Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.103/2017
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                [displayimage]  
 
 
1C_103/2017  
 
 
Arrêt du 16 janvier 2018  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Fonjallaz, Eusebio, Chaix et Kneubühler. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
Helvetia Nostra, 
représentée par Me Pierre Chiffelle, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1. C.________, 
2. D.________, 
intimés, 
 
Commune de Bagnes, Administration communale, 
Conseil d'Etat du canton du Valais, place de la Planta, Palais du Gouvernement,
1950 Sion. 
 
Objet 
autorisation de construire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
du Valais, Cour de droit public, du 13 janvier 2017 
(A1 16 241). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 31 août 2012, le Conseil municipal de Bagnes a accordé à C.________ et
D.________ l'autorisation de construire un chalet d'habitation avec forages
géothermiques sur les parcelles n° 1995 et 4973 situées à Verbier au lieu-dit
"Planalui", en zone touristique de faible densité T4 sous la ligne de
télécabine Verbier-Savoleyres. Le chalet comporte trois niveaux d'habitation.
Le rez inférieur compte deux chambres avec wc et salle de bains ainsi qu'une
cave; l'étage comporte deux chambres avec wc et salle de bains, plus une
buanderie, un fitness, un hammam, une cave et un local technique. Les combles,
situées au niveau de la route d'accès, se composent d'un hall d'entrée avec
local à skis et wc adjacents, et d'un espace séjour/coin à manger/cuisine. Dans
son autorisation de construire, le Conseil municipal a notamment écarté
l'opposition formée par Helvetia Nostra, la déclarant irrecevable,
subsidiairement mal fondée. 
Une première procédure de recours a abouti au renvoi de la cause à l'autorité
communale et à la délivrance par celle-ci d'un nouveau permis de construire, le
14 janvier 2016, prévoyant l'utilisation du chalet exclusivement aux fins de
résidence principale avec l'inscription d'une mention correspondante au
Registre foncier. Par décision du 7 septembre 2016, le Conseil d'Etat du canton
du Valais a rejeté le recours formé par Helvetia Nostra. 
 
B.   
Par arrêt du 13 janvier 2017, la Cour de droit public du Tribunal cantonal
valaisan a elle aussi rejeté le recours formé par Helvetia Nostra. Le chalet,
dans un secteur déjà largement construit, à 2,1 km (6 minutes en voiture) du
centre de la station, était accessible toute l'année. Sa typologie - nonobstant
l'existence de plusieurs salles d'eau, d'un fitness et d'un hammam - était
adaptée à une résidence principale. Entre janvier 2013 et début 2016, la
population résidente de Verbier avait légèrement baissé, de sorte que la
demande en résidences principales était relativement modeste. Sur 45
autorisations de construire (soit 79 logements) qui avaient été délivrées en
près de quatre ans pour des résidences principales, 8 logements étaient occupés
en résidence principale, 13 étaient en attente (recours avec effet suspensif)
et 9 en cours de réalisation; pour les 49 autres, les travaux n'avaient pas
commencé. La demande était donc réelle et pouvait être estimée à une bonne
dizaine par année. Le projet était d'un prix abordable (1'600'000 fr.) et
susceptible d'intéresser des personnes désireuses de prendre domicile à
Verbier. Un abus de droit ne pouvait donc être retenu. 
 
C.   
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, Helvetia Nostra
demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et l'autorisation de
construire et de renvoyer la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision
sur les frais et dépens. 
La cour cantonale et le Conseil d'Etat ont renoncé à se déterminer. La commune
de Bagnes se réfère à l'arrêt attaqué et conclut au rejet du recours. Les
intimés C.________ et D.________ ont renoncé à déposer des déterminations.
L'Office fédéral du développement territorial estime que les considérants de
l'arrêt attaqué ne permettent pas d'établir l'existence d'une demande de
résidences principales, de sorte qu'il renonce à prendre position. La
recourante a déposé de nouvelles observations le 15 août 2017, qui ont été
communiquées aux autres parties à titre d'information. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance
cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans une cause de droit public (art. 82
let. a LTF), le recours est en principe recevable, aucune des exceptions
prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recours a été déposé dans le délai
prescrit (art. 100 al. 1 LTF) et la qualité pour agir de la recourante (art. 89
al. 1 LTF) n'est pas contestable (ATF 139 II 271). 
 
