signifie pas pour autant que, de manière
générale, la méthode doive être nécessairement fixée dans le cadre d'un premier
procès.

4.4. Tout d'abord, l'entreprise recourante reproche au tribunal arbitral
d'avoir violé les art. 366 al. 2 (par analogie) et 368 al. 2 CO en refusant de
statuer sur la méthode de réparation (" sur la méthode, la nature et l'étendue
des travaux à entreprendre ").

4.4.1. La recourante soutient que la demande d'avance des frais est une
prétention en exécution et que, s'agissant d'une question de fond, elle doit
s'appuyer sur des preuves suffisantes quant au caractère justifié et adéquat
des travaux de réfection choisis (et de leurs coûts prévisibles), que le maître
de l'ouvrage doit donc alléguer avec précision - et preuves à l'appui - en quoi
consiste l'exécution, puisqu'il supporte le fardeau de la preuve de la
nécessité et de l'adéquation des travaux de réparation (art. 8 CC), et que
l'entreprise doit pouvoir les contester (n. 74 et 78). Se basant sur BRÄNDLI,
elle soutient que la preuve doit être apportée sur la base d'offres ou de devis
d'entreprises ou encore d'expertises (ROGER BRÄNDLI, die Nachbesserung im
Werkvertrag, Eine Gesamtdarstellung unter Berücksichtigung der SIA-Norm 118,
2007, n. 916). Selon elle, la question ne saurait être reportée, par économie
de procédure ou pour un autre motif, à un stade ultérieur. Lorsque la question
de la méthode de réparation est litigieuse devant le juge, qu'elle est au coeur
des débats, elle doit être tranchée par une décision ayant l'autorité de la
chose jugée, et non dans le procès relatif au décompte. La recourante fait
valoir qu'elle avait déjà insisté sur ce point en réaction à l'ordonnance
procédurale n° 7.

Elle estime aussi qu'en allouant une avance de 30 millions de francs, le
tribunal arbitral a donné carte blanche à la propriétaire pour procéder à des
travaux de modification, d'amélioration ou de modernisation de la façade, que
l'écart entre les différentes propositions de réparation ne permettait pas de
laisser la question ouverte de la méthode de réparation et que la sentence
rendue l'obligerait à engager un nouvel arbitrage, dans lequel le tribunal
arbitral serait alors placé devant le fait accompli. Elle soutient que la
sentence arbitrale est également arbitraire dans son résultat.

4.4.2. L'intimée estime que l'interprétation donnée par la recourante à l'ATF
141 III 257 est erronée. Premièrement, le fait que l'avance soit une prétention
en exécution n'implique pas que la méthode de réparation doive être
prédéterminée; l'avance étant de nature provisoire, dont le sort définitif ne
sera réglé que dans la phase du décompte, après la fin des travaux, il n'est
pas nécessaire de déterminer strictement le coût au moment de l'avance.
Deuxièmement, l'ATF 141 III 257 n'exige pas la prédétermination de la méthode
de réfection pour la fixation de l'avance. Troisièmement, le tribunal arbitral
n'était pas en mesure de déterminer la méthode de réfection.

4.4.3. On ne saurait reprocher au tribunal arbitral d'avoir appliqué
arbitrairement l'art. 366 al. 2 CO (par analogie) en considérant que la
détermination de la méthode de réparation n'est pas une condition du droit à la
substitution par un tiers et, partant, du droit à une avance des frais
présumés.

La recourante se trompe lorsqu'elle affirme que le Tribunal fédéral aurait
tranché la question dans son sens dans l'ATF 141 III 257 consid. 3.3 : dans cet
arrêt, comme on l'a vu, le Tribunal fédéral a précisé l'ATF 128 III 416 consid.
4.2.2 en ce sens que la question litigieuse dans cette affaire avait porté sur
le droit du maître de procéder à la réparation par un tiers avec le revêtement
déterminé " G " et sur le droit à une avance de frais pour cette réparation
précise.

La recourante se trompe également lorsqu'elle essaie de déduire l'obligation de
trancher préalablement la question du mode de réparation en se basant sur deux
auteurs : ces auteurs se limitent à prévoir que l'avance doit s'appuyer sur des
offres d'entrepreneurs tiers ou sur des expertises, ce qui n'impose pas de
qualifier d'arbitraire la solution du tribunal arbitral qui refuse d'en déduire
que la détermination de la méthode de réparation devrait être une condition du
droit à une avance.

Si, lorsqu'il effectue lui-même la réparation, l'entrepreneur choisit en
principe le mode de réparation, il n'est pas arbitraire de considérer, comme
l'a fait le tribunal arbitral, que lorsque le maître de l'ouvrage a le droit de
faire procéder à la réparation par un tiers, il choisit le mode de réparation à
ses risques et périls et, s'il utilise une méthode inadéquate ou trop onéreuse,
il en subira les conséquences lorsque les décomptes définitifs seront établis.
L'avance n'est qu'une estimation, un acompte.

