Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.312/2016
Zurück zum Index I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2016
Retour à l'indice I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2016


Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente
dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet.
Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem
Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
                                                               Grössere Schrift

Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
8C_312/2016
                   

Arrêt du 13 mars 2017

Ire Cour de droit social

Composition
MM. les Juges fédéraux Maillard, Président,
Frésard et Wirthlin.
Greffière : Mme Castella.

Participants à la procédure
Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité, rue des Gares 12, 1201
Genève,
recourant,

contre

A.________,
représentée par Me Aurèle Muller, avocat,
intimée.

Objet
Assurance-invalidité (rente d'invalidité; frais d'expertise),

recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre des assurances sociales, du 24 mars 2016.

Faits :

A. 
A.________ est associée-gérante des sociétés B.________ Sàrl et C.________ Sàrl
et exploite en cette qualité un magasin de sport. Sous la raison individuelle
"D.________", elle dispensait également des cours de plongée, entre autres
activités, avant de subir plusieurs accidents au cours des années 2009 et 2010,
à la suite desquels elle a bénéficié de prestations de l'assurance-accidents
obligatoire. Le 14 septembre 2010, elle a déposé une demande de prestations de
l'assurance-invalidité en raison d'une double hernie discale, opérée le 14 mai
2010 selon Cloward avec exérèse des deux hernies et mise en place de deux
cages. Dans la procédure opposant l'assurée à son assureur-accidents, une
expertise pluridisciplinaire a été confiée au Centre d'expertise médicale
(CEMed). Dans leur rapport d'expertise du 26 août 2011, les médecins du CEMed
ont considéré que la capacité de travail de l'assurée était nulle en ce qui
concernait les activités de plongée. En revanche, elle était totale dans une
activité adaptée.
Par décision du 15 janvier 2013, l'Office cantonal genevois de
l'assurance-invalidité (ci-après: l'office AI) a nié le droit de l'assurée à
des mesures professionnelles en raison d'un manque d'intérêt de sa part. En
outre, il a refusé de lui allouer une rente d'invalidité, au motif que le taux
d'invalidité (de 36 % si des mesures de réorganisation de l'entreprise étaient
exigibles et de 18 % dans le cas contraire) n'était pas suffisant pour ouvrir
droit à cette prestation.

B. 
Saisie d'un recours, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice
de la République et canton de Genève a ordonné la mise en oeuvre d'une
expertise judiciaire pluridisciplinaire, laquelle a été pratiquée par le
docteur E.________, spécialiste en neurologie, et par les docteurs F.________
et G.________, tous deux spécialistes en chirurgie orthopédique et
traumatologie de l'appareil locomoteur. Ces derniers ont posé les diagnostics
de cervicobrachialgie bilatérale non déficitaire et non radiculaire sur
pseudarthrose bi-étagée C5-C6 et C6-C7 après discectomie cervical antérieur et
fusion selon Cloward, et de status post entorse du genou gauche sans limitation
fonctionnelle. Ils ont considéré que la capacité de travail était nulle dans
toute activité (rapport d'expertise du 29 septembre 2015 et complément du 8
janvier 2016). Pour sa part, le docteur E.________ a retenu le diagnostic de
status après mise en place de deux cages en C5-C6 et C6-C7 et une capacité de
travail de 25 % dans une activité adaptée (rapport d'expertise du 16 juin
2015).
Par jugement du 24 mars 2016, la Chambre des assurances sociales a admis le
recours, annulé la décision du 15 janvier 2013, et mis l'assurée au bénéfice
d'une rente d'invalidité entière à compter du 1 ^er mars 2011. En outre, elle a
mis les frais de l'expertise judiciaire à la charge de l'office AI.

C. 
L'office AI interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement
en concluant à son annulation et au rétablissement de sa décision du 15 janvier
2013. En outre, il requiert l'attribution de l'effet suspensif à son recours.
L'intimée conclut au rejet du recours. La juridiction cantonale et l'Office
fédéral des assurances sociales ont renoncé à se déterminer.

D. 
Par ordonnance du 15 juillet 2016, le juge instructeur a attribué l'effet
suspensif au recours.

Considérant en droit :

1. 
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments du
recourant ou par la motivation de l'autorité précédente. Il fonde son
raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance
(art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte
ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le
recourant qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière
circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées
(cf. art. 97 al. 1 LTF).

2. 
Le litige porte, d'une part, sur le droit de l'intimée à une rente d'invalidité
et, d'autre part, sur la prise en charge des frais de l'expertise judiciaire.

