Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.140/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

2C_140/2019

Arrêt du 2 mai 2019

IIe Cour de droit public

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président,

Aubry Girardin et Haag.

Greffière : Mme Kleber.

Participants à la procédure

X.________,

représenté par Me Stephen Gintzburger, avocat,

recourant,

contre

Service de la population du canton de Vaud.

Objet

Refus de prolongation de l'autorisation de séjour,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit
administratif et public, du 19 décembre 2018 (PE.2018.0217).

Considérant en fait et en droit :

1. 

X.________ (ou Y.________), ressortissant serbe né en 1984, a épousé au Kosovo
le 21 novembre 2008 une compatriote au bénéfice d'un titre de séjour en Suisse.
Venu en Suisse en juin 2009, il s'est vu délivrer le 17 juillet 2009 une
autorisation de séjour par regroupement familial, régulièrement renouvelée
jusqu'au 19 juin 2016. Le couple a eu une fille, née le 25 juin 2010, et un
garçon, né le 8 août 2012. La mère et les enfants sont titulaires
d'autorisations d'établissement.

Le couple, connu des services de police pour des querelles, a vécu séparé
d'avril 2011 à fin février 2012. Le 1 ^er mars 2013, les conjoints se sont à
nouveau séparés. Le 21 mars 2013, l'épouse a saisi la justice civile, laquelle
a, par ordonnance de mesures protectrices de l'union conjugale, notamment
autorisé la séparation du couple jusqu'au 30 avril 2014, attribué la jouissance
du domicile et la garde des enfants à la mère, accordé un libre droit de visite
au père et exonéré celui-ci de toute contribution d'entretien. 

Du 9 juin 2013 au 26 novembre 2013, X.________ a été détenu préventivement dans
le cadre d'une enquête pour trafic international de stupéfiants. A sa sortie,
il a logé chez son épouse jusqu'au 21 janvier 2014, puis a pris une autre
adresse. Il est retourné au domicile conjugal en octobre ou novembre 2014.

Par ordonnance pénale du 10 octobre 2014, X.________ a été condamné à une
amende pour un excès de vitesse commis le 12 décembre 2013. Le 12 décembre
2016, il a été condamné par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
Lausanne à une peine privative de liberté de trente-six mois, dont vingt-sept
avec sursis pendant trois ans, pour infraction grave à la loi fédérale du 3
octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS
812.121), brigandage qualifié, recel et tentative de recel.

Sur le plan professionnel et financier, X.________ a effectué quelques missions
temporaires en tant que chauffeur. Depuis février 2015, son épouse travaille à
plein temps comme serveuse. X.________ a travaillé comme chauffeur livreur à
plein temps d'avril 2015 à janvier 2016, puis a touché des indemnités
journalières de l'assurance accident. Il a accumulé environ 100'000 fr. d'actes
de défaut de biens. De juin 2011 à octobre 2014, X.________ et son épouse ont
perçu le revenu d'insertion pour un montant total de 103'202 fr.

2. 

Par décision du 23 avril 2018, le Service cantonal a refusé le renouvellement
de l'autorisation de séjour que X.________ avait sollicité le 13 juillet 2016
et ordonné son renvoi de Suisse. Par arrêt du 19 décembre 2018, la Cour de
droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après:
le Tribunal cantonal) a rejeté le recours formé par X.________ contre cette
décision.

3. 

Contre l'arrêt du 19 décembre 2018, X.________ forme un "recours" au Tribunal
fédéral. Il conclut, sous suite de dépens, principalement à la réforme de
l'arrêt entrepris en ce sens que son autorisation de séjour est renouvelée et
qu'il ne fait pas l'objet d'un renvoi de Suisse et, subsidiairement, au renvoi
de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des
considérants.

Par ordonnance présidentielle du 5 février 2019, le Tribunal fédéral a admis la
demande d'effet suspensif contenue dans le recours.

Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

4.

