Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.214/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

4A_214/2019

Arrêt du 20 septembre 2019

Ire Cour de droit civil

Composition

Mmes les juges Kiss, présidente, Klett et Hohl.

Greffier : M. Thélin.

Participants à la procédure

X.________,

représenté par Me Matteo Pedrazzini,

demandeur et recourant,

contre

Y.________ SA,

représentée par Me Daniel Kinzer,

défenderesse et intimée.

Objet

procédure civile; suspension du procès

recours contre l'arrêt rendu le 19 mars 2019 par la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève

(C/49/2018, ACJC/440/2019).

Faits :

A. 

X.________ a contracté divers engagements envers l'établissement bancaire...
Y.________ SA. En garantie de ses obligations, il a souscrit trois billets à
ordre portant globalement sur la contre-valeur en réaux brésiliens de
6'796'592,24 dollars étasuniens.

Dès le 11 mai 2016, Y.________ SA a entrepris au Brésil deux procédures
judiciaires tendant au recouvrement de ces billets à ordre. Avec d'autres
plaideurs qui avaient contresigné les billets, X.________ a été débouté en
première instance; deux recours sont actuellement pendants.

B. 

Le 16 juin 2016, Y.________ SA a requis le séquestre des avoirs de X.________
auprès de U.________ SA à Genève, à concurrence de 6'552'850 fr.40 avec
intérêts au taux de 5% dès le 28 octobre 2015. Le Tribunal de première instance
du canton de Genève a donné suite à cette requête. En dernière instance,
l'opposition formée contre le séquestre (art. 278 al. 1 LP) a été rejetée par
le Tribunal fédéral (arrêt 5A_238/2017 du 16 octobre 2017).

Y.________ SA a validé le séquestre par une réquisition de poursuite adressée à
l'office de Genève. Celui-ci a ouvert la poursuite n° zzz et il a notifié un
commandement de payer. X.________ a formé opposition.

Le 29 novembre 2017, le Tribunal de première instance a donné mainlevée
provisoire de l'opposition; son prononcé a été confirmé le 16 mars 2018 par la
Cour de justice.

C. 

Le 4 janvier 2018, X.________ a ouvert action en libération de dette devant le
Tribunal de première instance. A titre principal, celui-ci est requis de
prononcer que la somme de 6'552'850 fr.40 n'est pas due, ni aucune autre somme
en relation avec les trois billets à ordre, et que la poursuite n° zzz doit
être annulée.

A titre préalable, le tribunal était requis de suspendre la cause jusqu'à droit
connu sur les deux procédures en cours au Brésil. La défenderesse Y.________ SA
s'est opposée à la suspension.

Le tribunal a ordonné la suspension par jugement du 11 septembre 2018.

La Chambre civile de la Cour de justice a statué le 19 mars 2019 sur l'appel de
la défenderesse; accueillant cet appel, elle a annulé le jugement et rejeté «
l'exception de litispendance soulevée par le demandeur ».

D. 

Agissant par la voie du recours en matière civile, le demandeur requiert le
Tribunal fédéral de déclarer irrecevable l'appel de son adverse partie à la
Cour de justice, et de confirmer le jugement ordonnant la suspension de la
cause.

La défenderesse conclut principalement à l'irrecevabilité du recours et
subsidiairement à son rejet.

Sans y être invitées, les parties ont déposé une réplique et une duplique.

Par ordonnance du 20 juin 2019, la Présidente de la Ire Cour de droit civil a
accueilli une demande d'effet suspensif jointe au recours.

Considérant en droit :

1. 

Le recours au Tribunal fédéral est en principe recevable contre les décisions
finales visées par l'art. 90 LTF. Le recours est aussi recevable contre les
décisions incidentes concernant la compétence et la récusation, visées par
l'art. 92 LTF. Selon l'art. 93 al. 3 LTF, les autres décisions incidentes
peuvent être attaquées avec la décision finale qu'elles précèdent, dans la
mesure où elles influent sur cette décision finale; un recours séparé n'est
recevable qu'aux conditions restrictives prévues par l'art. 93 al. 1 LTF.

La décision finale est celle qui met un terme à l'instance, qu'il s'agisse d'un
prononcé sur le fond ou d'une décision reposant sur le droit de procédure. Le
jugement ordonnant la suspension de la cause devant le Tribunal de première
instance était une décision incidente. L'arrêt de la Cour de justice a terminé
l'instance introduite devant cette autorité; toutefois, parce que l'appel à
l'origine de ce prononcé était dirigé contre une décision incidente, l'arrêt
revêt lui aussi le caractère d'une décision incidente selon les art. 92 ou 93
LTF (ATF 142 III 653 consid. 1.1 p. 654/655; 137 III 380 consid. 1.1 p. 381/
382).

Selon la thèse du demandeur, les procédures en cours au Brésil et l'action en
libération de dette intentée à Genève ont toutes pour objet d'élucider les
prétentions en paiement que la défenderesse peut, selon elle, ou qu'elle ne
peut pas, selon le demandeur, fonder sur les trois billets à ordre. En raison
de cet objet commun, il y a lieu d'appliquer l'art. 9 al. 1 de la loi fédérale
sur le droit international privé (LDIP) et de suspendre l'action en libération
de dette jusqu'à droit connu sur les procédures au Brésil. La contestation
présentement soumise au Tribunal fédéral porte donc sur l'application de cette
disposition. Celle-ci concerne la litispendance et ses effets, d'où il résulte
prétendument que l'arrêt de la Cour de justice est une décision incidente
concernant la compétence, susceptible de recours selon l'art. 92 LTF.

2. 