3. 
Se fondant sur l'appréciation des docteurs G.________, F.________ et
E.________, la juridiction cantonale a retenu que la capacité de travail de
l'intimée ne dépassait pas 25 % dans une activité adaptée. Elle a considéré en
résumé que les rapports de ces médecins étaient convaincants et remplissaient
les critères jurisprudentiels en matière de valeur probante. Par ailleurs, il
n'y avait pas lieu de leur préférer le rapport d'expertise du CEMed dès lors
que, selon les médecins dudit centre, la situation n'était alors pas stabilisée
et il subsistait une incertitude concernant l'existence d'une fusion osseuse
intervertébrale à la suite de l'opération du 14 mai 2010.

4.

4.1. Par un premier grief, l'office AI reproche à la cour cantonale d'avoir
écarté de manière arbitraire le rapport d'expertise du CEMed, en arguant
qu'elle ne s'est pas prononcée sur la valeur probante de ce rapport et n'a pas
expliqué de façon circonstanciée les raisons pour lesquelles elle s'en
écartait. En résumé, il fait valoir que dans la procédure opposant l'assurée à
l'assureur-accidents, la juridiction cantonale avait pourtant reconnu pleine
valeur probante au rapport du CEMed, lequel tiendrait compte de la possibilité
d'une non-fusion osseuse. Se référant à l'ordonnance d'expertise de la cour
cantonale du 12 février 2015, le recourant soutient que l'expertise judiciaire
avait pour but de déterminer l'existence d'une aggravation de l'état de santé
de l'intimée entre le rapport du CEMed et sa décision du 15 janvier 2013, ce
qui n'a pas été démontré au final. Par ailleurs, l'appréciation des experts
judiciaires de la capacité de travail de l'assurée ne reposerait que sur les
plaintes de celle-ci et ne constituerait qu'une appréciation différente d'un
état de fait qui est demeuré inchangé. Leurs conclusions seraient même
contradictoires en ce sens qu'ils concluent à des taux différents de capacité
résiduelle de travail et retiennent une évolution défavorable de l'état de
santé alors que l'assurée a maintenu le même taux d'activité et que le docteur
E.________ a fait état d'une amélioration sur le plan neurologique.

4.2. En principe, le juge ne s'écarte pas sans motifs impérieux des conclusions
d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de
mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de
l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné (ATF 135 V 465
consid. 4.4 p. 469 et la référence). Selon la jurisprudence, peut constituer
une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci
contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en
infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres
spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en
doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les
cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge
ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle
expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa p. 352 s. et les références).
Lorsque, comme en l'occurrence, l'autorité de recours juge l'expertise
judiciaire concluante et en fait sien le résultat, le Tribunal fédéral n'admet
le grief d'appréciation arbitraire que si l'expert n'a pas répondu aux
questions posées, si ses conclusions sont contradictoires ou si, d'une
quelconque autre façon, l'expertise est entachée de défauts à ce point évidents
et reconnaissables, même sans connaissances spécifiques, que le juge ne pouvait
tout simplement pas les ignorer. Il n'appartient en particulier pas au Tribunal
fédéral de vérifier si toutes les affirmations de l'expert sont exemptes
d'arbitraire; sa tâche se limite bien plutôt à examiner si l'autorité pouvait,
sans arbitraire, se rallier au résultat de l'expertise (arrêt 9C_803/2013 du 13
février 2014 consid. 3.1).

