Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.355/2016
Zurück zum Index II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2016
Retour à l'indice II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2016


Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente
dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet.
Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem
Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
                                                               Grössere Schrift

Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
2C_355/2016

Arrêt du 13 décembre 2016

IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffière : Mme Jolidon.

Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Ariane Ayer, avocate,
recourante,

contre

Secrétariat d'Etat à la formation,
à la recherche et à l'innovation SEFRI.

Objet
Obtention a posteriori d'un titre d'une haute école spécialisée,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour II, du 7 mars
2016.

Faits :

A. 
Le 9 mars 2015, A.________ a déposé auprès du Secrétariat d'Etat à la
formation, à la recherche et à l'innovation (ci-après: le Secrétariat d'Etat)
une demande d'obtention a posteriori d'un titre d'une haute école spécialisée
(ci-après: HES) de la filière " soins infirmiers " du domaine d'études santé
(ci-après : un titre HES en soins infirmiers). A l'appui de cette demande, elle
a produit différents titres, à savoir un diplôme d'infirmière en soins généraux
du 24 avril 1994, un diplôme intitulé " Spécialisation en santé communautaire "
de l'Institut et Haute Ecole de la Santé La Source du 18 mai 2001, ainsi qu'un
" Certificat de formation continue Migrations, relations interculturelles et
pratiques professionnelles " (ci-après : le Certificat en migrations), obtenu
en avril 2007, auprès de la Faculté des sciences sociales et politiques de
l'Université de Lausanne en partenariat avec la Haute école de la Santé La
Source.
Par décision du 20 août 2015, le Secrétariat d'Etat a rejeté la demande de
A.________ au motif que le Certificat en migrations ne constituait pas un titre
du domaine d'études de la santé comme exigé par l'art. 1 al. 4 let. d de
l'ordonnance du 4 juillet 2000 du Département fédéral de l'économie, de la
formation et de la recherche sur l'obtention a posteriori du titre d'une haute
école spécialisée (ci-après: l'ordonnance sur l'obtention a posteriori du titre
d'une HES ou OPT-HES; RS 414.711.5), entrée en vigueur le 1er octobre 2000.

B. 
Par arrêt du 7 mars 2016, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours
de A.________ pour la même raison.

C. 
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande
au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, principalement, d'annuler
l'arrêt du 7 mars 2016 du Tribunal administratif fédéral, ainsi que la décision
du 20 août 2015 du Secrétariat d'Etat, et de modifier cette décision en ce sens
qu'elle obtient a posteriori le titre HES en soins infirmiers; subsidiairement,
de renvoyer la cause au Tribunal administratif fédéral pour une nouvelle
décision dans le sens des considérants; elle requiert également la suspension
de la procédure jusqu'à droit jugé dans une affaire similaire pendante devant
le Tribunal de céans.
Le Secrétariat d'Etat conclut au rejet du recours et le Tribunal administratif
fédéral a renoncé à prendre position.
A.________ s'est encore prononcée par écriture du 11 juillet 2016.

Considérant en droit :

1. 
Le recours ne tombe pas sous le coup de l'art. 83 let. t LTF puisque la
décision attaquée ne porte pas sur le résultat d'examens ou d'autres
évaluations de capacités (ATF 138 II 42 consid. 1.1 p. 44 et les arrêts cités),
mais sur le refus de délivrer a posteriori un titre HES au motif que le
Certificat en migrations détenu par la recourante ne constitue pas un titre du
domaine d'études de la santé.
Le présent recours en matière de droit public remplit, au surplus, les
conditions des art. 42 et 82 ss LTF. Il est dès lors en principe recevable.
Toutefois, la conclusion tendant à l'annulation de la décision du 20 août 2015
du Secrétariat d'Etat est irrecevable en raison de l'effet dévolutif complet du
recours auprès du Tribunal administratif fédéral, l'arrêt de cette autorité se
substituant aux prononcés antérieurs (ATF 136 II 539 consid. 1.2 p. 543).

2. 
La présente cause a trait à l'obtention a posteriori d'un titre HES de la
filière " Soins infirmiers " du domaine d'études Santé. Avant d'examiner les
griefs de la recourante, il convient de déterminer le cadre légal pertinent, le
domaine de la formation étant en constante évolution, ce qui entraîne des
modifications législatives ponctuelles (cf. arrêt 2C_937/2014 consid. 2.1).