A teneur de l'art. 9 al. 1 et 3 LDIP, un tribunal suisse suspend la cause
lorsqu'une action ayant le même objet est déjà pendante entre les mêmes parties
à l'étranger et que la juridiction étrangère rendra probablement, dans un délai
convenable, une décision susceptible de reconnaissance en Suisse (al. 1);
ensuite, le tribunal suisse se dessaisit dès qu'une décision étrangère
susceptible de reconnaissance lui est présentée (al. 3).

Selon plusieurs arrêts du Tribunal fédéral, une décision de suspension fondée
sur l'art. 9 al. 1 LDIP est assimilée à une décision concernant la compétence,
susceptible de recours au Tribunal fédéral selon l'art. 92 al. 1 LTF (arrêts
5A_88/2016 du 4 octobre 2016, consid. 2; 5A_223/2016 du 28 juillet 2016,
consid. 1; 5A_526/2013 du 28 mars 2014, consid. 1.2). Ce raisonnement juridique
se justifie parce que la décision de suspension anticipe le dessaisissement
(c'est-à-dire une décision d'irrecevabilité de la demande en justice : Stephen
Berti et Lorenz Droese, in Commentaire bâlois, 3e éd., n° 25 ad art. 9 LDIP)
qui devra être plus tard ordonné conformément à l'art. 9 al. 3 LDIP (ATF 123
III 414 consid. 2b p. 418, concernant une clause d'un traité international
correspondant à l'art. 9 LDIP; voir aussi ATF 138 III 190 consid. 5 p. 191).

Dans la contestation concernant la poursuite n° zzz, le demandeur n'a
certainement pas requis la suspension du procès en vue d'obtenir plus tard un
jugement d'irrecevabilité de sa propre demande en justice. Contrairement à ce
que suggère le dispositif de l'arrêt de la Cour de justice, le demandeur n'a
pas soulevé « l'exception de litispendance ». De toute évidence, il entend
produire la décision finale des tribunaux brésiliens - cette décision supposée
favorable à sa cause - et modifier sa demande en ce sens que cette décision
étrangère soit reconnue à titre préalable, selon l'art. 29 al. 3 LDIP, et que
les conclusions dirigées contre la poursuite soient accueillies sur cette base.
Dans ce contexte spécifique, la suspension du procès semble justifiée autant,
voire même davantage par un motif d'opportunité ou d'économie de procédure
plutôt que par l'intérêt que préserve l'art 9 LDIP, c'est-à-dire prévenir des
décisions judiciaires divergentes rendues par les tribunaux de pays différents
(ATF 118 II 188 consid. 3b p. 191).

Le Tribunal fédéral peut se dispenser d'examiner si dans ledit contexte, la
contestation concernant la suspension du procès relève ou ne relève pas de
l'art. 92 al. 1 LTF. En effet, le recours en matière civile se révèle de toute
manière irrecevable.

3. 

La Cour de justice refuse la suspension du procès au motif que plusieurs des
conditions cumulatives énoncées à l'art. 9 al. 1 LDIP sont défaillantes. Sur la
base des avis de droit et des autres documents soumis à son appréciation, la
Cour retient notamment qu'à la différence de l'action en libération de dette
intentée à Genève, les procédures en cours au Brésil n'ont pas pour objet
d'élucider les prétentions éventuellement conférées à la défenderesse par les
billets à ordre; il s'agit plutôt de procédures d'exécution forcée fondées sur
un titre constatant ces prétentions, tendant à l'expropriation de biens des
parties débitrices spécifiés par Y.________ SA. En ce qui concerne le rôle du
titre, à bien comprendre l'arrêt de la Cour, ces procédures au Brésil semblent
similaires à une procédure de mainlevée provisoire de l'opposition selon l'art.
82 al. 1 LP.

Le recours en matière civile n'est recevable ni pour constatation inexacte des
faits ni, dans une contestation pécuniaire, pour application incorrecte du
droit étranger. Sur ces points, la partie recourante ne peut réclamer que la
protection contre l'arbitraire respectivement conférée par les art. 97 al. 1
LTF (ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1 p. 253; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266) et 9
Cst. (ATF 137 III 517 consid. 3.3 in fine p. 521). Cette partie doit indiquer
de façon précise en quoi la décision qu'elle attaque est entachée d'un vice
grave et indiscutable; le Tribunal fédéral ne se saisit pas des critiques dites
appellatoires, tendant simplement à une nouvelle appréciation des preuves
administrées ou des renseignements disponibles concernant le droit étranger
(ATF 145 I 26 consid. 1.3 p. 30; 143 IV 347 consid. 4.4 p. 354/355; 142 III 364
consid. 2.4 p. 368).

Le demandeur se plaint certes d'arbitraire mais il se borne à reprendre chacun
des avis et documents concernant les procédures au Brésil et à en proposer une
lecture ou interprétation opposée à celle retenue par la Cour de justice. Cette
argumentation est insuffisante au regard des exigences ci-mentionnées. Le
recours exercé auprès du Tribunal fédéral se révèle donc irrecevable parce que
dépourvu de motivation concluante sur un point décisif pour l'issue de la
cause.

4. 

A titre de partie qui succombe, le demandeur doit acquitter l'émolument à
percevoir par le Tribunal fédéral et les dépens auxquels l'autre partie peut
prétendre.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est irrecevable.

2. 

Le demandeur acquittera un émolument judiciaire de 14'000 francs.

3. 

Le demandeur versera une indemnité de 16'000 fr. à la défenderesse, à titre de
dépens.

4. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève.

Lausanne, le 20 septembre 2019

Au nom de la Ire Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

La présidente : Kiss

Le greffier : Thélin