Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.82/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

2C_82/2019

Arrêt du 18 septembre 2019

IIe Cour de droit public

Composition

M. et Mmes les Juges fédéraux Zünd, Juge présidant, Aubry Girardin et Hänni.

Greffière : Mme Kleber.

Participants à la procédure

APG/SGA Société Générale d'Affichage SA, représentée par Me Tobias Zellweger,
avocat,

recourante,

contre

Neo Advertising SA,

représentée par Me Bertrand R. Reich, avocat,

intimée,

Ville de Genève.

Objet

Concession d'affichage sur le domaine public,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre administrative, 2ème section, du 27 novembre 2018 (ATA/1271/
2018).

Faits :

A.

A.a. Le 19 juillet 2016, la Ville de Genève a lancé un appel à candidatures en
vue de l'attribution de la concession d'affichage papier sur son domaine
public, pour une durée de cinq ans, soit du 1er janvier 2017 au 31 décembre
2021.

Selon le cahier des charges, les prestations fournies devaient comprendre
l'affichage commercial, l'affichage populaire, l'affichage culturel,
l'affichage en faveur de la Ville, l'affichage officiel et l'affichage
politique. Le montant de la redevance devait être au minimum de 280'000 fr. par
mois durant la première année (soit 3'360'000 fr. par an). L'art. 25 al. 2 de
la loi genevoise sur les procédés de réclame du 9 juin 2000 (LPR; RS/GE F 3 20)
était réservé.

Le dossier de procédure précisait que les offres seraient exclusivement
évaluées selon cinq critères, pondérés comme suit: critère 1, montant de la
redevance nette versée à la Ville la première année, 70 %; critère 2,
compétences techniques et qualité des prestations dans le cadre de projets
similaires, expérience et références du candidat, 10 %; critère 3, capacité
économique (garanties de solvabilité et de la pérennité de l'entreprise), 10 %;
critère 4, organisation du candidat, notamment concernant la compétence et la
disponibilité du personnel pour le marché concerné, 5 %; critère 5, utilisation
de moyens respectueux de l'environnement, 5 %.

Dans le délai prescrit, trois entreprises ont fait une offre, dont Société
Générale d'Affichage SA (ci-après: SGA), de siège à Zurich, et Neo Advertising
SA (ci-après: Neo), de siège à Genève.

A.b. Le Comité d'évaluation a tenu des séances les 7 octobre et 4 novembre 2016
et a proposé au conseil administratif de la Ville de Genève d'adjuger la
concession d'affichage à Neo.

SGA avait proposé une redevance pour la première année de concession de
4'752'000 fr. et Neo une redevance de 5'311'231 fr. SGA escomptait des recettes
brutes totales de 9'875'225 fr. et Neo de 10'622'462 fr.

Le comité d'évaluation a attribué les notes suivantes à SGA et à Neo:

           Neo SGA

critère 1    5   4

critère 2    3   5

critère 3    2   5

critère 4    4   5

critère 5    5   4

 

Une fois les critères pondérés, Neo obtenait la note de 4,45 et SGA la note de
4,25. La troisième société candidate a obtenu la note de 3.

B. 

Par décision du 16 novembre 2016, le conseil administratif de la Ville de
Genève a attribué la concession d'affichage à Neo. Contre cette décision, SGA a
formé un recours auprès du Tribunal administratif de première instance de la
République et canton de Genève, qui l'a rejeté par jugement du 21 juin 2017.
SGA a recouru auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice de la
République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice). Le 19 décembre
2017, la Ville de Genève a précisé que la durée des contrats de concession
conclus de gré à gré pour des périodes de six mois avec Neo durant la procédure
ne serait pas déduite de la durée de la concession de cinq ans attribuée au
concessionnaire. Par arrêt du 27 novembre 2018, la Cour de justice a rejeté le
recours formé par SGA.

C. 

Agissant par la voie du recours en matière de droit public, SGA demande au
Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, outre l'effet suspensif,
d'annuler l'arrêt de la Cour de justice du 27 novembre 2018, d'annuler la
décision de la Ville de Genève du 16 novembre 2016, et, principalement, de lui
attribuer la concession d'affichage sur le domaine public de la Ville de Genève
pour la période 2017-2021. Subsidiairement, elle sollicite le renvoi de la
cause à la Ville de Genève pour nouvelle décision.

