Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.172/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

4A_172/2019

Arrêt du 4 juin 2019

Ire Cour de droit civil

Composition

Mmes les Juges fédérales

Kiss, présidente, Klett et Hohl.

Greffier: M. O. Carruzzo.

Participants à la procédure

A.________ SA,

représentée par Me Charles Poncet,

recourante,

contre

Bertrand Dayer,

intimé.

Objet

demande de récusation,

recours contre la décision rendue le 7 mars 2019 par le Président du Tribunal
cantonal du canton du Valais

(C2 19 11).

Faits :

A.

A.a. A.________ SA, dont U.________ est actionnaire et président du conseil
d'administration, a pour but l'exploitation de magasins d'électricité, le
commerce d'articles électriques, électroniques, radios, télévisions, photos,
leurs réparations et locations, les installations électriques et toutes
opérations mobilières et immobilières s'y rapportant; son siège est à
L.________ (Valais).

U.________ a été élu au conseil communal de la commune de L.________ pour la
législature 2013-2016. Il y a notamment assumé la présidence du dicastère "
Autorisations de construire & Bâtiments ".

Les membres de ce service, composé de trois élus communaux, assistés de trois
architectes, avaient pour mission de préaviser les demandes d'autorisation de
construire relevant de la compétence communale, la décision finale incombant au
conseil communal dans son ensemble.

En août 2015, le quotidien Y.________ a publié une série d'articles relatifs à
des dossiers jugés litigieux dans le secteur de la construction à Verbier.

Sous la plume de son conseil, A.________ SA a écrit le 8 septembre 2015 à la
société éditant Y.________ pour se plaindre de la teneur des articles publiés
dans ce dernier les... et... 2015. Elle lui reprochait de l'accuser " de
procéder par copinage " en vue de bénéficier d'avantages économiques, grâce à
la fonction communale exercée par U.________.

A.b. Le 29 octobre 2015, A.________ SA a saisi le Tribunal cantonal du canton
du Valais d'une écriture intitulée " demande en protection contre la
concurrence déloyale et requête de mesures provisionnelles ", dirigée contre
Editions Y.________ SA. Sur le fond, elle a notamment conclu au constat du
caractère illicite des divers articles publiés par la défenderesse en août 2015
et au retrait par celle-ci des articles apparaissant sur son site internet.
Elle a en outre requis qu'interdiction fût faite à la défenderesse d'alléguer
ou d'insinuer, dans toute publication ultérieure, que la demanderesse
bénéficierait de privilèges en raison de la présence de l'un de ses
actionnaires au conseil communal de L.________.

A.c. Statuant le 29 mars 2016, le juge cantonal Bertrand Dayer a rejeté la
demande de mesures provisionnelles. Il a considéré que la cause relevait de la
loi fédérale contre la concurrence déloyale (LCD; RS 241) et que sa valeur
litigieuse excédait 30'000 fr., de sorte qu'elle devait être jugée par une
instance cantonale unique au sens de l'art. 5 al. 1 let. d CPC, soit en
l'occurrence la Cour civile II du Tribunal cantonal valaisan. Dans ce cadre, un
juge cantonal unique était habilité à statuer sur une requête de mesures
provisionnelles.

A.d. Le même juge cantonal a instruit la procédure au fond. A l'issue d'un
double échange d'écritures, il a cité les parties, par avis du 15 juin 2016, à
une audience de débats d'instruction.

Le 23 septembre 2016, la demanderesse a déposé une écriture intitulée " Mémoire
sur faits et conclusions complémentaires ". Elle a annexé à celle-ci plusieurs
pièces, dont un rapport établi par V.________ à la demande du conseil communal
de L.________ sur certaines conséquences d'une pratique, jugée illégale, en
matière de police des constructions. Elle a également amplifié ses conclusions,
en réclamant le versement d'une somme de 143'675 fr. 80, intérêts en sus.

Les débats d'instruction se sont tenus le 27 septembre 2016.

