Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.346/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

2C_346/2019

Arrêt du 20 décembre 2019

IIe Cour de droit public

Composition

MM. les Juges fédéraux Seiler, Président,

Donzallaz et Stadelmann.

Greffier: M. Tissot-Daguette.

Participants à la procédure

A.________,

représenté par Me Jean-Samuel Leuba, avocat,

recourant,

contre

Chambre des avocats du canton de Vaud,

B.________,

représenté par Me Amandine Torrent, avocate,

intimé.

Objet

Capacité de postuler d'un avocat,

recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal
cantonal du canton de Vaud du 8 mars 2019 (GE.2018.0206).

Faits :

A. 

A.________ est notamment opposé, dans plusieurs procédures civiles et pénales,
à C.________, à la société D.________ SA (anciennement E.________ AG) et à la
société F.________ SA (anciennement F.________ Holding SA). C.________ est
l'administrateur unique des sociétés D.________ SA et F.________ SA. Jusqu'en
octobre 2013, il était également administrateur des sociétés A.________ Holding
SA et G.________ SA, A.________ lui ayant succédé à ce poste. Le 6 février
2017, C.________ a été condamné par ordonnance pénale du ministère public
compétent pour gestion déloyale au préjudice de ces deux dernières sociétés.

Le 13 octobre 2017, A.________ a déposé auprès de la Chambre patrimoniale
cantonale du canton de Vaud (ci-après: la Chambre patrimoniale) une demande en
paiement dirigée contre C.________, la société D.________ SA, la société
F.________ SA et H.________. Cette demande avait pour objet une inscription du
demandeur au registre des actionnaires de la société D.________ SA en qualité
d'actionnaire pour deux tiers des actions, une action en enrichissement
illégitime contre F.________ SA et C.________ tendant à récupérer des
dividendes perçus depuis mai 2013, une action en paiement de dommages-intérêts
pour acte illicite et violation de l'accord conclu lors de la liquidation d'une
société simple à l'encontre de C.________ et H.________ et une action en
responsabilité contre C.________, tendant à indemniser la société D.________ SA
pour les préjudices que celui-ci lui a fait subir depuis mai 2013. Le 9 janvier
2018, A.________ a sollicité de la Chambre patrimoniale qu'elle interdise à
l'avocat B.________ de procéder dans la cause précitée, cet avocat représentant
les défendeurs. Cette requête a été transmise par la Chambre patrimoniale à la
Chambre des avocats du canton de Vaud (ci-après: la Chambre des avocats) le 30
avril 2018. Le 25 mai 2018, A.________ a demandé la récusation des membres de
la Chambre des avocats ayant participé à une précédente procédure dans laquelle
il avait requis l'interdiction de postuler de l'avocat B.________. Il a
également contesté la compétence de cette autorité pour statuer sur la capacité
de postuler de cet avocat en faveur des défendeurs.

B. 

Par décision du 20 juin 2018, la Chambre des avocats, après avoir admis sa
compétence pour statuer et rejeté la requête de récusation déposée par
A.________ à l'encontre de certains de ses membres, a rejeté la requête tendant
à interdire à l'avocat B.________ de postuler en faveur de C.________, la
société D.________ SA, la société F.________ SA et H.________ dans la procédure
civile introduite le 13 octobre 2017. Le 21 septembre 2018, A.________ a
contesté cette décision auprès de la Cour de droit administratif et public du
Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) qui, par
arrêt du 8 mars 2019, a rejeté le recours.

C. 

Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande
au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du
Tribunal cantonal du 8 mars 2019 et d'interdire à l'avocat B.________ de
postuler dans le cadre de l'affaire civile introduite le 13 octobre 2017,
actuellement pendante devant la Chambre patrimoniale; subsidiairement d'annuler
l'arrêt précité et de renvoyer la cause à la Chambre patrimoniale, afin qu'elle
statue sur la question de l'interdiction pour l'avocat B.________, de postuler
dans le cadre de la cause civile pendante devant elle.

Le Tribunal cantonal renonce à se déterminer et se réfère aux considérants de
son arrêt. La Chambre des avocats s'en remet à justice. L'avocat B.________
conclut à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours. Dans des
observations subséquentes, A.________ et l'avocat B.________ ont encore
confirmé leurs conclusions.

Considérant en droit :

1. 

Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et
contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 144 II
184 consid. 1 p. 186).