2.   
La recourante estime que sur la base des données recueillies en instance
cantonale concernant la population résidente et le nombre de permis de
construire accordés, on constaterait un déséquilibre évident entre l'offre et
la demande de résidences principales. Du mois de janvier 2013 au début 2016, on
compterait 44 résidents à l'année en moins dans la station de Verbier, et il
existerait actuellement 58 logements neufs à disposition. Le risque d'un
recours accru à l'art. 14 LRS serait ainsi élevé, ce qui viderait de son sens
l'art. 75b Cst. La recourante dénonce le laxisme dont ferait preuve la commune
dans l'octroi des permis de construire. 
 
2.1. L'art. 75b Cst. limite les résidences secondaires au maximum de 20 % du
parc des logements et de la surface brute au sol habitable de chaque commune.
Cette disposition ne vise pas seulement les constructions qui, selon les
déclarations des intéressés, seront utilisées comme résidences secondaires,
mais également celles qui pourraient être utilisées comme résidences
secondaires (ATF 142 II 201 consid. 2.1 p. 208 et les références citées). L'
art. 7 al. 1 let. a LRS prévoit ainsi que dans les communes qui comptent une
proportion de résidences secondaires supérieure à 20 %, de nouveaux logements
ne peuvent être autorisés qu'à la condition d'être utilisés comme résidence
principale ou comme logement assimilé à une résidence principale au sens de
l'art. 2, al. 3. L'art. 3 al. 1 ORSec prévoit que la servitude à mentionner au
registre foncier en vertu de la LRS pour les logements soumis à une restriction
d'utilisation doit avoir la teneur suivante: "résidence principale ou logement
assimilé à une résidence principale au sens de l'art. 7, al. 1, let. a, LRS".
L'art. 14 LRS prévoit en outre que l'obligation d'affectation en résidence
principale peut être suspendue pendant une durée déterminée et renouvelable
lorsque la preuve est faite que le logement a été vainement proposé sur le
marché à un prix raisonnable (al. 1 let. b).  
 