4.1. Le recourant a déclaré former un "recours" auprès du Tribunal fédéral.
Cette désignation imprécise ne saurait lui nuire si le recours remplit les
exigences légales de la voie de droit qui lui est ouverte (ATF 138 I 367
consid. 1.1 p. 370).

4.2. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public
est irrecevable contre les décisions dans le domaine du droit des étrangers qui
concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit
international ne donnent droit. Selon la jurisprudence, il suffit, sous l'angle
de la recevabilité, qu'il existe un droit potentiel à l'autorisation, étayé par
une motivation soutenable, pour que cette clause d'exclusion ne s'applique pas
et que, partant, la voie du recours en matière de droit public soit ouverte
(cf. ATF 136 II 177 consid. 1.1 p. 179). La question de savoir si les
conditions d'un tel droit sont effectivement réunies relève du fond (ATF 139 I
330 consid. 1.1 p. 332 et les références).

Le recourant se prévaut en l'occurrence de manière soutenable de l'ancien art.
43 al. 1 de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (depuis le 1
^er janvier 2019, loi sur les étrangers et l'intégration, LEI; RS 142.20) et de
l'art. 8 CEDH. Dès lors que l'épouse et les enfants du recourant sont au
bénéfice d'autorisations d'établissement, ces dispositions sont potentiellement
de nature à lui conférer un droit au renouvellement de son autorisation de
séjour. Son recours échappe partant au motif d'irrecevabilité prévu à l'art. 83
let. c ch. 2 LTF (cf. ATF 136 II 177 consid. 1.1 p. 179). 

4.3. Au surplus, le recours est recevable au regard des conditions des art. 42
et 82 ss LTF. Il convient partant d'entrer en matière.

5.

5.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral
contrôle librement le respect du droit fédéral (art. 95 let. a et 106 al. 1
LTF), alors qu'il n'examine la violation de droits fondamentaux que si ce grief
a été invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire
s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (cf. ATF
142 III 364 consid. 2.4 p. 368).

5.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF), hormis dans les cas visés à l'art. 105 al. 2
LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations
de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte -
notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens
de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le
sort de la cause (ATF 142 II 355 consid. 6 p. 358; 139 II 373 consid. 1.6 p.
377 s.)

En l'espèce, en tant qu'ils ne résulteraient pas de l'arrêt attaqué, le
Tribunal fédéral ne tiendra pas compte des faits relatés dans le recours, dans
la mesure où le recourant les présente librement, sans invoquer, ni a fortiori
 démontrer, l'arbitraire des constatations cantonales.

6. 

Le recourant, qui invoque le droit d'être entendu, se plaint de ce que le
Tribunal cantonal a refusé l'audition de son épouse et la mise en oeuvre d'une
expertise destinée à évaluer les conséquences pour le développement de ses
enfants d'une séparation d'avec lui.

6.1. Garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend,
notamment, le droit pour le justiciable d'obtenir qu'il soit donné suite à ses
offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la
décision à rendre (cf. ATF 143 III 65 consid. 3.2 p. 67; 142 II 218 consid. 2.3
p. 222). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures
d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa
conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation
anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que
ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285
consid. 6.3.1 p. 299).

6.2. En l'occurrence, le Tribunal cantonal a renoncé aux mesures d'instruction
requises en indiquant que le dossier était suffisamment complet pour lui
permettre de statuer en connaissance de cause. Le recourant ne remet pas en
cause cette appréciation anticipée des moyens de preuve. Il se contente en
effet d'indiquer que, selon lui, l'audition et l'expertise requises
permettraient d'établir les faits pertinents, ce qui ne démontre pas que le
Tribunal cantonal serait tombé dans l'arbitraire en retenant que le dossier lui
permettait de statuer en l'état. Le grief ne peut donc qu'être rejeté.

7.

