Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.507/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
6B_507/2015

Arrêt du 25 février 2016

Cour de droit pénal

Composition
M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Jametti.
Greffière : Mme Musy.

Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Elie Elkaim, avocat,
recourant,

contre

1. Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy,
2. A.________, représenté par
Me Daniel Tunik, avocat,
3. B.________, représentée par
Me Jean-Charles Roguet, avocat,
intimés.

Objet
Abus de confiance aggravé

recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 29 mars 2015.

Faits :

A. 
Par jugement du 17 janvier 2014, le Tribunal de police de la République et
canton de Genève a reconnu X.________ coupable d'abus de confiance aggravé. Il
lui a infligé une peine privative de liberté de 24 mois, sous déduction de 614
jours de détention avant jugement, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans,
ainsi qu'une amende de 5000 fr., assortie d'une peine privative de liberté de
substitution de 50 jours.

B. 
Statuant sur l'appel formé par X.________, la Chambre pénale d'appel et de
révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève l'a rejeté
par arrêt du 29 mars 2015. La condamnation de X.________ repose sur les faits
suivants:

B.a. X.________ est le président du conseil d'administration et l'actionnaire
principal (détenant 99% des actions) de C.________ SA, une société de droit
luxembourgeois, dont le but social est "  la prise de participations, sous
quelque forme que ce soit, dans d'autres sociétés luxembourgeoises ou
étrangères, ainsi que la gestion, le contrôle et la mise en valeur de ces
participations. Elle peut notamment récupérer par voie d'apport, de
souscription, d'option, d'achat et de toute autre manière des valeurs
mobilières de toutes espèces et les réaliser par voie de vente, cession,
échange ou autrement [etc] ". C.________ SA dispose de succursales, notamment
C.________ Sàrl.

B.b. Le 16 février 2005, X.________ pour C.________ SA et A.________ ont conclu
un "  Custody Account Agreement " (ci-après: contrat de dépôt) ainsi qu'un " 
Subscription Agreement " (ci-après: contrat de souscription).
Le premier prévoyait que le client autorisait la banque à établir un compte de
dépôt ou des comptes incluant des sous-comptes au nom de celui-ci, pour le
dépôt de tous titres (compte de dépôt) ou d'espèces (compte d'espèces). Ce
contrat était soumis au droit du pays dans lequel était située la succursale et
où celle-ci effectuait ses obligations, soit en l'occurence C.________ Sàrl au
Luxembourg. Aux termes du second contrat, l'émetteur ("  Issuer "), soit
C.________ SA, remettait une obligation ("  Bond ") d'un montant de 1'000'000
dollars américains au 4 mars 2005 avec un taux d'intérêt annuel de 18%. Le
montant devait être restitué en totalité le 3 mars 2010. Une caution
supplémentaire consistant en un "  Investment Grade Bank Instrument " était
aussi prévue pour garantir l'investissement fait par l'investisseur (" 
Investor ") lors de la souscription de l'obligation. L'obligation de
l'investisseur de souscrire le titre était soumise à plusieurs conditions
consistant en la délivrance de divers documents de l'émetteur avant le terme.
Ce contrat était également soumis au droit luxembourgeois.

B.c. Le 17 février 2005, A.________ a versé la somme de 1'000'000 dollars
américains sur le compte bancaire de C.________ SA. Par la suite et jusqu'en
juin 2005, A.________ ou, pour lui, D.________, a entretenu divers échanges de
correspondance avec X.________, à teneur desquels ce dernier était requis de
fournir les relevés de compte et de payer les rendements obtenus grâce aux
investissements auxquels il disait procéder. L'intéressé n'a cependant jamais
remis de document ni effectué de paiement en faveur de A.________.
Le 4 avril 2005, X.________ a transféré l'investissement de 1'000'000 dollars
américains de A.________ sur un autre compte bancaire de C.________ SA, à
partir duquel, dès le 5 avril 2005 et jusqu'au 26 juillet 2005, il a effectué
plusieurs virements vers des comptes à son nom, au nom de sa fille ou encore au
nom de diverses sociétés. Il a également prélevé des montants en espèces, le
tout à hauteur de plusieurs centaines de milliers de dollars américains.
A partir de la fin du mois de juin 2005, A.________ a réclamé, sans succès, le
remboursement de son capital et des intérêts. Le 8 juillet 2005, il a résilié
le contrat au motif que X.________ était injoignable et qu'il doutait de la
réalité des transactions promises. Il a déposé plainte pénale le 11 juillet
2005.