2.1. Dans le cadre de la révision de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les
hautes écoles (RO 1996 2588), abrogée le 1er janvier 2015, la Confédération a
usé de sa compétence pour légiférer sur la formation professionnelle (art. 63
al. 1 Cst.) et le domaine d'études de la santé, qui était soumis à des
réglementations cantonales, lui a été transféré. En outre, auparavant, la
formation dans ce domaine n'était dispensée que par des écoles supérieures,
alors qu'elle l'est, depuis la création des HES, également par celles-ci (la
formation en physiothérapie, ergothérapie, diététique et sage-femme n'est plus
dispensée que par les HES au contraire de celle en soins infirmiers qui
continue à l'être aussi par des écoles supérieures, sauf en Suisse romande
[Rapport explicatif de novembre 2014 du Département fédéral de l'économie, de
la formation et de la recherche " Modification de l'ordonnance du DEFR sur
l'obtention a posteriori du titre d'une haute école spécialisée [RS 414.711.5]"
[ci-après: le Rapport explicatif 2014], p. 2]). Dans ce contexte, certaines
écoles supérieures ont obtenu le statut de HES et le Conseil fédéral a délégué
au Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche
(ci-après : le Département fédéral) la compétence de régler les modalités du
changement de statut des écoles supérieures reconnues en hautes écoles
spécialisées, ainsi que le port des titres décernés par les anciennes écoles
supérieures (art. 78 al. 2 de la loi fédérale du 30 septembre 2011 sur
l'encouragement des hautes écoles et la coordination dans le domaine suisse des
hautes écoles [loi sur l'encouragement et la coordination des hautes écoles,
LEHE; RS 414.20], en vigueur depuis le 1er janvier 2015); ce département fixe
notamment les conditions et la procédure pour convertir les titres décernés
selon l'ancien droit en titres des hautes écoles spécialisées (cf. art. 9 de
l'ordonnance fédérale du 12 novembre 2014 relative à la loi sur l'encouragement
et la coordination des hautes écoles [O-LEHE; RS 414.201], entrée en vigueur le
1er janvier 2015). Ledit département a ainsi arrêté l'ordonnance sur
l'obtention a posteriori du titre d'une HES dont l'interprétation est ici en
cause. Selon cette ordonnance, qui traite de différents corps de métiers
(technique et technologies de l'information, architecture, chimie et sciences
de la vie, etc.), les personnes portant un titre d'une école supérieure
convertie en haute école spécialisée peuvent déposer une demande au Secrétariat
d'Etat en vue d'obtenir a posteriori un titre HES. En matière de soins
infirmiers, les personnes qui remplissent les conditions légales peuvent alors
porter le titre d' " infirmier diplômé HES " (art. 7 al. 1 OPT-HES).

2.2. La modification du 4 décembre 2014, entrée en vigueur le 1er janvier 2015,
de l'ordonnance sur l'obtention a posteriori du titre d'une HES, avait
notamment pour but d'élargir l'application de cette ordonnance aux infirmières
et infirmiers; cette ordonnance ne traitait jusque-là, dans le domaine de la
santé, que des diététiciens, sages-femmes, physiothérapeutes et
ergothérapeutes. Cette modification permet aux requérants infirmiers, qui
remplissent les conditions légales, de porter le titre d' " infirmier diplômé
HES " (art. 7 al. 1 OPT-HES). Elle a introduit l'al. 4 de l'art. 1 OPT-HES
intitulé " Conditions d'obtention " qui dispose :

" Un titre HES de la filière «Soins infirmiers» du domaine d'études Santé peut
être décerné aux personnes:

a. qui sont titulaires d'un des diplômes CRS [Croix-Rouge suisse] suivants:

1. «infirmière»/«infirmier»,
2. «soins infirmiers, niveau II»,
3. «infirmière/infirmier en soins généraux»,
4. «infirmière/infirmier en psychiatrie»,
5. «infirmière/infirmier en hygiène maternelle et en pédiatrie»,
6. «infirmière/infirmier en soins communautaires»,
7. «infirmière/infirmier en soins intégré s»;

b. qui ont suivi une des formations complémentaires suivantes ou sont
titulaires d'un des diplômes complémentaires suivants:

