Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.196/2017
Zurück zum Index I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2017
Retour à l'indice I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2017


Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente
dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet.
Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem
Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
                                                               Grössere Schrift

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 

[displayimage]       
1C_196/2017            

 
 
 
Arrêt du 22 novembre 2017  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Karlen, Fonjallaz, Chaix et Kneubühler. 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
 A.________, 
 B.________, 
tous les deux représentés par Me Murat Julian Alder, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Grand Conseil du canton de Genève, case postale 3970, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
Recours contre la loi modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la
République et canton de Genève; qualité pour recourir, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre
constitutionnelle, du 23 février 2017. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 2 juin 2016, le Grand Conseil du canton de Genève a adopté la loi modifiant
l'art. 3 de la loi portant règlement du Grand Conseil (LRGC; RS/GE B 1 01) en
ce sens que le droit d'initiative parlementaire est désormais reconnu aux
membres du Grand Conseil, donc y compris aux députés suppléants (L 11668).
Publiée à la Feuille d'avis officielle du canton du 10 juin 2016, cette
modification législative n'a pas fait l'objet d'une demande de référendum.
Promulguée par arrêté du Conseil d'Etat genevois du 24 août 2016, elle est
entrée en vigueur le 27 août 2016. 
Par acte du 26 septembre 2016, A.________ et B.________, citoyens genevois,
respectivement député et ancien député au Grand Conseil, ont recouru contre
cette disposition légale auprès de la Chambre constitutionnelle de la Cour de
justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice), en concluant à son
annulation. Ils ont fait valoir que cet article violait les art. 1 al. 1, 80,
81 al. 1, 82 et 91 al. 2 de la Constitution genevoise du 14 octobre 2012 (Cst/
GE; RS/GE A 200) : la question de savoir si les députés suppléants devaient
être ou non autorisés à déclencher un processus parlementaire devrait figurer
dans la constitution et non pas dans une loi. Par arrêt du 23 février 2017, la
Cour de justice a déclaré le recours irrecevable, faute de qualité pour
recourir. 
 
B.   
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ et
B.________ demandent principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 23
février 2017 et de constater la recevabilité du recours formé le 26 septembre
2016. Ils concluent subsidiairement au renvoi de la cause à l'instance
précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
Invitée à se déterminer, la Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la
recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de
son arrêt. Le Grand Conseil conclut au rejet du recours. Par courrier du 16
juin 2017, les recourants ont renoncé à répliquer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Formé contre un arrêt final (art. 90 LTF) pris en dernière instance cantonale (
art. 86 al. 1 let. d LTF) sur la base du droit public cantonal (art. 82 let. a
LTF), le présent recours est en principe recevable comme recours en matière de
droit public au sens des art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art.
83 LTF n'étant réalisée. Les recourants sont directement touchés par le
prononcé d'irrecevabilité de l'arrêt attaqué et ont un intérêt digne de
protection à en obtenir l'annulation. Ils ont dès lors qualité pour recourir au
sens de l'art. 89 al. 1 LTF. 
Les juges cantonaux ayant refusé d'entrer en matière sur son recours, seule la
question de la recevabilité du recours cantonal peut donc être portée devant le
Tribunal fédéral qui n'a, à ce stade, pas à examiner le fond de la contestation
(ATF 133 IV 119 consid. 6.3 p. 121). 
 
2.   
Il n'est pas contesté que les recourants ne disposent pas de la qualité pour
recourir contre le nouvel art. 3 LRGC du seul fait qu'ils sont titulaires des
droits politiques dans le canton de Genève. Les recourants reprochent cependant
à l'instance précédente de leur avoir refusé la qualité pour recourir en se
fondant sur l'art. 60 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative
genevoise du 12 septembre 1985 (LPA/GE; E 5 10) - sur le modèle de l'art. 89
al. 1 let. b et c LTF. Ils se plaignent d'une violation des art. 111 et 89 al.
1 LTF. 
 