B.d. Le 15 février 2005, E.________, en qualité d'administrateur, directeur et
unique actionnaire de B.________, et X.________ pour C.________ SA ont
également signé un contrat de dépôt et un contrat de souscription.
Le 22 février 2005, B.________ a versé sur le compte bancaire de C.________ Inc
la somme de 1'000'000 euros. Par le débit de ce compte, entre le 28 février
2005 et le 27 juillet 2005, X.________ a effectué plusieurs virements vers des
comptes à son nom ou au nom de diverses sociétés. Il a également prélevé des
montants en espèces, le tout à hauteur de plusieurs centaines de milliers
d'euros.
Dès février 2005 et jusqu'au 12 juillet 2005, E.________ et X.________ ont
échangé divers emails aux termes desquels X.________ était requis de fournir la
documentation et les relevés de compte relatifs aux investissements et de payer
les bénéfices réalisés. C.________ SA a transmis à B.________ un courrier
intitulé "  relevé des avoirs " ("  statement of assets ") indiquant un solde
de 1'187'304.16 euros en faveur de cette dernière au 31 mai 2005 et B.________
a réclamé le paiement du bénéfice de 187'304.16 euros.
Le 19 septembre 2005, C.________ SA a transféré à B.________ un montant de
182'000 euros. Le même jour, B.________ a résilié les deux contrats et a
réclamé, sans succès, le remboursement de son capital de 1'000'000 euros et le
paiement de 7304.16 euros, faute d'avoir obtenu les "  term sheets " et les
décomptes mensuels prévus. Le 27 octobre 2005, E.________, au nom de
B.________, a déposé plainte pénale contre X.________.

C. 
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre
l'arrêt du 29 mars 2015. Il conclut au prononcé de son acquittement, à
l'annulation des créances compensatrices et des indemnités en faveur des
parties plaignantes, à la restitution de la caution de 250'000 fr., à la levée
des saisies ainsi qu'à l'allocation d'indemnités pour ses frais d'avocats
(724'594 fr., 160'643 dollars américains et 94'583.12 euros), pour le dommage
économique subi en raison de la procédure (900'000 euros et 900'000 dollars
américains) et pour son tort moral (122'400 fr.). Subsidiairement, il conclut à
l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale
pour nouvelle décision.

Considérant en droit :