1. «Höhere Fachausbildung Pflege Stufe II» (HöFa II) du SBK Bildungszentrum
(BIZ), de la Kaderschule für die Krankenpflege Aarau ou du
Weiterbildungszentrum Gesundheitsberufe (WE'G),
2. «Certificat d'infirmière clinicienne/infirmier clinicien II» de l'Ecole
supérieure d'enseignement infirmier (ESEI),
3. «Diploma CRS indirizzo clinico» de la Scuola superiore per le formazioni
sanitarie,
4. «Höhere Fachausbildung Pflege Stufe I» (HöFa I) reconnue par l'Association
suisse des infirmiers et infirmières (ASI),
5. «Höhere Fachausbildung Pflege Stufe I» de la Kaderschule für die
Krankenpflege Aarau, du WE'G ou de Careum Weiterbildung,
6. «Höhere Fachausbildung für Gesundheitsberufe, Stufe I (HFG) mit Schwerpunkt
Pflege» du WE'G,
7. «Certificat d'infirmière clinicienne/infirmier clinicien I» de l'ESEI,
8. «infirmière/infirmier en santé publique» reconnu par la CRS,
9. «Certificat d'Etudes Approfondies, Option Clinique» de l'Institut romand
pour les sciences et les pratiques de la santé et du social (IRSP) ou de
l'ESEI,
10. «Certificato CRS indirizzo clinico» de la Scuola superiore per le
formazioni sanitarie,
11. «WE'G-Zertifikat NDK Pflege» avec domaines de spécialisation,
12. «Nachdiplomkurs Pflege» avec domaines de spécialisation de Careum
Weiterbildung,
13. «Diplom Careum Weiterbildung Mütter- und Väterberaterin»,
14. «WE'G-Diplom Mütterberaterin»,
15. «Certificat Le Bon Secours en Soins à la personne âgée et soins
palliatifs»;

c. qui peuvent justifier d'une pratique professionnelle reconnue de deux ans au
minimum (art. 2 al. 2);

d. qui ont suivi un cours postgrade de niveau universitaire dans le domaine
d'études Santé ou qui peuvent justifier d'une autre formation continue
équivalente (art. 3, al. 2), s'ils ne sont pas titulaires d'un des diplômes
visés à la let. b, ch. 1 à 3. "

Quant à l'art. 1 al. 3 OPT-HES, dont il est également question ci-dessous, il
prévoit:

" Dans le domaine d'études Santé, à l'exception de la filière «Soins
infirmiers», un titre HES peut être décerné aux personnes:

a. qui sont titulaires d'un des diplômes suivants:

1. un des diplômes suivants, délivré par une école reconnue par la Croix-Rouge
suisse (CRS) :

- «diététicienne diplômée»/«diététicien diplômé»,
- «sage-femme diplômée»/«homme sage-femme diplômé»,
- «physiothérapeute diplômée»/«physiothérapeute diplômé»,
2. un diplôme d'ergothérapeute décerné par la Croix-Rouge suisse après une
procédure aboutie de reconnaissance du diplôme cantonal correspondant;

b. qui peuvent justifier d'une pratique professionnelle reconnue de deux ans au
minimum (art. 2, al. 2);

c. qui ont suivi un cours postgrade de niveau universitaire dans le domaine
d'études de la santé ou qui peuvent justifier d'une autre formation continue
équivalente (art. 3, al. 2). "

Les juges précédents ont soigneusement examiné l'ordonnance sur l'obtention a
posteriori du titre d'une HES et ont à juste titre constaté qu'il s'agissait
d'une ordonnance de substitution qui laissait un large pouvoir d'appréciation
au délégataire pour réglementer la conversion des titres. Ce point n'est du
reste pas contesté.

3.

3.1. Dans un premier grief, la recourante se plaint de la violation de l'art.
49 PA au terme duquel le Tribunal administratif fédéral dispose d'un plein
pouvoir de cognition, y compris en opportunité. Or, en décrétant qu'il devait
faire preuve d'une grande retenue dans l'interprétation de ce qu'il a qualifié
d'ordonnance de substitution, et plus précisément de l'application de l'art. 1
al. 4 let. d OPT-HES, ledit tribunal aurait à tort limité son pouvoir
d'appréciation au motif que le Département fédéral avait bénéficié d'un large
pouvoir d'appréciation pour réglementer la question de l'obtention d'un titre
HES a posteriori. Le Tribunal administratif fédéral aurait par là même
également commis une forme de déni de justice puisqu'il privait de la sorte la
recourante d'un contrôle juridictionnel de la décision.

