Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.853/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
8C_853/2015
                   

Arrêt du 29 novembre 2016

Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Maillard, Président, Ursprung, Frésard, Heine et
Wirthlin.
Greffière : Mme von Zwehl.

Participants à la procédure
Caisse de compensation du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762
Givisiez,
recourante,

contre

A.________,
intimée.

Objet
Allocation familiale (concours de droits),

recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des
assurances sociales, du 12 octobre 2015.

Faits :

A. 
A.________ est mère de cinq enfants et divorcée. Elle n'a pas été mariée avec
le père de son dernier enfant B.________, né en 1998, dont elle a l'autorité
parentale et la garde. C.________, père de cet enfant, et B.________,
représenté par son curateur, ont conclu une convention d'entretien, approuvée
le 5 juillet 1999 par la Justice de paix du IVe cercle de la Sarine (FR), selon
laquelle C.________ contribuerait à l'entretien de son fils par le versement
d'une pension alimentaire mensuelle. Le père s'est également engagé à faire
valoir son droit aux allocations familiales et à les payer en plus de la
pension alimentaire pour autant que personne d'autre ne les touche.
Le 3 janvier 2014, A.________ a présenté, par l'entremise du service d'aide
sociale, une demande d'allocations familiales pour personnes sans activité
lucrative dès le 1er juillet 2013 à la Caisse de compensation du canton de
Fribourg (ci-après: la caisse). Elle y indiquait que sa requête faisait suite
au refus du père, inscrit au chômage, de demander à la caisse de chômage le
supplément correspondant aux allocations familiales pour leur fils B.________.
Par décision du 7 février 2014, la caisse a rejeté la demande au motif qu'il
appartenait au père, C.________, tant qu'il était au chômage, de réclamer le
droit aux allocations familiales pour l'enfant directement auprès de sa caisse
de chômage. Le cas échéant, la requérante pouvait s'adresser à cette caisse en
demandant à pouvoir exercer elle-même le droit aux prestations du père.
A.________ a formé opposition contre cette décision en faisant valoir que
C.________ n'était plus au chômage depuis le 9 janvier 2014 et qu'il lui était
de toute façon impossible d'obtenir les prestations auprès de la caisse de
chômage pour la période déterminante (soit du 15 août 2013 au 9 janvier 2014)
dès lors que le droit du père au supplément correspondant aux allocations
familiales s'était périmé faute d'avoir été exercé dans le délai légal de trois
mois. Par décision du 29 avril 2014, la caisse a partiellement admis
l'opposition en ce sens qu'elle a accepté d'entrer en matière sur sa demande de
prestations mais seulement pour la période antérieure (du 1er juillet au 15
août 2013) et postérieure (dès le 10 janvier 2014) à celle durant laquelle le
père avait été indemnisé par le chômage. Elle l'a rejetée pour le surplus.

B. 
A.________ a déféré cette décision sur opposition à la Ie Cour des assurances
sociales du canton de Fribourg, qui a admis son recours, annulé la décision
litigieuse, et renvoyé la cause à la caisse pour nouvelle décision dans le sens
des considérants (jugement du 12 octobre 2015).

C. 
La caisse interjette un recours en matière de droit public. Elle conclut à
l'annulation du jugement cantonal et à la confirmation de sa décision du 29
avril 2014.
A.________ conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances
sociales (OFAS) a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.

1.1. Le jugement attaqué renvoie la cause à la recourante afin qu'elle examine
si la mère remplit les conditions matérielles du droit aux allocations pour
personnes sans activité lucrative pour la période litigieuse. En tant qu'il
prononce le renvoi, le jugement entrepris doit être qualifié de décision
incidente, laquelle ne peut être déférée immédiatement au Tribunal fédéral que
si la condition du préjudice irréparable est réalisée ou pour des motifs
d'économie de la procédure (art. 93 al. 1 LTF).
Lorsqu'une administration ou un assureur social sont contraints par le jugement
incident à rendre une décision qu'ils estiment contraire au droit et qu'ils ne
pourront eux-mêmes pas attaquer, un tel jugement incident peut être déféré au
Tribunal fédéral sans attendre le prononcé du jugement final (ATF 133 V 477
consid. 5.2 p. 483). C'est le cas en l'espèce du moment que le tribunal
cantonal impose à la caisse d'examiner matériellement la demande de la mère
qu'elle avait rejetée faute pour celle-ci de disposer de la qualité d'ayant
droit prioritaire.