1. 
Commet un abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 al. 2 CP, celui qui,
sans droit, aura employé à son profit ou au profit d'un tiers des valeurs
patrimoniales qui lui avaient été confiées.
Sur le plan objectif, l'infraction suppose qu'une valeur ait été confiée,
autrement dit que l'auteur ait acquis la possibilité d'en disposer, mais que,
conformément à un accord (exprès ou tacite) ou un autre rapport juridique, il
ne puisse en faire qu'un usage déterminé, en d'autres termes, qu'il l'ait reçue
à charge pour lui d'en disposer au gré d'un tiers, notamment de la conserver,
de la gérer ou de la remettre (ATF 133 IV 21 consid. 6.2 p. 27). Le
comportement délictueux consiste à utiliser la valeur patrimoniale
contrairement aux instructions reçues, en s'écartant de la destination fixée (
ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1 p. 259). L'alinéa 2 de l'art. 138 ch. 1 CP ne
protège pas la propriété, mais le droit de celui qui a confié la valeur
patrimoniale à ce que celle-ci soit utilisée dans le but qu'il a assigné et
conformément aux instructions qu'il a données; est ainsi caractéristique de
l'abus de confiance au sens de cette disposition le comportement par lequel
l'auteur démontre clairement sa volonté de ne pas respecter les droits de celui
qui lui fait confiance (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1 p. 259; 121 IV 23 consid.
1c p. 25).
Du point de vue subjectif, l'auteur doit avoir agi intentionnellement et dans
un dessein d'enrichissement illégitime. Celui qui dispose à son profit ou au
profit d'un tiers d'un bien qui lui a été confié et qu'il s'est engagé à tenir
en tout temps à disposition de l'ayant droit s'enrichit illégitimement s'il n'a
pas la volonté et la capacité de le restituer immédiatement en tout temps.
Celui qui ne s'est engagé à tenir le bien confié à disposition de l'ayant droit
qu'à un moment déterminé ou à l'échéance d'un délai déterminé s'enrichit
illégitimement que s'il n'a pas la volonté et la capacité de le restituer à ce
moment précis (ATF 118 IV 27 consid. 3a p. 29 s.). Le dessein d'enrichissement
illégitime fait en revanche défaut si, au moment de l'emploi illicite de la
valeur patrimoniale, l'auteur en paie la contre-valeur, s'il avait à tout
moment ou, le cas échéant, à la date convenue à cet effet, la volonté et la
possibilité de le faire ("Ersatzbereitschaft"; ATF 118 IV 32 consid. 2a p. 34)
ou encore s'il était en droit de compenser (ATF 105 IV 29 consid. 3a p. 34 s.).

2. 
Le recourant reproche à la cour cantonale de s'être écartée du texte du contrat
de souscription en retenant que les parties étaient convenues de remettre leurs
fonds au recourant à des fins d'investissement. Les termes contractuels étaient
clairs et les avis de droit qu'il avait produit confirmaient que le contrat de
souscription prévoyait que les parties prêtaient des fonds à sa société sans
obligation d'investissement de sa part.

2.1. Saisi d'un litige sur l'interprétation d'un contrat en droit suisse, le
juge doit tout d'abord s'attacher à rechercher la réelle et commune intention
des parties, le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices, sans
s'arrêter aux expressions et dénominations inexactes dont elles ont pu se
servir. Pour ce faire, le juge prendra en compte non seulement la teneur des
déclarations de volonté, mais aussi les circonstances antérieures,
concomitantes et postérieures à la conclusion du contrat (art. 18 al. 1 CO; ATF
140 III 86 consid. 4.1 p. 90 s. et les références citées). Il convient de ne
pas attacher une importance décisive au sens des mots, même clairs, utilisés
par les parties. Il ressort de l'art. 18 al. 1 CO qu'on ne peut ériger en
principe qu'en présence d'un texte clair, on doit exclure d'emblée le recours à
d'autres moyens d'interprétation; même si la teneur d'une clause contractuelle
paraît claire et indiscutable à première vue, il peut résulter du but poursuivi
par les parties ou d'autres circonstances que la lettre ne restitue pas
exactement le sens de l'accord conclu (ATF 131 III 280 consid. 3.1 p. 287 et
les références citées; INGEBORG SCHWENZER, Schweizerisches Obligationenrecht,
Allgemeiner Teil, 6e éd. 2012, ch. 33.04 p. 267; ALFRED KOLLER, Schweizerisches
Obligationenrecht Allgemeiner Teil, 3. Aufl. 2009, p. 141 ch. 6). Par ailleurs,
la cour cantonale a constaté, sans que le recourant ne critique ce point, qu'en
droit luxembourgeois, la portée des conventions devait, comme en droit suisse,
être examinée sous l'angle de la recherche de la commune et réelle intention
des parties contractantes au-delà du sens strict des termes employés.

