Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.773/2017
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Bundesgericht

Tribunal fédéral

Tribunale federale

Tribunal federal

               

2C_773/2017

Arrêt du 13 mai 2019

IIe Cour de droit public

Composition

MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président,

Aubry Girardin, Donzallaz, Stadelmann et Haag.

Greffier : M. Ermotti.

Participants à la procédure

A.________ Sàrl,

représentée par Me Thierry F. Ador, avocat,

recourante,

contre

Grand Conseil de la République et canton de Genève,

Conseil d'Etat de la République et canton de Genève.

Objet

Loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur; contrôle
abstrait,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre constitutionnelle, du 30 juin 2017 (ACST/10/2017).

Faits :

A.

A.a. Le 13 octobre 2016, le Grand Conseil de la République et canton de Genève
(ci-après: le Grand Conseil) a adopté la loi genevoise sur les taxis et les
voitures de transport avec chauffeur (LTVTC/GE; RS/GE H 1 31), qui a abrogé
l'ancienne loi du 21 janvier 2005 sur les taxis et limousines (aLTaxis/GE; aRS/
GE H 1 30). Cette loi contient notamment, dans le "Chapitre VII - Dispositions
finales et transitoires", l'article suivant:

"Art. 46 - Permis de service public

1. [...]

2. Tout titulaire de la carte professionnelle de chauffeur de taxi qui exploite
un taxi de service privé en qualité d'indépendant ou travaille comme employé ou
fermier d'un titulaire d'une autorisation d'exploiter un taxi ou une entreprise
de taxis de service public au sens de la loi sur les taxis et limousines, du 21
janvier 2005, délivrée avant le 1er juin 2015, qui, lors de l'entrée en vigueur
de la présente loi, exerce de manière effective sa profession peut demander une
autorisation d'usage accru du domaine public au sens de l'article 10, dans un
délai de 6 mois après son entrée en vigueur. La taxe annuelle prévue par
l'article 11A est due pro rata temporis de l'année en cours, à compter de la
date de délivrance de l'autorisation."

A l'issue du délai référendaire, qui n'a pas été utilisé, le Conseil d'Etat de
la République et canton de Genève (ci-après: le Conseil d'Etat) a adopté, le 7
décembre 2016, l'arrêté de promulgation de la LTVTC/GE, qui a été publié dans
la Feuille d'avis officielle dudit canton (ci-après: la feuille officielle) du
9 décembre 2016. Dans ce même arrêté, le Conseil d'Etat a fixé la date d'entrée
en vigueur de la LTVTC/GE au 1er juillet 2017.

A.b. A.________ Sàrl (ou : la Société), dont le siège se situe à B.________
(GE), est une société à responsabilité limitée ayant notamment pour but la
location de taxis et des permis permettant d'exercer le métier de chauffeur de
taxi avec un usage accru du domaine public. A.________ Sàrl, qui détient cinq
véhicules de taxi et est titulaire de cinq permis de taxi de "service public",
a conclu un contrat de bail à ferme avec huit chauffeurs de taxi.

B. 

Le 20 janvier 2017, A.________ Sàrl a recouru auprès de la Chambre
constitutionnelle de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour
de justice) contre l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE, en concluant à sa "nullité". Par
arrêt du 30 juin 2017, la Cour de justice a rejeté le recours.

C. 

Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ Sàrl
demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt
de la Cour de justice du 30 juin 2017 et, cela fait, d'annuler l'art. 46 al. 2
LTVTC/GE, "dont en particulier ses termes 'ou travaille comme employé ou
fermier d'un titulaire d'une autorisation d'exploiter un taxi ou une entreprise
de taxis de service public au sens de la loi sur les taxis et limousines, du 21
janvier 2005'". Subsidiairement, la Société demande à être acheminée à prouver
par toutes voies de droit utiles les faits allégués dans son "appel" (sic).
Elle se plaint d'arbitraire, ainsi que de violations de la liberté économique
et de l'égalité de traitement entre concurrents.