Par ordonnance de preuves rendue le lendemain, le juge instructeur a précisé
que les preuves seraient administrées dans l'ordre suivant:

- production par Me W.________ ou M. X.________ de leur rapport d'expertise du
12 février 2016;

- audition des témoins;

- déposition des parties.

Le 20 octobre 2016, la défenderesse a déposé des propositions de questionnaires
en vue de l'audition des témoins. Dans le délai prolongé au 22 novembre 2016,
la demanderesse a indiqué qu'elle n'entendait pas remettre des projets de
questionnaires au tribunal.

Par courrier du 24 novembre 2016, le juge instructeur a invité Me W.________ et
M. X.________ à lui communiquer un exemplaire de leur rapport. A la suite de
différents échanges postaux entre les parties et les experts à propos de
l'anonymisation dudit rapport, ces derniers l'ont finalement transmis le 21
mars 2017.

Le 25 avril 2017, le conseil de la demanderesse s'est enquis de l'avancement de
la procédure. Le juge délégué lui a répondu deux jours plus tard. Se référant à
l'ordonnance de preuves du 28 septembre 2016, il a rappelé que l'instruction de
la cause avait tout d'abord consisté en l'édition du rapport établi par les
experts W.________ et X.________, laquelle n'était devenue effective que le 21
mars 2017. Il a en outre précisé que l'audition des témoins interviendrait
vraisemblablement dans le courant de l'automne 2017 afin d'éviter à ces
derniers d'avoir à se déplacer à deux reprises au tribunal. En effet, une
ordonnance de preuves rendue quelques jours auparavant dans une procédure
parallèle introduite par la demanderesse prévoyait également l'audition de ces
mêmes témoins.

Par courrier du 5 septembre 2017, le juge instructeur a invité les parties à
lui communiquer leurs disponibilités en vue de fixer la séance d'audition des
témoins. Le 19 septembre 2017, les mandataires des parties ont annoncé s'être
accordés sur la date du 16 novembre 2017.

Les huit témoins ont été entendus au cours de l'audience du 16 novembre 2017.

Le 22 novembre 2017, la demanderesse a produit des procès-verbaux d'audition de
témoins entendus dans la procédure parallèle ouverte contre un autre quotidien,
qu'elle qualifiait de vrais nova. Le 4 décembre 2017, le juge délégué a indiqué
à la demanderesse qu'il ne lui paraissait pas possible, en l'état, de tenir
compte des pièces nouvellement produites. Par pli du 21 décembre 2017, la
demanderesse a invité le juge à reconsidérer sa position. A l'issue d'un
échange d'écritures entre les parties, le juge a accepté, par ordonnance du 1er
mars 2018, que lesdits procès-verbaux d'audition fussent versés au dossier.

Le 22 octobre 2018, le conseil de la défenderesse s'est enquis de la suite de
la procédure. Deux jours plus tard, le juge délégué a annoncé aux parties que
la séance d'instruction (déposition des parties) serait fixée dans le courant
du premier trimestre 2019, étant donné que " le rang des causes de la Cour
(...) a[vait] déjà été établi jusqu'à la fin de l'année en cours ". Par lettre
du 12 décembre 2018, le juge instructeur a prié les mandataires des parties de
lui communiquer leurs disponibilités en vue de fixer l'audience d'instruction.
Après avoir interpellé une nouvelle fois le conseil de la demanderesse -
celui-ci y donnant suite le 9 janvier 2019 en indiquant que seule la date du 15
mars 2019 pourrait lui convenir -, le juge instructeur a arrêté, par avis du 11
janvier 2019, la date de la séance d'instruction au 15 mars 2019.