4.3. En l'espèce, le recourant ne parvient pas à établir le caractère
arbitraire du choix opéré par les premiers juges de se fonder sur l'expertise
judiciaire plutôt que sur l'expertise du CEMed. D'ailleurs, au regard de la
jurisprudence susmentionnée, il ne s'agit pas d'examiner laquelle des deux
expertises est la plus convaincante mais uniquement de savoir si l'expertise
judiciaire est entachée d'un vice tel que l'on ne peut s'y fier. Dans ces
conditions, la juridiction cantonale n'avait pas à s'exprimer sur la valeur
probante du rapport d'expertise du CEMed, laquelle n'est au demeurant pas
remise en cause dans le jugement attaqué. En outre, la divergence d'opinion
entre les médecins du CEMed d'une part et les docteurs G.________, F.________
et E.________ d'autre part au sujet de la capacité de travail résiduelle n'est
pas susceptible de jeter un doute sérieux sur les conclusions de l'expertise
judiciaire. En effet, elle s'explique principalement par l'absence de fusion
osseuse aux niveaux C5-C6 et C6-C7 mise en évidence postérieurement à
l'expertise du CEMed (cf. complément du rapport d'expertise des docteurs
G.________ et F.________ du 8 janvier 2016). À ce propos, on ne saurait
retenir, comme l'affirme le recourant de manière appellatoire, que les médecins
du CEMed ont intégré l'éventualité d'une absence de fusion osseuse dans leur
évaluation de la capacité de travail. On relèvera par ailleurs que l'on ne se
trouve pas dans un cas de révision du droit à la rente (art. 17 al. 1 LPGA), de
sorte qu'il importe peu de savoir si l'état de santé de l'intimée s'est
détérioré depuis 2011 et si le rapport d'expertise judiciaire consacre une
simple appréciation différente d'un état de fait demeuré inchangé. Enfin, le
fait que les experts judiciaires n'ont pas retenu le même taux d'incapacité de
travail entre eux (75 % dans une activité adaptée pour le docteur E.________ et
100 % pour les docteurs G.________ et F.________) n'est pas de nature à
discréditer leurs appréciations, dans la mesure où les limitations
fonctionnelles retenues par ces médecins se rejoignent largement. Au vu de ces
limitations, à savoir le port de charges lourdes et la position statique
prolongée assise et debout selon les docteurs G.________ et F.________,
respectivement le port de charges, les positions "extrêmes" de la nuque
maintenues trop longtemps, la position debout et la marche de plus d'une heure
selon le docteur E.________ (cf. ch. 1 du titre "Concilium" des rapports
d'expertise judiciaire), les premiers juges n'ont en tout cas pas fait preuve
d'arbitraire en arrêtant la capacité de travail à 25 % dans une activité
adaptée, plutôt que de retenir une capacité nulle dans toute activité.

5.

5.1. Par un deuxième moyen, l'office AI reproche à la juridiction cantonale
d'avoir violé le droit fédéral en établissant le taux d'invalidité sur la base
d'une comparaison en pour cent, qui ne tient pas compte du statut
d'indépendante de l'assurée.

5.2. Les juges cantonaux ont retenu que l'intimée présentait un taux
d'invalidité d'au moins 75 % "dès lors qu'il n'était guère vraisemblable
qu'elle puisse réaliser avec invalidité au taux d'activité de 25 % un revenu
supérieur, à ce pourcentage, par rapport au revenu obtenu précédemment sans
invalidité". Aussi, de l'avis de la cour cantonale, le taux d'incapacité de
travail se confond-il avec le taux d'invalidité.

5.3. Le point de savoir selon quelle méthode le degré d'invalidité d'un assuré
doit être évalué est une question de droit sur laquelle le Tribunal fédéral se
prononce librement (arrêt 9C_236/2009 du 7 octobre 2009 consid. 3.4, in SVR
2010 IV n°11 p. 35).

5.4.

5.4.1. Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être déterminé sur
la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait
pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait
obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui
après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail
équilibré (art. 28a al. 1 LAI en corrélation avec l'art. 16 LPGA [RS 830.1]).
La comparaison des revenus s'effectue, en règle générale, en chiffrant aussi
exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant
l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité.
Dans la mesure où ces revenus ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent
être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi
l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues. Lorsqu'on
procède à une évaluation, celle-ci ne doit pas nécessairement consister à
chiffrer des valeurs approximatives; une comparaison de valeurs exprimées
simplement en pour-cent peut aussi suffire. Le revenu hypothétique réalisable
sans invalidité équivaut alors à 100 %, tandis que le revenu d'invalide est
estimé à un pourcentage plus bas, la différence en pour-cent entre les deux
valeurs exprimant le taux d'invalidité (comparaison en pour-cent; ATF 119 V 475
consid. 2b p. 482; 114 V 313 consid. 3a p. 313 et les références).

5.4.2. Si l'on ne peut déterminer ou évaluer sûrement les deux revenus en
cause, il faut, en s'inspirant de la méthode spécifique pour personnes sans
activité lucrative (art. 28a al. 2 LAI en corrélation avec les art. 27 RAI [RS
831.201] et 8 al. 3 LPGA), procéder à une comparaison des activités et évaluer
le degré d'invalidité d'après l'incidence de la capacité de rendement amoindrie
sur la situation économique concrète (procédure extraordinaire d'évaluation de
l'invalidité). La différence fondamentale entre la procédure extraordinaire
d'évaluation et la méthode spécifique réside dans le fait que l'invalidité
n'est pas évaluée directement sur la base d'une comparaison des activités; on
commence par déterminer, au moyen de cette comparaison, quel est l'empêchement
provoqué par la maladie ou l'infirmité, après quoi l'on apprécie séparément les
effets de cet empêchement sur la capacité de gain. Une certaine diminution de
la capacité de rendement fonctionnelle peut certes, dans le cas d'une personne
active, entraîner une perte de gain de la même importance, mais n'a pas
nécessairement cette conséquence. Si l'on voulait, dans le cas des personnes
actives, se fonder exclusivement sur le résultat de la comparaison des
activités, on violerait le principe légal selon lequel l'invalidité, pour cette
catégorie d'assurés, doit être déterminée d'après l'incapacité de gain (ATF 128
V 29 consid. 1 p. 30 s. et les références).