La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de son
arrêt. Le Grand Conseil dépose des observations et propose le rejet du recours
dans la mesure de sa recevabilité. Le Conseil d'Etat, par le biais du
Département compétent, se rallie aux arguments du Grand Conseil.

Par ordonnance du 9 octobre 2017, le Président de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral a rejeté la requête d'effet suspensif formulée par la
recourante.

Considérant en droit :

1. 

Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et
contrôle librement la recevabilité des recours portés devant lui (ATF 141 II
113 consid. 1 p. 116).

1.1. D'après l'art. 87 al. 1 LTF, le recours en matière de droit public est
directement recevable contre les actes normatifs cantonaux ne pouvant faire
l'objet d'un recours cantonal. En revanche, selon l'art. 87 al. 2 LTF, lorsque
le droit cantonal instaure une voie de recours contre les actes normatifs,
l'art. 86 LTF, qui prévoit que le recours est recevable contre les décisions
des autorités cantonales de dernière instance, pour autant que le recours
devant le Tribunal administratif fédéral ne soit pas ouvert (al. 1 let. d), est
applicable.

La loi contestée est un acte normatif cantonal qui peut, dans le canton de
Genève, faire l'objet d'un moyen de droit, appelé tantôt "requête", tantôt
"recours", devant la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice (art. 124
let. a de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre
2012 [Cst./GE; RS/GE A 2 00] et art. 130B al. 1 let. a de la loi genevoise sur
l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 [LOJ/GE; RS/GE E 2 05]),
statuant en tant qu'unique instance cantonale. L'arrêt entrepris étant une
décision finale (art. 90 LTF) et la liste des exceptions de l'art. 83 LTF ne
s'appliquant pas aux actes normatifs (arrêt 2C_380/2016 du 1er septembre 2017
consid. 1.2, non publié in ATF 143 II 598), la voie du recours en matière de
droit public est ainsi en principe ouverte.

1.2. S'il existe, comme en l'espèce, une juridiction constitutionnelle
cantonale, on peut, devant le Tribunal fédéral (art. 82 let. b LTF), conclure
non seulement à l'annulation de la décision de dernière instance cantonale,
mais également à celle de l'acte normatif cantonal soumis à examen (ATF 141 I
36 consid. 1.2.2 p. 39 s.; arrêt 2C_589/2016 du 8 mars 2017 consid. 1.2).
Partant, les conclusions de la recourante, qui demande au Tribunal fédéral
d'annuler tant l'arrêt de la Cour de justice que l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE, sont
recevables.

1.3. L'art. 89 al. 1 LTF confère la qualité pour former un recours en matière
de droit public à quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité
précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est
particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (let. b) et
a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let.
c). Lorsque l'acte attaqué est un acte normatif, l'intérêt personnel requis
peut être simplement virtuel; il suffit qu'il existe un minimum de
vraisemblance que la partie recourante puisse se voir un jour appliquer les
dispositions contestées (ATF 138 I 435 consid. 1.6 p. 445; arrêt 2C_589/2016 du
8 mars 2017 consid. 1.3). Quant à l'intérêt digne de protection, il n'est pas
nécessaire qu'il soit de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant
(ATF 141 I 78 consid. 3.1 p. 81; arrêt 2C_735/2017 du 6 février 2018 consid.
1.3).

En l'occurrence, la règle litigieuse permet, à certaines conditions, aux
titulaires d'une carte professionnelle de chauffeur de taxi d'obtenir une
autorisation d'usage accru du domaine public. Dans la mesure où la Société fait
notamment valoir que la disposition contestée consacrerait une violation de
l'égalité de traitement entre concurrents, il faut admettre qu'elle a un
intérêt digne de protection à son annulation (cf. arrêt 2P.91/1997 du 30 avril
1998 consid. 1d). Ayant pris part à la procédure devant l'autorité précédente,
l'intéressée a donc qualité pour recourir.

