Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.155/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

2C_155/2019

Arrêt du 14 mars 2019

IIe Cour de droit public

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président,

Aubry Girardin et Donzallaz.

Greffière : Mme Kleber.

Participants à la procédure

1. A.X.________,

2. B.X.________,

3. C.X.________,

tous les trois représentés par Me Raphaël Brochellaz, avocat,

recourants,

contre

Service de la population du canton de Vaud.

Objet

Refus d'octroi d'autorisations d'entrée et de séjour en Suisse par regroupement
familial,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit
administratif et public, du 7 janvier 2019 (PE.2018.0117).

Considérant en fait et en droit :

1. 

D.X.________, ressortissant kosovar né en 1962, est entré en Suisse en décembre
1993. Il est titulaire d'une autorisation d'établissement et travaille à plein
temps pour une entreprise à Perroy. En 1994, D.X.________ a épousé, dans son
pays d'origine, une compatriote, A.X.________. Le couple a eu trois enfants.
L'aîné est né en 1996. B.X.________ est née en 2000 et C.X.________ en 2003.
A.X.________ et les trois enfants vivent au Kosovo.

Le 6 janvier 2017, A.X.________, B.X.________ et C.X.________ ont déposé auprès
de l'Ambassade de Suisse à Pristina, Kosovo, trois demandes d'autorisation
d'entrée en Suisse, respectivement de séjour par regroupement familial, pour
rejoindre leur mari et père. Par décision du 9 février 2018, le Service de la
population du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal) a refusé de
délivrer les autorisations sollicitées. Contre cette décision, A.X.________,
B.X.________ et C.X.________ ont formé un recours devant la Cour de droit
administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le
Tribunal cantonal), qui l'a rejeté par arrêt du 7 janvier 2019. En substance,
les juges cantonaux ont considéré que la demande de regroupement familial était
tardive et qu'aucune raison familiale majeure ne justifiait un regroupement
familial différé, la nécessité d'une prise en charge des grands-parents
paternels par A.X.________ toutes ces années n'ayant pas été établie. Le refus
prononcé était en outre conforme à l'intérêt des enfants et à l'art. 8 par. 2
CEDH.

2. 

Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.X.________,
agissant pour elle et pour le compte de son fils C.X.________, ainsi que
B.X.________ demandent au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens,
outre l'assistance judiciaire, de réformer l'arrêt du Tribunal cantonal du 7
janvier 2019 en ce sens qu'une autorisation d'entrée, respectivement de séjour,
est accordée à chacun d'entre eux. Subsidiairement, ils concluent à
l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause au Tribunal cantonal
pour nouvelle décision.

Le Tribunal fédéral a renoncé à exiger une avance de frais, en informant les
recourants qu'il serait statué ultérieurement sur l'octroi de l'assistance
judiciaire.

Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. Le Service cantonal et le
Tribunal cantonal ont produit les dossiers de la cause.

3.

3.1. Le recours ne tombe pas sous le coup de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, dès
lors que les recourants font valoir un droit au regroupement familial avec leur
mari et père, titulaire d'une autorisation d'établissement, sur la base de
l'art. 47 al. 4 de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et
l'intégration (LEI [LEtr jusqu'au 31 décembre 2018]; RS 142.20) en invoquant
des raisons familiales majeures au sens de cette disposition (cf. arrêt 2C_1025
/2017 du 22 mai 2018 consid. 1.1). Par ailleurs, la recourante B.X.________,
désormais majeure, n'avait pas encore 18 ans au moment de la demande
d'autorisation de séjour, de sorte que le recours est également recevable la
concernant, étant rappelé que pour statuer sur la recevabilité du recours
contre une décision rendue en matière de regroupement familial en faveur des
enfants, le Tribunal fédéral, pour ce qui concerne le droit interne, se fonde
sur l'âge de l'enfant au moment du dépôt de la demande (ATF 136 II 497 consid.
3.2 p. 500). La voie du recours en matière de droit public est partant ouverte,
étant précisé que la question de savoir si le regroupement familial doit en
définitive être accordé relève du fond et non de la recevabilité (cf. ATF 139 I
330 consid. 1.1 p. 332).