La Cour de justice, Neo et la Ville de Genève s'en sont rapportés à justice
quant à la requête d'effet suspensif. Par ordonnance du 13 février 2019, le
Président de la II ^e Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la
demande d'effet suspensif en ce sens qu'est empêchée la signature du contrat de
concession entre la Ville de Genève et Neo. 

La Cour de justice ne formule pas d'observations, s'en rapporte à justice quant
à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif
de son arrêt. Neo s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et
conclut, au fond, à son rejet dans la mesure de sa recevabilité, sous suite de
dépens. La Ville de Genève conclut principalement au rejet du recours sous
suite de frais et dépens et, subsidiairement, à être "acheminée à prouver par
toutes voies de droit les faits allégués" dans ses écritures. La Commission de
la concurrence (COMCO) a renoncé à déposer une prise de position.

SGA a répliqué, en maintenant ses conclusions. Neo a dupliqué, en réitérant ses
conclusions. La Ville de Genève a également dupliqué en persistant dans ses
conclusions.

Considérant en droit :

1. 

L'intimée a demandé, à titre préalable, au Tribunal fédéral de soustraire à la
consultation des parties toute pièce ou information versée à la procédure
relative à son offre, la construction de son offre, sa situation économique,
financière et/ou bilancielle ou relevant de son secret d'affaires à quelque
autre titre.

Sa requête est sans objet, car aucun document du type décrit n'a été versé dans
le cadre de la procédure fédérale et le dossier transmis par l'autorité
précédente (cf. art. 102 al. 2 LTF) n'en contient pas non plus. Le Tribunal
administratif de première instance a en effet déjà écarté, par décision du 1er
mars 2017, les pièces confidentielles relatives à Neo.

2.

2.1. L'arrêt attaqué, qui confirme l'octroi d'une concession portant sur un
monopole d'affichage sur le domaine public, est une décision finale (art. 90
LTF) rendue dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), par un
tribunal cantonal supérieur statuant en dernière instance, sans qu'un recours
auprès du Tribunal administratif fédéral ne soit ouvert (art. 86 al. 1 let. d
et al. 2 LTF). La transmission d'une concession portant sur un monopole
d'affichage sur le domaine public telle que celle du cas d'espèce ne relève pas
des marchés publics dès lors que son octroi n'est pas subordonné à des
contre-prestations devant faire l'objet d'un marché public (cf. ATF 143 II 120
consid. 2.2.1 p. 122; 135 II 49 consid. 4.4 p. 56; 125 I 209 consid. 6b p. 212
ss). Par conséquent, l'art. 83 let. f LTF, qui soumet le recours en matière de
droit public contre les décisions en matière de marchés publics à deux
conditions cumulatives, n'est pas applicable en l'espèce (cf. ATF 143 II 120
consid. 2 p. 122 s.). L'arrêt entrepris ne tombe sous le coup d'aucune autre
exception de l'art. 83 LTF. Il peut donc en principe faire l'objet d'un recours
en matière de droit public.

2.2. Le recours a par ailleurs été formé en temps utile compte tenu des féries
(art. 100 al. 1 LTF et 46 al. 1 let. c LTF) et dans les formes prescrites (art.
42 LTF). La recourante, destinataire de l'arrêt attaqué, a un intérêt digne de
protection à son annulation ou à sa modification, de sorte qu'elle a la qualité
pour recourir (art. 89 al. 1 LTF). Le recours est ainsi recevable et il
convient d'entrer en matière.

2.3. Toutefois, la conclusion tendant à l'annulation de la décision de la Ville
de Genève du 16 novembre 2016 est irrecevable en raison de l'effet dévolutif
complet du recours auprès de la Cour de justice (ATF 136 II 101 consid. 1.2 p.
104; pour Genève: arrêt 2C_886/2012 du 29 juin 2013 consid. 1, non publié in
ATF 139 II 529).

3.

3.1. Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du
droit au sens des art. 95 et 96 LTF. Sous réserve des cas visés à l'art. 95
let. c-e LTF, la violation du droit cantonal en tant que tel ne peut être
invoquée devant le Tribunal fédéral. Il est néanmoins possible de faire valoir
que son application consacre une violation du droit fédéral, comme la
protection contre l'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou la garantie d'autres
droits constitutionnels (ATF 143 I 321 consid. 6.1 p. 324; 141 IV 305 consid.
1.2 p. 308). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1
LTF). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il ne connaît toutefois de la
violation des droits fondamentaux, ainsi que de celle de dispositions de droit
cantonal et intercantonal, que si ce grief a été invoqué et motivé par la
partie recourante, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de
façon claire et détaillée (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368; 141 I 36 consid.
1.3 p. 41; 135 III 232 consid. 1.2 p. 234).