5.5. En l'espèce, le raisonnement opéré par les premiers juges, lesquels se
fondent implicitement sur la méthode de comparaison en pour cent (cf. supra
consid. 5.2), ne peut pas être suivi. En effet, cette méthode d'évaluation de
l'invalidité est pertinente lorsqu'un assuré invalide est capable d'exercer son
ancienne profession. Ce qui n'est pas le cas en l'espèce, notamment en ce qui
concerne les activités de plongée. En outre, en l'absence de toute constatation
de fait relative aux revenus perçus par l'assurée avant son invalidité, les
juges cantonaux ne pouvaient sans plus considérer que celle-ci n'était de toute
façon pas en mesure de réaliser, avec invalidité, un revenu supérieur à celui
gagné auparavant à un taux de 25 %. Par ailleurs, comme le fait valoir avec
raison le recourant, on ignore si l'intimée a pu ou pourrait réorganiser son
emploi du temps au sein de son entreprise en fonction de ses aptitudes
résiduelles. On ne sait pas non plus si l'activité qu'elle a maintenu dans son
entreprise après la survenance de l'atteinte à la santé met pleinement en
valeur sa capacité de travail résiduelle. Dans la négative, il faudrait se
demander si l'on ne pourrait pas exiger d'elle qu'elle mette fin à son activité
indépendante au profit d'une activité salariée plus lucrative (cf. arrêt 9C_578
/2009 du 29 décembre 2009 consid. 4.2.4 et les arrêts cités, in SVR 2010 IV n°
37 p. 115). Le jugement attaqué est muet sur toutes ces questions et les
constatations des premiers juges ne permettent pas de se prononcer sur les
conséquences économiques du handicap de l'intimée dans son activité
indépendante. Partant, il n'est pas possible de confirmer le résultat auquel la
juridiction cantonale est parvenue. Il convient dès lors d'annuler le jugement
attaqué et de renvoyer la cause à l'office AI pour qu'il rende une nouvelle
décision après examen, si nécessaire instruction complémentaire, de la
situation sur le plan économique.

6.

6.1. Par un dernier grief, l'office recourant soutient que la cour cantonale a
violé la jurisprudence en mettant à sa charge les frais de l'expertise
judiciaire.

6.2. Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. ATF 139 V 496
consid. 4.3 p. 501 s.), les frais qui découlent de la mise en oeuvre d'une
expertise judiciaire pluridisciplinaire confiée à un Centre d'observation
médicale de l'assurance-invalidité (COMAI) peuvent le cas échéant être mis à la
charge de l'assurance-invalidité. En effet, lorsque l'autorité judiciaire de
première instance décide de confier la réalisation d'une expertise judiciaire
pluridisciplinaire à un COMAI parce qu'elle estime que l'instruction menée par
l'autorité administrative est insuffisante (au sens du consid. 4.4.1.4 de l'ATF
137 V 210), elle intervient dans les faits en lieu et place de l'autorité
administrative qui aurait dû, en principe, mettre en oeuvre cette mesure
d'instruction dans le cadre de la procédure administrative. Dans ces
conditions, les frais de l'expertise ne constituent pas des frais de justice au
sens de l'art. 69 al. 1 bis LAI, mais des frais relatifs à la procédure
administrative au sens de l'art. 45 LPGA qui doivent être pris en charge par
l'assurance-invalidité.