3.2. Au surplus, le recours remplit les conditions des art. 82 ss LTF. Il
convient donc d'entrer en matière. Cela étant, le recours étant manifestement
infondé, il sera traité sur la base d'une motivation sommaire (art. 109 al. 3
LTF).

3.3. Les pièces accompagnant le recours ne seront pas prises en considération
(art. 99 al. 1 LTF).

4. 

Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2
LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3 p. 156). En vertu de l'art. 97 LTF, le recours
ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de
façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou
en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est
susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 142 II 355 consid. 6 p.
358). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant doit expliquer de
manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Lorsque la
partie recourante s'en prend à l'appréciation des preuves et à l'établissement
des faits, la décision n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement pas
compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison
sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision
attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a procédé à des
déductions insoutenables (cf. ATF 141 IV 369 consid. 6.3 p. 375; 140 III 264
consid. 2.3 p. 266).

5. 

Les recourants reprochent au Tribunal cantonal d'avoir refusé l'audition des
soeurs de leur mari et père, tout en retenant en parallèle qu'ils n'avaient pas
prouvé l'absence de solution alternative à la prise en charge des
grands-parents paternels. Un tel procédé violerait le droit d'être entendu
(art. 29 al. 2 Cst.) et serait arbitraire (art. 9 Cst.).

5.1. Garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend,
notamment, le droit pour le justiciable d'obtenir qu'il soit donné suite à ses
offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la
décision à rendre (cf. ATF 143 III 65 consid. 3.2 p. 67; 142 II 218 consid. 2.3
p. 222). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures
d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa
conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation
anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que
ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285
consid. 6.3.1 p. 299).

5.2. Dans son arrêt, le Tribunal cantonal a motivé le refus d'entendre
oralement les soeurs de D.X.________ en relevant que celles-ci avaient fourni
deux déclarations signées concernant leurs possibilités de prendre leurs
parents en charge et qu'il ne voyait partant pas ce que pourraient apporter les
auditions sollicitées. Le Tribunal cantonal n'a donc pas refusé les moyens de
preuve présentés au sujet des possibilités de prise en charge par les soeurs de
D.X.________, mais écarté les auditions requises parce qu'il s'est estimé
suffisamment renseigné, de par les attestations écrites figurant au dossier,
sur ces possibilités. On ne se trouve ainsi pas dans le cas de figure décrit
par les recourants où l'autorité refuse de donner suite à une offre de preuve
pertinente tout en considérant que l'allégation à l'origine de cette
réquisition n'est pas prouvée ou démontrée, procédé qui est arbitraire et viole
le droit d'être entendu (cf. arrêt 2D_19/2018 du 19 février 2019 consid. 3.7 et
les arrêts cités). Le grief des recourants est partant rejeté.

6. 

Les recourants estiment, en tout état, que le Tribunal cantonal est tombé dans
l'arbitraire en retenant qu'ils n'avaient pas établi l'absence de solution
alternative à la prise en charge des grands-parents paternels. Ils font valoir
que les soeurs de D.X.________ ont expliqué pour quels motifs elles ne
pouvaient pas s'occuper de leurs parents. Ils se plaignent d'avoir dû apporter
la preuve d'un fait négatif, à savoir l'absence de solution alternative.

Le fait que les soeurs de D.X.________ n'aient éventuellement pas pu s'occuper
de leurs parents ne fournit aucune indication sur la recherche d'autres
solutions de prise en charge pour ceux-ci. Les recourants ne parviennent
partant pas à démontrer que la conclusion du Tribunal cantonal selon laquelle
il n'est pas établi que la famille a cherché en vain une autre solution pour la
prise en charge des grands-parents paternels serait arbitraire et il n'y a donc
pas lieu de s'en écarter. Par ailleurs, il ne s'agit pas d'apporter dans ce
contexte la preuve d'un fait négatif comme le soutiennent les recourants, mais
de démontrer que des solutions ont été cherchées, sans succès (cf. arrêt 2C_259
/2018 du 9 novembre 2018 consid. 4.1 et les arrêts cités). Le grief tiré d'un
établissement des faits arbitraire est rejeté.