2.2. Face à l'interdiction générale de dépasser le seuil de 20 % de résidences
secondaires dans une commune, on ne peut exclure que certains constructeurs
soient tentés de contourner la réglementation en déclarant faussement qu'ils
entendent utiliser leur construction en tant que résidence principale ou
l'affecter en résidence touristique mise à disposition du public. Un abus de
droit manifeste ne saurait toutefois être admis que s'il apparaît d'emblée que
le projet ne pourra pas être utilisé comme annoncé, notamment en raison de
l'insuffisance de la demande de résidences principales dans la commune en
question pour le type d'objets concernés, et/ou en présence d'autres indices
concrets (ATF 142 II 206 consid. 2.2 p. 209). En droit public, le principe de
la bonne foi est explicitement consacré par l'art. 5 al. 3 Cst., en vertu
duquel les organes de l'Etat et les particuliers doivent agir de manière
conforme aux règles de la bonne foi. Il y a fraude à la loi - forme
particulière d'abus de droit - lorsqu'un justiciable évite l'application d'une
norme imposant ou interdisant un certain résultat par le biais d'une autre
norme permettant d'aboutir à ce résultat de manière apparemment conforme au
droit (ATF 142 II 206 consid. 2.3 p. 209 s.). La norme éludée doit alors être
appliquée nonobstant la construction juridique destinée à la contourner (ATF
142 II 206 consid. 2.3 p. 210; ATF 134 I 65 consid. 5.1 p. 72; 131 I 166
consid. 6.1 p. 177 et les arrêts cités). Pour être sanctionné, un abus de droit
doit apparaître manifeste. L'autorité qui entend faire appliquer la norme
éludée doit établir l'existence d'une fraude à la loi, ou du moins démontrer
l'existence de soupçons sérieux dans ce sens. Cette appréciation doit se faire
au cas par cas, en fonction des circonstances d'espèce (ATF 142 II 206 consid.
2.5 p. 210 et la jurisprudence citée).  
Dans le contexte de l'art. 75b Cst. et de ses dispositions d'application, il
n'y a pas lieu d'assouplir la répartition du fardeau de la preuve dans ce
domaine en exigeant systématiquement du constructeur qu'il prouve d'emblée le
respect de l'affectation prévue. Toutefois, il appartient à l'autorité chargée
de la délivrance des permis de construire de s'assurer que les conditions
posées pourront être respectées (ATF 142 II 206 consid. 4.3 p. 215; arrêt
1C_546/2015 du 23 juin 2016 consid. 2.5). Il s'agit de vérifier si, en
prétendant vouloir construire une résidence principale (but en soi admissible
au regard de la norme constitutionnelle) selon la définition des art. 2 al. 2
et 3 LRS, l'intéressé n'a pas pour objectif de contourner l'interdiction
découlant de l'art. 75b Cst. et de l'art. 6 LRS en réalisant, à terme, une
résidence secondaire. Il en va de même s'il envisage d'emblée, toujours en
prétendant vouloir construire une résidence principale, de faire usage de l'
art. 14 LRS qui permet de suspendre cette affectation lorsqu'il n'existe pas de
demande pour un tel logement à un prix raisonnable (ATF 142 II 206 consid. 2.4
p. 210). Dans ce cadre, le Tribunal fédéral recherche s'il existe des indices
concrets mettant d'emblée en doute la volonté ou la possibilité d'utiliser
l'immeuble comme résidence principale. Ces indices peuvent, selon les
circonstances, concerner la situation de l'immeuble (zone de construction,
accessibilité toute l'année, éloignement des lieux de travail), sa conception
même (dans l'optique d'une occupation à l'année), éventuellement son prix, les
circonstances tenant à la personne qui entend y habiter, lorsque celle-ci est
connue (résidence actuelle, lieu de travail, déclarations d'intention de
l'intéressé lui-même). Lorsque le ou les futurs occupants ne sont pas connus
(logements destinés à la vente ou à la location), le critère principal est
celui de la demande de résidences principales dans le même secteur (ATF 142 II
206 consid. 2.4 p. 210). 
 
2.3. Dans un arrêt concernant la construction de trois habitations dans la
station de Verbier (arrêt 1C_874/2013 du 4 avril 2014), le Tribunal fédéral a
considéré qu'il n'existait pas d'indice d'abus de droit; les allégations
concernant la délivrance par la commune de Bagnes de nombreux permis assortis
d'avenants portant sur des résidences principales ne permettaient pas
d'admettre l'existence d'un abus de droit dans le cas particulier. Par la
suite, dans les cas de constructions dont les acquéreurs ne sont pas encore
connus, la jurisprudence a exigé qu'il soit à tout le moins rendu vraisemblable
qu'il existe, dans le secteur considéré, une demande pour des résidences
principales (arrêt 1C_160/2015 du 3 mai 2016 concernant la station d'Ovronnaz,
commune de Leytron). L'introduction de l'art. 14 LRS, depuis le 1er janvier
2016, renforçait le risque que les constructeurs ne recourent à la possibilité
de suspendre l'affectation en résidence principale lorsque le logement ne
trouve pas preneur. Il y avait lieu soit pour la commune d'instruire de manière
complète la question de la demande pour des résidences principales, soit pour
les constructeurs de faire état de promesses de vente. Dans les cas où la
demande pour ce type d'habitation est manifestement insuffisante, le permis de
construire doit être refusé (arrêt 1C_263/2016 du 21 février 2017).  
 
