Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.633/2017
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                [displayimage]  
 
 
1C_633/2017  
 
 
Arrêt du 12 février 2018  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, Karlen, Fonjallaz, Chaix et
Kneubühler. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________ Corp., 
3. C.________ Ltd, 
tous les trois représentés par Me Carlo Lombardini, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213
Petit-Lancy. 
 
Objet 
Entraide judiciaire internationale en matière pénale 
au Venezuela, remise de moyens de preuve, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, du 7
novembre 2017 (RR.2017.204-206). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par décision de clôture du 13 juin 2017, le Ministère public du canton de
Genève a ordonné la transmission, au Procureur de Caracas (Venezuela), des
documents relatifs à cinq comptes bancaires détenus par A.________ (deux
comptes), B.________ Corp. (au Panama, deux comptes) et C.________ Ltd (Hong
Kong, un compte). Cette transmission intervient en exécution d'une demande
d'entraide judiciaire formée le 20 octobre 2016 dans le cadre d'une enquête
pour corruption visant les dénommés D.________ et E.________, dont les sociétés
auraient obtenu des marchés publics contre paiements à des fonctionnaires. 
Par arrêt du 7 novembre 2017, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral a
partiellement admis le recours formé par A.________ et les deux sociétés. La
décision de clôture était suffisamment motivée. Le demande d'entraide indiquait
clairement en quoi consistaient les agissements poursuivis. Selon un rapport du
Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) produit en cours de
procédure et dont l'OFJ avait donné la teneur essentielle, le pouvoir
judiciaire dans l'Etat requérant souffrait de surcharge chronique et manquait
d'indépendance; des arrestations arbitraires et des violations des droits de
procédure étaient aussi constatées. Toutefois, conformément aux conclusions
subsidiaires prises par les recourants, l'entraide judiciaire pouvait être
accordée moyennant les garanties suivantes: 
 
"a) Aucun tribunal d'exception ne pourra être saisi des actes délictueux qui
sont imputés à A.________; 
b) Le prévenu disposera du temps et des facilités nécessaires pour préparer sa
défense (art. 14 par. 3 let. b Pacte ONU II) et du droit de se faire assister
et de communiquer avec le défenseur de son choix (art. 14 par. 3 let. b Pacte
ONU II); 
c) La présomption d'innocence sera respectée (art. 14 par. 2 Pacte ONU II); 
d) Il aura le droit d'être jugé publiquement, dans un délai raisonnable, par un
tribunal indépendant et impartial (art. 14 par. 3 let. c Pacte ONU II); 
e) En cas d'arrestation, le détenu ne sera soumis à aucun traitement portant
atteinte à son intégrité physique et psychique (art. 7, 10 et 17 Pacte ONU II).
Les conditions de détention ne seront pas inhumaines ou dégradantes au sens de
l'art. 7 du Pacte ONU II; en particulier, la détention doit se dérouler dans
une cellule salubre (température, air, lumière, espace, eau, etc.) et le détenu
doit avoir la possibilité d'une promenade journalière; la santé du détenu sera
assurée de manière adéquate, notamment par l'accès aux soins médicaux
suffisants requis par son état de santé. 
f) La représentation diplomatique de la Suisse pourra en tout temps s'enquérir
de l'état d'avancement de la procédure pénale, assister aux débats lors du
jugement sur le fond et obtenir un exemplaire de la décision mettant fin au
procès; elle pourra rendre visite, en tout temps et sans surveillance, au
prévenu; celui-ci pourra s'adresser à elle en tout temps, que ce soit au stade
de l'instruction ou lors de l'exécution d'une peine privative de liberté qui
serait infligée. 
g) La peine de mort ne sera ni requise, ni prononcée, ni appliquée à l'égard du
prévenu." 
 
L'octroi de l'entraide judiciaire était soumis à la condition que l'autorité
compétente de l'Etat requérant donne les garanties précitées. 
 