7. 

Les recourants estiment que le Tribunal cantonal a violé l'art. 47 al. 4 LEI,
ainsi que l'art. 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 20
novembre 1989 (RS 0.107; ci-après: CDE) et l'art. 8 par. 2 CEDH, en confirmant
le refus de leur octroyer des autorisations de séjour.

7.1. Il n'est pas contesté, à juste titre, que les demandes de regroupement
familial ont été déposées tardivement au regard de l'art. 47 al. 1 et 3 let. b
LEI lu conjointement avec l'art. 126 al. 3 LEI. Le regroupement sollicité ne
peut donc être autorisé que pour des raisons familiales majeures au sens de
l'art. 47 al. 4 LEI, comme l'a retenu à bon droit le Tribunal cantonal.

7.2. L'autorité précédente a correctement exposé le droit applicable en matière
de regroupement familial différé (art. 47 al. 4 et 96 LEI, art. 75 de
l'ordonnance fédérale du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à
l'exercice d'une activité lucrative [OASA; RS 142.201], art. 3 par. 1 CDE et 8
CEDH), ainsi que la jurisprudence y relative (cf. ATF 137 II 393), de sorte
qu'il peut être renvoyé à l'arrêt entrepris sur ces aspects (art. 109 al. 3
LTF).

7.3. Le Tribunal cantonal a en outre procédé à une analyse détaillée et
convaincante de la situation d'espèce. Après s'être étonné de ce que la
recourante A.X.________ n'ait pas cherché à rejoindre son mari après le mariage
en 1994, alors que ses beaux-parents, qui n'ont eu besoin de soutien qu'à
partir de 2000, étaient encore autonomes à cette époque, et avoir laissé la
question de savoir si ces personnes nécessitaient réellement une prise en
charge, il a relevé, de manière non arbitraire (cf. supra consid. 6), qu'il
n'était de toute façon pas établi que les recourants avaient cherché en vain
une solution alternative. Compte tenu de ces circonstances, le Tribunal
cantonal pouvait, sans violer le droit fédéral, retenir que le motif allégué
pour expliquer la tardiveté de la demande de regroupement familial ne
constituait pas une raison personnelle majeure au sens de l'art. 47 al. 4 LEI
(cf., sur la prise en charge de membres de la famille comme raison personnelle
majeure, arrêts 2C_259/2018 du 9 novembre 2018 consid. 4.1; 2C_153/2018 du 25
juin 2018 consid. 5.2 et les arrêts cités).

7.4. Le Tribunal cantonal a ensuite examiné, conformément à l'art. 75 OASA et à
l'art. 3 CDE, la demande de regroupement familial à la lumière de l'intérêt des
enfants. Il a noté que les enfants avaient grandi avec leur mère au Kosovo, où
ils avaient suivi toute leur scolarité, où vivait encore une partie de leur
famille et notamment leur frère aîné, et a considéré, au vu de ces faits,
qu'une coupure des liens familiaux, sociaux et culturels pour poursuivre leur
vie dans un pays dont ils ne connaissaient rien, n'apparaissait pas dans leur
intérêt, ce d'autant moins compte tenu de leur âge (18 et 15 ans lors de
l'arrêt querellé). Ces considérations, pertinentes, sont convaincantes, de
sorte qu'il peut y être renvoyé (art. 109 al. 3 LTF).