3.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF), hormis dans les cas visés à l'art. 105 al. 2
LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations
de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte -
notion qui correspond à celle d'arbi-traire - ou en violation du droit au sens
de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le
sort de la cause (ATF 142 II 355 consid. 6 p. 358; 139 II 373 consid. 1.6 p.
377). La partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces
conditions seraient réalisées (cf. art. 106 al. 2 LTF). A défaut, il n'est pas
possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui retenu dans
l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur
des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur
l'appréciation des preuves (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266; 139 II 404
consid. 10.1 p. 445; 137 II 353 consid. 5.1 p. 356).

4. 

La recourante fait valoir que l'art. 25 al. 2 de la loi genevoise sur les
procédés de réclame du 9 juin 2000 (LPR; RS/GE F 3 20), auquel il était fait
référence dans l'appel d'offres litigieux, fait obstacle à la bonne application
de l'art. 2 al. 7 de la loi fédérale sur le marché intérieur du 6 octobre 1995
(LMI; RS 943.02), car il déploierait un effet de distorsion de la concurrence.
Se prévalant de la primauté du droit fédéral (art. 49 Cst.), elle considère que
l'application de l'art. 25 al. 2 LPR devait être écartée en l'espèce.

4.1. Le principe de la primauté du droit fédéral, inscrit à l'art. 49 al. 1
Cst., fait obstacle à l'adoption ou à l'application de règles cantonales qui
éludent des prescriptions de droit fédéral ou qui en contredisent le sens ou
l'esprit, notamment par leur but ou par les moyens qu'elles mettent en oeuvre,
ou qui empiètent sur des matières que le législateur fédéral a réglementées de
façon exhaustive (cf. ATF 142 II 369 consid. 5.2 p. 382; 140 I 218 consid. 5.1
p. 221).

4.2. Selon l'art. 2 al. 7 LMI, la transmission de l'exploitation d'un monopole
cantonal ou communal à des entreprises privées doit faire l'objet d'un appel
d'offres et ne peut discriminer des personnes ayant leur établissement ou leur
siège en Suisse.

L'art. 2 al. 7 LMI impose donc deux exigences (découlant du droit des marchés
publics) : un appel d'offres et l'interdiction de discriminer. La mise en place
d'un appel d'offres implique certaines obligations procédurales. La
collectivité publique doit non seulement organiser une procédure permettant aux
personnes (physiques ou morales) privées intéressées par l'exploitation dudit
monopole de déposer une offre, mais aussi attribuer la concession par le biais
d'une décision contre laquelle des voies de droit doivent être ouvertes (cf.
art. 9 al. 1 et 2 LMI; ATF 143 II 598 consid. 4.1.2 p. 606; 143 II 120 consid.
6.4.1 p. 129; 135 II 49 consid. 4.1 p. 52; arrêt 2C_569/2018 du 27 mai 2019
consid. 6.4.1 destiné à la publication). Quant à l'interdiction de discriminer,
elle s'applique non seulement à la procédure d'appel d'offres stricto sensu,
mais aussi à la détermination des critères de sélection et au choix du
concessionnaire; elle impose aussi le respect du principe de transparence, qui
est son corollaire (ATF 143 II 120 consid. 6.4.1 p. 129; arrêt 2C_569/2018 du
27 mai 2019 consid. 6.4.1 destiné à la publication).

