Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.186/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

4A_186/2019

Arrêt du 20 décembre 2019

Ire Cour de droit civil

Composition

Mmes les Juges fédérales

Kiss, présidente, Niquille et May Canellas.

Greffière Monti.

Participants à la procédure

A.________,

représentée par Me Jean-Daniel Kramer,

demanderesse et recourante,

contre

Z.________ S.A.,

représentée par Me Dominique Erard,

défenderesse et intimée.

Objet

contrat de travail; licenciement immédiat,

recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 18 mars 2019 par la Cour
d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel (CACIV.2019.1).

Faits :

A. 

Par contrat de travail prenant effet le 1 ^er décembre 2006, la société
Z.________ S.A. a engagé la dénommée A.________ en qualité d'opératrice de
production. Son dernier salaire était de 4'605 fr. brut par mois, payable
treize fois l'an. Un délai de résiliation de trois mois était prévu dès la
neuvième année de service. 

En novembre 2015, lors d'une vente destinée au personnel de la société,
l'employée s'est portée acquéreuse de deux montres, dont l'une, en or, lui a
été vendue au prix préférentiel de 11'578 fr. et l'autre au prix préférentiel
de 1'447 fr. Les conditions d'achat de ces montres spécifiaient qu'il était
interdit de les revendre.

Le mari de l'employée était actif dans l'import-export de produits horlogers.

L'achat de ces deux montres a englouti la quasi-totalité des économies du
couple qui atteignaient environ 15'000 fr. Selon l'employée, la montre en or
devait être offerte à son mari comme cadeau pour fêter leur anniversaire de
mariage. L'intéressé a toutefois déclaré qu'il n'y avait aucune circonstance
spéciale associée à ce cadeau.

Cette montre, identifiée grâce au certificat de garantie, a été proposée à la
revente en mai 2016 sur le marché gris pour 30'000 fr. D'après les explications
données par l'employée, un tiers dénommé T.________ aurait pris les photos de
la montre en cause dans le bureau de son mari alors qu'elle était exposée avec
le certificat de garantie. Selon les déclarations divergentes de son mari,
cette montre n'était pas exposée avec la carte de garantie; T.________ aurait
pris ces clichés car il souhaitait acquérir la même montre.

Par lettre du 25 mai 2016 faisant suite à deux entretiens, l'employeuse a
résilié le contrat de travail avec effet immédiat pour justes motifs. En
substance, elle a indiqué qu'elle confirmait sa décision de résiliation en
raison de l'infraction grave commise par l'employée, laquelle avait clairement
et irrémédiablement rompu le rapport de confiance.

Par courrier du 30 mai 2016, l'employée a contesté avoir commis une faute
grave, requis la motivation écrite des motifs du licenciement et s'est tenue à
disposition pour reprendre le travail.

Par lettre du 2 juin 2016, l'employeuse a évoqué l'épisode de l'achat ainsi que
la revente de la montre et ajouté que les explications fournies par l'employée
avaient achevé de rompre le lien de confiance.

B.

B.a. L'employée a ouvert action contre l'employeuse le 8 novembre 2016. Par
demande du 11 avril 2017, elle a conclu au paiement de 17'684 fr. 35 bruts avec
intérêts aux titres de salaire pour les mois de mai à août 2016, d'indemnités
de vacances non prises et de part au treizième salaire, plus 791 fr. 05 avec
intérêts à titre d'allocations familiales et 10'857 fr. 50 avec intérêts à
titre d'indemnité pour licenciement injustifié.

Par jugement du 20 novembre 2018, le Tribunal civil des Montagnes et du
Val-de-Ruz a rejeté cette demande. En substance, il a considéré que le domaine
de l'horlogerie haut de gamme dans lequel travaillait la demanderesse était un
domaine sensible et que le degré de confiance envers les employés devait
forcément être élevé, ce que reflétait du reste le contrat de travail avec ses
clauses relatives au secret professionnel et à la confidentialité. Ainsi, le
moindre agissement dans le dos de son employeur était propre à détruire le lien
de confiance, a fortiori lorsque l'employé avait dans ses proches une personne
active dans l'horlogerie, ce qui était le cas du mari de l'employée. Le
tribunal a dès lors retenu que le comportement de l'employée était
objectivement susceptible de justifier un congé immédiat. Il a ensuite
considéré que ce manquement grave lui était imputable à faute; en effet, ses
moyens financiers modestes ainsi que les déclarations divergentes du couple
quant au motif du cadeau et à son lieu de remise accréditaient la thèse selon
laquelle cet achat relevait d'un investissement froid et non des sentiments. Le
tribunal était convaincu que la demanderesse savait, ou du moins pouvait très
fortement se douter que son mari destinait cette montre à son commerce et non à
son poignet. Le licenciement immédiat était ainsi justifié.

B.b. Par arrêt du 18 mars 2019, le Tribunal cantonal neuchâtelois a rejeté
l'appel de la demanderesse en reprenant pour l'essentiel les motifs qui
sous-tendaient le premier jugement.

C. 

L'employée saisit le Tribunal fédéral d'un recours en matière civile, au terme
duquel elle reprend les conclusions formulées dans sa demande en paiement.

La cour cantonale se réfère à son arrêt.

L'employeuse conclut, dans sa réponse, à l'irrecevabilité du recours,
subsidiairement à son rejet.

La recourante a répliqué, suscitant le dépôt d'une duplique de l'intimée.

Considérant en droit :

1. 

Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur
le principe, notamment sous l'angle de la valeur litigieuse minimale de 15'000
fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF) et du délai pour recourir (art. 100 al. 1 LTF en
lien avec les art. 45 al. 1 et 46 al. 1 let. a LTF). Demeure réservé l'examen
des griefs particuliers.

2.