4.5. Ensuite, l'entreprise recourante reproche au tribunal arbitral de n'avoir
pas fixé un délai à la propriétaire pour faire procéder à la réfection des
défauts, qui, selon elle, serait une condition du droit à l'octroi d'une
avance.

La recourante ne peut rien déduire du passage de l'ATF 128 III 416 consid.
4.2.2, qu'elle cite, et selon lequel " le maître est tenu de restituer la
totalité de l'avance versée par l'entrepreneur s'il ne fait pas exécuter les
réparations dans un délai convenable ".

Alors même qu'elle ne démontre pas avoir elle-même requis dans ses conclusions
qu'un délai soit fixé, comme le soutient l'intimée, il ne saurait être
arbitraire de ne pas fixer de délai et d'attendre que l'entrepreneur ouvre
action en remboursement de l'avance si les travaux n'ont pas été effectués dans
un délai convenable.

5. 

S'agissant de la fixation du montant de l'avance des frais de réfection,
l'entreprise recourante soulève tout d'abord des griefs en relation avec
l'application arbitraire du droit (art. 393 let. e, 2 ^ème hypothèse, CPC). 

5.1. Selon la jurisprudence, le montant de l'avance correspond aux frais
présumés (ou prévisibles) de la réparation des défauts. Il s'agit d'une
estimation à laquelle le juge procède, notamment sur la base de devis, voire
d'une expertise. Le fait que l'avance soit fondée sur une expertise ne change
rien au fait qu'elle n'a que la valeur d'un acompte, versé sous réserve du
règlement ultérieur définitif des coûts; elle n'a pas autorité de la chose
jugée, mais si elle est ainsi basée sur une expertise, des exigences de
motivation élevées seront nécessaires pour s'en écarter (ATF 141 III 257
consid. 3.3 et les nombreuses références à la doctrine).

Puisque le bien-fondé du montant de l'avance de frais peut être revu au moment
du décompte final des coûts effectifs et que le maître, qui a choisi une
méthode trop onéreuse, en supporte le risque, cette avance des frais n'est
logiquement qu'une prestation provisoire ( vorläufige Leistung).

5.2. Le tribunal arbitral en a déduit, en se référant à la doctrine, que les
allégués relatifs au montant de l'avance ne sont pas soumis à une preuve
stricte ( i.e. une preuve certaine), mais à la simple vraisemblance ( nur
glaubhaft; cf. MARTHA NIQUILLE-EBERLE, op. cit., n. 37; sur la distinction
entre ces deux degrés de preuve en général, cf. ATF 130 III 321 consid. 3.3).
Se basant toujours sur la doctrine, il a admis que le montant de l'avance
puisse se fonder sur des offres de réfection faites par des entreprises tierces
ou des rapports d'expertise privés. Il en a conclu que le degré de la preuve
n'est pas celui requis par l'art. 8 CC, mais un degré inférieur comme la
doctrine l'admet en se référant à la notion de vraisemblance ( i.e. glaubhaft)
et à l'art. 42 al. 2 CO.

5.3. La recourante se plaint uniquement d'application arbitraire de l'art. 42
al. 2 CO. Elle ne s'en prend pas au principe que le degré de la preuve, pour
l'allocation d'une prétention provisoire, n'est que la simple vraisemblance ( 
Glaubhaftmachen). Son grief est d'ores et déjà irrecevable pour ce motif. Au
surplus, comme elle le relève, l'estimation selon l'art. 42 al. 2 CO, que
propose la doctrine, ne devrait se faire que par analogie et ne saurait donc
conduire à appliquer, comme elle le soutient, les mêmes exigences que pour un
jugement sur une prétention au fond.

Il s'ensuit que son grief subsidiaire de violation de l'équité selon l'art. 393
let. e, 3 ^ème hypothèse, CPC, formulé pour le cas où l'art. 42 al. 2 CO serait
applicable, est sans portée. 

6. 

To ujours en ce qui concerne le montant de l'avance des frais de réfection,
l'entreprise recourante reproche au tribunal arbitral d'avoir violé l'art. 393
let. e, 1ère hypothèse, CPC en procédant à des constatations de fait
arbitraires, tout d'abord en écartant arbitrairement la proposition de
réparation n° 1 de A.________ de 6,5 millions de francs et, ensuite, en se
basant sur la pièce C-581, qui n'a selon elle aucune valeur probante, pour
arrêter l'avance à 30 millions de francs.