2.2. La cour cantonale a relevé que les déclarations des parties plaignantes,
qui ne se connaissaient pas, et de D.________ concordaient parfaitement sur le
fait que les fonds avaient été remis afin d'être investis par le recourant, et
non dans le cadre d'un prêt en faveur de ce dernier ou de sa société sans
obligation de placement. Les multiples échanges de correspondances
électroniques confirmaient ce point de vue. En effet, le recourant y indiquait
notamment que les avoirs de chacune des parties plaignantes avaient été
investis dans certains fonds ayant un rendement particulièrement profitable. Il
apparaissait également incompréhensible que, face à l'insistance des intimés
tendant à obtenir des relevés mensuels concernant leurs investissements, le
recourant ne se fût pas contenté de répondre que la délivrance de tels
documents n'était pas prévue par les contrats qu'ils avaient signés, si tel
avait vraiment été sa conviction. Le recourant ne leur avait pas davantage
transmis les autres documents mentionnés par le contrat de souscription. Par
ailleurs, les avis de droit suisse et luxembourgeois produits par le recourant,
aux termes desquels les contrats signés ne prévoyaient pas d'obligation de
gestion de fortune à la charge du recourant, ne prenaient pas en considération
le contexte de leur conclusion et des échanges de correspondances y relatifs.
Dans cette mesure, leur pertinence devait être relativisée. Que ce soit sous
l'angle du droit suisse ou du droit luxembourgeois, force était de constater
que le contenu des contrats en cause ne correspondait pas à la volonté des
parties plaignantes, telle qu'elle avait été manifestée antérieurement ou
postérieurement à leur conclusion.

2.3. Le recourant ne conteste pas que les avis de droit produits se limitent à
une interprétation strictement littérale du contrat. Conformément à ce qui
précède (consid. 2.1 supra), la cour cantonale était autorisée à s'écarter de
la lettre du contrat de souscription, même claire  a priori, dans la mesure où
il résultait d'éléments extrinsèques, notamment des circonstances postérieures
à sa signature, qu'une interprétation fondée uniquement sur la lettre du
contrat ne correspondait pas en tous points à la volonté subjective des
parties.
La question de savoir si la cour cantonale aurait mal apprécié l'ensemble des
éléments pertinents pour déterminer la réelle et commune intention des parties
doit être examinée sous l'angle d'une éventuelle constatation arbitraire des
preuves (consid. 3 infra). En effet, déterminer ce qu'un cocontractant savait
ou voulait au moment de conclure un contrat relève d'une constatation de fait (
ATF 140 III 86 consid. 4.1 p. 90 s et les références citées).

3. 
Invoquant l'interdiction de l'arbitraire et la présomption d'innocence (art. 6
par. 2 CEDH, 32 al. 1 Cst., 10 al. 3 CPP), le recourant soutient qu'une
correcte appréciation des preuves, soit non seulement du contrat mais également
des déclarations initiales des parties, que les échanges de correspondance ne
contrediraient pas, devait conduire la cour cantonale à retenir que les fonds
lui avaient été remis par les parties plaignantes dans le cadre d'un prêt
accordé à sa société, C.________ SA, de sorte que celle-ci était libre d'en
disposer à sa guise aussi longtemps qu'elle s'acquittait de l'intérêt annuel
convenu et que le capital était remboursé à l'échéance du prêt fixé à 5 ans.

3.1. Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base
des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF); il peut
toutefois compléter ou rectifier même d'office les constatations de fait qui se
révèlent manifestement inexactes, c'est-à-dire arbitraires aux termes de l'art.
9 Cst.). La violation des droits fondamentaux doit être invoquée et motivée de
manière précise (art. 106 al. 2 LTF). Ainsi, il appartient au recourant
d'exposer et de démontrer de manière claire et circonstanciée en quoi l'arrêt
attaqué serait entaché d'une constatation arbitraire des faits. Les critiques
appellatoires sont irrecevables (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266).