B.   
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________
(ci-après désigné comme le recourant), B.________ Corp. et C.________ Ltd
demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour des plaintes, de
refuser toute transmission au Venezuela et d'ordonner la restitution des
documents saisis. Subsidiairement, ils demandent la suspension de la procédure
jusqu'à l'octroi de garanties suffisantes quant à l'utilisation des documents
et la limitation de la transmission aux comptes de B.________ et C.________, du
1er janvier 2012 au 31 décembre 2014. Plus subsidiairement, ils demandent le
renvoi de la cause au Ministère public genevois pour nouvelle décision au sens
des considérants. 
La Cour des plaintes et le Ministère public se réfèrent à l'arrêt attaqué, sans
autres observations. L'OFJ conclut à l'irrecevabilité du recours,
subsidiairement à son rejet, tout en relevant que l'identité du recourant ne
devrait pas figurer dans le texte des garanties soumises à l'Etat requérant. 
Dans leurs dernières observations, les recourants persistent dans leurs
conclusions, indiquant notamment que A.________ a fait l'objet le 16 décembre
2017 d'un enlèvement et qu'il avait été libéré après six heures contre une
rançon de 20'000 USD environ. Par lettre du 25 janvier 2018 (anticipée par
fax), les recourants ont indiqué que la situation au Venezuela se serait encore
aggravée et que le Conseil de l'Union européenne avait pris de nouvelles
sanctions, ajoutant l'actuel Procureur général du Venezuela à la liste des
personnes faisant l'objet de mesures restrictives. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Selon l'art. 84 LTF, le recours est notamment recevable à l'encontre d'un arrêt
du Tribunal pénal fédéral en matière d'entraide judiciaire internationale si
celui-ci a pour objet la transmission de renseignements concernant le domaine
secret. Il doit toutefois s'agir d'un cas particulièrement important (al. 1).
Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de
supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou
comporte d'autres vices graves (al. 2). Ces motifs d'entrée en matière ne sont
toutefois pas exhaustifs et le Tribunal fédéral peut être appelé à intervenir
lorsqu'il s'agit de trancher une question juridique de principe ou lorsque
l'instance précédente s'est écartée de la jurisprudence suivie jusque-là (ATF
133 IV 215 consid. 1.2 p. 218). En vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, il incombe au
recourant de démontrer que les conditions d'entrée en matière posées à l'art.
84 LTF sont réunies (ATF 133 IV 131 consid. 3 p. 132). 
La présente espèce porte sur la transmission de documents relatifs à cinq
comptes bancaires, soit des renseignements touchant le domaine secret. En
outre, compte tenu des griefs soulevés concernant le respect des droits de
l'homme et des garanties de procédure dans l'Etat requérant, et sur le vu de la
situation particulière prévalant dans ce même Etat, il se justifie d'entrer en
matière. 
 
2.   
Les recourants dénoncent la situation politico-juridique au Venezuela. Ils
rappellent que depuis début 2016, ce pays traverse une grave crise économique
et sociale et se rapprocherait d'une dictature. Le processus de changement de
constitution susciterait de vives critiques quant à sa légalité et sa
légitimité. L'opposition serait violemment réprimée et les violations des
droits de l'homme, en particulier des détentions arbitraires, seraient
nombreuses. Dans un rapport du mois d'août 2017, le Haut-Commissaire aux droits
de l'homme de l'ONU ferait état d'une situation alarmante, de détentions sans
motifs ni contrôle judiciaire et de violations des garanties procédurales (pas
d'accès à un avocat, violations de la présomption d'innocence). Selon Amnesty
International (rapport 2016/2017), les autorités pourraient répondre de leur
attitude devant la justice internationale. Au printemps 2017, la
Vice-procureure générale avait été démise de ses fonctions pour s'être opposée
au pouvoir. Les recourants font en outre état d'importants problèmes de
corruption et d'extorsion, ainsi que d'une augmentation des cas d'enlèvements;
le fils du recourant en aurait été deux fois victime et lui-même en aurait été
l'objet le 16 décembre 2017. Après une condamnation en 2012 par la Cour
interaméricaine des droits de l'homme en raison des conditions de détention, le
Venezuela aurait dénoncé la Convention et n'en serait plus partie depuis 2013;
il se serait également retiré fin avril 2017 de l'organisation des Etats
américains. Les recourants relèvent que le rapport établi en cours de procédure
par le DFAE, dont ils n'ont eu qu'une connaissance partielle, met lui aussi en
évidence le manque d'autonomie, d'impartialité et d'indépendance du pouvoir
judiciaire ainsi que l'existence de cas de détentions arbitraires et de
violations des droits de procédure. Les recourants estiment que la situation au
Venezuela ne pourrait être comparée à celle des autres Etats d'Amérique du sud.
Le recourant fait partie des entrepreneurs aisés, membres de l'opposition,
particulièrement menacés par le régime actuel. 
 