1.4. Pour le surplus, le présent recours a été interjeté dans les formes
requises (art. 42 LTF) et en temps utile, compte tenu des féries (art. 46 al. 1
let. b et 100 al. 1 LTF, l'art. 101 LTF ne s'appliquant pas lorsqu'une Cour
constitutionnelle cantonale a statué au préalable; cf. arrêt 2C_735/2017 du 6
février 2018 consid. 1.4). Il convient donc d'entrer en matière.

1.5. Dans la mesure où elles ne résulteraient pas déjà du dossier cantonal, les
pièces nouvelles accompagnant le recours ne peuvent être prises en
considération (art. 99 al. 1 LTF).

2. 

Dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes cantonales, lorsque le
recourant se plaint, comme en l'espèce, de violations de la Constitution
fédérale, le Tribunal fédéral examine librement la conformité de l'acte
normatif litigieux aux droits constitutionnels, à condition que ceux-ci soient
invoqués et motivés conformément aux exigences issues de l'art. 106 al. 2 LTF
(arrêt 2C_589/2016 du 8 mars 2017 consid. 2). Lors de cet examen, le Tribunal
fédéral s'impose toutefois une certaine retenue eu égard notamment aux
principes découlant du fédéralisme et de la proportionnalité. Dans ce contexte,
pour être annulée, il est décisif que la norme contestée ne puisse, d'après les
principes d'interprétation reconnus, se voir attribuer un sens compatible avec
les dispositions du droit supérieur invoquées (ATF 140 I 2 consid. 4 p. 14;
arrêt 2C_735/2017 du 6 février 2018 consid. 2). Pour en juger, il faut
notamment tenir compte de la portée de l'atteinte aux droits fondamentaux en
cause, de la possibilité d'obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de
la norme, une protection juridique suffisante, et des circonstances dans
lesquelles ladite norme sera appliquée (cf. ATF 140 I 2 consid. 4 p. 14; 137 I
31 consid. 2 p. 39 s.; arrêt 2C_380/2016 du 1er septembre 2017 consid. 2, non
publié in ATF 143 II 598). Le juge ne doit pas se borner à traiter le problème
de manière purement abstraite, mais il lui incombe de prendre en compte dans
son analyse la vraisemblance d'une application conforme au droit supérieur. Les
explications de l'autorité cantonale sur la manière dont elle applique ou
envisage d'appliquer la disposition contestée doivent également être prises en
considération. Si une réglementation de portée générale apparaît comme
défendable au regard des droits fondamentaux en cause dans des situations
normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l'éventualité que,
dans certains cas, son application puisse se révéler inconstitutionnelle ne
saurait en principe justifier une intervention du juge au stade du contrôle
abstrait des normes (cf. ATF 140 I 2 consid. 4 p. 14; 137 I 31 consid. 2 p. 40
et les nombreuses références citées; arrêt 2C_380/2016 du 1er septembre 2017
consid. 2, non publié in ATF 143 II 598).

3. 

Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits
constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas
prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut
critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon
manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est
susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 142 II 355 consid. 6 p. 358;
139 II 373 consid. 1.6 p. 377 s.). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la
partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces
conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte
d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF
137 II 353 consid. 5.1 p. 356; arrêt 2C_382/2017 du 13 décembre 2018 consid.
3.1).

En l'espèce, dans la mesure où la recourante présente une argumentation
partiellement appellatoire, notamment en complétant librement l'état de fait
retenu dans l'arrêt entrepris, sans cependant invoquer ni l'arbitraire, ni une
constatation manifestement inexacte des faits, le Tribunal fédéral ne peut pas
en tenir compte. Il sera donc statué sur la base des faits tels qu'ils
ressortent de l'arrêt attaqué.

4. 

