Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.1040/2019
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

2C_1040/2019

Arrêt du 9 mars 2020

IIe Cour de droit public

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président,

Aubry Girardin et Donzallaz.

Greffier : M. Rastorfer.

Participants à la procédure

A.________,

recourant,

contre

Département de l'économie, de l'innovation et du sport du canton de Vaud
(DEIS), Secrétariat général.

Objet

Révocation de l'autorisation d'établissement et renvoi de Suisse,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit
administratif et public, du 6 novembre 2019 (PE.2019.0081).

Faits :

A. 

A.________, ressortissant chinois né en 1972, est arrivé en Suisse dans le
courant de l'année 2005. Il y a, dans un premier temps, séjourné et travaillé
sans autorisation. Il a, par la suite, annoncé son arrivée dans le canton de
Vaud le 17 mars 2007, en provenance de la France, d'après les indications qu'il
avait apposées sur la formule d'annonce d'arrivée pour les ressortissants CE/
AELE, datée du 19 mars 2007. Il a mentionné être de nationalité française et
s'est légitimé au moyen d'un passeport français valable jusqu'au 18 septembre
2015.

Le 2 avril 2007, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après : le
Service cantonal), sur la base des déclarations effectuées par A.________, lui
a délivré une autorisation de séjour CE/AELE pour l'exercice d'une activité
lucrative. L'intéressé a commencé à travailler à partir de cette date pour une
entreprise active dans le secteur de la construction. Le 3 avril 2012, le
Service cantonal a mis A.________ au bénéfice d'une autorisation
d'établissement UE/AELE, dont le délai de contrôle a été fixé au 2 avril 2017.

Par jugement du 18 août 2016, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du
canton de Vaud a condamné A.________ pour faux dans les certificats à une peine
pécuniaire de 60 jours-amende avec sursis pendant deux ans et à une amende de
400 fr. Il lui a en substance été reproché d'avoir acquis un passeport français
falsifié, avec lequel il s'était légitimé auprès des autorités administratives
vaudoises, afin d'obtenir une autorisation d'établissement de Suisse. Le fait
d'avoir présenté antérieurement ledit passeport contrefait aux autorités
précitées pour obtenir une autorisation de séjour en Suisse était quant à lui
atteint par la prescription.

B. 

Par décision du 1er février 2019, le Chef du Département de l'économie, de
l'innovation et du sport (ci-après : le Chef du Département) a révoqué
l'autorisation d'établissement de A.________ et a prononcé son renvoi de
Suisse, considéra nt qu'il avait fait des fausses déclarations et dissimulé des
faits essentiels durant la procédure d'autorisation. L'intéressé a contesté ce
prononcé le 11 mars 2019 auprès de la Cour de droit administratif et public du
Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) qui, par
arrêt du 6 novembre 2018, a rejeté le recours.

C. 

Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande
au Tribunal fédéral, outre l'effet suspensif, de réformer l'arrêt du Tribunal
cantonal du 6 novembre 2019 en ce sens que son autorisation d'établissement
n'est pas révoquée, que la décision de renvoi prononcée à son encontre est
annulée et qu'il est autorisé à séjourner et à travailler en Suisse;
subsidiairement, d'annuler l'arrêt précité et de l'autoriser à séjourner et à
travailler en Suisse.

Par ordonnance du 16 décembre 2019, le Président de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral a admis la requête d'effet suspensif.

Le Tribunal cantonal et le Chef du Département se réfèrent tous deux aux
considérants de l'arrêt entrepris. Le Secrétariat d'Etat aux migrations renonce
à se déterminer.

Considérant en droit :

1.

1.1. Selon l'art. 83 lettre c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public
est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui
concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit
international ne donnent droit. Il est recevable contre les décisions
révoquant, comme en l'espèce, une autorisation d'établissement, car il existe
en principe un droit au maintien d'une telle autorisation (ATF 135 II 1 consid.
1.2.1 p. 4). La présente cause ne tombe ainsi pas sous le coup de l'art. 83
let. c ch. 2 LTF, ni d'aucune autre clause d'irrecevabilité figurant à l'art.
83 LTF. Partant, la voie du recours en matière de droit public est ouverte.

1.2. Au surplus, déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes
prescrites par la loi (art. 42 LTF), par le destinataire de l'arrêt attaqué qui
a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 89
al. 1 LTF), le présent recours, dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF)
rendue dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) par une autorité
cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF),
est recevable.

2. 

Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral contrôle
librement le respect du droit fédéral, qui comprend les droits de nature
constitutionnelle (cf. art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF), sous réserve des
exigences de motivation figurant à l'art. 106 al. 2 LTF. Il conduit son
raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF), hormis dans les cas prévus à l'art. 105 al. 2
LTF.

3. 