2.1. L'art. 2 EIMP a pour but d'éviter que la Suisse ne prête son concours, par
le biais de l'entraide judiciaire ou de l'extradition, à des procédures qui ne
garantiraient pas à la personne poursuivie un standard de protection minimal
correspondant à celui offert par le droit des Etats démocratiques, défini en
particulier par la CEDH ou le Pacte ONU II, ou qui heurteraient des normes
reconnues comme appartenant à l'ordre public international (ATF 125 II 356
consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6a p. 166/167, 511 consid. 5a p. 517, 595
consid. 5c p. 608; 122 II 140 consid. 5a p. 142). L'examen des conditions
posées par l'art. 2 EIMP implique un jugement de valeur sur les affaires
internes de l'Etat requérant, en particulier sur son régime politique, sur ses
institutions, sur sa conception des droits fondamentaux et leur respect
effectif, et sur l'indépendance et l'impartialité du pouvoir judiciaire (ATF
126 II 324 consid. 4 p. 326; 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid.
6b p. 167, 511 consid. 5b p. 517; 111 Ib 138 consid. 4 p. 142). La
jurisprudence considère que les garanties de procédure offertes par la CEDH et
le Pacte ONU II appartiennent à l'ordre public international et que la Suisse
contreviendrait à ses obligations internationales en collaborant à une
procédure pénale présentant un risque de traitement contraire à ces garanties,
notamment un traitement discriminatoire (ATF 130 II 217 consid. 8.1 p. 227 et
les arrêts cités; 126 II 324 consid. 4c p. 327). La demande d'entraide doit
donc être écartée lorsqu'est rendue vraisemblable l'existence d'un risque
sérieux et objectif d'un traitement discriminatoire prohibé (ATF 123 II 161
consid. 6b p. 167, 511 consid. 5b p. 517; 122 II 373 consid. 2a p. 377, et les
arrêts cités).  
 