4.3. Il convient de rappeler que l'autorité occupe une position intrinsèquement
différente lors du transfert d'un monopole par rapport à celle qu'elle exerce
lors de la passation d'un marché public. Contrairement au marché public dans
lequel la collectivité publique, endossant le rôle de "consommateur", acquiert
auprès d'une entreprise privée, en contre-partie du paiement d'un prix, une
prestation dont elle a besoin pour exécuter ses tâches publiques, l'attribution
d'une concession de monopole cantonal ou communal implique que l'autorité
concédante se trouve dans un rôle "d'offreur" ou de "vendeur", puisqu'elle
cède, moyennant une redevance et diverses prestations annexes, le droit
d'utiliser le domaine public à des fins commerciales (ATF 143 II 120 consid.
6.3.3 p. 129; 135 II 49 consid. 4.2 p. 53; 125 I 209 consid. 6b p. 213; arrêt
2C_569/2018 du 27 mai 2019 consid. 6.4.1 destiné à la publication). Il n'y a
pas de droit à l'obtention d'une concession de monopole, car la collectivité
publique reste libre d'exercer elle-même l'activité en cause (cf. ATF 143 II
120 consid. 6.3.3 p. 129; 142 I 99 consid. 2.2.1 p. 108 s.; 128 I 3 consid. 3b
p. 11; arrêt 2C_569/2018 du 27 mai 2019 consid. 6.4.1 destiné à la
publication). Ces différences justifient de laisser à la collectivité publique
une plus grande liberté dans le choix des critères à remplir par le
concessionnaire et des conditions qu'elle peut lui imposer dans l'exercice du
monopole qu'en matière de marchés publics (cf. ATF 143 II 120 consid. 6.3.3 p.
129; 142 I 99 consid. 2.2.1 p. 108 s.; 128 I 3 consid. 3b p. 11).

4.4. Pour déterminer si concrètement une collectivité publique s'est conformée
aux exigences de l'art. 2 al. 7 LMI lors du transfert d'une concession de
monopole cantonal ou communal, il convient de tenir compte de ces spécificités
(cf. ATF 143 II 120 consid. 6.4.2 p. 130). Il faut toutefois dans tous les cas
que les choix opérés par la collectivité publique respectent les principes de
non-discrimination et de transparence, ce qui signifie que toutes les
entreprises concernées doivent pouvoir déposer une offre avec les mêmes chances
et voir évaluer celle-ci en toute transparence et impartialité (cf. ATF 143 II
120 consid. 6.4.2 p. 130 s.). En effet, par le biais de l'art. 2 al. 7 LMI, le
législateur a cherché à créer une concurrence et une transparence lors du
transfert des concessions de monopole cantonal ou communal (cf. ATF 143 II 120
consid. 6.3.1 p. 127).

4.5. En l'espèce, le dossier de la procédure d'appel d'offres indiquait que le
montant de la redevance serait le premier critère d'attribution de la
concession, avec une pondération à 70 %. Selon le cahier des charges, le
montant de la redevance proposée devait être au minimum de 280'000 fr. par mois
durant la première année (3'360'000 fr. par année). L'art. 25 al. 2 LPR était
réservé.

Selon l'art. 25 al. 1 LPR, les communes peuvent octroyer, par le biais d'une
concession, un droit exclusif d'employer des procédés de réclame sur le domaine
public à une ou plusieurs sociétés. Conformément à l'alinéa 2 de cette
disposition, l'octroi d'une concession donne lieu à une redevance annuelle
globale dont le montant n'excède pas 50 % de la recette brute perçue (al. 2).

4.6. La recourante relève qu'en raison de l'art. 25 al. 2 LPR, la Ville de
Genève ne peut pas exiger plus de 50 % du chiffre d'affaires de la
concessionnaire au titre de la redevance de concession. Du fait de cette règle,
un soumissionnaire ne courrait aucun risque à proposer une redevance de
concession trop élevée au moment de l'appel d'offres, puisque son offre, si
elle venait à être exagérée par rapport à son chiffre d'affaires, ne pourrait
pas lui être opposée par la suite. Selon la recourante, eu égard au renvoi dans
le cahier des charges à l'art. 25 al. 2 LPR, il n'y aurait pas de concurrence
équitable et transparente sur le critère de la redevance, alors même que ce
critère serait en l'espèce l'élément prépondérant. En induisant des offres
excessives, l'art. 25 al. 2 LPR entraverait la concurrence de manière contraire
à l'art. 2 al. 7 LMI.