2.1. Aux termes de l'art. 111 LTF, la qualité de partie à la procédure devant
toute autorité cantonale précédente doit être reconnue à quiconque a qualité
pour recourir devant le Tribunal fédéral (al. 1); l'autorité qui précède
immédiatement le Tribunal fédéral doit pouvoir examiner au moins les griefs
visés aux art. 95 à 98 LTF (al. 3).  
Il résulte de cette disposition que la qualité pour recourir devant les
autorités cantonales ne peut pas s'apprécier de manière plus restrictive que la
qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral, les cantons demeurant libres
de concevoir cette qualité de manière plus large (ATF 135 II 145 consid. 5 p.
149 et les arrêts cités). En l'occurrence, il convient donc d'examiner la
qualité pour recourir sous l'angle de l'art. 89 al. 1 LTF. S'agissant de droit
fédéral (art. 111 al. 1 LTF), le Tribunal fédéral examine cette question
librement. 
Selon l'art. 89 al. 1 let. b et c LTF - notion correspondant à celle de l'art.
60 al. 1 let. b LPA/GE -, lorsque le recours est dirigé contre un acte normatif
cantonal, la qualité pour recourir appartient à toute personne dont les
intérêts sont effectivement touchés par l'acte attaqué ou pourront l'être un
jour; une simple atteinte virtuelle suffit, à condition toutefois qu'il existe
un minimum de vraisemblance que le recourant puisse un jour se voir appliquer
les dispositions contestées. Quant à l'intérêt digne de protection, il n'est
pas nécessaire qu'il soit de nature juridique, un intérêt de fait étant
suffisant (ATF 141 I 78 consid. 3.1 p. 81; 137 I 77 consid. 1.4 p. 81). 
La simple appartenance à une autorité n'implique pas par elle-même une relation
de proximité suffisante avec l'objet du litige et ne crée pas une qualité pour
recourir particulière (cf. art. 89 al. 2 LTF; voir déjà ATF 91 I 110 consid. 2
p. 115; 82 I 98 consid. 1a p. 98). Indépendamment de son appartenance à une
autorité, la personne qui souhaite former un recours doit être potentiellement
directement touchée par l'acte législatif qu'elle attaque (ATF 137 II 30
consid. 2.2.3 et 2.3 p. 33-34). En effet, afin d'exclure l'action populaire, la
seule poursuite d'un intérêt général et abstrait à la correcte application du
droit ne suffit pas (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 p. 33; arrêt 1C_754/2013 du 28
avril 2014 consid. 3.1). Le recourant doit prouver l'existence d'un rapport
particulièrement étroit et digne de protection (" eine schutzwürdige besondere
Beziehungsnähe ") avec l'objet du litige.  
 
2.2. Il y a donc lieu d'analyser la condition de l'intérêt digne de protection
contenue à l'art. 89 al. 1 let. c LTF, notion correspondant à celle de l'art.
60 al. 1 let. b LPA/GE.  
Avant l'entrée en vigueur du nouvel art. 3 LRGC, le droit d'initiative
parlementaire de l'art. 91 al. 2 Cst/GE était conféré uniquement aux députés
titulaires, le député suppléant étant affecté à une fonction de remplacement
(art. 27A et 27B LRGC). L'acte normatif attaqué élargit donc le cercle des
députés disposant du droit d'initiative parlementaire. Il modifie le nombre de
personnes légitimées à déclencher un processus parlementaire. En cela, il
touche à l'activité d'un député titulaire, lequel sera amené à traiter
d'initiatives parlementaires qui n'ont pas été déposées par le cercle des
députés élus qui siègent dans la composition ordinaire du Grand Conseil. Avec
les recourants, il faut reconnaître qu'un député élu subit directement dans
l'exercice de sa charge les effets de cette modification législative qui étend
le droit d'initiative de l'art. 91 al. 2 Cst/GE au-delà du cercle des députés
titulaires. L'introduction du droit d'initiative parlementaire aux députés
suppléants peut en effet conduire à une augmentation des projets ou des
interventions qui seront soumis aux députés titulaires. De ce point de vue une
atteinte virtuelle peut être envisagée (cf. arrêt 1C_222/2016 du 5 juillet 2017
consid. 1.3.1). Quoi qu'en dise la cour cantonale, le fait que les députés
titulaires ne se trouvent pas exposés à être évincés de l'exercice de leur
compétence, ni en séance plénière, ni même en séance de commission importe peu.
En effet, il n'en demeure pas moins que les députés titulaires se trouvent dans
un rapport particulièrement étroit avec la nouvelle teneur de l'art. 3 LRGC, de
sorte qu'ils disposent d'un intérêt de fait à ce que la conformité au droit
supérieur de l'étendue du droit d'initiative parlementaire aux députés
suppléants soit contrôlée. Le recourant, député titulaire, ne poursuit ainsi
pas un intérêt général et abstrait tendant à garantir une application correcte
du droit. Lui reconnaître la qualité pour recourir ne consacre pas non plus une
action populaire, laquelle est proscrite (cf. consid. 2.2 ci-dessus). 
 