A.e. Par courrier du 5 décembre 2018, la demanderesse a reproché au juge
délégué son inaction. A ses yeux, celle-ci " confinait au déni de justice " et
était de nature " à favoriser la thèse et le comportement de la partie adverse
dans une mesure telle qu'elle apparai[ssait] objectivement comme un choix
intentionnel de laisser ce dossier " dormir ", afin que la demanderesse, lassée
de voir que de toute façon une victoire judiciaire interviendrait plusieurs
années après les faits, ne finisse par renoncer à ses prétentions. " Au terme
de sa lettre, le conseil de la demanderesse, relevant que le comportement
reproché semblait constitutif d'une prévention apparente au titre de l'art. 47
al. 1 let. f CPC, priait le juge cantonal de se déterminer sur les
justifications de son inaction ainsi que sur ses facultés à juger la cause dans
des conditions respectueuses de la garantie d'indépendance et d'objectivité.

En date du 6 décembre 2018, le juge cantonal Bertrand Dayer a contesté n'avoir
rien entrepris depuis l'audience d'instruction du 16 novembre 2017, en se
référant aux écritures des parties et aux ordonnances postérieures à cette
date. Il a exposé que seule la " très importante et chronique surcharge " du
tribunal expliquait l'allongement du temps de traitement des procédures. Tout
en déplorant cette situation d'engorgement judiciaire, il a estimé que la
longueur de la procédure ne permettait pas de mettre en doute son impartialité.

Par pli du 20 décembre 2018, la demanderesse a soutenu une nouvelle fois que la
gestion du dossier par le juge cantonal Bertrand Dayer mettait en cause son
impartialité et son indépendance. Tout en le priant de se déterminer sur le
contenu de sa lettre, elle l'invitait à tirer les conséquences de cette
situation et à confier la cause à l'un de ses collègues.

Le 28 décembre 2018, le juge délégué a formellement contesté les griefs
formulés à son encontre.

B. 

Par requête du 1er février 2019 adressée au Président du Tribunal cantonal du
canton du Valais, A.________ SA a sollicité la récusation du juge cantonal
Bertrand Dayer.

Ce dernier a fermement contesté la demande de récusation formée à son endroit,
se référant pour le surplus aux courriers qu'il avait adressés au mandataire de
la demanderesse en date des 6 et 28 décembre 2018.

Statuant le 7 mars 2019, le Président du Tribunal cantonal du canton du Valais
a rejeté la requête de récusation. Ses considérants seront discutés dans la
suite du présent arrêt.

C. 

Le 8 avril 2019, A.________ SA (ci-après: la recourante) a formé un recours en
matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut à la réforme de l'arrêt
cantonal, en ce sens que la récusation du juge cantonal Bertrand Dayer
(ci-après: l'intimé) soit ordonnée.

L'intimé et l'autorité précédente, qui a produit le dossier de la cause, n'ont
pas été invités à déposer une réponse.

Considérant en droit :

1.

1.1. Les décisions qui sont notifiées séparément et qui portent sur une demande
de récusation sont susceptibles d'un recours selon l'art. 92 al. 1 LTF.

1.2. En vertu du principe de l'unité de la procédure, la voie de recours contre
une décision incidente est déterminée par le litige principal (ATF 137 III 380
consid. 1.1). En l'occurrence, la procédure dans le cadre de laquelle la
requête de récusation a été formée ressortit au droit de la concurrence
déloyale, de sorte que la décision rendue dans cette cause est sujette au
recours en matière civile (art. 72 al. 1 LTF).

1.3. Lorsque le droit fédéral prévoit une instance cantonale unique, le recours
en matière civile est recevable indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74
al. 2 let. b LTF) et, contrairement à la règle générale (cf. art. 75 al. 2
LTF), le tribunal supérieur n'a pas à statuer sur recours (art. 75 al. 2 let. a
LTF).

Dans les litiges qui relèvent de la loi fédérale du 19 décembre 1986 contre la
concurrence déloyale (LCD), et dont la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr.,
l'art. 5 al. 1 let. d CPC prévoit une instance cantonale unique. En
l'occurrence, l'intimé a considéré que ce cas de figure était réalisé et a agi
en application des règles de compétence y relatives; en l'état et dans le cadre
du présent recours, il n'y a pas à remettre en cause cette analyse.