4.7. Sur un plan général, l'éventuel effet dénoncé par la recourante et dû
selon elle à l'art. 25 al. 2 LPR, à savoir la proposition d'offres surévaluées,
dans le but d'obtenir la concession, tout en sachant que ne pourra être exigée
en définitive que la moitié de la recette brute perçue, bien qu'il concerne
potentiellement tous les candidats, est effectivement problématique. Une
candidature offrant un montant trop élevé ne manquerait toutefois pas d'attirer
l'attention sur le caractère irréaliste de l'offre et son auteur pourrait se
voir demander des explications complémentaires. Les autorités n'ont en effet
aucun intérêt à octroyer une concession contre une redevance qui n'atteindra
jamais le montant prévu. Elles sont en outre en mesure, en comparant les
offres, de les contrôler, afin de déterminer, d'une part, si le chiffre
d'affaires annoncé par un candidat est réaliste et, d'autre part, si la
redevance proposée ne dépasse pas 50 % des recettes brutes envisagées. A cet
égard, si l'art. 25 al. 2 LPR est potentiellement de nature à influencer à la
hausse les offres des candidats, il incite dans le même temps la collectivité à
contrôler la crédibilité de ces offres, puisqu'il limite le montant qui pourra
être finalement exigé du concessionnaire à la moitié de la recette brute
réalisée.

Ainsi, de manière générale, on ne comprend pas en quoi l'art. 25 al. 2 LPR
serait susceptible de fausser la concurrence et violerait l'art. 2 al. 7 LMI
dans son principe.

4.8. Dans le cas concret, la recourante allègue que l'appel d'offres litigieux
poussait les candidats à présenter des offres "ambitieuses", puisque la
redevance minimum annuelle avait été arrêtée à 3'360'000 fr. et que le critère
du montant de la redevance était pondéré à 70 %.

Il résulte de l'arrêt entrepris que l'intimée et la recourante ont déposé des
offres très proches s'agissant du montant de la redevance, soit 5'311'231 fr.
pour l'intimée et 4'752'000 fr. pour la recourante. Ce constat, qui, n'en
déplaise à la recourante, est parfaitement objectif et n'implique aucune
appréciation, permet d'écarter l'hypothèse d'une distorsion de concurrence due
à l'art. 25 al. 2 LPR. On ne saurait en effet considérer, au vu de la proximité
des montants, qu'une candidate a déposé une offre volontairement surévaluée, en
escomptant sur l'effet de l'art. 25 al. 2 LPR pour réduire le montant de la
redevance effectivement due, et pas l'autre.

Par ailleurs, ainsi que l'a souligné la Cour de justice, la recourante aurait
pu proposer une offre à 50 % de son chiffres d'affaires annoncé de 9'875'225
fr. Le montant de la redevance aurait ainsi été de 4'937'612 fr. 50, ce qui
aurait amélioré de quelque 200'000 fr. la proposition qu'elle a soumise
(4'752'000 fr.). Comme devant les juridictions précédentes, la recourante
n'explique nullement pourquoi elle n'a pas formulé une offre en ce sens. Or, on
ne voit pas en quoi l'art. 25 al. 2 LPR aurait eu une incidence sur le choix de
la recourante de faire une offre de redevance en deçà de la limite fixée par
cette disposition.

4.9. Il convient encore d'ajouter que le cahier des charges de la soumission
litigieuse contenait des dispositions propres à éviter qu'une offre surévaluée
ne soit retenue dans le cas concret. En effet, d'après l'art. 5.9 du dossier de
procédure, chaque candidat devait annoncer les recettes qu'il entendait tirer
des activités concédées et ces éléments allaient être évalués par l'autorité.
La Cour de justice a par ailleurs relevé que le Comité d'évaluation, lors de
son analyse, devrait être en mesure de déceler un éventuel abus sous la forme
d'une offre surévaluée. Ainsi, même à suivre la recourante quant à l'effet de
l'art. 25 al. 2 LPR sur les offres des candidats, le contrôle effectué par
l'autorité aurait permis d'y remédier. Dans la mesure où la recourante allègue
que le Comité d'évaluation est composé de fonctionnaires de la Ville qui ne
disposeraient que d'une connaissance indirecte du marché de l'affichage
commercial et ne seraient pas en mesure de faire des pronostics fiables sur le
chiffre d'affaires réalisable, elle se place sur le terrain de la critique
appellatoire, qui n'est pas admissible devant le Tribunal fédéral (cf. supra
 consid. 3.2). Quant à son argument selon lequel le contrôle serait de toute
façon biaisé, car la Ville voudrait encaisser la redevance la plus élevée, il
suffit de relever, ainsi qu'il a déjà été souligné (cf. supra consid. 4.7), que
l'autorité n'a au contraire aucun intérêt à choisir une offre surévaluée,
puisqu'elle ne pourra par la suite, précisément en raison de l'art. 25 al. 2
LPR, exiger du concessionnaire que la moitié de la recette brute effectivement
réalisée. En ce sens, le fait que l'art. 25 al. 2 LPR soit réservé dans le
cahier des charges constitue une garantie d'évaluation de la crédibilité des
offres déposées et une garantie de transparence pour les candidats, qui savent
ainsi à quoi s'en tenir. En tant que la recourante dénonce un manque de
prévisibilité, ainsi qu'un risque d'abus et de manipulation de la part du
concédant du fait du renvoi à l'art. 25 al. 2 LPR, sa critique tombe ainsi à
faux.