Les recourants se contentent pour les remettre en cause de souligner que, de
leur point de vue, il est dans l'intérêt des enfants de venir en Suisse. S'il
est vrai que le regroupement familial n'apparaît en l'espèce pas manifestement
contraire à l'intérêt des enfants, qui ne s'y opposent notamment pas (cf. ATF
136 II 78 consid. 4.8 p. 87), on ne voit pas que les considérations du Tribunal
cantonal relatives aux difficultés d'intégration et au déracinement que
provoquerait une venue en Suisse, deux éléments importants qui plaident en
faveur du maintien dans le pays d'origine, seraient contraires à la notion
d'intérêt supérieur de l'enfant au sens de l'art. 3 CDE. Le Tribunal cantonal
n'a partant pas méconnu cette disposition, contrairement à ce que soutiennent
les intéressés.

7.5. Enfin, sous l'angle du respect de la vie familiale garanti par l'art. 8
CEDH, le Tribunal cantonal a souligné que la recourante B.X.________ ne pouvait
pas se prévaloir de l'art. 8 CEDH pour rejoindre son père en Suisse, dès lors
qu'elle était aujourd'hui majeure et qu'elle ne se trouvait pas dans un état de
dépendance particulier à son égard qui permettrait d'appliquer l'art. 8 CEDH.
Cette conclusion doit être confirmée (cf. ATF 137 I 154 consid. 3.4.2 p. 159;
129 II 11 consid. 2 p. 13 s.), étant souligné qu'une dépendance uniquement
financière, telle qu'elle est alléguée en l'espèce, ne suffit pas pour que la
relation entre un parent et son enfant majeur tombe dans le champ d'application
de l'art. 8 CEDH.

Pour ce qui est de l'épouse et de l'enfant mineur, le Tribunal cantonal a
relevé que D.X.________ était resté en Suisse à la suite de son mariage, qu'il
n'avait jamais vécu auprès de sa famille, que la relation familiale pourrait
continuer à être entretenue à distance, comme jusqu'à présent, mais que la
famille pourrait également choisir de se réunir au Kosovo, pays dont
D.X.________ était aussi ressortissant. Il en a déduit que le refus de
regroupement familial par le Service cantonal respectait l'art. 8 par. 2 CEDH.
Cette motivation, qui prend en compte les éléments pertinents, est convaincante
et ne prête pas le flanc à la critique. Partant, il y sera également renvoyé
(cf. art. 109 al. 3 LTF). En tant que les recourants font valoir que leur
requête n'est pas abusive et qu'il n'existe pas d'intérêt public au refus des
autorisations sollicitées, il sera précisé qu'un abus de droit ne leur a pas
été reproché, d'une part, et que l'art. 8 CEDH ne confère pas un droit à
choisir le lieu de vie de la famille, d'autre part (ATF 144 I 91 consid. 4.2 p.
96; 140 I 145 consid. 3.1 p. 146), ainsi que le Tribunal cantonal le leur a du
reste déjà indiqué.

7.6. Il suit de ce qui précède qu'en confirmant le refus du Service cantonal de
délivrer les autorisations d'entrée et de séjour sollicitées, le Tribunal
cantonal n'a méconnu ni le droit fédéral, ni les dispositions conventionnelles
invoquées par les recourants.

8. 

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours en application de
la procédure simplifiée de l'art. 109 al. 2 let. a LTF. Le recours étant
d'emblée dénué de chance de succès, la demande d'assistance judiciaire est
rejetée (cf. art. 64 al. 1 LTF). Succombant, les recourants doivent supporter
les frais judiciaires, solidairement entre eux (cf. art. 66 al. 1 et 5 LTF).
Ceux-ci seront toutefois fixés en   

tenant compte de leur situation financière (cf. art. 65 al. 2 LTF). Il n'est
pas alloué de dépens (cf. art. 68 al. 1 et 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté.

2. 

La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge des
recourants, solidairement entre eux.

4. 

Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au Service
cantonal de la population et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de
droit administratif et public, ainsi qu'au Secrétariat d'Etat aux migrations.

Lausanne, le 14 mars 2019

Au nom de la IIe Cour de droit public

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Seiler

La Greffière : Kleber