Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.179/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
6B_179/2015

Arrêt du 26 août 2015

Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,
Rüedi et Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffier : M. Vallat.

Participants à la procédure
X.________, représentée par Me Hervé Bovet, avocat,
recourante,

contre

1. Ministère public de l'Etat de Fribourg, case postale 1638, 1701 Fribourg,
2. A.________, représenté par Me Bruno Charrière, avocat,
intimés.

Objet
Ordonnance de classement (lésions corporelles graves),

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Chambre
pénale, du 26 janvier 2015.

Faits :

A. 
Par ordonnance du 8 avril 2014, le Ministère public de l'État de Fribourg a
ordonné le classement de la procédure pénale dirigée contre A.________ pour
lésions corporelles par négligence, renvoyé la partie plaignante a faire valoir
ses droits devant le juge civil et mis les frais de procédure à la charge de
l'État.

B. 
Par arrêt du 26 janvier 2015, la Chambre pénale du Tribunal cantonal
fribourgeois a rejeté le recours formé par X.________ dans la mesure où il
était recevable, confirmé l'ordonnance précitée et mis les frais de procédure à
la charge de X.________. En bref, la cour cantonale a retenu les faits
suivants.

Le 15 octobre 2010, aux alentours de 7h40, X.________, alors âgée de 14 ans, a
été victime d'un accident ferroviaire en gare de Vaulruz-Sud. En raison d'un
problème technique d'aiguillage, le train est entré en gare sur la voie 1,
proche de la gare, au lieu de passer comme à l'ordinaire sur la voie 2. A cette
heure-là, entre vingt et trente élèves du cycle d'orientation attendaient
l'arrivée du train. Celui-ci a heurté X.________, qui traversait la voie 1 et
qui a entendu le premier signal sonore d'avertissement mais pas les suivants.
Le freinage d'urgence entrepris par le conducteur du train n'a pas permis
d'éviter la collision et la jeune fille est tombée entre les rails puis a été
traînée latéralement par le châssis de l'automotrice sur 7,3 mètres.

Une instruction a été ouverte à l'encontre de A.________, chef de circulation
officiant en gare de Bulle, pour lésions corporelles par négligence. Après
diverses auditions, une reconstitution et l'obtention de divers rapports, dont
celui du Service d'enquête sur les accidents des transports publics (SEA), le
Ministère public a rendu une ordonnance de classement, le 30 septembre 2012, et
renvoyé la partie plaignante à faire valoir ses droits devant le juge civil. La
Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois a admis le recours de la
partie plaignante et renvoyé la cause pour suite utile, par arrêt du 10 février
2014. Après avoir informé les parties du rejet des réquisitions de preuves
complémentaires, le Ministère public a prononcé un nouveau classement, par
ordonnance du 8 avril 2014, et renvoyé la partie plaignante à faire valoir ses
droits devant le juge civil. Il a considéré que sous un angle purement objectif
le chef de circulation avait certes violé deux devoirs de prudence et que la
partie plaignante avait subi des lésions corporelles graves. Cependant, un lien
de causalité entre le comportement fautif et les lésions corporelles faisait
défaut. Le prévenu ne pouvait donc pas être condamné pour lésions corporelles
par négligence, sans qu'il soit besoin d'examiner la question de la négligence.
En particulier, A.________ avait contrevenu aux dispositions d'exécution des
prescriptions de circulation des trains (DE TPF R 300.6, art. 5.1.3), ainsi
qu'aux prescriptions suisses de circulation des trains (PCT R 300.6, art.
5.1.4). Le signal correct aurait dû annoncer la marche à vue, à la vitesse
maximale de 20 km/h depuis le signal de limite de garage, alors que la
signalisation effective donnée par A.________ indiquait une vitesse maximale de
circulation de 40 km/h depuis l'aiguille d'entrée. Toutefois, de facto, le
convoi circulait à une vitesse de 22 km/h à la limite de garage et à une
vitesse de 16 à 17 km/h au moment du déclenchement du freinage d'urgence. Par
conséquent, l'accident aurait tout de même eu lieu si A.________ avait respecté
les prescriptions en la matière.