4.10. La recourante se plaint encore de ce que l'offre de redevance retenue
dépasserait le double du montant qu'elle-même versait en 2016 lorsqu'elle était
concessionnaire.

Il a été constaté, dans l'arrêt entrepris, d'une manière qui lie le Tribunal
fédéral (cf. art. 105 al. 1 LTF), une tendance à la hausse des redevances
d'affichage dans tous les cantons, indépendamment de l'existence d'une
disposition similaire à l'art. 25 al. 2 LPR. Cela démontre qu'il n'y a pas de
lien entre cette disposition et le montant des offres articulées par les
candidats. Pour le surplus, des redevances plus élevées, impliquant de
meilleures recettes pour les collectivités publiques, sont le signe d'une
concurrence efficace, de sorte qu'on peine à comprendre ce qu'entend déduire la
recourante du fait qu'elle s'acquittait de montants bien moins élevés par le
passé.

4.11. En définitive, on ne discerne pas en quoi la réserve en faveur de l'art.
25 al. 2 LPR indiquée dans le cahier des charges serait susceptible de biaiser
la concurrence ou l'aurait biaisée dans le cas particulier, ni en quoi cette
réserve rendrait le cahier des charges imprévisible et peu transparent. Il
n'apparaît ainsi pas que l'art. 25 al. 2 LPR soit, dans son principe ou dans la
façon dont il a été mis en oeuvre dans l'offre litigieuse, contraire à l'art. 2
al. 7 LMI. Il s'ensuit que le grief tiré de la violation du principe de la
primauté du droit fédéral consacré à l'art. 49 Cst. est rejeté.

4.12. Sur le vu de cette conclusion, il n'est pas nécessaire d'examiner si,
comme le font valoir l'intimée et la Ville de Genève, la recourante commet un
abus de droit, respectivement adopte une attitude contraire à la bonne foi, en
se plaignant d'une disposition dont elle s'est prévalue jusqu'à présent pour
réduire le montant des redevances dont elle s'acquittait et en prétendant que
l'offre de sa concurrente n'est pas crédible, alors qu'elle est pratiquement
identique à la sienne.

5. 

Toujours en lien avec la redevance, la recourante se plaint d'arbitraire (art.
9 Cst.). Compte tenu de l'art. 25 al. 2 LPR, le critère de la redevance serait,
selon elle, vide de sens. Elle reproche à la Cour de justice de ne pas avoir
examiné l'effet combiné de la pondération du critère du montant de la redevance
(70 %) et de la règle posée à l'art. 25 al. 2 LPR. L'arrêt querellé résulterait
ainsi d'une application arbitraire du droit cantonal. La recourante considère
que la situation actuelle, à savoir le paiement d'une redevance minimale de
280'000 fr. par mois par l'intimée alors que celle-ci avait promis une
redevance mensuelle de 442'602 fr., démontrerait que la prépondérance du
critère de la redevance serait insoutenable, puisque ce critère resterait sans
conséquence sur les montants finalement versés.

5.1. Une décision est arbitraire (art. 9 Cst.) lorsqu'elle contredit clairement
la situation de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe
juridique clair et indiscuté ou qu'elle heurte d'une manière choquante le
sentiment de la justice et de l'équité. Il n'y a pas arbitraire du seul fait
qu'une solution autre que celle de l'autorité cantonale semble concevable,
voire préférable. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il
ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; il faut encore que cette
décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 318 consid. 5.4 p. 326
s.).