1.2. Pour le surplus, le recours est dirigé contre un arrêt rendu en matière de
droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance
(art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la
forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable.

2.

2.1. La loi fédérale sur les allocations familiales [LAFam] du 24 mars 2006 [RS
836.2]) règle le droit aux prestations familiales des salariés, des
indépendants et des personnes sans activité lucrative.
Selon l'art. 19 LAFam, les personnes obligatoirement assurées dans l'AVS en
tant que personnes sans activité lucrative sont considérées comme sans activité
lucrative. Elles ont droit aux allocations familiales prévues aux art. 3 et 5.
L'art. 7 al. 2, n'est pas applicable. Ces personnes relèvent du canton dans
lequel elles sont domiciliées. Dans la législation fribourgeoise, cette règle a
été concrétisée à l'art. 22 al. 1 de la loi cantonale sur les allocations
familiales (LAFC/FR; RSF 836. 1), selon lequel les allocations familiales pour
personnes sans activité lucrative sont accordées aux personnes domiciliées dans
le canton dont le revenu n'atteint pas les limites de l'art. 19 al. 2 LAFam
(c'est-à-dire si le revenu imposable est égal ou inférieur à une fois et demie
le montant d'une rente de vieillesse complète maximale de l'AVS et qu'aucune
prestation complémentaire de l'AVS/AI n'est perçue).
Les enfants avec lesquels l'ayant droit a un lien de filiation en vertu du code
civil donnent droit aux allocations (art. 4 al. 1 let. a LAFam). Celles-ci
comprennent l'allocation pour enfant et l'allocation de formation
professionnelle (cf. art. 3 al. 1 let. a et let. b LAFam). Le même enfant ne
donne pas droit à plus d'une allocation du même genre; le paiement de la
différence prévu à l'art. 7, al. 2, est réservé (art. 6 LAFam).
Pour éviter un cumul des prestations lorsque plusieurs personnes peuvent faire
valoir un droit aux allocations pour le même enfant en vertu d'une législation
fédérale ou cantonale, l'art. 7 al. 1 LAFam prévoit que le droit aux
prestations est reconnu selon l'ordre de priorité suivant: a. à la personne qui
exerce une activité lucrative; b. à la personne qui détient l'autorité
parentale ou qui la détenait jusqu'à la majorité de l'enfant; c. à la personne
chez qui l'enfant vit la plupart du temps ou vivait jusqu'à sa majorité; d. à
la personne à laquelle est applicable le régime d'allocations familiales du
canton de domicile de l'enfant; e. à la personne dont le revenu soumis à l'AVS
et provenant d'une activité lucrative dépendante est le plus élevé; f. à la
personne dont le revenu soumis à l'AVS et provenant d'une activité lucrative
indépendante est le plus élevé.

2.2. A côté de la législation fédérale et cantonale sur les allocations
familiales, il existe des réglementations spéciales pour certaines catégories
de personnes, dont les chômeurs.
A teneur de l'art. 22 al. 1 LACI, l'indemnité journalière pleine et entière
s'élève à 80 % du gain assuré. L'assuré perçoit en outre un supplément qui
correspond au montant, calculé par jour, de l'allocation pour enfant et
l'allocation de formation professionnelle légales auxquelles il aurait droit
s'il avait un emploi. Ce supplément n'est versé qu'aux conditions suivantes:
a. les allocations ne sont pas versés à l'assuré durant la période de chômage;
b. aucune personne exerçant une activité lucrative ne peut faire valoir de
droit aux allocations pour ce même enfant.
Le supplément correspondant aux allocations légales pour enfants et formation
professionnelle est calculé d'après la loi régissant les allocations familiales
du canton où l'assuré est domicilié (art. 34 al. 1, 1ère phrase, OACI).