Des mesures probatoires devant le Tribunal fédéral ne sont
qu'exceptionnellement ordonnées dans une procédure de recours (ATF 136 II 101
consid. 2 p. 104), dès lors que cette autorité conduit en principe son
raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente
(cf. supra consid. 3). En l'occurrence, la recourante demande à la Cour de
céans d'être acheminée à prouver par toutes voies de droit utiles les faits
allégués dans son écriture. Il ne sera pas donné suite à cette requête, car il
n'y a aucun élément dont on puisse inférer des circonstances exceptionnelles
justifiant une mesure d'instruction devant le Tribunal fédéral, ce que la
recourante ne motive ni démontre du reste nullement (cf. arrêt 2C_879/2015 du
29 février 2016 consid. 3).

5. 

La recourante soutient que l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE serait arbitraire et
violerait donc les art. 9 Cst. et 17 Cst./GE. A son avis, l'application de
cette disposition conduirait à une augmentation excessive du nombre de
chauffeurs de taxi titulaires d'une autorisation d'usage accru du domaine
public, ce qui serait en "contradiction flagrante" avec le principe de
l'utilisation optimale du domaine public consacré à l'art. 10 LTVTC/GE.

5.1. L'intéressée n'établit pas que l'art. 17 Cst./GE lui offrirait une
protection plus étendue que l'art. 9 Cst., si bien que l'examen du Tribunal
fédéral se confinera à cette dernière garantie (cf. arrêt 2C_926/2013 du 21
janvier 2014 consid. 3.1).

5.2. Un acte normatif viole le principe de l'interdiction de l'arbitraire (art.
9 Cst.) s'il ne repose pas sur des motifs objectifs sérieux ou s'il est
dépourvu de sens et de but. Le législateur cantonal, organe politique soumis à
un contrôle démocratique, doit se voir reconnaître une grande liberté dans
l'élaboration des lois. Le Tribunal fédéral n'a pas à revoir l'opportunité des
choix effectués dans ce cadre. Il n'annulera pas une disposition légale au
motif que d'autres solutions lui paraîtraient envisageables, voire même
préférables (ATF 136 I 241 consid. 3.1 p. 250 s.; arrêt 2C_727/2011 du 19 avril
2012 consid. 3.7, non publié in ATF 138 II 191).

5.3. En l'espèce, l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE est une disposition transitoire dont
le but est de régler le statut des titulaires d'une carte professionnelle de
chauffeur de taxi qui, sous l'empire de l'ancienne loi, exploitaient un taxi de
service privé (au sens de l'aLTaxis/GE) "en qualité d'indépendant ou travaill
[aient] comme employé ou fermier d'un titulaire d'une autorisation d'exploiter
un taxi ou une entreprise de taxis de service public". Sur la base de cet
article, ces personnes peuvent, sur requête et à certaines conditions, obtenir
une autorisation d'usage accru du domaine public en application du nouveau
droit. Comme le relève la recourante, la norme litigieuse peut donc conduire à
une augmentation des chauffeurs de taxis titulaires d'une autorisation de ce
type. Il ne ressort toutefois pas de l'arrêt attaqué que cela aurait pour
conséquence d'empêcher l'utilisation optimale du domaine public. L'intéressée
ne le démontre pas, se limitant à se référer à des éléments ne résultant pas de
l'arrêt entrepris et à affirmer de manière appellatoire que le nombre total
d'autorisations délivrées serait excessif. A ce sujet, il sied d'ailleurs de
constater que le nombre maximal d'autorisations d'usage accru du domaine public
ne dépend pas de l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE, mais est fixé par voie
réglementaire. En effet, conformément à l'art. 10 al. 3 LTVTC/GE, "le Conseil
d'Etat fixe le nombre maximal d'autorisations [d'usage accru du domaine public]
en fonction des besoins évalués périodiquement". Sur la base de cette
disposition, le Conseil d'Etat a adopté l'art. 21 du règlement d'exécution du
21 juin 2017 de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec
chauffeur (RTVTC/GE; RS/GE H 1 31.01), qui, dans sa version actuellement en
vigueur, prévoit que "le nombre maximal d'autorisations d'usage accru du
domaine public est fixé à 1'100" (avant le 6 février 2018: 1'300; entre le 7
février 2018 et le 30 novembre 2018: 1'100; entre le 1er décembre 2018 et le 2
avril 2019: 1'200). La recourante ne peut donc pas être suivie lorsqu'elle
affirme que l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE serait per se arbitraire, car il
conduirait à une augmentation excessive du nombre de chauffeurs de taxis
titulaires d'une telle autorisation et empêcherait donc une utilisation
optimale du domaine public, le nombre maximal d'autorisations délivrées étant
déterminé sur la base d'une autre disposition. Pour le reste, l'intéressée
n'expose pas - et le Tribunal fédéral ne le voit pas non plus - en quoi la
norme contestée, en ce qu'elle tend à régler une situation transitoire, serait
dépourvue de sens et de but. Dans ces conditions, le grief de violation des
art. 9 Cst. et 17 Cst./GE ne peut qu'être écarté.