Dans la mesure où la recourante conteste une décision portant sur la récusation
d'un juge d'une instance cantonale unique, un recours immédiat au Tribunal
fédéral est ouvert, à l'exclusion d'un recours selon les art. 319 ss CPC, et
ce, indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b et 75 al. 2
let. a LTF; D ENIS TAPPY, in Commentaire du CPC, 2e éd. 2019, nos 35 et 39 ad
art. 50 CPC; STEPHAN WULLSCHLEGER, in Kommentar zur Schweizerischen
Zivilprozessordnung, 3e éd. 2016, no 21 ad art. 50 CPC; S TAEHELIN ET ALII,
Zivilprozessrecht, 2e éd. 2013, § 6 no 28).

A cet égard, une précision s'impose. Le droit cantonal valaisan prévoit la
possibilité de former un recours au niveau cantonal contre la décision de
récusation concernant un juge cantonal (art. 35 al. 3 let. c et 22 al. 1 let. b
de la loi du 11 février 2009 sur l'organisation de la Justice (LOJ), RS/VS
173.1). Cette voie de droit cantonale est contraire au droit fédéral en tant
qu'elle vise, comme en l'espèce, une décision portant sur la récusation d'un
juge d'une autorité statuant en instance cantonale unique. En effet, toutes les
décisions prises par une instance cantonale unique au sens de l'art. 5 CPC -
qu'il s'agisse de décisions au fond ou non - ne peuvent faire l'objet que d'un
recours au Tribunal fédéral, pour autant que celui-ci soit ouvert (Message du
28 juin 2006 relatif au code de procédure civile suisse, FF 2006 6984; JACQUES
HALDY, in Commentaire du CPC, 2e éd. 2019,no 9 ad art. 5 CPC; T HEODOR HÄRTSCH,
in Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO], 2010, nos 36 s.). Cette exigence
s'applique également à la décision de récusation, qui n'est pas formellement
rendue par l'instance cantonale unique, mais qui vise l'un des juges qui la
compose (TAPPY, op. cit., nos 35 et 39 ad art. 50 CPC; WULLSCHLEGER, op. cit.,
no 21 ad art. 50 CPC). Partant, seule la voie du recours au Tribunal fédéral
est ouverte en l'espèce.

1.4. Au surplus, le recours est exercé par une partie qui possède un intérêt
digne de protection à la modification de la décision entreprise et qui a donc
qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF); il a été déposé dans le délai (art.
45 al. 1 et 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il
convient dès lors d'entrer en matière.

2.

2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits retenus par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les
constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement
inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art.
105 al. 2 LTF). "Manifestement inexactes" signifie ici "arbitraires" (ATF 140
III 115 consid. 2 p. 117; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la
correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97
al. 1 LTF). La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict
de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p.
266 et les références).

La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente
doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions
seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 p. 18 et les références).

2.2. En matière d'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient,
du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris
le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de
tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments
recueillis, des déductions insoutenables (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266;
137 III 226 consid. 4.2).

3. 

Dans un premier moyen, la recourante, invoquant l'art. 9 Cst., reproche à
l'autorité précédente d'avoir opéré une constatation manifestement inexacte des
faits.

3.1. Elle soutient tout d'abord que le Président du Tribunal cantonal du canton
du Valais, en décrivant de façon détaillée ce que l'intimé a entrepris lors de
l'instruction de la cause, aurait de la sorte minimisé ses périodes d'inaction,
laissant ainsi entendre que celui-ci a dû faire face à des périodes d'activité
intense. L'autorité précédente aurait ainsi dépeint les faits de manière
manifestement inexacte.

Semblable argumentation tombe à faux. Dans la décision attaquée, l'autorité
précédente a retracé précisément le déroulement de la procédure instruite par
l'intimé. En procédant de la sorte, elle n'a ainsi nullement constaté les faits
de façon inexacte. Savoir si, sur la base des constatations de fait qui lient
la Cour de céans, l'autorité cantonale a nié à bon droit toute prévention de
l'intimé est une question de droit qui sera examinée plus loin (cf. infra
 consid. 4.4).