3.2. Malgré les termes utilisés, à savoir qu'elle devait " faire preuve d'une
grande retenue dans l'examen des griefs... en lien avec l'art. 1 al. 4 let. d
OPT-HES ", l'autorité précédente n'a pas limité son examen; une telle
limitation pourrait au demeurant être contraire à l'art. 29a Cst., disposition
qui garantit l'accès à un juge disposant d'un pouvoir d'examen complet des
faits et du droit (ATF 137 I 235 consid. 2.5 p. 239 et 2.5.2 p. 241), sous
réserve de la retenue acceptée dans certains cas (domaines nécessitant des
connaissances techniques, décisions présentant un caractère politique, etc. [
ATF 136 I 184 consid. 2.2.1 p. 188]). Le Tribunal administratif fédéral a en
effet procédé aux différentes interprétations possibles de la disposition en
cause sans jamais faire référence à la décision attaquée ou utilisé de terme
laissant penser qu'il restreignait son pouvoir d'appréciation. Puis, il a
appliqué le sens de la norme, tel qu'il l'avait déterminé, au cas de la
recourante; il en a ensuite conclu que le Certificat en migrations en cause ne
pouvait être admis comme une formation postgrade de niveau universitaire dans
le domaine d'études santé ou une formation continue équivalente au sens de
l'art. 1 al. 4 let. d OPT-HES et que c'était à juste titre que le Secrétariat
d'Etat avait retenu que la condition de cette disposition n'était pas remplie.
Force est dès lors d'admettre que les juges précédents n'ont concrètement pas
restreint leur pouvoir d'appréciation et ne semblent même pas avoir fait preuve
d'une certaine retenue. Partant, le grief est rejeté.

4. 
Dans un grief pour le moins confus intitulé " De la violation de l'art. 1 al. 4
OPT-HES ", la recourante estime que le Département fédéral pose des exigences
plus élevées pour l'obtention a posteriori d'un titre HES pour les infirmiers
que pour les autres formations traitées à l'art. 1 al. 3 OPT-HES
(physiothérapeutes, ergothérapeutes, sages-femmes, diététiciens) et elle
mentionne " l'admissibilité de la norme contestée ".
Si, avec cet argument, la recourante entendait se plaindre du fait que
l'ordonnance en question sortait du cadre de la délégation législative, son
grief doit être rejeté. En effet, le Parlement fédéral a confié au Conseil
fédéral le règlement des modalités du port des titres décernés selon l'ancien
droit et de leur conversion; puis, le Conseil fédéral a à son tour délégué au
Département fédéral le pouvoir de fixer non seulement la procédure pour
convertir les titres décernés selon l'ancien droit en titres des hautes écoles
spécialisées, mais également les conditions de cette conversion (cf. art. 9
O-LEHE et consid. 2.1). Ledit département possède, dès lors,en la matière un
large pouvoir d'appréciation. Au surplus, la recourante ne prétend pas que
l'ordonnance en cause serait contraire à la Constitution, soulignant
expressément qu'elle ne conteste pas l'arrêt attaqué s'agissant du raisonnement
en lien avec la délégation législative.

5. 
La recourante remplit les trois premières conditions de l'art. 1 al. 4 let. a -
c OPT-HES, à savoir détenir un titre d'une formation de base, avoir suivi une
formation complémentaire et avoir au minimum deux ans de pratique
professionnelle reconnue. L'art. 1 al. 4 let. d OPT-HES pose une quatrième
condition pour les personnes ne disposant pas d'une formation énoncée au ch. 1
à 3 de l'art. 1 al. 4 let. b OPT-HES, ce qui est le cas de la recourante,
exigeant un cours postgrade de niveau universitaire dans le domaine d'études
Santé ou une autre formation continue équivalente.
Le seul point litigieux sur le fond est de savoir si le " Certificat de
formation continue Migrations, relations interculturelles et pratiques
professionnelles " de la Faculté des sciences sociales et politiques de
l'Université de Lausanne en partenariat avec la Haute école de la Santé La
Source obtenu par l'intéressée entre dans la catégorie de formation définie à
l'art. 1 al. 4 let. d OPT. Selon le Tribunal administratif fédéral, pour
répondre à la condition posée par cette disposition, le cours postgrade doit
faire partie du domaine de la santé; or, il a jugé que le diplôme susmentionné
ne pouvait pas être considéré comme appartenant au domaine de la santé au sens
de ladite disposition. La recourante conteste cette interprétation de l'art. 1
al. 4 let. d OPT-HES.