6.1. Selon l'art. 393 let. e, 1ère hypothèse, CPC, la sentence arbitrale peut
être attaquée lorsqu'elle est arbitraire dans son résultat parce qu'elle repose
sur des constatations manifestement contraires aux faits résultant du dossier.
Ce motif de recours a été repris de l'art. 36 let. f aCA; la jurisprudence
relative à cette ancienne disposition conserve toute sa valeur (arrêts 5A_978/
2015 du 17 février 2016 consid. 3; 4A_511/2013 du 27 février 2014 consid.
2.3.2, in ASA 2014 609; 4A_395/2012 du 16 octobre 2012 consid. 3.1, in ASA 2013
 167).

Une constatation de fait est manifestement contraire aux faits résultant du
dossier, et partant entraîne un résultat arbitraire, au sens de l'art. 393 let.
e, 1ère hypothèse, CPC, lorsque le tribunal arbitral, à la suite d'une
inadvertance, s'est mis en contradiction avec les pièces du dossier, soit en
perdant de vue certains passages d'une pièce déterminée ou en leur attribuant
un autre contenu que celui qu'ils ont réellement, soit en admettant par erreur
qu'un fait est établi par une pièce alors que celle-ci ne donne en réalité
aucune indication à cet égard. L'objet de ce grief est donc restreint : il ne
porte pas sur l'appréciation des preuves et les conclusions qui en sont tirées,
mais uniquement sur les constatations de fait manifestement réfutées par des
pièces du dossier. La façon dont le tribunal arbitral exerce son pouvoir
d'appréciation ne peut pas faire l'objet d'un recours; le grief d'arbitraire
est limité aux constatations de fait qui ne dépendent pas d'une appréciation,
c'est-à-dire à celles qui sont inconciliables avec des pièces du dossier (ATF
131 I 45 consid. 3.6 et 3.7; arrêts 4A_599/2014 du 1er avril 2015 consid. 3.1;
5A_978/2015 précité consid. 3 et les arrêts cités). En d'autres termes,
l'erreur sanctionnée autrefois par l'art. 36 let. f CA et aujourd'hui par
l'art. 393 let. e CPC s'apparente davantage à la notion d'inadvertance
manifeste qu'utilisait l'art. 63 al. 2 aOJ qu'à celle d'établissement des faits
de façon manifestement inexacte qui figure à l'art. 105 al. 2 LTF et qui
correspond à l'arbitraire (arrêts 5A_978/2015 précité consid. 3; 4A_378/2014 du
24 novembre 2014 consid. 2.1; 4A_274/2014 du 30 septembre 2014 consid. 1.3;
4A_112/2014 du 28 avril 2014 consid. 1.3 et les références).

6.2. Considérant que la méthode précise de réfection n'est pas encore
définitivement fixée, le tribunal arbitral en a conclu que son coût faisait
défaut et qu'il ne disposait pas des éléments permettant de fixer l'avance avec
exactitude.

Après avoir écarté différentes estimations de 2015 et 2016, et d'avril 2017, il
a comparé la proposition n° 1 du sous-traitant A.________ (nettoyer les verres
affectés de fogging et remplacer les moteurs, les engrenages et les stores) du
24 juillet 2017, qui se montait à 6'543'457,56 euros et dont il discute la
viabilité, avec quatre offres (pièce C-581) reçues de tiers à la suite de
l'appel d'offres lancé par la propriétaire le 13 novembre 2017, qui
comprenaient une explication sommaire des travaux à réaliser et dont le montant
s'élevait à une moyenne de 46'827'504 euros. Estimant que la solution " A "
présentée dans la pièce C-581 correspond au montant le moins élevé de ces
offres pour une réparation (avec la description : réutilisation des cadres de
la façade, y compris ceux endommagés, nettoyage des vitrages intérieurs,
remplacement des stores, des vis sans fin et du moteur intérieur, remplacement
des vitrages extérieurs, le problème d'accessibilité aux cavités CFF n'étant
pas réglé), il a fixé l'avance à 30 millions de francs.

6.3. Sous couvert de constatations arbitraires, l'entreprise recourante
conteste en réalité l'appréciation des preuves par le tribunal arbitral, ce qui
est inadmissible dans un recours contre une sentence arbitrale.

Lorsqu'elle discute l'appréciation faite par le tribunal arbitral de la
proposition n° 1, sur la base des considérations de l'expert B.________, elle
ne s'en prend qu'à l'appréciation des preuves du tribunal arbitral, ce qui est
inadmissible dans le cadre d'un recours contre une sentence arbitrale. Il en va
de même lorsqu'elle dénie toute valeur probante à la pièce C-581, résumant les
devis obtenus ensuite de l'appel d'offres. Ses griefs sont donc irrecevables.

En tant qu'elle se plaint de n'avoir pas été en mesure d'analyser en détail les
offres reçues, qui n'ont pas été produites par la demanderesse, son grief sera
examiné ci-après (consid. 7).