2.4. En l'occurrence, les intimés ne font pas valoir et établissent encore
moins qu'ils auraient d'ores et déjà des offres d'achat sérieuses et concrètes
pour l'acquisition du chalet projeté. L'usage de ce chalet à des fins de
résidence principale apparaît dès lors d'emblée comme incertain.  
Il faut dès lors examiner la situation du marché immobilier tel qu'il se
présente dans la commune où est situé ce double projet de construction en
tenant compte de l'ensemble des circonstances. La construction est située à
Verbier, station à vocation essentiellement touristique et relativement
éloignée de la vallée du Rhône. Il n'est certes pas contesté que le bien-fonds,
situé à une altitude d'environ 1700 m, est accessible toute l'année et que, de
par sa typologie, le logement peut se prêter en soi à une utilisation en
résidence principale. Selon les renseignements obtenus en instance cantonale,
la population résidente à titre principal à Verbier a passé, entre janvier 2013
et début 2016, de 3197 à 3153 habitants, soit une diminution de 44 personnes,
ce qui établit une demande déclinante. Cette caractéristique est encore
renforcée par les chiffres relatifs aux autorisations de construire délivrées
durant la même période. Dites autorisations étaient au nombre de 45
correspondant à 79 logements; 8 de ces logements étaient achevés et occupés
comme résidences principales, 9 en cours de réalisation, 13 en attente de
l'issue d'un recours et pour les 49 restants, les travaux n'avaient pas encore
commencé. Toujours selon l'arrêt cantonal, 49 biens de nature comparable au
projet litigieux (maisons ou chalets de six pièces et plus) étaient disponibles
à la vente au 29 décembre 2016. Le Tribunal cantonal relève que certains de ces
biens ne sont pas neufs et qu'il n'existe aucun objet comparable dans les
environs immédiats du projet; cela ne suffit cependant pas pour justifier la
construction litigieuse, car un tel raisonnement permettrait de contourner
systématiquement l'interdiction de l'art. 75b Cst. et de sa loi d'application. 
Compte tenu de la baisse de la population résidente (tendance dont rien
n'indique qu'elle se soit modifiée dernièrement) et de l'existence d'une offre
portant potentiellement sur plusieurs dizaines de logements neufs, on ne
saurait considérer la demande de résidences principales, en particulier pour le
type d'immeuble litigieux, comme établie et suffisante pour justifier le projet
au regard des principes rappelés ci-dessus. Une augmentation de la population
dans l'ensemble de la vallée de Bagnes ne constitue au demeurant pas un élément
pertinent tant la situation géographique et touristique de Verbier est
particulière. 
Dès lors, le projet ne pouvait être autorisé qu'à condition que l'achat par un
habitant à l'année fasse l'objet d'engagements sérieux et concrets avant même
la construction. Autoriser celle-ci alors que, d'emblée, il n'est pas
vraisemblable que le logement soit en définitive occupé comme résidence
principale, serait manifestement contraire aux objectifs constitutionnels et
légaux. 
 
3.   
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être admis. L'arrêt cantonal est
annulé, de même que la décision du Conseil d'Etat et le permis de construire
qui, en l'état, ne peut être accordé. Conformément aux art. 66 al. 1 et 68 al.
2 LTF, les frais judiciaires, de même que l'indemnité de dépens allouée à
Helvetia Nostra, sont mis à la charge solidaire des intimés qui succombent,
quand bien même ils n'ont pas procédé devant le Tribunal fédéral. La cause doit
être renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et
dépens des instances cantonales. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis; l'arrêt attaqué est annulé, de même que la décision du
Conseil d'Etat du 7 septembre 2016 et le permis de construire accordé le 14
janvier 2016. La cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision
sur les frais et dépens des instances cantonales. 
 
2.   
Une indemnité de dépens de 2'000 fr. est allouée à la recourante, à la charge
solidaire des intimés C.________ et D.________. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge solidaire des
intimés C.________ et D.________. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Commune de Bagnes, au Conseil
d'Etat du canton du Valais, au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de
droit public, et à l'Office fédéral du développement territorial. 
 
 
Lausanne, le 16 janvier 2018 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
Le Greffier : Kurz 

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