2.2. Les instances précédentes n'ont pas méconnu la gravité de la crise
politique et économique que connaît l'Etat requérant. Compte tenu de cette
situation, l'OFJ a demandé, durant la procédure devant la Cour des plaintes, un
avis du DFAE au sujet de la situation générale et du système judiciaire au
Venezuela, afin de déterminer si l'entraide pouvait être accordée moyennant des
garanties diplomatiques. Cette prise de position, du 21 août 2017, n'a pas été
produite telle quelle pour des motifs d'ordre diplomatique, mais son contenu a
été résumé dans la réponse de l'OFJ au recours, conformément aux exigences de
l'art. 28 PA. Il en résulte que le pouvoir judiciaire, en particulier la cour
suprême et le ministère public, manquerait d'autonomie, d'indépendance et
d'impartialité. Alors que la réputation du ministère public s'était
considérablement améliorée ces dernières années sous l'influence d'une
procureure générale ayant fait preuve d'indépendance et d'une attitude critique
vis-à-vis du pouvoir, celle-ci avait été destituée par l'Assemblée constituante
et remplacée par un proche du régime en place, de sorte qu'il était probable
que le ministère public perde le peu d'indépendance acquis ces derniers mois.
La procédure de désignation et de révocation des juges n'était pas
transparente; seul un tiers des juges occupaient un poste permanent, ce qui
augmentait le risque de décisions favorables au pouvoir en place. La
représentation suisse à Caracas avait eu connaissance de nombreux cas de
détention arbitraire d'opposants politiques et de manifestants, ces personnes
se voyant reprocher des infractions peu vraisemblables; leurs droits de
procédure n'étaient pas respectés. Par ailleurs, le pouvoir judiciaire
souffrait d'une surcharge chronique due à un sous-effectif. Le Venezuela était
partie à différents traités de protection des droits de l'homme (Pacte ONU II,
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants), mais avait dénoncé la Convention américaine relative aux droits
de l'homme. Ces constatations recoupent largement les affirmations des
recourants. Toutefois, en dépit de la situation très volatile et des carences
relevées, le DFAE a estimé que la situation, pour les délits de droit commun,
n'était pas différente (s'agissant de la corruption, du clientélisme et de
l'inefficience de la justice) de la majorité des Etats d'Amérique latine
auxquels la Suisse accorde habituellement l'entraide judiciaire. Celle-ci
pouvait être accordée sous conditions (à fixer le cas échéant au cas par cas),
et après un examen approfondi tenant compte de l'évolution sur place. Le DFAE
évoquait aussi l'éventualité d'un "resserrement du monitoring des garanties
effectué par la représentation suisse sur place".  
 
2.3. Selon la jurisprudence, l'application de l'art. 2 EIMP doit se faire in
concreto: si un jugement de valeur doit être porté de manière générale sur le
régime politique, les institutions et en particulier le pouvoir judiciaire de
l'Etat requérant (ATF 123 II 161 consid. 6b), l'intéressé doit également
démontrer qu'en raison de sa propre situation, il se trouve concrètement menacé
d'une grave violation des droits de l'homme, en particulier de traitements
prohibés ou d'une procédure inéquitable (ATF 129 II 268 consid. 6.3 p. 272).  
En l'espèce, le recourant prétend faire partie de l'opposition. Il explique
avoir travaillé dans le secteur public jusqu'en 1992 et aurait ensuite
poursuivi sa carrière dans le secteur privé comme consultant externe pour le
Venezuela de plusieurs groupes de sociétés européennes. Il affirme avoir fait
partie du Parlamento Latinoamericano à la fin des années 90 comme membre du
parti Accion Democratica, opposé au pouvoir actuellement en place. Le recourant
n'apporte toutefois aucune précision sur son rôle dans l'opposition et sur une
éventuelle activité politique actuelle. Le fait qu'il ait été élu de
l'opposition bien avant la crise ne justifie pas les craintes à l'égard du
pouvoir en place. Renseignements pris sur place, le DFAE a ainsi estimé que
cette qualité d'opposant n'était pas confirmée, et le recourant lui-même admet
qu'il mène une existence discrète. Ses craintes découlent avant tout du fait
qu'il jouit d'une bonne situation financière, mais rien n'indique que le
pouvoir en place s'en prendrait systématiquement aux membres de la classe aisée
de la population. Le recourant allègue que son fils a fait l'objet de deux
enlèvements; lui-même aurait été enlevé au mois de décembre 2017, cette
circonstance constituant un fait nouveau dont le Tribunal fédéral ne devrait en
principe pas tenir compte (art. 99 LTF). Quoiqu'il en soit, le recourant ne
prétend pas que ces enlèvements auraient été commandités par le pouvoir en
place; ils se sont achevés par le versement de rançons, sans que le recourant
n'allègue avoir fait l'objet de pressions en relation avec une quelconque
activité ou opinion politique. Aucun lien ne peut donc être fait avec une telle
activité du recourant et rien ne permet de redouter que le recourant puisse se
voir appliquer les traitements illicites dont peuvent être l'objet les
opposants au pouvoir en place (détention arbitraire, accusations fantaisistes,
violations délibérées des droits de procédure). 
Il apparaît ainsi que les défauts et irrégularités de procédure auxquels le
recourant se trouverait exposé en cas de mise en prévention, ne sont pas
différents de ceux auxquels doivent faire face tous les prévenus de droit
commun. Dans de telles circonstances, et en dépit des réserves exprimées sur
l'indépendance et la surcharge chronique du pouvoir judiciaire, l'entraide peut
être accordée moyennant l'octroi de garanties diplomatiques. Celles-ci portent
sur les principales carences relevées ci-dessus (droits de la défense,
présomption d'innocence, jugement dans un délai raisonnable par un tribunal
impartial, garanties en cas d'arrestation et de détention), et les recourants
ne demandent pas que ces garanties soient complétées sur un point ou un autre. 
Le DFAE recommande un réexamen approfondi de l'évolution de la situation; en
principe, la procédure de l'art. 80p EIMP ne sert qu'à vérifier la validité de
l'engagement de l'Etat requérant, et ne permet notamment pas de fixer de
nouvelles conditions à l'entraide judiciaire (ATF 131 II 228 consid. 2 p. 231).
Toutefois, en cas d'évolution soudaine de la situation sur un point essentiel,
l'autorité pourrait être amenée à reconsidérer sa décision. Le DFAE préconise
en outre que le monitoring prévu dans les conditions fixées soit renforcé. Il
n'appartient pas à l'autorité d'entraide de donner des directives précises sur
ce point à la représentation suisse dans l'Etat requérant. Il est toutefois
pris acte des intentions du DFAE à cet égard. 
En définitive, l'octroi de l'entraide assorti de garanties aura pour effet
d'améliorer la situation du recourant en cas de mise en prévention, voire en
détention, puisque rien n'empêcherait sans cela les autorités répressives
d'agir à leur guise. Le grief relatif à l'art. 2 EIMP doit dès lors être
écarté. Il ne se justifie pas, cela étant, de suspendre la procédure
d'entraide, cette conclusion du recours n'étant au demeurant pas motivée. 
 