5.2. En l'occurrence, dès lors que les offres proposées font l'objet d'un
contrôle par un comité d'évaluation et que celui-ci n'a aucun intérêt à retenir
une offre surévaluée (cf. supra consid. 4.9), on ne voit pas que le critère de
la redevance serait vide de sens et que sa pondération à 70 % serait
insoutenable. Il sera à cet égard rappelé la liberté dont jouit l'autorité dans
le choix des critères en cas d'octroi d'une concession (cf. supra consid. 4.3).
Si la jurisprudence a précisé que la collectivité publique doit pouvoir
s'écarter du critère de l'offre économiquement la plus favorable pour s'appuyer
sur des considérations poursuivant d'autres intérêts publics (ATF 143 II 120
consid. 6.4.2 p. 130), l'autorité n'en demeure pas moins libre de conférer au
critère économique un poids prépondérant.

Pour le surplus, et ainsi que l'a relevé à bon droit la Cour de justice, la
recourante ne peut rien déduire du montant convenu dans les contrats conclus
entre la Ville de Genève et l'intimée, afin d'assurer l'affichage sur le
domaine public de la Ville pendant la durée de la procédure, car ces contrats
sortent du cadre du présent litige. Au demeurant, on ne connaît pas la manière
dont la redevance y est calculée et ces contrats portent sur des durées
limitées de six mois, ce qui exclut les comparaisons.

En définitive, la recourante ne parvient pas à démontrer et on ne voit pas que
la Cour de justice serait tombée dans l'arbitraire en confirmant les critères
d'attribution choisis par la Ville et la pondération à 70 % du critère de la
redevance, tout en validant la réserve en faveur de l'art. 25 al. 2 LPR
figurant dans le cahier des charges. Le grief tiré de la violation de
l'interdiction de l'arbitraire est par conséquent rejeté.

6. 

Invoquant le principe de la bonne foi (art. 5 al. 3 et 9 Cst.), la recourante
reproche à la Cour de justice de ne pas avoir sanctionné le fait que l'art.
16.1 du cahier des charges, relatif au calcul du montant de la redevance,
n'était absolument pas clair.

6.1. Aux termes de l'art. 5 al. 3 Cst., les organes de l'Etat et les
particuliers doivent agir conformément aux règles de la bonne foi. Cela
implique notamment qu'ils s'abstiennent d'adopter un comportement
contradictoire ou abusif (ATF 136 I 254 consid. 5.2 p. 261). De ce principe
découle notamment le droit de toute personne à la protection de sa bonne foi
dans ses relations avec l'Etat, consacré à l'art. 9 in fine Cst. et dont le
Tribunal fédéral contrôle librement le respect (ATF 138 I 49 consid. 8.3.1 p.
53). L'art. 9 in fine Cst. protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il
met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu'il a réglé sa conduite
d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de
l'administration. A certaines conditions, le principe de la bonne foi confère
au citoyen le droit d'exiger des autorités qu'elles se conforment aux promesses
ou assurances précises qu'elles lui ont faites et ne trompent pas la confiance
qu'il a légitimement placée dans ces dernières (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 p.
103; 141 V 530 consid. 6.2 p. 538; 137 II 182 consid. 3.6.2 p. 193 et les
arrêts cités). 

6.2. L'art. 16.1 du cahier des charges indiquait qu'indépendamment des
prestations en nature, le concessionnaire devait verser à la Ville une
redevance financière mensuelle, "calculée sur la base des tarifs fixés par
format et par type d'affichage (cf. annexe 3 du dossier de procédure)
multipliés par le nombre de surfaces d'affichage existantes". L'annexe 3,
intitulée "tableau des redevances" invitait les candidats à indiquer le montant
de "la redevance nette annuelle" et de "la redevance nette sur cinq ans" qu'ils
proposaient et d'établir leur offre relative à l'affichage commercial en
remplissant un tableau prévu à cet effet.

6.3. La recourante fait valoir qu'en raison de l'art. 16.1 du cahier des
charges et du renvoi à l'annexe 3 contenant le tableau sur l'affichage
commercial, ainsi que de la pratique lors de l'octroi de concessions
précédentes, elle aurait compris qu'il ne fallait pas inclure dans le calcul de
la redevance proposée le prix de l'affichage culturel. Cela expliquerait
pourquoi son offre, contrairement à celle de sa concurrente, ne comprenait pas
cet élément. La recourante estime qu'elle a été induite en erreur et qu'elle
aurait dû avoir la possibilité de compléter son offre. Elle souligne que
l'inclusion de la recette résultant de l'affichage culturel serait décisive eu
égard à la pondération du critère de la redevance: si elle avait également pu
inclure les recettes de l'affichage culturel payant dans son offre, elle aurait
obtenu la concession.