1.1. Conformément à l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en
matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité
précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est
particulièrement atteint par la décision attaquée (let. b) et a un intérêt
digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c). Constitue
un intérêt digne de protection au sens de l'art. 89 al. 1 let. c LTF, tout
intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou l'annulation de la
décision attaquée. Cet intérêt doit être direct et concret (à propos de ces
notions, cf. ATF 143 II 506 consid. 5.1 p. 512 et les références). En outre, la
qualité pour recourir au Tribunal fédéral suppose un intérêt actuel à obtenir
l'annulation de la décision attaquée. Cet intérêt doit exister tant au moment
du dépôt du recours qu'au moment où l'arrêt est rendu. Ainsi, si l'intérêt
actuel n'existe plus au moment du dépôt du recours, celui-ci est déclaré
irrecevable. Lorsque cet intérêt disparaît durant la procédure devant le
Tribunal fédéral, la cause est radiée du rôle comme devenue sans objet (ATF 142
I 135 consid. 1.3.1 p. 143 et les références).

1.2. En vertu de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, à moins que cela ne fasse d'emblée
aucun doute, la partie recourante doit, sous peine d'irrecevabilité, exposer en
quoi les conditions de recevabilité sont réunies, en particulier en quoi elle a
qualité pour recourir (ATF 134 II 45 consid. 2.2.3 p. 48 et les références).

1.3. Le présent litige concerne le refus d'interdire à l'avocat intimé de
représenter quatre clients dans une procédure opposant ceux-ci au recourant, en
raison d'un potentiel conflit d'intérêts, prohibé par l'art. 12 let. c de la
loi fédérale du 23 juin 2000 sur la libre circulation des avocats (LLCA; RS
935.61).

Le recourant explique avoir un intérêt personnel, concret et actuel à ce que
les règles destinées à assurer la légalité de la procédure et son bon
déroulement soient respectées. Il se prévaut d'un intérêt personnel à ce que
les défendeurs dans la procédure civile agissent par l'entremise d'avocats
aptes à les représenter, notamment pour ne pas perdre de temps. Citant deux
auteurs de doctrine, le recourant affirme encore qu'un intérêt juridique est
reconnu à la partie qui se plaint d'un conflit d'intérêts de l'avocat adverse.
Pour sa part, l'intimé est d'avis qu'en tant que dénonciateur, le recourant n'a
pas la qualité pour recourir au Tribunal fédéral, faute d'intérêt digne de
protection. Il aboutit à cette conclusion en relevant que le recourant n'a
jamais été son client, qu'il ne subit aucun préjudice en raison de cette
représentation et qu'il n'est pas particulièrement atteint, se limitant à faire
valoir un intérêt général.

1.4. Dans l'ATF 138 II 162 consid. 2.5.2 p. 168, le Tribunal fédéral a jugé que
la personne qu'une décision prive de la possibilité de poursuivre la défense de
ses intérêts par l'avocat de son choix, ou alors contraint de voir un ancien
mandataire - ou l'associé de l'un de ses anciens mandataires - défendre les
intérêts d'une partie adverse, est touchée de manière directe et dispose d'un
intérêt digne de protection au sens de l'art. 89 al. 1 let. c LTF à
l'annulation ou la modification de cette décision. Dans cet arrêt, le Tribunal
fédéral ne s'est en revanche pas prononcé sur l'intérêt digne de protection
d'un recourant désirant que l'avocat représentant plusieurs parties adverses,
avec lequel il n'a jamais été en relation contractuelle, ne puisse pas
représenter ses clients.