5.1. La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation
littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs
interprétations de celui-ci sont possibles, le juge doit rechercher la
véritable portée de la norme au regard notamment de la volonté du législateur
telle qu'elle ressort, entre autres, des travaux préparatoires (interprétation
historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur
lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation
téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales
(interprétation systématique [ATF 141 II 280 consid. 6.1 p. 287; 140 II 202
consid. 5.1 p. 204]).

5.2. Selon l'art. 1 al. 4 let. d OPT-HES, les intéressés doivent donc avoir " 
suivi  un cours postgrade de niveau universitaire dans le domaine d'études
Santé ou [pouvoir] justifier d'une autre formation continue équivalente (art.
3, al. 2) ". Cette disposition n'est pas claire. Sa lettre ne permet en effet
pas de déterminer si l'expression "  autre formation continue équivalente " se
rapporte au "  cours postgrade de niveau universitaire " ou au "  domaine
d'études Santé ", c'est-à-dire s'il se réfère au niveau d'études et au domaine
d'études. En d'autres termes, on ne sait pas, si pour être acceptée, la
formation peut être d'un niveau équivalent à un cours postgrade de niveau
universitaire mais doit relever du domaine de la santé ou si une formation, de
niveau postgrade universitaire, dans un domaine équivalent à celui de la santé
serait admise.
Il faut néanmoins relever que l'expression litigieuse est suivie du renvoi,
entre parenthèses, à l'art. 3 al. 2 OPT-HES; or, cette disposition traite de l'
« Etendue des cours postgrades de niveau universitaire » et mentionne :

" Pour les requérants du domaine de la santé (art. 1, al. 3 et 4), le cours
postgrade de niveau universitaire doit comprendre au minimum 200 leçons ou 10
crédits ECTS ".

Ce renvoi fait donc penser que l'expression "  autre formation continue
équivalente " concerne le niveau de la formation plutôt que le domaine
d'études.

5.3. Ni la " Notice OPT en soins infirmiers " de janvier 2015 du Département
fédéral (www.fhschweiz.ch/webautor-data/1051/2015_ Jan_Merkblatt_Pflege_fr.pdf,
consulté le 6 septembre 2016), pas plus que le Rapport explicatif 2014 qui a
une teneur similaire (p. 6), ne permettent de résoudre le point litigieux. En
effet, ils précisent uniquement, à propos de la condition de l'art. 1 al. 4
let. d OPT-HES, qu'en suivant un cours postgrade de niveau universitaire dans
le domaine de la santé, les requérants acquièrent des connaissances
scientifiques et méthodologiques supplémentaires au niveau haute école et que
l'exigence de suivre un tel cours permet de garantir que les détenteurs d'un
titre HES obtenu a posteriori disposent également de compétences en matière de
recherche et de développement de la qualité.