2.1. Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit
fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 136 II
304 consid. 2.4 p. 313). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art.
106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42
al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le
Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, sauf en cas
d'erreurs juridiques manifestes. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait
une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se
posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 141 III 86
consid. 2; 140 III 115 consid. 2). Par exception à la règle selon laquelle il
applique le droit d'office, il n'examine la violation d'un droit
constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée
(art. 106 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 in fine).

2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les
constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement
inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art.
105 al. 2 LTF). «Manifestement inexactes» signifie ici «arbitraires» (ATF 140
III 115 consid. 2 p. 117; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la
correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97
al. 1 LTF) La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict
de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p.
266 et les références).

La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente
doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions
seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 p. 18 et les références). Si
elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi
démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux
autorités précédentes en conformité avec les règles de procédure les faits
juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140
III 86 consid. 2 p. 90). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les
allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la
décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16
consid. 1.3.1 p. 18).

En matière d'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral se montre
pareillement réservé. Il n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge
du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de
preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes
ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions
insoutenables (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 265; 137 III 226 consid. 4.2).

En l'espèce, dans la mesure où elle prétend récapituler les faits pertinents en
s'écartant de ceux établis par la cour cantonale sans démontrer qu'ils l'aient
été de manière arbitraire, la recourante méconnaît ces principes. Il ne sera
donc pas tenu compte de ces faits divergents.

3. 

La recourante soulève trois griefs à l'encontre de l'arrêt attaqué. La cour
cantonale aurait violé son droit d'être entendue, elle aurait constaté certains
faits de manière manifestement inexacte et enfin violé l'art. 337 CO.

3.1. La recourante soutient tout d'abord que les juges cantonaux auraient dû
procéder à l'audition du témoin T.________ et qu'en omettant de le faire, ils
auraient violé son droit d'être entendue. Elle se borne toutefois à affirmer
qu'elle n'a pas abandonné sa requête, sans discuter les motifs ayant conduit
les juges d'appel à considérer qu'elle y avait renoncé - et sans davantage
chercher à démontrer en quoi l'appréciation anticipée des preuves présentée en
guise d'argument alternatif serait arbitraire. Son grief est irrecevable.

Invoquant un autre pan du droit d'être entendu, à savoir le droit d'obtenir une
décision motivée, la recourante reproche aux juges d'appel d'avoir méconnu que
non seulement elle contestait avoir commis un manquement, mais niait de
surcroît qu'il pût constituer un juste motif de résiliation immédiate. En
réalité, la cour cantonale a procédé à une déduction: l'employée ne contestait
pas que la mise en vente sur Internet d'une montre acquise à un prix
préférentiel pouvait paraître choquante et problématique et elle ne niait pas
davantage que le fait de travailler dans l'horlogerie haut de gamme impliquait
un degré de confiance élevé entre les employés. Partant, elle en a tiré la
conclusion querellée, selon laquelle le fait de vendre une montre achetée à un
prix préférentiel et dont la revente était interdite constituait un juste motif
de résiliation immédiate du contrat de travail. Contrairement à ce que la
recourante prétend, son grief n'est pas demeuré lettre morte. Elle n'est donc
pas fondée à se plaindre d'une violation de son droit d'être entendue.

3.2. La recourante soutient ensuite que ni son mari ni elle n'a essayé de
revendre la montre litigieuse. Si celle-ci s'est retrouvée mise en vente sur
Internet sur le marché gris asiatique, ce serait le fait de T.________. Les
premiers juges sont parvenus à la conclusion que l'employée savait, ou à tout
le moins pouvait très fortement se douter que son mari destinait cette montre à
son commerce et non à son poignet. La cour cantonale a repris implicitement
cette constatation de fait dans son jugement. Elle a ainsi refusé de voir dans
la tentative de revente de cette montre l'acte d'un tiers qui, après avoir eu
accès à la montre et au certificat de garantie qu'il a pris en photo chez la
recourante et son mari, aurait agi de son propre mouvement et pour des motifs
inexplicables. La recourante se contente de livrer sa propre appréciation des
faits, sans démontrer en quoi la cour cantonale aurait versé dans l'arbitraire.
Son grief est irrecevable.

3.3. Enfin, la recourante fait grief au tribunal de première instance d'avoir
omis d'analyser le manquement qui lui est reproché dans le contexte plus
général de la position et des responsabilités qui étaient les siennes au sein
de l'entreprise, de la durée des rapports contractuels et de la qualité du
travail qu'elle a fourni. Outre que ce grief n'est pas dirigé contre le
jugement de dernière instance cantonale selon l'art. 75 al. 1 LTF, c'est le
lieu de souligner que la cour cantonale a évoqué plusieurs de ces éléments pour
en conclure qu'ils ne remettaient pas en cause l'importance du manquement
reproché (arrêt attaqué p. 8 in fine et 9). Ce grief, pour autant que
recevable, est dès lors privé de fondement. Sur la base des constatations de
fait dont la recourante échoue à démontrer qu'elles seraient entachées
d'arbitraire, l'autorité précédente pouvait retenir sans enfreindre l'art. 337
CO de justes motifs de licenciement immédiat, eu égard, notamment, au domaine
de travail très particulier nécessitant une confiance absolue, et aux
explications de l'employée qui étaient de nature à dissoudre définitivement ce
qui aurait pu rester du lien de confiance.

Partant, le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. La
recourante supportera les frais de procédure fixés selon l'art. 65 al. 4 let. c
LTF et versera à son adverse partie une indemnité à titre de dépens (art. 66
al. 1 LTF, art. 68 al. 1 et 2 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 

La recourante versera à l'intimée une indemnité de 1'500 fr. à titre de dépens.

4. 

Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour
d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 20 décembre 2019

Au nom de la Ire Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

La présidente: Kiss

La greffière: Monti