3. 
Sur le vu de ces dispositions, les juges cantonaux ont considéré qu'il était
non seulement conforme au but de la LAFam mais également compatible avec le
système dans son ensemble de faire bénéficier des allocations familiales,
s'agissant de l'enfant B.________, la mère, dont la qualité d'ayant droit se
fondait sur la LAFC, indépendamment du fait que le père eût pu se voir accorder
les prestations en vertu de la LACI. D'une part, celui-ci avait laissé périmer
son droit au supplément en s'abstenant de déposer une demande dans ce sens, de
sorte qu'il n'y avait aucun risque de cumul des allocations familiales pour
l'enfant B.________. D'autre part, toujours selon les juges cantonaux, il ne
semblait pas qu'il y eût des "règles de préséance prévalant en matière de
sources de versement des allocations familiales", sauf à respecter
l'interdiction du cumul des prestations pour un même enfant. Or il fallait
éviter que la mère ne se trouve lésée sans sa faute dans ses droits par le
comportement du père sur lequel elle n'avait aucune influence.

4. 
Cette solution ne reflète toutefois pas la volonté du législateur comme le
soutient à juste titre la recourante.

4.1. En précisant expressément que l'obtention du montant pour allocation
familiale servi en supplément à l'indemnité journalière est conditionné au fait
qu'aucune personne exerçant une activité lucrative ne peut faire valoir de
droit aux allocations pour ce même enfant, la disposition de l'art. 22 al. 1
LACI introduit une règle de coordination claire entre la LACI et la LAFam en
matière de versement d'allocations familiales. Elle doit être comprise en ce
sens que si l'un des parents est au chômage et que l'autre exerce une activité
lucrative, c'est le droit aux allocations familiales de cette dernière personne
en vertu de la LAFam qui prime - ce qui correspond à la disposition de l'art. 7
al. 1 let. a LAFam, selon lequel la personne qui exerce une activité lucrative
arrive en tête de l'ordre de priorité -, tandis que le droit au supplément
selon la LACI est prioritaire si l'autre parent n'exerce pas d'activité
lucrative (voir le rapport complémentaire de la Commission de la sécurité
sociale et de la santé publique du Conseil national [Initiative parlementaire -
Prestations familiales] du 8 septembre 2004; FF 2004 6488 sv.).
Il s'ensuit que contrairement à ce que semble croire la cour cantonale, le
législateur a réglé la question de savoir quel droit, de la réglementation
spéciale de la LACI ou des dispositions de la LAFam, l'emporte sur l'autre,
respectivement la question de savoir qui, de la caisse de chômage ou de la
caisse de compensation, est tenue de verser les prestations familiales, lorsque
l'un des parents est au chômage. Dans le cas particulier, il ne fait pas de
doute qu'en ce qui concerne l'enfant B.________, le droit du père selon la LACI
primait celui de la mère pour personnes sans activité lucrative de la LAFAm
durant la période de chômage de l'intéressé, de sorte que la recourante était
fondée, à l'aune de cette règle de coordination, à nier son obligation de
prester.