5.4. Comme relevé dans l'arrêt attaqué, le texte de l'art. 1 al. 4 let. d
OPT-HES est identique à celui de l'art. 1 al. 3 let. c OPT-HES (cf. supra
consid. 2.2). Ainsi, la condition qui y est énoncée est la même. Selon sa
lettre, l'art. 1 al. 3 OPT-HES traite des conditions applicables à l'obtention
a posteriori du titre d'une HES "  dans le domaine de la santé, à l'exception
de la filière Soins infirmiers " qui relève de l'art. 1 al. 4 OPT-HES; il
s'applique aux diététiciens, sages-femmes, physiothérapeutes et
ergothérapeutes.
Le Département fédéral a émis un Rapport explicatif de mars 2009 intitulé "
Révisions partielles : - ordonnance du DFE concernant l'obtention a posteriori
du titre d'une haute école spécialisée, - ordonnance du DFE concernant les
filières d'études, les études postgrades et les titres dans les hautes écoles
spécialisées, - ordonnance relative à la création et à la gestion des hautes
écoles spécialisées " (ci-après: le Rapport explicatif 2009). Ce rapport donne
des explications sur le cours postgrade de l'art. 1 al. 3 let. c OPT-HES : il
précise qu'est exigé " un cours postgrade de niveau universitaire ou une
formation équivalente dans le domaine d'études de la santé comprenant 200
leçons ou 10 crédits selon le Système européen de transfert et d'accumulation
de crédits (crédits ECTS), ce qui représente une charge de travail allant de
250 à 300 heures " et que " pour l'OPT-HES, une formation continue de niveau
non universitaire doit aussi pouvoir être prise en compte si elle remplit les
conditions quantitatives mentionnées (nombre d'heures d'enseignement et de
formation) et si elle est comparable à une formation continue de niveau
universitaire en ce qui concerne les objectifs d'études, l'organisation de
l'enseignement et l'apprentissage ainsi que la compétence spécifique des
enseignants ". La lettre explicative du 22 juillet 2011 du Département fédéral
aux différents professionnels concernés va dans le même sens; elle précise que
" au moment de l'ordonnance sur l'obtention a posteriori d'un titre HES, le
domaine de la santé en Suisse ne proposait des formations et des formations
continues de niveau haute école que depuis peu de temps. Les formations
continues étaient organisées et proposées pour l'essentiel par des écoles
supérieures, des associations professionnelles (...). C'est pourquoi le
législateur a ajouté la disposition selon laquelle une formation continue qui
n'est pas de niveau haute école peut aussi être prise en compte si elle remplit
les conditions d'un point de vue qualitatif (nombre d'heures d'enseignement et
d'heures de formation) et si elle est comparable à une formation continue de
niveau haute école sur le plan des objectifs de formation, de l'organisation de
l'enseignement et de l'apprentissage et de la compétence professionnelle des
enseignants ". Ces documents ne laissent ainsi aucun doute sur le fait que la
notion de "  autre formation équivalente " se réfère au niveau d'études: une
formation équivalente à un cours postgrade de niveau universitaire est admise.
La recourante conteste que l'interprétation dégagée de l'art. 1 al. 3 let. c
OPT-HES puisse être appliquée à l'art. 1 al. 4 let. d OPT-HES. De la sorte,
selon elle, des exigences plus élevées seraient posées pour les infirmiers que
pour les professions de l'art. 1 al. 3 OPT-HES, à savoir les ergothérapeutes,
les diététiciens, les sages-femmes et les physiothérapeutes car la loi exige,
de surcroît, pour les infirmiers, une formation complémentaire au diplôme de
base (cf. la condition de l'art. 1 al. 4 let. b OPT-HES qui ne figure pas à
l'art. 1 al. 3 OPT-HES). Cet argument ne saurait être suivi. Il n'y a, en
effet, pas de raison d'interpréter différemment des dispositions dont le texte
est identique. De plus, cette exigence supplémentaire peut s'expliquer par le
fait que les formations pour les seconds ne sont plus proposées que par des
HES, à l'exclusion des écoles supérieures. A l'inverse, dans le domaine des
soins infirmiers, la formation continue d'être prodiguée dans des écoles
supérieures en plus des HES. Ainsi, les infirmières et infirmiers qui ont
obtenu leur diplôme dans une école reconnue par la Croix-Rouge suisse ont
toujours le droit de porter le titre d' " infirmière diplômée ES " / "
infirmier diplômé ES " (cf. art. 23 al. 4 et Annexe 5 ch. 4 al. 1 let g de
l'ordonnance du 11 mars 2005 du Département fédéral de l'économie, de la
formation et de la recherche concernant les conditions minimales de
reconnaissance des filières de formation et des études postdiplômes des écoles
supérieures [OCM ES, RS 412.101.61]). Le port d'un titre reconnu est donc déjà
garanti aujourd'hui dans le domaine des soins infirmiers, contrairement aux
autres professions. Contrairement à ce que prétend la recourante, ce n'est pas
parce que les exigences pour l'obtention d'un titre HES a posteriori sont
différentes pour les infirmiers que pour les autres formations de l'art. 1 al.
3 OPT-HES qu'il faut également interpréter la notion d' "  autre formation
continue équivalente " de l'art. 1 al. 4 let. d OPT-HES différemment de la même
notion contenue à l'art. 1 al. 3 let. c OPT-HES. Dans la mesure où la
recourante entendait également se plaindre, à cet égard, d'une violation du
principe d'égalité (art. 8 al. 1 Cst.), on ajoutera que cette différence ne
viole pas ledit principe, compte tenu des considérations développées ci-dessus.