6. 

Invoquant les art. 27 al. 1 et 94 al. 1 Cst., ainsi que l'art. 35 Cst./GE, la
recourante se prévaut d'une violation de sa liberté économique, y compris sous
l'angle de "l'égalité de traitement entre concurrents".

6.1. L'intéressée n'établit pas que l'art. 35 Cst./GE lui offrirait une
protection plus étendue que les art. 27 al. 1 et 94 al. 1 Cst., si bien que
l'examen du Tribunal fédéral se confinera à ces dernières dispositions.

6.2.

6.2.1. Aux termes de l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al.
1). Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à
une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2). Cette
liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel
et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF 143 II 598 consid. 5.1
p. 612; 140 I 218 consid. 6.3 p. 229), telle que l'activité de chauffeur de
taxi indépendant, même si celle-ci implique un usage accru du domaine public
(arrêts 2C_713/2017 du 25 juin 2018 consid. 4.1; 2C_519/2013 du 3 septembre
2013 consid. 6.1; 2C_564/2009 du 26 février 2010 consid. 6.1). La liberté
économique peut être invoquée tant par les personnes physiques que par les
personnes morales (ATF 142 I 162 consid. 3.2.1 p. 164; 140 I 218 consid. 6.3 p.
229). Des restrictions cantonales à cette liberté sont admissibles, mais elles
doivent reposer sur une base légale, être justifiées par un intérêt public
prépondérant et respecter le principe de proportionnalité (cf. art. 36 al. 1 à
3 Cst.; ATF 143 II 598 consid. 5.1 p. 612).

6.2.2. La liberté économique comprend le principe de l'égalité de traitement
entre personnes appartenant à la même branche économique. Selon ce principe,
déduit des art. 27 et 94 Cst., sont prohibées les mesures étatiques qui ne sont
pas neutres sur le plan de la concurrence entre les personnes exerçant la même
activité économique (ATF 143 II 598 consid. 5.1 p. 612; 143 I 37 consid. 8.2 p.
47). On entend par concurrents directs les membres de la même branche
économique qui s'adressent avec les mêmes offres au même public pour satisfaire
les mêmes besoins (ATF 143 II 598 consid. 5.1 p. 612; arrêts 2C_975/2017 du 15
mai 2018 consid. 6.1.2 et 2C_441/2015 du 11 janvier 2016 consid. 7.1.2).
L'égalité de traitement entre concurrents directs n'est pas absolue et autorise
des différences, à condition que celles-ci reposent sur une base légale,
qu'elles répondent à des critères objectifs, soient proportionnées et résultent
du système lui-même; il est seulement exigé que les inégalités ainsi instaurées
soient réduites au minimum nécessaire pour atteindre le but d'intérêt public
poursuivi (cf. ATF 143 I 37 consid. 8.2 p. 47 s.; 140 I 218 consid. 6.3 p. 229
s.; arrêts 2C_136/2018 du 24 septembre 2018 consid. 6.2 et 2C_975/2017 du 15
mai 2018 consid. 6.1.2).