Au fond et en substance, l'arrêt entrepris a confirmé la révocation de
l'autorisation d'établissement du recourant pour les raisons suivantes. Afin de
bénéficier d'un titre de séjour, le recourant - dont il était établi qu'il
était ressortissant chinois, et non pas français - avait sciemment produit un
passeport français contrefait auprès des autorités administratives, afin de
tromper celles-ci et obtenir une autorisation de séjour puis, par la suite, une
autorisation d'établissement UE/AELE. C'était donc à bon droit que le Chef du
Département avait retenu que l'intéressé avait fait de fausses déclarations ou
dissimulé des faits essentiels durant la procédure d'autorisation, qui
justifiaient la révocation de son autorisation d'établissement en vertu de
l'art. 63 al. 1 let. a de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers
(RS 142.20; intitulée, depuis le 1er janvier 2019, loi fédérale sur les
étrangers et l'intégration [LEI, RO 2017 6521]) en lien avec l'art. 62 al. 1
let. a LEI. Cette mesure s'avérait par ailleurs conforme au principe de la
proportionnalité.

4. 

Devant le Tribunal fédéral, le recourant ne conteste à juste titre pas que les
conditions d'une révocation de son autorisation d'établissement, au sens de
l'art. 63 al. 1 let. a LEI cum art. 62 al. 1 let. a LEI, sont réalisées. C'est
également à juste titre qu'il ne se prévaut pas de l'art. 63 al. 3 LEI en lien
avec les art. 66a ss CP, dans la mesure où l'infraction de faux dans les
certificats est antérieure au 1er octobre 2016 et que les dispositions
précitées n'entraient dès lors pas en considération à l'époque (art. 106 al. 1
LTF).

5. 

Invoquant exclusivement une violation de l'art. 96 LEI et de l'art. 5 al. 2
Cst. (dispositions qui n'amènent pas d'examens différenciés en l'espèce; cf.
arrêts 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 6.1; 2C_1004/2018 du 11 juin 2019
consid. 7.1), le recourant conteste la proportionnalité de la révocation de son
autorisation d'établissement. Il fait valoir en sa faveur la durée de son
séjour en Suisse, sa bonne intégration, la faible gravité de l'infraction qu'il
a commise et les difficultés qu'il rencontrerait s'il devait retourner dans son
pays d'origine. L'objet du litige revient ainsi uniquement à examiner la
proportionnalité de la mesure de révocation (cf. ATF 139 I 145 consid. 2.2 p.
147 s.).

5.1. Dans le cadre de l'examen de la proportionnalité, il y a lieu de prendre
en considération la gravité de l'éventuelle faute commise par l'étranger, son
degré d'intégration, la durée de son séjour en Suisse et les conséquences d'un
renvoi (cf. ATF 139 I 145 consid. 2.4 p. 149; arrêt 2C_338/2019 du 28 novembre
2019 consid. 5.3.3 et les arrêts cités). S'agissant en particulier de la durée
du séjour d'un étranger en Suisse, le Tribunal fédéral considère que son
importance doit en principe être relativisée lorsque la présence dans le pays a
été rendue possible par de fausses déclarations faites aux autorités et,
partant, par un comportement contraire à l'ordre public suisse (arrêts 2C_338/
2019 précité; 2C_176/2018 du 11 septembre 2018 consid. 5.2). Par ailleurs,
lorsque l'étranger a pu s'intégrer à la faveur de titres de séjour obtenus en
trompant les autorités, une bonne intégration ne pèse également qu'un faible
poids dans la balance des intérêts à effectuer et ne peut en tout cas pas
justifier à elle seule la prolongation du séjour en Suisse (cf. arrêt 2C_754/
2018 du 28 janvier 2019 consid. 6.2 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral a
jugé récemment qu'une intégration qualifiée d'" excellente" pouvait jouer un
rôle dans un cas où ladite intégration résultait non pas de la période passée
en Suisse à la faveur d'un titre de séjour frauduleusement obtenu, mais des
nombreuses années antérieures durant lesquelles l'étranger a séjourné et a
travaillé régulièrement dans le pays (cf. arrêt 2C_338/2019 du 28 novembre 2019
consid. 5).

