Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.788/2016
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 

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8C_788/2016            

 
 
 
Arrêt du 20 novembre 2017  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Maillard, Président, 
Frésard et Viscione. 
Greffière : Mme von Zwehl. 
 
Participants à la procédure 
1. A.A.________, 
2. B.A.________, 
3. C.A.________, 
tous les trois représentés 
par Me Jean-Daniel Kramer, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Bâloise Assurances SA, 
Aeschengraben 25, 4051 Basel, 
représentée par Me Marina Machado, avocate, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (réduction des prestations; participation à une rixe), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton de
Neuchâtel, Cour de droit public, du 25 octobre 2016 (CDP.2016.68-AA/yr). 
 
 
Faits :  
 
A.   
D.A.________ était marié à A.A.________ avec qui il a eu deux enfants,
B.A.________ et C.A.________. Il travaillait au service du W.________ à
V.________ et était, à ce titre, assuré obligatoirement contre le risque
d'accident auprès de la Bâloise Assurances SA (ci-après: la Bâloise). 
Dans la nuit du 24 au 25 février 2011, il est décédé des suites d'une
hémorragie massive causée par plusieurs coups de couteau donnés par B.________
devant la discothèque "X.________" à V.________. Une action pénale a été
ouverte contre ce dernier ainsi que contre le groupe d'amis qui l'accompagnait,
soit C.________, D.________ et E.________. 
Par jugement du 27 septembre 2012, le Tribunal criminel Y.________ a reconnu
B.________ coupable de meurtre et de rixe et l'a condamné à une peine privative
de liberté d'ensemble de 14 ans. C.________ a été reconnu coupable de
complicité de meurtre et condamné à une peine privative de liberté de 5 ans. En
ce qui concerne D.________ et E.________, le tribunal criminel les a reconnus
coupables de rixe et condamnés à une peine privative de liberté de 15 mois,
respectivement 12 mois, avec sursis pendant 4 ans. 
Statuant le 16 mai 2013, la Cour pénale du Tribunal cantonal de Neuchâtel a
rejeté l'appel formé par B.________ et confirmé le jugement de première
instance. En bref, le jugement d'appel repose sur les faits suivants: 
Le 24 février 2011, B.________ accompagné de ses trois amis, E.________,
D.________ et C.________, se sont rendus à V.________ pour passer la soirée.
Dans l'établissement "X.________", aux environs de 1h30, ils se sont trouvés
impliqués dans une bagarre, qui les opposait notamment à D.A.________. Les
gardes Securitas ont fait sortir de l'établissement public les quatre amis qui
n'ont pas opposé de résistance. Plutôt que de quitter les lieux, les intéressés
sont restés devant la porte de la boîte de nuit, avec la volonté d'en découdre
encore à l'extérieur. C.________ et E.________ sont partis chercher une bombe
lacrymogène dans la voiture qu'ils avaient garée dans un parking proche. Outre
la bombe lacrymogène, C.________ y a pris un couteau lui appartenant. Les deux
hommes sont retournés vers le "X.________". Au moment de leur arrivée à la
porte de la discothèque, dans un laps de temps qui n'a pas excédé 10 minutes,
D.A.________ est sorti de l'établissement et s'est dirigé directement vers
D.________, qui a dit avoir esquivé des coups et frappé à son tour. B.________
a alors empoigné D.A.________ et lui a asséné plusieurs coups de couteau.
D.A.________ est tombé accroupi. Un garde Securitas est sorti et les quatre
amis ont pris la fuite. 
Par décision du 8 juin 2015, confirmée sur opposition le 1er février 2016, la
Bâloise a réduit les prestations pour survivants de 50 %, au motif que l'assuré
avait pris part à une rixe à l'issue de laquelle il a avait été mortellement
blessé. 
 
B.   
Saisie d'un recours contre la décision sur opposition, la Cour de droit public
du Tribunal cantonal neuchâtelois l'a rejeté, par jugement du 25 octobre 2016. 
 