6.4. Il a été constaté dans l'arrêt entrepris que le cahier des charges
mentionnait, à l'art. 2.2, que la concession visait plusieurs types d'affichage
(commercial, populaire, culturel, en faveur de la Ville, officiel et
politique). Il a également été relevé que, selon l'art. 7.4 du cahier des
charges, il incombait au concessionnaire de commercialiser les surfaces
d'affichage commercial et de proposer les tarifs applicables. Les tarifs des
autres types d'affichage ou leur gratuité étaient en revanche directement
définis par le cahier des charges. Il était notamment précisé que l'affichage
culturel, pour lequel le concessionnaire s'engageait à maintenir cinq-cent
surfaces d'affichage sur quarante-trois dispositifs d'affichage et neuf cent
douze aux emplacements spécifiques du réseau culturel (art. 9.3), serait
gratuit pour les premiers, le tarif étant fixé à 21 fr. par affiche pour une
période de quatorze jours pour les seconds (art. 9.4). Par ailleurs, aux termes
de l'art. 16.2 du cahier des charges, au vu du nombre actuel de surfaces
d'affichage (annexe 2 au cahier des charges), les tarifs fixés par format et
par type d'affichage devaient permettre le versement d'une redevance minimum de
280'000 fr. par mois durant la première année.

Il résulte ainsi en substance du cahier des charges qu'il y a plusieurs types
d'affichage, que le montant de la redevance nette sera calculée sur la base des
tarifs fixés par format ainsi que par type d'affichage et que l'affichage
culturel n'est que partiellement gratuit. Eu égard à ces indications, il est
clair que l'offre de redevance devait ou à tout le moins pouvait intégrer les
montants résultant de l'affichage culturel. Comme l'a relevé la Cour de
justice, si l'annexe 3 contient un tableau réservé à l'affichage commercial,
c'est uniquement parce que les soumissionnaires devaient proposer leur prix
pour ce type d'affichage, les tarifs pour les autres affichages étant
directement fixés par le cahier des charges. Ainsi que le souligne l'intimée,
il ne fait par ailleurs pas de sens d'exclure le montant de l'affichage
culturel de la redevance. La lecture proposée par la recourante signifie en
effet que le concessionnaire, qui obtient le droit exclusif d'affichage, y
compris d'affichage culturel payant, pourrait ne pas inclure dans sa
proposition une partie des montants qu'il percevra. Il pourrait ainsi diminuer
artificiellement son chiffre d'affaires et réduire le montant de la redevance
finalement due. La recourante ne saurait enfin rien déduire, sous l'angle de la
bonne foi, du fait que l'affichage culturel n'était pas pris en compte dans le
calcul de la redevance lors de l'octroi de précédentes concessions, dès lors
qu'on ne connaît pas les conditions qui étaient prévues et dans la mesure où la
recoura nte ni n'allègue, ni ne démontre qu'elles étaient les mêmes.

En définitive, en confirmant que le cahier des charges était clair et que
l'autorité n'avait partant pas à donner l'occasion à la recourante de compléter
son offre, la Cour de justice n'a pas méconnu le principe de la bonne foi. Le
grief de la recourante est rejeté.

7. 

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure où
il est recevable.

Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF). Elle versera en outre une indemnité à titre de dépens à la société Neo
Advertising SA, représentée par un avocat et qui s'est déterminée dans la
procédure de recours engagée devant la Cour de céans (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
Aucune indemnité à titre de dépens ne sera en revanche accordée à la Ville de
Genève, qui, dans le cadre du transfert d'une concession de monopole communal,
obtient gain de cause dans l'exercice de ses attributions officielles (art. 68
al. 3 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 15'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 

La recourante versera à Neo Advertising SA une indemnité de 15'000 fr. à titre
de dépens.

4. 

Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au mandataire
de l'intimée, à la Ville de Genève et à la Cour de justice de la République et
canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, ainsi qu'à la
Commission de la concurrence COMCO, Berne.

Lausanne, le 18 septembre 2019

Au nom de la IIe Cour de droit public

du Tribunal fédéral suisse

Le Juge présidant : Zünd

La Greffière : Kleber