6.3. La recourante fonde en partie ses critiques sur l'ATF 79 I 334, rendu en
matière de taxis (recours, p. 32-42). En affirmant que l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE
"participe[rait] à l'établissement des catégories des taxis et des VTC dans la
LTVTC/GE" (recours, p. 40), elle soutient notamment qu'une application stricte
des principes issus de l'arrêt précité au système introduit par la LTVTC/GE
conduirait à une violation de "la garantie constitutionnelle de la liberté
économique" (recours, p. 36).

6.3.1. En premier lieu, il sied de constater que, dans la mesure où la
recourante soutient que l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE "participe[rait] à
l'établissement des catégories des taxis et des VTC dans la LTVTC/GE", elle
semble se méprendre sur la portée de l'article en question, qui seul fait
l'objet de la présente cause. En effet, cette norme constitue uniquement une
disposition transitoire, dont le but est de régler le statut des titulaires
d'une carte professionnelle de chauffeur de taxi qui, sous l'empire de
l'ancienne loi, exploitaient un taxi de service privé (au sens de l'aLTaxis/GE)
"en qualité d'indépendant ou travaill[aient] comme employé ou fermier d'un
titulaire d'une autorisation d'exploiter un taxi ou une entreprise de taxis de
service public". Si l'intéressée avait voulu remettre en question le nouveau
système introduit par la LTVTC/GE, elle aurait dû recourir contre les
dispositions de cette loi qui mettent en place et définissent les catégories de
véhicules autorisés, c'est-à-dire, en particulier, les art. 4, 10 ss, 19 ss et
22 ss LTVTC/GE, ce qu'elle n'a pas fait. Le Tribunal fédéral est ainsi lié par
les conclusions prises (cf. art. 107 al. 1 LTF) qui se limitent à l'art. 46 al.
2 LTVTC/GE.

6.3.2. Au demeurant, n'en déplaise à la recourante, le régime prévu par la
nouvelle LTVTC/GE n'est de toute façon pas en contradiction avec les principes
tirés de l'ATF 79 I 334. Selon l'arrêt en question, qui a par la suite été
confirmé à plusieurs reprises, le législateur peut limiter le nombre de places
de stationnement réservées aux taxis sur le domaine public et déterminer le
cercle des bénéficiaires de ces emplacements; il doit toutefois veiller à ne
pas restreindre de façon disproportionnée l'exploitation du service dans son
ensemble, en particulier il ne doit pas soumettre la profession de taxi à un
numerus clausus déterminé uniquement par les besoins du public (cf. ATF 79 I
334 consid. 4a p. 339; arrêts 2C_829/2015 du 15 janvier 2016 consid. 4.3;
2P.258/2006 du 16 mars 2007 consid. 2.1; 2P.8/2006 du 29 août 2006 consid. 2.2;
2P.167/1999 du 25 mai 2000 consid. 2a).

Comme l'a relevé pertinemment la Cour de justice, la notion de "taxi" à
laquelle se réfère cette jurisprudence doit être relativisée. Les moyens de
communication modernes permettent de proposer au public, en matière de
transport professionnel de personnes, des solutions alternatives aux taxis au
sens strict du terme. Ainsi, l'"interdiction du numerus clausus" prévue par la
jurisprudence en question, appréciée à l'aune de la situation actuelle, doit
être comprise comme faisant référence au transport professionnel de personnes
au sens large et non seulement aux taxis.