3.2. La recourante fait ensuite grief à l'autorité cantonale d'avoir considéré
à tort que l'article de presse, paru dans l'édition de Y.________ du... 2018 et
produit à l'appui de la requête de récusation, était sans pertinence pour
statuer sur le sort de cette demande. A en croire l'intéressée, ledit article
serait primordial car il démontrerait que l'intimé, en laissant " dormir " le
dossier, aurait nécessairement favorisé la défenderesse. En écartant cette
pièce, l'autorité précédente aurait dès lors constaté les faits de manière
erronée.

Tel qu'il est présenté le grief ne saurait prospérer. Force est d'emblée de
relever qu'en reprochant à l'autorité cantonale d'avoir établi les faits de
manière inexacte, la recourante s'en prend à l'appréciation des preuves, sans
toutefois démontrer en quoi celle-ci serait arbitraire. La recevabilité de son
grief apparaît dès lors douteuse. Quoi qu'il en soit, la Cour de céans ne
décèle aucun arbitraire dans l'appréciation des preuves effectuée par
l'autorité précédente. En effet, la parution de l'article de presse précité ne
permet pas d'en déduire ipso facto que l'intimé, en laissant prétendument
traîner la procédure, aurait nécessairement favorisé la société éditant 
Y.________.

4.

4.1. 

Dans un second moyen, la recourante dénonce la violation des art. 29 al. 1 et
30 Cst. ainsi que de l'art. 47 al. 1 let. f CPC. Avant d'examiner les mérites
des critiques formulées par l'intéressée au soutien de ce moyen, il convient de
rappeler les principes juridiques applicables en la matière.

4.1.1. L'art. 29 al. 1 Cst. garantit à toute personne, dans une procédure
judiciaire ou administrative, le droit à ce que sa cause soit traitée dans un
délai raisonnable. Cette disposition consacre le principe de célérité ou, en
d'autres termes, prohibe le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette
garantie constitutionnelle lorsqu'elle ne rend pas la décision qu'il lui
incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que la
nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître
comme raisonnable. Le caractère raisonnable du délai s'apprécie selon les
circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de
l'affaire, à l'enjeu du litige pour l'intéressé, à son comportement ainsi qu'à
celui des autorités compétentes (ATF 143 IV 373 consid. 1.3.1 p. 377). A cet
égard, il appartient au justiciable d'entreprendre ce qui est en son pouvoir
pour que l'autorité fasse diligence, que ce soit en l'invitant à accélérer la
procédure ou en recourant, le cas échéant, pour retard injustifié (ATF 130 I
312 consid. 5.2; arrêt 2C_1058/2017 du 5 février 2019 consid. 8.1). Par
ailleurs, on ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont
inévitables dans une procédure. Lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment
choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut (ATF 130 I 312 consid.
5.2).

4.1.2. La garantie d'un juge indépendant et impartial telle qu'elle résulte des
art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH - lesquels ont, de ce point de vue, la même
portée - permet, indépendamment du droit de procédure (en l'occurrence l'art.
47 CPC), de demander la récusation d'un magistrat dont la situation ou le
comportement est de nature à susciter des doutes quant à son impartialité. Elle
vise à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent
influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose
pas la récusation uniquement lorsqu'une prévention effective est établie, car
une disposition interne de la part du juge ne peut être prouvée; il suffit que
les circonstances donnent l'apparence d'une prévention et fassent redouter une
activité partiale du magistrat; cependant, seules les circonstances
objectivement constatées doivent être prises en considération, les impressions
purement individuelles n'étant pas décisives (ATF 144 I 159 consid. 4.3; 142
III 732 consid. 4.2.2; 142 III 521 consid. 3.1.1; 140 III 221 consid. 4.1; 139
III 120 consid. 3.2.1, 433 consid. 2.1.2; 139 I 121 consid. 5.1; 138 I 1
consid. 2.2; 138 IV 142 consid. 2.1).