2.3. Dans un arrêt relativement ancien, le Tribunal fédéral avait eu à statuer
sur la qualité pour recourir d'un parlementaire contre une disposition
cantonale soumettant désormais les lois cantonales à une double délibération du
Grand Conseil, ce qui était de nature à accroître le travail parlementaire. Le
Tribunal fédéral avait alors considéré que les membres du Grand Conseil
n'étaient pas légitimés à recourir: ils étaient certes touchés par la
disposition litigieuse, mais uniquement en leur qualité de membre d'une
autorité et, en cette qualité, ils ne pouvaient pas faire valoir la violation
de droits constitutionnels (ATF 91 I 110 consid. 2 p. 115). En d'autres termes,
la qualité de membre d'une autorité excluait toute qualité pour recourir contre
une loi votée par cette autorité.  
Les autres arrêts rendus dans ce domaine, d'ailleurs cités par la cour
cantonale à l'appui de sa position, ne confirment pas entièrement cette
jurisprudence. Dans ces autres arrêts, le Tribunal fédéral a exclu la qualité
pour recourir du membre d'une autorité, non pas en raison de son appartenance à
cette autorité, mais parce que ce membre n'était pas dans un rapport
particulièrement étroit avec l'objet du recours. Il a, par exemple, nié une
telle proximité en matière de modification de la loi sur l'enseignement
relative au nombre et à l'organisation des commissions scolaires (ATF 123 I 41
), en matière d'élection par le parlement des membres d'un conseil de
l'éducation (ATF 112 Ia 174), pour l'élection des membres du bureau du conseil
municipal (ATF 108 Ia 281), à l'occasion d'un arrêté relatif à l'entrée en
vigueur de la loi sur la nationalité genevoise (ATF 82 I 93) ou enfin
s'agissant d'une ordonnance de l'exécutif cantonal portant sur une commission
statuant sur les cas de rigueur en droit des migrations (arrêt 2C_384/2009 du 5
novembre 2009). 
Le caractère apparemment absolu de l'ATF 91 I 110 consid. 2 p. 115doit encore
être relativisé en raison de l'élargissement de la voie de droit prévue par
l'actuel recours en matière de droit public par rapport à l'ancien recours de
droit public. De fait, la jurisprudence relative à l'art. 88 de l'ancienne loi
fédérale du 16 décembre 1943 d'organisation judiciaire (OJ; RO 2006 1205)
imposait un intérêt juridiquement protégé pour admettre la qualité pour agir,
alors que, en application de la jurisprudence portant sur l'art. 89 al. 1 let.
c LTF, il suffit de faire valoir un intérêt digne de protection, soit notamment
un intérêt de fait (ATF 133 I 286 consid. 2.2 p. 289-290; ATF 134 I 322 consid.
1.3 non publié). 
 
2.4. Au vu de ce qui précède, la qualité pour recourir ne se fonde pas sur la
simple appartenance du recourant au Grand Conseil, mais sur le fait que - en sa
qualité de parlementaire - il est directement touché par l'acte législatif
qu'il tient pour contraire à la constitution cantonale. Un intérêt personnel
digne de protection aurait donc dû lui être reconnu à faire contrôler la
conformité au droit supérieur et la Cour de justice aurait dû entrer en matière
sur le fond du recours.  
 
3.   
Il s'ensuit que le recours est admis, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la
qualité pour recourir du deuxième recourant (ancien député). L'arrêt attaqué
est annulé et la cause est renvoyée à l'instance précédente pour qu'elle entre
en matière sur le recours. 
Les recourants, qui obtiennent gain de cause avec l'assistance d'un avocat, ont
droit à des dépens pour la présente procédure de recours, à la charge de l'Etat
de Genève (art. 68 al. 1 LTF). Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66
al. 4 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis et l'arrêt attaqué annulé. La cause est renvoyée à la Cour
de justice pour qu'elle entre en matière sur le recours. 
 
2.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Une indemnité de dépens de 2'000 francs est accordée aux recourants. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au Grand Conseil
du canton de Genève et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre
constitutionnelle. 
 
 
Lausanne, le 22 novembre 2017 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
La Greffière : Tornay Schaller 

Navigation

Neue Suche

ähnliche Leitentscheide suchen
ähnliche Urteile ab 2000 suchen

Drucken nach oben