2.4. Comme le relève l'OFJ dans sa réponse, les garanties diplomatiques seront
soumises à l'Etat requérant qui devra en accepter rigoureusement la teneur.
Selon l'art. 80p EIMP, les conditions posées à l'octroi de l'entraide sont
communiquées à l'Etat requérant et un délai lui est imparti pour déclarer s'il
les accepte ou les refuse (al. 2). L'OFJ examine alors si la réponse de l'Etat
requérant constitue un engagement suffisant au regard des conditions fixées
(al. 3). Sa décision peut faire l'objet d'un recours dans les dix jours auprès
du TPF, dont la décision est définitive (al. 4; ATF 133 IV 134 consid. 1).
Selon la jurisprudence, le rôle de l'OFJ se limite en principe à communiquer
les exigences imposées aux autorités étrangères, à les éclairer sur la
procédure et à vérifier que les assurances données correspondent entièrement et
sans ambiguïté aucune à ce qui a été demandé. Il ne peut pas reformuler ou
interpréter les conditions fixées, lesquelles sont intangibles (ATF 124 II 132
consid. 3b p. 140/141). La procédure de contrôle instituée par l'art. 80p al. 4
EIMP n'a ainsi normalement pas pour but de remettre en discussion la décision
relative à l'octroi de l'entraide judiciaire (ATF 131 II 228 consid. 2 p 321),
raison pour laquelle la loi prévoit une procédure simplifiée et précise que
l'arrêt du TPF sur ce point est définitif (art. 80p al. 4 EIMP; ATF 133 IV 134
).  
En raison des incertitudes et de l'évolution rapide de la situation dans l'Etat
requérant, il y a lieu d'admettre à titre exceptionnel que l'OFJ puisse, comme
il l'envisage lui-même, disposer d'une certaine latitude pour réévaluer la
situation après la décision de principe accordant l'entraide judiciaire. Il lui
appartiendra ainsi de demeurer attentif au développement de la situation
particulière du Venezuela, en ce qui concerne notamment l'indépendance et
l'impartialité des institutions judiciaires ainsi que des pratiques policières.
Le cas échéant, il pourra s'adresser à nouveau au DFAE au cas où des changement
importants surviendraient. 
 