L'art. 47 CPC dresse une liste exhaustive des motifs de récusation. Le juge
d'une cause civile est récusable dans les cas énumérés à l'art. 47 al. 1 let. a
à e CPC; il est aussi récusable, selon l'art. 47 al. 1 let. f CPC - qui
constitue une clause générale -, s'il est « de toute autre manière » suspect de
partialité. Selon la jurisprudence, l'art. 47 CPC doit être appliqué dans le
respect des principes de la garantie d'un tribunal indépendant et impartial
instituée par les art. 6 par. 1 CEDH et 30 al. 1 Cst. (ATF 140 III 221 consid.
4.2 p. 222; 139 III 433 consid. 2.2 i.f. p. 441).

Des erreurs de procédure ou d'appréciation commises par un juge ne suffisent
pas à fonder objectivement la suspicion de partialité, même lorsque ces erreurs
sont établies; seules des fautes particulièrement lourdes ou répétées, qui
doivent être considérées comme des violations graves des devoirs du magistrat,
peuvent avoir cette conséquence (ATF 138 IV 142 consid. 2.3 p. 146; 116 Ia 135
consid. 3a p. 138).

Dans un arrêt non publié rendu en matière de privation de liberté à des fins
d'assistance, le Tribunal fédéral a considéré que la partialité d'un juge
pouvait résulter de son inactivité (arrêt 5A_819/2011 du 13 décembre 2011).

4.1.3. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CPC, la partie qui entend obtenir la
récusation d'un magistrat ou d'un fonctionnaire judiciaire la demande au
tribunal aussitôt qu'elle a eu connaissance du motif de récusation. A défaut,
elle est déchue du droit de s'en prévaloir ultérieurement (ATF 136 I 207
consid. 3.4 p. 211; ATF 134 I 20 consid. 4.3.1 p. 21). L'art. 49 CPC ne fixe
pas de délai pour solliciter la récusation, mais précise qu'elle doit être
requise " aussitôt " après la connaissance du motif invoqué. Cela rejoint les
exigences des art. 36 al. 1 LTF et 58 al. 1 CPP (TAPPY, op. cit., no 10 ad art.
49 CPC). Dans plusieurs arrêts rendus en matière de procédure pénale, le
Tribunal fédéral a considéré qu'une demande déposée deux ou trois semaines
après la découverte du motif de récusation était tardive (arrêts 1B_274/2013 du
19 novembre 2013 consid. 4.1; 1B_499/2012 du 7 novembre 2012 consid. 2.3). La
Cour de céans a laissé ouverte la question de savoir si " aussitôt " pouvait
signifier plus de dix jours (arrêt 4A_600/2015 du 1er avril 2016 consid. 6.3).
Elle a en revanche jugé qu'une requête formée 40 jours après la connaissance du
motif de récusation était manifestement incompatible avec l'art. 49 al. 1 CPC
(arrêt 4A_104/2015 du 20 mai 2015 consid. 6).

4.2. 

Dans la décision attaquée, l'autorité précédente a nié toute prévention de
l'intimé découlant d'une prétendue violation du principe de célérité. En
substance, elle a considéré que seule une période de latence d'environ huit
mois s'était écoulée. L'appréciation d'ensemble du dossier ne permettait
nullement de retenir que l'intimé aurait laissé " dormir " l'affaire, celui-ci
ayant plutôt fait montre de célérité en exerçant une activité continue.

Par ailleurs, l'autorité cantonale a écarté la thèse selon laquelle l'intimé
aurait choisi de favoriser les Editions Y.________ SA par peur de la vindicte
de cet organe de presse. Elle a relevé que cette affirmation ne reposait sur
aucun élément et qu'elle semblait plutôt relever de l'extrapolation.

Par surabondance, l'autorité précédente a émis des doutes quant à la
recevabilité de la requête de récusation au vu de sa tardiveté. Elle a
toutefois laissé la question indécise.

4.3. 

La recourante reproche à l'autorité précédente d'avoir nié toute prévention de
l'intimé. A l'en croire, ce dernier aurait violé le principe de célérité
témoignant ainsi, par son inaction, de sa volonté de favoriser la société
éditant Y.________.