1.5. En l'occurrence, le recourant dénonce un prétendu conflit d'intérêts en
raison de la représentation, par un même avocat, d'une société à laquelle il a
demandé d'être inscrit dans le registre des actionnaires en tant qu'actionnaire
majoritaire (à raison de deux-tiers des actions), et de l'administrateur unique
de cette société, à qui il demande des dommages-intérêts pour des préjudices
causés à la société en sa qualité d'administrateur. Il ressort par ailleurs de
l'arrêt entrepris (cf. art. 105 al. 1 LTF) que l'administrateur unique est
valablement habilité à représenter la société, celle-ci n'étant pas soumise à
un quelconque contrôle spécial (cf. art. 697a ss CO). On constate donc que si
aucune des deux parties défenderesse à la procédure civile au fond n'était
représentée par un avocat, elles agiraient malgré tout par la même personne.
L'administrateur en son nom propre et la société, par son administrateur. En
l'espèce, l'avocat intimé, lorsqu'il échange avec les deux clients précités, ne
reçoit donc qu'une seule et même personne. C'est cette unique personne qui lui
indique comment elle désire procéder en son nom et au nom de la société, sans
qu'aucun tiers n'intervienne. Partant, dans l'éventualité où, comme le désire
le recourant, deux avocats venaient à représenter l'un la société et l'autre
l'administrateur, ces deux mandataires devraient suivre les ordres de la même
personne, ce qui correspondrait en définitive à la situation actuelle. Dans ces
conditions et en rappelant que l'interdiction de postuler ne concerne que la
procédure civile introduite le 13 octobre 2017, à l'exclusion d'éventuelles
autres procédures futures qui pourraient intervenir entre la recourant, en tant
qu'actionnaire majoritaire de la société, et l'administrateur (cf. ATF 138 II
162 consid. 2.5.1 p. 168; arrêt 1B_209/2019 du 19 septembre 2019 consid.
4.1.1), on ne saurait reconnaître au recourant un intérêt digne de protection,
qu'il soit pratique ou actuel, au présent recours. Pour le surplus, le
recourant ne fait pas valoir de potentiel conflit d'intérêts en relation avec
la représentation, par l'avocat intimé, de la société F.________ SA et de
H.________. Ainsi, dans la mesure où rien dans l'arrêt entrepris ne permet de
déterminer si un tel conflit pourrait éventuellement exister et en l'absence de
contestation topique du recourant s'agissant d'une question de recevabilité
dont les conditions ne sont pas clairement réalisées (cf. art. 42 al. 2 LTF;
ATF 145 I 121 consid. 1 p. 124 et les références), il n'y a pas à examiner plus
avant cette question. En tout état de cause, il convient également de rappeler
que les règles professionnelles contenues à l'art. 12 LLCA servent
essentiellement à protéger les intérêts des clients de l'avocat (ou ses anciens
clients), notamment en leur garantissant une défense exempte de conflit
d'intérêts (cf. arrêt 1B_376/2013 du 18 novembre 2013 consid. 3). C'est pour
cette raison que l'interdiction de postuler vise principalement à éviter que
l'avocat puisse utiliser les connaissances d'une partie adverse (ATF 138 II 162
consid. 2.5.2 p. 168), situation qui ne concerne pas celle du recourant.
Finalement, il convient encore de mentionner que les références doctrinales
citées par le recourant ne lui sont d'aucun secours. Tout d'abord,
contrairement à ce qu'affirme celui-ci, Chappuis ne dit pas qu'un " intérêt
juridique est reconnu à la partie qui se plaint d'un conflit d'intérêts de
l'avocat adverse ". Cet auteur reprend bien plus la jurisprudence publiée à
l'ATF 138 II 162 et mentionne à juste titre que, lorsque le dénonciateur entend
empêcher son ancien avocat de représenter sa partie adverse, il a un intérêt
digne de protection (cf. BENOÎT CHAPPUIS, La profession d'avocat, Tome I, 2 ^
e éd. 2016, p. 154). Bohnet parle quant à lui de procédures parallèles au civil
et au pénal, ouvertes à l'encontre d'une société et de l'un de ses organes, et
explique qu'un mandataire commun peut bloquer toute issue au civil, faute pour
l'avocat de pouvoir utilement conseiller à la société de transiger et de se
retourner contre ledit organe (FRANÇOIS BOHNET, Conflits d'intérêts de l'avocat
et qualité pour recourir du client et de son adversaire: derniers
développements, in RSJ 110/2014 p. 234, ch. V p. 237). Cette situation n'est
nullement semblable à la présente où il n'est question que d'une unique
procédure civile, dans laquelle la société concernée agit par son
administrateur, seul habilité à la représenter. 

1.6. Dans ces conditions, le recourant ne bénéficiant pas d'un intérêt digne de
protection à la modification ou l'annulation de l'arrêt entrepris et n'étant
pas particulièrement atteint par celui-ci, son recours est irrecevable.

2. 

Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF). Il n'est pas alloué de dépens, l'intimé étant représenté par une
collaboratrice de son étude et rien ne justifiant de lui en accorder (cf. art.
68 al. 1 et 2 LTF; cf. arrêt 1C_447/2016 du 31 août 2017 consid. 8 et les
références), la Chambre des avocats n'y ayant pour sa part pas droit (cf. art.
68 al. 3 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est irrecevable.

2. 

Les frais judiciaires arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant et de l'intimé, à
la Chambre des avocats et à la Cour de droit administratif et public du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 20 décembre 2019

Au nom de la IIe Cour de droit public

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Seiler

Le Greffier : Tissot-Daguette