4.2. Cela étant, il est constant que le père n'a pas exercé son droit aux
allocations familiales auprès de sa caisse de chômage et qu'aucun versement n'a
donc été effectué pour l'enfant B.________ - les prestations n'étant pas
allouées d'office mais sur demande de l'ayant droit (art. 29 LPGA) -, ce qui,
comme l'a relevé justement la cour cantonale, conduit à un résultat
insatisfaisant. La solution adoptée par celle-ci revient dès lors à se demander
s'il se justifie, pour cette raison, de déroger à la règle de l'art. 22 al. 1
LACI et d'accorder à l'autre parent la possibilité de faire valoir,
subsidiairement, sa qualité d'ayant droit aux prestations en vertu de la LAFam.
A propos de l'art. 7 LAFam qui s'applique en cas de concours de droits selon la
LAFam, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil
national a exprimé la volonté que la loi fédérale règle, sous la forme d'un
classement par ordre de priorité des ayants droits aux prestations, "tous les
cas" (plusieurs droits de la même personne, droits de différentes personnes) et
cela selon les mêmes critères pour les parents mariés et non mariés (p. 6477 du
rapport complémentaire du 8 septembre 2004 précité). Un droit d'option des
parents a clairement été écarté (cf. UELI KIESER/MARCO REICHMUTH, Bundesgesetz
über die Familienzulagen, Praxiskommentar, 2010, n. 5 ad art. 7 LAFam). Amené à
se prononcer sur la portée obligatoire de l'ordre de priorité instauré par
l'art. 7 LAFam, le Tribunal fédéral a récemment jugé que celui-ci imposait
qu'un arriéré de prestations soit versé à la deuxième personne désignée comme
ayant droit prioritaire dès le moment où celle-ci en remplissait les conditions
et non seulement à partir du dépôt de sa demande, tandis que la personne qui a
perçu indûment les prestations était appelée à les restituer (ATF 139 V 429).
C'est dire que le comportement des ayants droits ne saurait modifier l'ordre de
priorité légal par lequel est désigné l'ayant droit prioritaire qui a droit aux
prestations familiales (voir également DOROTHEA RIEDI HUNOLD,
Familienleistungen, in Recht der Sozialen Sicherheit - Sozialversicherungen,
Opferhilfe, Sozialhilfe, Beraten und Prozessieren, 2014, p. 1195 n. 33.61).
Admettre le contraire reviendrait à conférer de facto un libre choix aux ayants
droit, ce qui est incompatible avec la réglementation légale. Il est par
conséquent exclu que l'ayant droit qui suit dans l'ordre de priorité prenne la
place de l'ayant droit prioritaire lorsque ce dernier s'abstient de faire
valoir son droit (voir THOMAS FLÜCKIGER, Koordinations- und
verfahrensrechtliche Aspekte bei den Kinder- und Ausbildungszulagen, in:
Schaffhauser/Kieser [éd.]: Bundesgesetz über die Familienzulagen [FamZG], 2009,
p. 180).
On ne voit pas qu'il puisse en aller différemment en ce qui concerne la règle
de coordination de l'art. 22 al. 1 LACI qui détermine, tout comme l'art. 7
LAFam, qui est l'ayant droit prioritaire des allocations familiales, même si
cela a peut avoir pour effet, comme ici, que les prestations ne soient pas
allouées au détriment de l'enfant concerné.

4.3. Autre est la question de savoir si, dans une telle constellation et par
analogie à la jurisprudence relative à la qualité pour agir du tiers (on parle
en allemand de "Drittbeschwerdebefugnis pro Adressat"; cf. ATF 141 V 650
consid. 3.1 p. 652; 135 V 382 consid. 3.3.1 p. 387), il convient de reconnaître
à l'enfant, en tant que destinataire des prestations familiales, et à son
représentant légal, un intérêt digne de protection à faire valoir lui-même le
droit de l'ayant droit prioritaire auprès de la caisse compétente et, le cas
échéant, à l'autoriser à recourir pour obtenir la prestation (dans ce sens:
THOMAS FLÜCKIGER, op. cit., p. 209). Cette question n'est toutefois pas l'objet
de la présente procédure, de sorte qu'on peut la laisser ouverte.
On relèvera tout au plus que, selon les pièces du dossier, l'intimée s'était
adressée à la caisse de chômage qui a indemnisé C.________ afin qu'elle prenne
position sur cette problématique par une décision formelle et que cette
dernière n'y a pas donné suite (act. 4/3/7,8 et act. 14/I/5). Le cas échéant,
il est loisible à l'intimée de relancer cette caisse pour qu'elle rende une
décision sur sa demande à la lumière de ce qui vient d'être dit, étant précisé
que le présent considérant ne préjuge en rien l'issue de cette démarche.

4.4. En conséquence, le recours doit être admis et le jugement cantonal annulé.

5. 
L'intimée, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF). La caisse n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est admis. Le jugement de la Ie Cour des assurances sociales du
Tribunal cantonal fribourgeois du 12 octobre 2015 est annulé et la décision sur
opposition de la Caisse de compensation du canton de Fribourg du 29 avril 2014
est confirmée.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de
Fribourg, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 29 novembre 2016

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Maillard

La Greffière : von Zwehl

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