4.4. 

Considéré à la lumière des principes rappelés supra (cf. consid. 4.1.1 -
4.1.3), le grief soulevé ne résiste pas à l'examen.

Il sied d'emblée de souligner que la requête de récusation déposée le 1er
février 2019 apparaît abusive. En effet, si la recourante s'est certes enquise
de l'avancement de la procédure par courrier du 25 avril 2017, elle ne s'est en
revanche plus jamais souciée de la prétendue lenteur de la procédure avant son
courrier du 5 décembre 2018. Après avoir invité l'intimé à se déterminer sur
les reproches qu'elle formulait à son encontre - ce que ce dernier a fait les 6
et 28 décembre 2018 -, la recourante qui, par le truchement de son conseil, a
expressément cité la date du 15 mars 2019 en vue de fixer l'audience
d'instruction, a attendu plus d'un mois avant de solliciter formellement la
récusation de l'intimé. Dans la mesure où l'intervention du 5 décembre 2018 de
la recourante auprès de l'intimé a porté ses fruits, ce dernier ayant
immédiatement réagi et pris des mesures concrètes en proposant des dates aux
parties en vue de fixer l'audience d'instruction, la requête de récusation
formée le 1er février 2019 en raison d'un prétendu ralentissement délibéré de
la procédure se révèle dénuée de tout fondement.

Ensuite, l'on ne saurait suivre la recourante lorsqu'elle soutient que l'intimé
aurait laissé délibérément " dormir " l'affaire. S'il est vrai qu'une période
de plus d'un an s'est écoulée entre l'ordonnance de preuves rendue le 28
septembre 2016 et la séance d'audition de témoins du 16 novembre 2017, cela ne
signifie pas encore que l'intimé soit resté inactif durant ce laps de temps. Il
a en effet procédé à plusieurs mesures d'instruction. Il a ainsi invité les
parties à produire des questionnaires en vue de l'audition des témoins et a
requis production du rapport établi par les experts W.________ et X.________.
Afin d'éviter que les mêmes témoins ne soient entendus à deux reprises dans des
causes parallèles, l'intimé a précisé aux parties que leur audition
interviendrait dans le courant de l'automne 2017, ce qui n'a suscité aucune
objection de leur part. S'il est exact que la procédure a connu un " temps mort
" à compter du 1er mars 2018, date à laquelle l'intimé a admis les nouvelles
pièces produites par la recourante, l'on ne saurait déduire de ce seul fait une
volonté de l'intimé de laisser " dormir " la procédure, trahissant une
quelconque forme de prévention. Au regard de l'ensemble des circonstances, la
durée de la procédure, si elle est certes longue, apparaît encore raisonnable.
C'est le lieu en outre de rappeler que la recourante ne s'est jamais plainte de
la lenteur de la procédure entre le 25 avril 2017 et le 5 décembre 2018. Si
réellement elle estimait que le Tribunal tardait de façon injustifiée à
statuer, il lui était loisible d'interpeller le tribunal, voire de recourir
pour déni de justice au sens de l'art. 319 let. c CPC, ce qu'elle s'est
pourtant bien gardée de faire.

Enfin, on relèvera que l'affirmation péremptoire de la recourante selon
laquelle l'intimé, par son comportement, aurait eu pour but de favoriser la
société éditant Y.________ n'est étayée par aucune preuve.

Sur le vu de ce qui précède, le moyen pris d'une violation des art. 29 et 30
Cst. ainsi que de l'art. 47 al. 1 let. f CPC se révèle infondé.

5. 

En définitive, le recours doit être rejeté.

La recourante, qui succombe, devra payer les frais de la procédure fédérale
(art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 3 LTF),
des déterminations de la part de l'intimé n'ayant au demeurant pas été
demandées.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté.

2. 

Les frais judiciaires, fixés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Président du Tribunal
cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 4 juin 2019

Au nom de la Ire Cour de droit civil

du Tribunal fédéral suisse

La Présidente : Kiss

Le Greffier : O. Carruzzo