Lorsqu'elle invoque en réplique, que l'expert B.________ a intégralement validé
la proposition n° 1 de A.________, que la solution " A " est une solution
d'amélioration, et non seulement de réparation, et que la pièce C-581 n'a
aucune valeur probante, elle rediscute également l'appréciation des preuves,
qu'elle a déjà exposée pour l'essentiel dans son recours, ce qui est
inadmissible dans ce recours.

7. 

Dans les deux dernières pages de son recours, l'entreprise recourante invoque
encore la violation de l'art. 393 let. d CPC, sous son aspect de violation du
droit d'être entendu.

7.1. L'art. 393 let. d CPC précise que la sentence issue d'un arbitrage interne
peut être attaquée si l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en
procédure contradictoire n'a pas été respecté. Ce motif de recours a été repris
des règles régissant l'arbitrage international. En conséquence, la
jurisprudence relative à l'art. 190 al. 2 let. d LDIP est, en principe,
également applicable dans le domaine de l'arbitrage interne.

Tel qu'il est garanti par l'art. 182 al. 3 et l'art. 190 al. 2 let. d LDIP, le
droit d'être entendu en procédure contradictoire n'a en principe pas un contenu
différent de celui consacré en droit constitutionnel (art. 29 al. 2 Cst.).
Ainsi, il a été admis, dans le domaine de l'arbitrage, que chaque partie a le
droit de s'exprimer sur les faits essentiels pour le jugement, de présenter son
argumentation juridique, de proposer, pour autant qu'elle le fasse à temps et
dans les formes prévues, ses moyens de preuve sur des faits pertinents et de
prendre part aux séances du tribunal arbitral (ATF 142 III 284 consid. 4.1 et
les arrêts cités).

7.2. Le tribunal arbitral a estimé que, puisque la méthode de réparation
n'avait pas encore été déterminée, il n'y avait pas lieu d'ordonner une
réouverture des débats pour discuter de chacune des offres de réparation, ce
qui aurait entraîné des frais importants en nécessitant de nouveaux rapports
d'experts, de nouvelles auditions, le tout pour débattre d'offres dont la
majorité ne seraient finalement pas retenues.

7.3. La recourante reproche au tribunal arbitral de s'être basé sur la pièce
C-581, qui est une synthèse d'une page des offres reçues, établie par
C.________, mandataire de la propriétaire, et qui est censée résumer les offres
reçues. La demanderesse n'a pas produit les offres dans l'instance arbitrale.
La recourante soutient avoir été en conséquence empêchée de vérifier la réalité
et le sérieux des offres présentées, de commenter les travaux de réfection
envisagés et les prix et n'avoir pas pu démontrer que ces prétendues offres
étaient en réalité des offres de modification et d'amélioration de la façade.
Elle relève qu'elle avait expressément dénoncé ce fait, soupçonnant que l'appel
d'offres dissimulât une amélioration de la façade et que, si le tribunal
arbitral voulait se fonder sur cette pièce, il aurait dû ordonner la production
des offres reçues de façon à les soumettre à un débat contradictoire.

L'intimée soulève l'irrecevabilité du grief, qui n'a pas été invoqué en fin de
procédure lorsque le tribunal arbitral a demandé aux parties si elles avaient
des réserves à formuler sur la manière dont la procédure avait été menée et si
elles pensaient que leur droit d'être entendues avait été bafoué.
Subsidiairement, sur le fond, elle estime que ce grief est en réalité une
critique de l'appréciation des preuves; elle relève que le tribunal arbitral a
procédé à une appréciation anticipée de ces documents et considéré que leur
production ne se justifiait pas, le directeur général de C.________ ayant été
entendu comme témoin pendant près de deux heures en audience.

7.4. Dans sa réplique, la recourante se limite à affirmer qu'elle ne serait pas
forclose à se prévaloir de son droit d'être entendue : elle mentionne qu'elle a
relevé durant les audiences que les offres de réfection n'avaient pas été
produites, mais elle ne conteste pas n'avoir pas formulé à l'issue de
l'audience des réserves sur la manière dont la procédure avait été conduite, ni
invoqué la violation de son droit d'être entendue, faute de production des
offres en question. Le renvoi aux motifs de son recours ne permet pas de
réfuter ces objections de l'intimée et il n'appartient pas au Tribunal fédéral
de les rechercher d'office. Il s'ensuit que le grief de violation du droit
d'être entendu est irrecevable.

8. 

Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est
recevable, et les frais et dépens mis à la charge de son auteur qui succombe
(art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2. 

Les frais de la procédure fédérale, arrêtés à 95'000 fr., sont mis à la charge
de la recourante.

3. 

La recourante versera à l'intimée une indemnité de 110'000 fr. à titre de
dépens.

4. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal arbitral avec siège
à Genève. 

Lausanne, le 2 mars 2020

Au nom de la Ire Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

La présidente : Kiss

Le greffier : Thélin