5.2. En l'occurrence, la longueur du séjour du recourant en Suisse, soit plus
de douze ans, doit être relativisée, ainsi que l'a relevé à juste titre le
Tribunal cantonal, dès lors que sa présence en Suisse n'a été rendue possible
que par de fausses déclarations effectuées par l'intéressé durant la procédure
d'autorisation (cf. supra consid. 5.1). Il en va de même s'agissant des
éléments positifs dont il se prévaut, soit le fait de n'avoir jamais émargé à
l'aide sociale, d'être autonome sur le plan financier et de n'avoir jamais fait
l'objet d'aucune poursuite, dans la mesure où c'est uniquement grâce aux titres
de séjour obtenus en trompant les autorités administratives vaudoises qu'il
peut se prévaloir de ceux-ci, si bien que ces éléments ne pèsent que d'un
faible poids dans la balance des intérêts à effectuer. Par ailleurs, bien que
le recourant soit bien intégré professionnellement, on ne saurait considérer
qu'il a réalisé - nonobstant son salaire prétendument supérieur à la moyenne
dans son secteur d'activité - une ascension professionnelle telle qu'un retour
dans son pays d'origine ne pourrait plus être exigé. De plus, l'intéressé, en
dehors de liens de camaraderie tissés sur son lieu de travail, n'a pas démontré
avoir développé des liens sociaux particuliers en Suisse. Enfin, quand bien
même le recourant relativise la gravité de l'infraction qu'il a commise, il
n'en demeure pas moins que sa condamnation pour faux dans les certificats ne
plaide pas en faveur d'une intégration que l'on pourrait qualifier de
généralement réussie, et en aucun cas d'«excellente». A cela s'ajoute que
l'intéressé, qui est arrivé en Suisse en Suisse à l'âge de 33 ans, a vécu la
grande partie de son existence en Chine, pays dont il maîtrise la langue et où
vivent toujours son épouse et ses deux enfants, désormais majeurs. On peut
ainsi présumer qu'il a conservé dans son pays d'origine des attaches
familiales, culturelles et sociales qui faciliteront son retour, ce d'autant
plus qu'il souligne maintenir des contacts avec sa famille, à qui il envoie un
montant de 1'000 fr. environ par mois. L'intéressé, relativement jeune (48 ans)
et qui ne prétend pas avoir des problèmes de santé, pourra par ailleurs mettre
à profit ses qualifications professionnelles acquises en Suisse, qui sont
également de nature à favoriser sa réintégration. Il ne soutient d'ailleurs pas
le contraire. Enfin, l'intéressé affirme qu'un retour dans son pays d'origine
serait "vu comme un échec" et que la situation en Chine a "beaucoup changé".
Outre qu'il n'explique pas en quoi de tels changements, non étayés, auraient un
impact sur ses possibilités de réintégration, toujours est-il qu'un retour dans
son pays d'origine n'apparaît, au vu des circonstances, pas insurmontable,
étant rappelé que le simple fait que l'étranger doive retrouver des conditions
de vie qui sont usuelles dans son pays de provenance ne saurait de toute façon
suffire à maintenir son titre de séjour, même si ces conditions de vie sont
moins avantageuses que celles dont celui-ci bénéficie en Suisse (cf. ATF 139 II
393 consid. 6 p. 403; arrêt 22C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 6.3).

5.3. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, il n'apparaît pas qu'en
faisant primer l'intérêt public à éloigner le recourant sur l'intérêt privé de
celui-ci à pouvoir vivre en Suisse, le Tribunal cantonal ait violé le droit
fédéral. Le grief de violation du principe de la proportionnalité est partant
rejeté.

6. 

Dans une conclusion subsidiaire, le recourant conclut à l'attribution d'une
autorisation de séjour.

6.1. Conformément à l'art. 63 al. 2 LEI (dans sa version en vigueur depuis le
1er janvier 2019), l'autorisation d'établissement peut être révoquée et
remplacée par une autorisation de séjour (rétrogradation) lorsque les critères
d'intégration définis à l'art. 58a LEI ne sont pas remplis. Cette disposition,
qui vise à améliorer les déficits d'intégration de l'étranger, ne s'applique
toutefois pas si les conditions, plus strictes, d'une révocation de
l'autorisation d'établissement, au sens de l'art. 63 al. 1 LEI, sont également
remplies (cf. arrêts 2C_782/2019 du 10 février 2020 consid. 3.3.4; 2C_58/2019
du 31 janvier 2020 consid. 6.2 et l'arrêt cité; cf. également Rapport
explicatif du 2 août 2018 sur la modification de l'ordonnance relative à
l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative [OASA; RS
142.201] relatif à la modification du 16 décembre 2016 de la loi fédérale sur
les étrangers, p. 13 ad art. 62a OASA).

6.2. En l'occurrence, non seulement l'intéressé est manifestement apte à
communiquer dans la langue nationale de son domicile et est économiquement
indépendant, si bien qu'il remplit les critères d'intégration prévus à l'art.
58a al. 1 let. c et d LEI, mais il remplit également le motif de révocation
prévu à l'art. 63 al. 1 let. a LEI en lien avec l'art. 62 al. 1 let. a LEI (cf.
supra consid. 4), qui justifie, au demeurant, à lui seul la révocation d'une
autorisation de séjour. Il n'y a dès lors pas lieu de faire application de
l'art. 63 al. 2 LEI. Partant, la conclusion subsidiaire du recourant doit
également être rejetée.

7. 

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. Succombant, le
recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est
pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3. 

Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Département de l'économie, de
l'innovation et du sport du canton de Vaud (DEIS), Secrétariat général, au
Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, au
Service de la population du canton de Vaud et au Secrétariat d'Etat aux
migrations.

Lausanne, le 9 mars 2020

Au nom de la IIe Cour de droit public

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Seiler

Le Greffier : Rastorfer