Or, dans le canton de Genève, le législateur a opéré une distinction entre deux
catégories de transporteurs professionnels de personnes: les chauffeurs de
"taxis" et les chauffeurs de "voitures de transport avec chauffeur". La loi
définit ces notions de la manière suivante:

"Art. 4 LTVTC/GE - Définitions

La terminologie utilisée par la présente loi et ses dispositions d'application
répond aux définitions suivantes:

a) "taxi": voiture automobile des catégories M1 ou M2 jusqu'à 3,5 tonnes au
sens du droit fédéral, se mettant à la disposition de tout public pour
effectuer le transport professionnel de personnes et de leurs effets personnels
contre rémunération, offrant une complémentarité en matière de service public,
bénéficiant de l'usage accru du domaine public conformément à la présente loi
ainsi que du droit de faire usage de l'enseigne "Taxi";

b) "voiture de transport avec chauffeur" / "VTC": voiture automobile des
catégories M1 ou M2 jusqu'à 3,5 tonnes au sens du droit fédéral, servant au
transport professionnel de personnes et de leurs effets personnels, mise à leur
disposition par commande ou réservation préalable, contre rémunération, et
offrant une complémentarité en matière de service public, ne bénéficiant pas de
l'usage accru du domaine public ni du droit à l'enseigne "Taxi";

[...]"

Il ressort de cette disposition que, dans le domaine du transport professionnel
des personnes, l'activité y relative peut être exercée en tant que chauffeur de
"taxi" au sens strict du terme, ou en tant que chauffeur de "voiture de
transport avec chauffeur" (ci-après: chauffeur VTC). Ces deux catégories de
transporteurs sont soumises à des règles en partie différentes, en ce sens que
les chauffeurs de taxis bénéficient en particulier de l'usage accru du domaine
public et ont le droit d'utiliser l'enseigne "Taxi", contrairement aux
chauffeurs VTC. Cela ne change toutefois rien au fait que l'exploitant d'une
voiture de transport avec chauffeur exerce une activité analogue à celle d'un
chauffeur de taxi, bien que soumise à un régime différent. En effet, un
chauffeur VTC met à disposition du public une voiture servant au transport
professionnel de personnes et de leurs effets personnels, contre rémunération
(art. 4 let. b LTVTC/GE), comme le fait l'exploitant d'un taxi (art. 4 let. a
LTVTC/GE). Le fait que les chauffeurs VTC ne puissent pas se prévaloir de
l'enseigne "taxi" et ne bénéficient pas d'un droit d'usage accru du domaine
public, n'enlève donc rien au caractère de transporteur professionnel de
personnes de ceux-ci.

Il en découle que la LTVTC/GE ne restreint pas de façon disproportionnée
l'exploitation du service de transport professionnel de personnes en soumettant
cette activité à un numerus clausus déterminé uniquement par les besoins du
public. Au contraire, en prévoyant un système hybride, le législateur genevois
s'est conformé à la jurisprudence, dans la mesure où le service en question est
fourni par deux catégories de véhicules: les taxis, dont le nombre est limité
en lien avec l'usage accru du domaine public dont ils bénéficient, et les
voitures de transport avec chauffeur, qui offrent un service analogue aux taxis
mais ne jouissent pas de l'usage accru du domaine public.

6.3.3. Dans ces conditions, les critiques formulées par la recourante en lien
avec l'ATF 79 I 334 ne peuvent qu'être rejetées.

6.4. Pour le reste, s'agissant du grief de violation de la liberté économique
(au sens strict) formé par la recourante, il peut être retenu ce qui suit.

6.4.1. La Société était titulaire, sous l'empire de l'ancienne aLTaxis/GE, de
cinq permis de taxi de service public. Elle peut donc se prévaloir de l'art. 46
al. 1 LTVTC/GE, aux termes duquel "les titulaires de permis de service public
au sens de la [aLTaxis/GE] se voient délivrer un nombre correspondant
d'autorisations d'usage accru du domaine public au sens de la présente loi, et
conservent la titularité de leurs numéros d'immatriculation, pour autant qu'ils
poursuivent leur activité de chauffeur de taxi, respectivement d'entreprise
proposant un service de taxis [...]". Aux conditions prévues par cette
disposition, la Société a ainsi le droit d'obtenir cinq d'autorisations d'usage
accru du domaine public au sens de la nouvelle LTVTC/GE.