C.   
A.A.________, B.A.________ et C.A.________ forment un recours en matière de
droit public dans lequel ils concluent à l'annulation de l'arrêt cantonal et au
versement par la Bâloise de prestations non réduites; subsidiairement, au
renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouveau jugement au sens des
considérants. 
La Bâloise, la juridiction cantonale, de même que l'Office fédéral de la santé
publique ont renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de
droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (
art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) prévu
par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.   
Le litige porte sur le bien-fondé de la réduction des prestations en espèces
opérée par la Bâloise, de sorte que le Tribunal fédéral n'est pas lié par
l'état de fait constaté par la juridiction précédente (cf. art. 97 al. 2 et 105
al. 3 LTF). 
 
3.   
Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015
de la LAA. Cette modification laisse inchangé l'art. 39 LAA qui habilite le
Conseil fédéral à désigner les dangers extraordinaires et les entreprises
téméraires qui motivent dans l'assurance des accidents non professionnels le
refus de toutes les prestations ou la réduction des prestations en espèces. De
toute manière, le droit des recourants aux prestations d'assurance est soumis à
l'ancien droit dès lors que l'événement assuré est survenu avant le 1er janvier
2017 (voir les dispositions transitoires relatives à la modification du 25
septembre 2015; RO 2016 4375). 
L'art. 49 al. 2 OLAA [RS 832.202] dispose que les prestations en espèces sont
réduites au moins de moitié en cas d'accident non professionnel survenu
notamment en cas de participation à une rixe ou à une bagarre, à moins que
l'assuré ait été blessé par les protagonistes alors qu'il ne prenait aucune
part à la rixe ou à la bagarre ou qu'il venait en aide à une personne sans
défense (let. a). 
La notion de participation à une rixe ou à une bagarre est plus large que celle
de l'art. 133 CP. Pour admettre l'existence d'une telle participation, il
suffit que l'assuré entre dans la zone de danger, notamment en participant à
une dispute. Peu importe qu'il ait effectivement pris part activement aux faits
ou qu'il ait ou non commis une faute: il faut au moins qu'il se soit rendu
compte ou ait pu se rendre compte du danger. En revanche, il n'y a pas matière
à réduction en cas de légitime défense ou plus généralement lorsque l'assuré se
fait agresser physiquement, sans qu'il y ait eu au préalable une dispute, et
qu'il frappe à son tour l'agresseur dans un mouvement réflexe de défense
(JEAN-MAURICE FRÉSARD/MARGIT MOSER-SZELESS, L'assurance-accidents obligatoire
in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3 ^
ème éd., 2016, nos 418 et 419).  
Par ailleurs, il doit exister un lien de causalité entre le comportement de la
personne assurée et le dommage survenu. Si l'attitude de l'assuré - qui doit
être qualifiée de participation à une rixe ou à une bagarre - n'apparaît pas
comme une cause essentielle de l'accident ou si la provocation n'est pas de
nature, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à
entraîner la réaction de violence, l'assureur-accidents n'est pas autorisé à
réduire ses prestations d'assurance. Il convient de déterminer
rétrospectivement, en partant du résultat qui s'est produit, si et dans quelle
mesure l'attitude de l'assuré apparaît comme une cause essentielle de
l'accident (ATF 134 V 315 consid. 4.5.1.2 p. 320; arrêt 8C_153/2016 du 13
décembre 2016 consid. 2). A cet égard, les diverses phases d'une rixe forment
un tout et ne peuvent être considérées indépendamment l'une de l'autre (ATFA
1964 p. 75; arrêt 8C_529/2011 du 4 juillet 2012 consid. 2.2). 
 
4.  
 