Le litige porte sur la question de savoir si c'est à bon droit que le Tribunal
cantonal a confirmé le refus de renouvellement de l'autorisation de séjour
prononcé par le Service cantonal. Le recourant s'en prend à la proportionnalité
de la mesure.

7.1. Il n'est pas contesté, à juste titre, que, compte tenu de la condamnation
pénale du recourant le 12 décembre 2016 à une peine privative de liberté de
trente-six mois, le Service cantonal était, sur le principe, fondé à rendre la
décision querellée. En effet, l'autorité compétente peut refuser le
renouvellement de l'autorisation de séjour du conjoint du titulaire d'une
autorisation d'établissement, notamment lorsque l'étranger a été condamné à une
peine privative de liberté de longue durée (cf. anciens art. 43, 51 al. 2 let.
b et 62 al. 1 let. b LEtr, actuels art. 43, 51 al. 2 let. b et 62 al. 1 let. b
LEI) et on entend par "peine privative de liberté de longue durée" toute peine
dépassant un an, indépendamment du fait qu'elle soit ou non assortie (en tout
ou en partie) du sursis (ATF 139 I 145 consid. 2.1 p. 147).

7.2. Le refus de renouveler une autorisation de séjour ne se justifie que si la
pesée globale des intérêts à effectuer fait apparaître la mesure comme
proportionnée (cf. ATF 139 II 132 consid. 6.5.1 p. 132; 139 I 145 consid. 2.2
p. 147 s.; 135 II 377 consid. 4.3 p. 381). Cette exigence découle tant de
l'art. 8 par. 2 CEDH que de l'art. 96 LEI. L'examen de la proportionnalité sous
l'angle de ces dispositions se confond (ATF 137 I 284 consid. 2.1 p. 287 s.).
Le Tribunal cantonal a correctement présenté tous les éléments requis pour
procéder à la pesée des intérêts, de sorte qu'il peut être renvoyé aux
considérants de la décision entreprise sur ce point (art. 109 al. 3 LTF).

7.3. Le Tribunal cantonal a en outre procédé à une analyse circonstanciée de la
situation d'espèce, tenant compte de tous les facteurs pertinents. Du point de
vue de l'intérêt public à l'éloignement du recourant, il a tout d'abord relevé
que celui-ci avait été condamné en décembre 2016 à une peine privative de
liberté de trois ans, essentiellement pour trafic international de cocaïne,
domaine dans lequel il y avait lieu de se montrer particulièrement rigoureux,
ce qui est tout à fait correct (cf. ATF 139 II 121 consid. 5.3 p. 126). Le
brigandage qualifié dont a été reconnu coupable le recourant dans le même
jugement appelle au reste la même remarque (cf. arrêt 2C_557/2018 du 26 octobre
2018 consid. 3.3). Le Tribunal cantonal a ensuite estimé qu'il ne s'agissait
pas d'un "incident de parcours isolé", puisque les faits incriminés étaient
multiples et s'étaient déroulés sur six mois. Seule l'arrestation du recourant
y avait mis un terme. Le bon comportement de l'intéressé depuis devait en outre
être relativisé, puisqu'un excès de vitesse avait été commis le 12 décembre
2013 et que l'épouse du recourant avait appelé la police en hiver 2014 en
raison d'une dispute, qui n'était pas la première. Il était enfin, selon le
Tribunal cantonal, trop tôt pour se convaincre d'une prise de conscience,
puisque le recourant était en exécution de peine jusqu'au 17 février 2019 et
que le délai d'épreuve, fixé à trois ans, continuait à courir jusqu'en décembre
2019.

Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que prétend le recourant,
le Tribunal cantonal n'a pas exagérément mis l'accent sur la condamnation pour
excès de vitesse; il a en effet seulement pris en compte cet élément, parmi
d'autres, pour souligner que le recourant ne pouvait pas prétendre à un
comportement exemplaire en dehors des faits ayant conduit à la lourde
condamnation de décembre 2016. C'est également en vain que le recourant prétend
s'être amendé par l'exécution de sa peine. Comme l'a relevé à bon droit le
Tribunal cantonal, on ne peut en effet rien conclure tant que le délai
d'épreuve, qui joue un rôle dissuasif, court (cf. arrêt 2C_1097/2016 du 20
février 2017 consid. 4.3).