6.3. Cette règle, qu'il convient également d'appliquer dans son principe aux
expertises judiciaires mono- et bidisciplinaires (cf. ATF 139 V 349 consid. 5.4
p. 357), ne saurait entraîner la mise systématique des frais d'une expertise
judiciaire à la charge de l'autorité administrative. Encore faut-il que
l'autorité administrative ait procédé à une instruction présentant des lacunes
ou des insuffisances caractérisées et que l'expertise judiciaire serve à
pallier les manquements commis dans la phase d'instruction administrative. En
d'autres mots, il doit exister un lien entre les défauts de l'instruction
administrative et la nécessité de mettre en oeuvre une expertise judiciaire (
ATF 137 V 210 consid. 4.4.2 p. 265 s.). Tel est notamment le cas lorsque
l'autorité administrative a laissé subsister, sans la lever par des
explications objectivement fondées, une contradiction manifeste entre les
différents points de vue médicaux rapportés au dossier, lorsqu'elle a laissé
ouverte une ou plusieurs questions nécessaires à l'appréciation de la situation
médicale ou lorsqu'elle a pris en considération une expertise qui ne
remplissait manifestement pas les exigences jurisprudentielles relatives à la
valeur probante de ce genre de documents (voir par exemple arrêt 8C_71/2013 du
27 juin 2013 consid. 2). En revanche, lorsque l'autorité administrative a
respecté le principe inquisitoire et fondé son opinion sur des éléments
objectifs convergents ou sur les conclusions d'une expertise qui répondait aux
réquisits jurisprudentiels, la mise à sa charge des frais d'une expertise
judiciaire ordonnée par l'autorité judiciaire de première instance, pour
quelque motif que ce soit (à la suite par exemple de la production de nouveaux
rapports médicaux ou d'une expertise privée), ne saurait se justifier (ATF 139
V 496 précité consid. 4.4 p. 502).

6.4. En l'espèce, dans sa décision du 15 janvier 2013, l'office AI s'est référé
à l'avis de son service médical régional (SMR), qui se fondait lui-même sur le
rapport d'expertise du CEMed (cf. rapport du SMR du 13 octobre 2011), pour
retenir une capacité entière de travail dans une activité adaptée depuis avril
2011. Avant de rendre sa décision, il a ordonné une enquête pour activité
professionnelle indépendante. En revanche, sur le plan médical, aucune mesure
d'instruction n'a été entreprise par le SMR, hormis l'examen des pièces
médicales versées au dossier. Même en admettant que le rapport d'expertise du
CEMed remplissait les réquisits jurisprudentiels en matière de valeur probante,
il n'en reste pas moins que, selon ce rapport, l'état de santé de l'assurée
n'était pas stabilisé au moment de l'expertise du CEMed et qu'il subsistait des
doutes sur l'existence d'une fusion osseuse intervertébrale, comme l'ont
constaté les premiers juges. Dans ces conditions, l'office AI aurait dû
procéder à des investigations complémentaires au niveau médical. En
entreprenant aucune démarche dans ce sens, il a laissé ouverte une question
nécessaire à l'appréciation de l'état de santé de l'assurée. Aussi, la cour
cantonale pouvait-elle mettre à sa charge les frais de l'expertise judiciaire
sans violer le droit fédéral.

7. 
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être partiellement admis et le
jugement entrepris annulé en tant qu'il porte sur le taux d'invalidité.

8. 
En ce qui concerne la répartition des frais judiciaires et des dépens, le
renvoi de la cause pour nouvel examen et décision revient à obtenir gain de
cause au sens des art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF, indépendamment du fait
qu'une conclusion ait ou non été formulée à cet égard (ATF 141 V 281 consid.
11.1 p. 312 et l'arrêt cité). Dans ces conditions, il se justifie de répartir
les frais à raison de la moitié à la charge du recourant et de l'autre moitié à
la charge de l'intimée. S'agissant de l'octroi d'une indemnité de dépens à
l'intimée, la question ne se pose qu'au regard du droit à la rente
d'invalidité. Vu l'issue du litige sur ce point, l'intimée ne peut pas
prétendre une telle indemnité.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est partiellement admis. Le jugement de la Chambre des assurances
sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 24 mars
2016 est annulé en tant qu'il octroie une rente entière d'invalidité à
l'intimée. La décision de l'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité
du 15 janvier 2013 est annulée et la cause lui est renvoyée pour nouvelle
décision. Le recours est rejeté pour le surplus.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis pour 400 fr. à la charge du
recourant et pour 400 fr. à la charge de l'intimée.

3. 
La cause est renvoyée à la Chambre des assurances sociales de la Cour de
justice de la République et canton de Genève pour nouvelle décision sur les
frais judiciaires et dépens de la procédure antérieure (ch. 5 et 7 du
dispositif du jugement attaqué).

4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 13 mars 2017

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Maillard

La Greffière : Castella

Navigation

Neue Suche

ähnliche Leitentscheide suchen
ähnliche Urteile ab 2000 suchen

Drucken nach oben