6.4.2. En revanche, l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE ne s'applique pas à la situation
de la recourante. En effet, cette disposition concerne uniquement les
titulaires d'une carte professionnelle de chauffeur de taxi qui, sous l'empire
de l'ancienne loi, exploitaient un taxi de service privé (au sens de l'aLTaxis/
GE) "en qualité d'indépendant ou travaill[aient] comme employé ou fermier d'un
titulaire d'une autorisation d'exploiter un taxi ou une entreprise de taxis de
service public". Dans ces circonstances, on ne voit pas en quoi l'art. 46 al. 2
LTVTC/GE, qui - on le rappelle - seul fait l'objet de la présente procédure,
limiterait la liberté économique (au sens strict) de la recourante. En premier
lieu, comme on vient de le voir, celle-ci est exclue du champ d'application de
cette disposition. En outre, et surtout, la Société a de toute façon le droit
de demander l'attribution de cinq autorisations d'usage accru du domaine public
sur la base de l'art. 46 al. 1 LTVTC/GE et de continuer ainsi à exercer son
activité économique comme elle le faisait sous l'ancienne loi. Sous l'angle du
libre accès à une activité économique lucrative privée et de son libre exercice
(art. 27 al. 2 Cst.; cf. supra consid. 6.2.1), la norme litigieuse n'a donc
aucun effet sur la situation de la recourante.

6.5. Reste à examiner si l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE opère une distinction
injustifiée entre des personnes exerçant la même activité économique (principe
de l'égalité de traitement entre concurrents; cf. supra consid. 6.2.2). Il se
trouve que l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE n'est qu'une disposition transitoire, qui
permet aux destinataires de celle-ci d'obtenir - à certaines conditions - une
autorisation d'usage accru du domaine public, soit la même autorisation que la
Société peut exiger sur la base de l'art. 46 al. 1 LTVTC/GE (cf. supra consid.
6.4.1). Après avoir obtenu cette autorisation, les personnes concernées, au
même titre que la Société, devront se conformer aux exigences légales
applicables à tout titulaire d'une autorisation de ce type (paiement de la taxe
annuelle [art. 11A LTVTC/GE], obligation d'usage effectif de l'autorisation
[art. 12 al. 3 let. c LTVTC/GE], etc.]). Dans ces conditions, il ne saurait
être question d'une inégalité de traitement entre concurrents, car tous les
titulaires d'une autorisation d'usage accru du domaine public au sens de la
nouvelle LTVTC/GE seront soumis aux mêmes règles, indépendamment de la question
de savoir s'ils ont obtenu cette autorisation sur la base de l'art. 46 al. 1
LTVTC/GE ou en application de l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE. Enfin, le fait que
l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE puisse aboutir à une augmentation des titulaires d'une
autorisation d'usage accru du domaine public, outre qu'il n'est pas constitutif
d'arbitraire (cf. supra consid. 5), ne saurait consacrer une violation de
l'art. 27 Cst. au seul motif que la recourante risque de se voir confrontée à
une concurrence accrue.

6.6. Il en découle que l'art. 46 al. 2 LTVTC/GE ne consacre aucune violation de
la liberté économique (art. 27 al. 1 et 94 al. 1 Cst.) de la recourante. Le
grief y relatif est partant rejeté.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

7. 

Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 

Le recours est rejeté.

2. 

Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 

Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Grand
Conseil et au Conseil d'Etat du canton de Genève, ainsi qu'à la Cour de justice
du canton de Genève, Chambre constitutionnelle. 

Lausanne, le 13 mai 2019

Au nom de la IIe Cour de droit public

du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Seiler

Le Greffier : Ermotti