4.1. Sur la base des constatations de fait établies dans la procédure pénale,
le tribunal cantonal a retenu que D.A.________ avait participé à une bagarre au
sens de l'art. 49 al. 2 let. a OLAA à l'intérieur de la discothèque
"X.________", même si son rôle au début de la dispute n'avait pas pu être
clairement établi (selon certains témoins D.A.________ s'en était pris
directement à B.________ tandis que pour d'autres D.A.________ s'était fait
insulter sans raison). Il a également considéré que la participation de
D.A.________ à cette bagarre était la cause essentielle des lésions dont
celui-ci avait ensuite été victime à l'extérieur de la discothèque et qui
avaient entraîné son décès. Selon le tribunal cantonal, en effet, l'agression
au couteau subie par le prénommé n'était que le prolongement, certes à un autre
endroit mais entre les mêmes protagonistes, de la rixe qui avait éclaté, à
peine 10 minutes auparavant, dans l'établissement. L'affirmation que
D.A.________ n'avait eu aucune intention agressive et avait même tenté de fuir
après être sorti du "X.________" n'y changeait rien et ne trouvait d'ailleurs
aucun appui dans les faits retenus par les juges pénaux selon lesquels le
prénommé s'était directement dirigé vers D.________. Partant, les conditions
d'une réduction des prestations en application de l'art. 49 al. 2 let. a OLAA
étaient remplies.  
 
4.2. Les recourants soutiennent qu'il n'y a pas de lien de causalité entre les
événements survenus à l'intérieur du "X.________" et les lésions mortelles
subies par D.A.________ devant l'établissement. Ce n'était pas le prénommé qui
avait provoqué la rixe dans la discothèque mais C.________ qui avait admis
chercher la bagarre. De plus, il ne ressortait pas des jugements pénaux que
cette bagarre avait eu des conséquences particulières ou que quelqu'un avait
été été blessé. Au moment de sortir du "X.________", l'histoire était terminée
pour D.A.________. Celui-ci était la victime malheureuse d'un guet-apens tendu
par quatre agresseurs qui avaient décidé de se battre contre lui. L'absence
d'intention belliqueuse de D.A.________ - à cet égard, la version différente
donnée par D.________ au cours de la procédure pénale était contestée, la
prétendue tentative de D.A.________ de le frapper par un coup de poing devant
être interprétée comme un mouvement de défense - trouvait confirmation dans le
fait qu'il était sorti seul de l'établissement. S'il s'était attendu à la
présence du groupe à l'extérieur et s'il avait eu la volonté d'en découdre, il
n'aurait pas rivalisé à un contre quatre et se serait fait accompagner par
d'autres personnes. En tout état de cause, la réaction d'extrême violence de
l'auteur des coups de couteau devait être qualifiée de tellement
extraordinaire, inattendue et disproportionnée qu'elle reléguait à
l'arrière-plan le rôle causal joué le cas échéant par D.A.________ dans la
bagarre survenue à l'intérieur de la discothèque et interrompait le lien de
causalité.  
 
5.  
 
5.1. Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales n'est
certes pas lié par les constatations de fait et l'appréciation du juge pénal.
Il ne s'en écarte cependant que si les faits établis au cours de l'instruction
pénale et leur qualification juridique ne sont pas convaincants, ou s'ils se
fondent sur des considérations spécifiques du droit pénal qui ne sont pas
déterminantes en droit des assurances sociales (ATF 125 V 237 consid. 6a p. 242
et les références). En l'occurrence, on ne se trouve dans aucun de ces cas de
figure. Les recourants ne démontrent pas le contraire. On s'en tiendra donc aux
faits tels qu'ils ont été constatés dans le jugement pénal d'appel du 16 mai
2013, au demeurant confirmé par arrêt du 8 novembre 2013 de la Cour de droit
pénal du Tribunal fédéral (cause 6B_645/2013).  
 