3.   
Le second grief des recourants a trait au principe de la proportionnalité; les
recourants relèvent que la demande d'entraide ne visait que deux comptes
bancaires pour la période allant de début 2012 au 31 janvier, respectivement 31
décembre 2014, alors que le Ministère public avait ordonné la transmission des
documents relatifs à 5 comptes pour la période allant du 1er janvier 2012
jusqu'à 2017 pour certains d'entre eux. 
Le recourant est titulaire de l'un des comptes expressément mentionnés dans la
demande d'entraide, soupçonnés d'avoir reçu des versements suspects. Dès lors,
le Ministère public a ordonné la production de tous les comptes dont celui-ci
était titulaire ou ayant droit économique, ce qui correspond au sens de la
demande d'entraide. Par ailleurs, lorsque les comptes en question sont
susceptibles d'avoir recueilli des versements suspects, il est conforme au
principe de la proportionnalité de produire la documentation sur une période
étendue afin de pouvoir identifier d'éventuels transferts ultérieurs (ATF 121
II 241 consid. 3 p. 242; arrêts 1A.249/2006 du 26 janvier 2007 consid. 3;
1A.205/2006 du 7 décembre 2006 consid. 4.2). Au demeurant, alors que les
recourants ont pu faire valoir leurs objections à l'encontre de certains
documents déterminés lors de la procédure devant le Ministère public puis en
instance de recours, ils se sont contentés d'allégations générales sur la
validité de la demande d'entraide et le nombre de documents saisis. Cela ne
constitue pas une motivation suffisante sous l'angle de la proportionnalité, de
sorte que la Cour des plaintes pouvait se dispenser d'examiner la question sans
violer le droit d'être entendu. 
 
4.   
Dans sa réponse au recours, l'OFJ estime que le nom du recourant ne devrait pas
apparaître dans le texte des garanties soumises à l'Etat requérant, dès lors
que ce dernier ignore encore son identité comme titulaire et ayant droit des
comptes. La remarque, appuyée par les recourants dans leur dernière écriture,
est justifiée et il y a lieu de réformer l'arrêt attaqué sur ce point;
l'identité du recourant, mentionnée sous let. a des garanties figurant au
consid. 5.1 de l'arrêt attaqué, devra être remplacée par la mention "la
personne physique titulaire ou ayant droit des comptes bancaires", afin
d'éviter que l'identité du recourant ne parvienne de manière anticipée à la
connaissance de l'autorité requérante. 
 
5.   
Sur le vu de ce qui précède, le recours est très partiellement admis au sens du
considérant qui précède, et rejeté pour le surplus. Conformément à l'art. 66
LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants qui succombent
pour l'essentiel, le recours étant admis sur un point de détail qui n'avait pas
été soulevé dans le recours. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est très partiellement admis et l'arrêt attaqué est réformé en ce
sens que l'identité du recourant, mentionnée sous let. a des garanties figurant
au consid. 5.1 de l'arrêt attaqué, devra être remplacée par la mention "la
personne physique titulaire ou ayant droit des comptes bancaires". Le recours
est rejeté pour le surplus. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge des
recourants. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au Ministère
public de la République et canton de Genève, au Tribunal pénal fédéral, Cour
des plaintes, et à l'Office fédéral de la justice, Unité Entraide judiciaire. 
 
 
Lausanne, le 12 février 2018 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
Le Greffier : Kurz 

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