5.5. Finalement, l'interprétation téléologique confirme que la notion d' " 
autre formation équivalente " ne se réfère pas au domaine d'études. Est, en
effet, en cause un titre relatif à une profession du domaine de la santé.
Ainsi, les formations complémentaires imposées par l'art. 1 al. 4 let. b
OPT-HES font partie de ce domaine. En outre, l'exigence de l'art. 1 al. 4 let.
d OPT-HES vise à compenser la différence entre la formation HöFa I (art. 1 al.
4 let. b ch. 4-15 OPT-HES) et la formation HöFa II (art. 1 al. 4 let. b ch. 1-3
OPT-HES). Dès lors, un diplôme dans un domaine tout autre ne saurait suffire à
la combler; il doit avoir trait à la santé.

5.6. Il découle de ce qui précède que la notion "  autre formation équivalente
 " de l'art. 1 al. 4 let. d OPT-HES se réfère au niveau d'études et non pas au
domaine d'études qui doit de toute façon être dans le domaine de la santé: une
formation équivalente à un cours postgrade de niveau universitaire est
acceptée. Cela signifie que ce cours postgrade de niveau universitaire ou la
formation continue équivalente doit avoir été suivi "  dans le domaine d'études
Santé ". Il ne peut pas relever d'un domaine équivalent, comme le prétend la
recourante.

6. 
Il reste donc à déterminer si le " Certificat de formation continue Migrations,
relations interculturelles et pratiques professionnelles " de la Faculté des
sciences sociales et politiques de l'Université de Lausanne en partenariat avec
la Haute école de la Santé La Source appartient au domaine de la santé.
Ce certificat a pour objectif de " comprendre les enjeux de migration comme des
constructions culturelles et sociales, politiques et juridiques; redéfinir sa
pratique professionnelle afin de mieux appréhender les défis liés à la
pluralité de la société et questionner sa représentation de l'altérité, sa
compréhension et reconnaissance de l'autre dans sa différence ". Il comprend
trois modules principaux, à savoir " Migrations : perspectives historiques,
juridiques et anthropologiques ", " Pratiques professionnelles, logiques
institutionnelles et altérités " et " Altérité, perspectives communautaires et
reconnaissance ". Il a pour public cible les professionnels des domaines de
l'éducation, du social, de la santé, de l'administration et toute personne
confrontée aux enjeux migratoires. Cette formation n'a ainsi pas trait au
domaine de la santé, tel qu'il est défini de façon restrictive au sens de
l'ordonnance sur l'obtention a posteriori du titre d'une HES, même si elle est
proposée par la Haute école de santé La Source et qu'elle peut être mise à
profit quotidiennement par la recourante. Partant, la condition de l'art. 1 al.
4 let. d OPT-HES n'est pas remplie. Il n'y a donc pas lieu d'examiner plus
avant les compétences acquises dans le cadre de ce diplôme et de le comparer au
" Plan d'études cadre, Bachelor 2012, Filière de formation en Soins infirmiers
", comme requis par la recourante. Il sied de rappeler ici que la recourante
peut toujours exercer en tant qu' " infirmière diplômée ES " (art. 23 al. 4 et
Annexe 5 ch. 4 al. 1 let. g OCM ES).
Celle-ci dénonce encore un manque de connaissances de la part du Département
fédéral en matière de formation dans le domaine de la santé, celui-ci
n'exerçant que depuis peu de temps des compétences qui relevaient auparavant de
la Croix-Rouge suisse; elle déplore par ailleurs que les avis émis par les
associations professionnelles en soins infirmiers, lors de la procédure de
consultation relative à l'ordonnance sur l'obtention a posteriori du titre
d'une HES, n'aient pas été pris en considération. Il s'agit toutefois là d'un
problème politique sur lequel le Tribunal fédéral n'a pas à se prononcer.

7. 
Au regard de ce qui précède, le recours est rejeté dans la mesure où il est
recevable.
La demande de suspension jusqu'à droit connu dans l'affaire similaire est
devenue sans objet, les causes étant jugées simultanément.
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF). Il n'est pas alloué de dépens au Secrétariat d'Etat qui obtient gain de
cause dans l'exercice de ses attributions officielles (art. 68 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire de la recourante, au
Secrétariat d'Etat à la formation, à la recherche et à l'innovation SEFRI, au
Tribunal administratif fédéral, Cour II, ainsi qu'au Département fédéral de
l'économie, de la formation et de la recherche DEFR.

Lausanne, le 13 décembre 2016

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Seiler

La Greffière : Jolidon

Navigation

Neue Suche

ähnliche Leitentscheide suchen
ähnliche Urteile ab 2000 suchen

Drucken nach oben