5.2. En l'espèce, il est établi par les constations pénales que D.A.________ a
pris part à une bagarre l'opposant au groupe d'amis composés de B.________,
C.________, D.________ et E.________ à l'intérieur du "X.________". C'est donc
à juste titre que les juges cantonaux ont retenu la participation à une rixe
sans qu'il soit décisif de savoir qui a déclenché la dispute et pourquoi. Il
n'y a pas non plus lieu de s'écarter de leur point de vue selon lequel il
existe une relation étroite entre ce premier affrontement et les événements qui
se sont produits à peine 10 minutes plus tard à l'extérieur de l'établissement.
La bagarre survenue entre notamment B.________ et D.A.________ a conduit les
gardes Securitas à intervenir et à faire sortir le groupe des quatre amis de
l'établissement tandis que l'assuré a pu rester à l'intérieur. Elle n'a pas
pris fin du fait que les participants se seraient calmés d'eux-mêmes et
auraient décidé de mettre un terme à leur dispute. C'est uniquement
l'intervention du personnel chargé de maintenir l'ordre qui a empêché
l'affrontement de se poursuivre. Dans ces conditions, D.A.________ n'était pas
raisonnablement fondé à penser que "l'histoire était terminée" et qu'il n'avait
rien à craindre en sortant de l'établissement à peine 10 minutes après
l'expulsion forcée du groupe d'amis contre lesquels il s'était bagarré. Il
pouvait et devait au contraire se rendre compte qu'au vu du court laps de temps
qui s'était écoulé depuis, il y avait un risque élevé que B.________ et ses
comparses fussent restés sur place avec la volonté d'en découdre avec lui à
l'extérieur comme cela ressort d'ailleurs du jugement pénal. Rien qu'en
s'avançant encore vers D.________ une fois sorti de l'établissement - fait
également retenu par le juge pénal -, D.A.________ devait s'attendre à ce que
la situation dégénère avec une violence accrue, se plaçant ainsi dans la zone
de danger exclue de la couverture d'assurance. C'est donc à bon droit que les
juges cantonaux ont considéré que les événements survenus à l'intérieur
respectivement à l'extérieur du "X.________" constituent un tout, si bien que
le lien de causalité entre la participation de l'assuré à la rixe et les
lésions mortelles dont il a été victime est donné. Le cas d'espèce se distingue
en effet nettement de la situation de guet-apens qu'avait eu à juger le
Tribunal fédéral des assurances dans l'ATFA 1964 p. 75. Il s'agissait de deux
groupes de personnes qui, après un long échange de propos injurieux, s'étaient
séparés sans en venir aux mains et en s'éloignant chacun de leur côté dans une
direction différente; or un groupe s'était embusqué dans un autre lieu pour,
une bonne heure plus tard, frapper la victime qui faisait partie de l'autre
groupe de trois coups de couteau alors qu'aucune nouvelle altercation n'avait
précédé cette attaque. Au vu des particularités de ce cas, le tribunal avait
retenu que le guet-apens constituait un événement nouveau, un risque dont
objectivement personne n'avait plus à tenir compte dans le cadre de la dispute
passée.  
On ne peut pas non plus suivre les recourants sur l'existence d'une
interruption du lien de causalité adéquate entre le comportement de l'assuré et
le résultat qui est survenu (sur cette notion cf. ATF 134 V 340 consid. 6.2 p.
349; 133 V 14 consid. 10.2 p. 23; 130 III 182 consid. 5.4 p. 188; voir
également, pour un cas où une interruption de la causalité adéquate a été
admise, l'arrêt 8C_363/2010 du 29 mars 2011 et, concernant la même affaire, au
plan civil, l'arrêt 4A_66/2010 du 27 mai 2010). Dans un contexte de rixe,
l'usage d'une arme dangereuse par un participant, tel un couteau, est une
éventualité qui ne peut pas être exclue selon le cours ordinaire des choses et
l'expérience de la vie. A partir de là, le fait que la rixe entraîne des
lésions corporelles graves, voire la mort d'homme, n'est pas si imprévisible ou
si exceptionnel pour qu'il soit propre à rompre le lien de causalité. 
La cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral en confirmant la
réduction opérée par la Bâloise. 
 
6.   
Vu ce qui précède, le recours se révèle mal fondé. 
Les recourants, qui succombent, doivent supporter les frais judiciaires (art.
66 al. 1 LTF) et n'ont pas droit à des dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de droit public du
Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, et à l'Office
fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 20 novembre 2017 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Maillard 
 
La Greffière : von Zwehl 

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