3.2. Il découle des déclarations constantes de A.________, D.________ et
E.________ que la transaction avec C.________ SA portait sur la remise de fonds
aux fins de placement, excluant que le recourant ou sa société soit autorisé à
en disposer à leur guise. En particulier, selon A.________ et D.________, un
intérêt annuel de 18% était convenu, auquel s'ajoutait un intéressement aux
profits (supérieurs à 18%) générés par les investissements réalisés et pour
lesquels le recourant devait fournir des rapports mensuels (arrêt attaqué,
consid. B. c.b. p. 6). De même, E.________ a déclaré que le recourant lui avait
expliqué travailler avec des banques et des sociétés financières et faire des
investissements financiers. L'un des deux contrats signés avec C.________ SA
réglait l'investissement de 1'000'000 euros par le biais de l'achat d'un titre
de C.________ SA et l'autre les détails concernant l'investissement. Ces deux
contrats, entrés en vigueur simultanément, servaient à protéger
l'investissement de B.________ et à garantir les intérêts dus dans l'hypothèse
où les investissements seraient fructueux et, en cas contraire, le
remboursement du capital (arrêt attaqué, consid. B. f.b. p. 9).
En outre, il ressort de la correspondance entre les parties que les intimés
s'étaient constamment préoccupés des investissements réalisés par le recourant
avec leur fonds, exigeant à multiples reprises extraits de compte, rapports sur
les placements et paiement des rendements annoncés par l'intéressé. Faute de
les obtenir, elles avaient mis fin aux rapports contractuels. Aussi apparaît-il
que, contrairement à l'hypothèse d'un prêt, les exigences des intimés ne se
limitaient pas à obtenir le paiement de l'intérêt annuel et le remboursement du
prêt à son terme. De son côté, le recourant n'a jamais fait mention d'un prêt;
au contraire, il assurait continuellement avoir placé l'argent des intimés dans
différents investissements (ainsi en va-t-il, par exemple, de la télécopie et
de l'email envoyés le 28 juin 2005 à A.________ et E.________ respectivement:
"  I kindly inform you about your fund performance. We placed the fund into a
short investment cycle of 5 days. The growth was 18.73% average based on the
capital [...].  We are in process to place your fund into a $60 B investment
frame. It means of around 120 days investment period. "), ce qu'il semble
d'ailleurs admettre dans son recours (cf. p. 12).
Enfin, si le contrat de souscription prévoyait uniquement l'achat d'une
obligation contre la remise de la somme de 1'000'000 dollars américains,
respectivement 1'000'000 euros, il n'excluait pas que cet investissement soit
assorti d'autres conditions ne figurant pas dans le contrat. Il ne permettait
pas non plus d'inférer que le recourant avait la libre disposition des montants
qui lui étaient remis. Il s'ensuit que la volonté subjective des parties
établie par la cour cantonale n'entre pas en contradiction avec la lettre du
contrat, mais la complète grâce à des éléments extrinsèques pertinents, dont
l'appréciation n'est pas critiquable.

3.3. Le recourant s'écarte de l'état de fait cantonal, sans en démontrer
l'arbitraire, lorsqu'il affirme que les parties étaient rompues aux affaires,
ou que les propos qu'il tenait aux intimés s'expliquaient par son souhait
d'éviter tout conflit s'agissant de leur compréhension des contrats. Son
argumentation est ainsi appellatoire, partant irrecevable. Au surplus, il n'est
pas crédible que le recourant ait entretenu les intimés dans une conviction
fausse dans le seul but d'éviter un conflit; en effet, alors que les demandes
des parties plaignantes devenaient plus pressantes, et même lorsque celles-ci
déclaraient vouloir résilier les contrats et récupérer l'argent investi, le
recourant n'a jamais présenté la version des faits qu'il soutient désormais, à
savoir qu'il n'avait aucun compte à rendre sur l'usage des fonds remis à sa
société.

3.4. Sur le vu de ce qui précède, la cour cantonale n'est pas tombée dans
l'arbitraire en déduisant des circonstances et du comportement des parties que
les intimés avaient confié leur argent au recourant pour une affectation
convenue, à savoir aux fins de les investir dans des instruments financiers
permettant d'obtenir des revenus annuels d'au minimum 18% du capital remis.
Le grief de violation de la présomption d'innocence et d'arbitraire dans
l'appréciation des preuves est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

4. 
Le recourant discute la réalisation de l'élément constitutif subjectif de
l'infraction d'abus de confiance. Il affirme que rien ne permet de présumer
qu'il n'aurait pas eu la volonté et la faculté de restituer lesdits montants à
l'échéance du délai de 5 ans tel que convenu dans le contrat. Par ailleurs, il
soutient être en droit d'invoquer la compensation dans la mesure où la
procédure pénale et la détention lui auraient causé un dommage plus important
que les sommes versées par les parties plaignantes, alors que celles-ci avaient
agi avec excès après avoir accepté un contrat parfaitement valable et licite
qui soudain ne leur convenait plus.