7.4. Du point de vue de l'intérêt privé, le Tribunal cantonal a pris en compte
la durée relativement importante du séjour en Suisse (neuf ans), qu'il a
relativisée en soulignant que ce séjour ne s'accompagnait pas d'une intégration
réussie (incapacité à conserver un emploi stable, recours à l'aide sociale de
2011 à 2014 pour un subside global de quelque 103'000 fr., accumulation de
dettes, actes de défaut de biens dont le montant s'élevait, en décembre 2014, à
quelque 109'000 fr.). S'agissant des liens du recourant avec son épouse, le
Tribunal cantonal a noté les nombreuses querelles et séparations des conjoints
et les interventions de la police au domicile conjugal entre 2010 et 2014.
Quant à la relation avec les enfants, le Tribunal cantonal a constaté que le
recourant avait quitté le domicile conjugal peu après chaque naissance, que ses
enfants ne l'avaient pas détourné de la commission d'infractions, que la mère
avait seule la garde, qu'il n'assumait pas l'entretien financier et qu'il
n'était pas crédible lorsqu'il prétendait jouer un rôle essentiel dans les
soins à leur apporter. Enfin, le Tribunal cantonal a relevé que le recourant,
qui avait vécu jusqu'à ses 25 ans dans son pays d'origine, où il avait
travaillé plusieurs années et où le reste de sa famille vivait, ne serait pas
confronté à des difficultés de réintégration particulières. Le Tribunal
cantonal a, sur le vu de ces différents éléments, retenu que l'intérêt du
recourant à demeurer auprès de son épouse et ses enfants ne l'emportait pas sur
l'intérêt public à son éloignement.

Le recourant critique cette appréciation en soulignant qu'il est, dans le
couple, le parent en charge des enfants et que c'est grâce à sa présence auprès
d'eux que son épouse peut travailler à plein temps, permettant au ménage de ne
plus dépendre de l'aide sociale. Son éloignement serait très préjudiciable à la
famille. Le recourant passe toutefois sous silence le fait que, comme le lui a
fait remarquer le Tribunal cantonal, son épouse a toujours su se débrouiller
sans lui lorsqu'il n'était pas au domicile conjugal ou était incarcéré. A cela
s'ajoute qu'aucun élément de fait ne résultant de l'arrêt entrepris ne vient
confirmer la répartition des tâches dont se prévaut le recourant. Or, il sera
rappelé à celui-ci que le Tribunal fédéral n'a pas à prendre en compte des
allégations appellatoires (cf. supra consid. 5.2). La critique du recourant
tombe donc à faux. Comme il ne remet pas en cause les autres éléments pris en
compte dans la pesée des intérêts par le Tribunal cantonal et que celui-ci a
exposé de manière détaillée et convaincante pour quels motifs l'intérêt public
à l'éloignement du recourant l'emportait sur son intérêt privé à demeurer en
Suisse, il peut être renvoyé pour le surplus à l'arrêt entrepris (art. 109 al.
3 LTF).

7.5. Sur le vu de l'ensemble des circonstances, la confirmation par le Tribunal
cantonal de la décision de refus de renouvellement de l'autorisation de séjour
du recourant, qui procède d'une correcte application des dispositions
pertinentes, n'est pas critiquable.

8. 

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours en application de
la procédure simplifiée de l'art. 109 al. 2 let. a LTF. Les frais judiciaires
sont mis à la charge du recourant (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de
dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service de la
population et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit
administratif et public, ainsi qu'au Secrétariat d'Etat aux migrations.

Lausanne, le 2 mai 2019

Au nom de la IIe Cour de droit public

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Seiler

La Greffière : Kleber