4.1. Savoir ce que l'auteur voulait, savait ou ce dont il s'accommodait relève
du contenu de la pensée, donc de l'établissement des faits (consid. 3.1 supra).

4.2. Conformément à ce qui précède, le recourant a agi intentionnellement car
il savait ne pas être autorisé à disposer des valeurs patrimoniales confiées
comme il l'avait fait.
La cour cantonale a relevé que, bien qu'au cours de toute la procédure, le
recourant n'eût cessé de prétendre disposer des moyens financiers lui
permettant de rembourser les intimés, il ne s'était jamais exécuté, même
partiellement. Dès lors, il n'était pas arbitraire d'en déduire que l'intéressé
n'avait pas la volonté de payer la contre-valeur de ce qu'il avait reçu, à
supposer qu'il en ait eu la capacité. En outre, dans la mesure où, selon les
considérants qui précèdent, l'intéressé ne dispose d'aucune créance contre les
parties plaignantes, il n'est pas autorisé à invoquer la compensation. Il
s'ensuit que le dessein d'enrichissement illégitime est réalisé. Le grief doit
par conséquent être rejeté.

5. 
En définitive, les conditions objectives et subjectives de l'art. 138 ch. 1 al.
2 CP sont réunies quant aux sommes versées par les investisseurs sur le compte
de C.________ SA et qui ont été utilisées dans un but autre que celui convenu.
Dans cette mesure, la cour cantonale n'a pas méconnu le droit fédéral en
reconnaissant le recourant coupable d'abus de confiance aggravé, étant précisé
que ce dernier n'élève aucun grief spécifique contre l'application de la
circonstance aggravante.

6.
Selon le recourant, les juridictions cantonales se seraient contredites en lui
reprochant d'avoir trompé ses cocontractants afin de les inciter à lui remettre
des fonds qu'il n'entendait pas leur restituer, sans pour autant le reconnaître
coupable d'escroquerie.

6.1. Lorsque l'auteur a trompé astucieusement le lésé pour le déterminer à lui
confier la valeur patrimoniale qu'il a ensuite détournée, son comportement est
non seulement constitutif d'abus de confiance, mais également d'escroquerie
(arrêts 6B_569/2014 du 24 novembre 2014 consid. 3.1; 6B_91/2007 du 8 juillet
2007 consid. 6.2; cf. ATF 133 IV 21 consid. 6 et 7 p. 27 ss). La jurisprudence
n'a pas encore déterminé s'il y avait concours imparfait ou concours idéal
entre les deux infractions. En tous les cas, la condamnation pour abus de
confiance sera retenue lorsque les valeurs patrimoniales auront été confiées à
la suite d'une tromperie, mais que, notamment pour des raisons de procédure
(par exemple en raison du principe de l'immutabilité), la qualification
d'escroquerie est exclue (arrêts 6B_569/2014 précité consid. 3.1; 6B_91/2007
précité consid. 6.2; cf. ATF 117 IV 429 consid. 2 p. 433).

6.2. Conformément à l'acte d'accusation du Ministère public, le recourant a été
renvoyé en jugement pour la commission de l'infraction d'abus de confiance
aggravé. Dans la mesure où les juridictions cantonales n'étaient pas saisies
d'une accusation d'escroquerie, le recourant ne peut rien déduire du fait que
cette infraction n'a pas été retenue aux termes de l'arrêt attaqué, à supposer
qu'il pût en découler un argument en sa faveur.

7. 
Sur le vu de ce qui précède, les prétentions du recourant visant la restitution
de la caution, la levée des saisies et l'allocation d'indemnités sont sans
objet.

8. 
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant
supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 4000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.

Lausanne, le 25 février 2016

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

La Greffière : Musy

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