C. 
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet
arrêt. Elle conclut à l'annulation de l'ordonnance de classement et au renvoi
de la cause au Ministère public pour suite utile. La société Service Sinistres
Suisse SA, qui a produit une procuration de la Direction de la santé et des
affaires sociales de l'État de Fribourg, a demandé qu'une copie de l'arrêt
fédéral lui soit transmise.

Considérant en droit :

1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 138 III 46 consid. 1 p. 46).

1.1. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a
participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à
recourir au Tribunal fédéral, si la décision attaquée peut avoir des effets sur
le jugement de ses prétentions civiles. Constituent de telles prétentions
celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être
déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement
des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41
ss CO.

En vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe à la partie recourante d'alléguer
les faits qu'elle considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir.
Lorsque le recours est dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou
de classement de l'action pénale, la partie plaignante n'a pas nécessairement
déjà pris des conclusions civiles. Quand bien même la partie plaignante aurait
déjà déclaré des conclusions civiles (cf. art. 119 al. 2 let. b CPP), il n'en
reste pas moins que le procureur qui refuse d'entrer en matière ou prononce un
classement n'a pas à statuer sur l'aspect civil (cf. art. 320 al. 3 CPP). Dans
tous les cas, il incombe, partant, à la partie plaignante d'expliquer dans son
mémoire au Tribunal fédéral quelles prétentions civiles elle entend faire
valoir contre l'intimé. Comme il n'appartient pas à la partie plaignante de se
substituer au Ministère public ou d'assouvir une soif de vengeance, la
jurisprudence entend se montrer restrictive et stricte, de sorte que le
Tribunal fédéral n'entre en matière que s'il ressort de façon suffisamment
précise de la motivation du recours que les conditions précitées sont
réalisées, à moins que l'on puisse le déduire directement et sans ambiguïté
compte tenu notamment de la nature de l'infraction alléguée (ATF 141 IV 1
consid. 1.1 p. 4).

1.2. La recourante indique que, gravement blessée à la suite d'un accident
ferroviaire, elle est une victime LAVI et que la question de l'existence d'un
lien de causalité entre l'omission reprochée à l'intimé et les lésions
corporelles graves subies se posera en des termes comparables s'agissant de
l'application de l'art. 41 CO, de sorte qu'elle aurait qualité pour recourir,
sans exposer quelles prétentions civiles elle entend faire valoir.

L'infraction dénoncée, à savoir des lésions corporelles graves, constitue une
infraction grave contre l'intégrité physique. Il apparaît d'emblée que la
décision de classement est, en soi, de nature à influencer négativement le
jugement de prétentions en réparation du dommage et du tort moral que
X.________ pourrait élever en raison des lésions subies. Il est cependant
douteux que la recourante puisse faire valoir des prétentions fondées sur le
droit privé directement contre l'intimé (cf. art. 51 de la loi fédérale du 20
mars 2009 sur le trafic des voyageurs [LTV; RS 745.1] et art. 40b à 40f de la
loi fédérale du 20 décembre 1957 sur les chemins de fer [LCdF; RS 742.101]).
Cet aspect peut demeurer indécis vu le sort du recours.

2. 
La recourante reproche à la juridiction cantonale d'avoir établi certains faits
de manière manifestement inexacte. Elle soutient que la cour cantonale aurait
procédé à une appréciation arbitraire des preuves en ignorant qu'une
signalisation correcte aurait permis une réduction importante de la vitesse et,
partant, une distance de freinage plus courte. Elle lui reproche aussi de
n'avoir pas donné suite à ses réquisitions tendant à déterminer à quelle
vitesse le train aurait circulé si la signalisation choisie avait été conforme
aux prescriptions en vigueur.

2.1. Le Tribunal fédéral est un juge du droit. Il ne peut revoir les faits
établis par l'autorité précédente que si ceux-ci l'ont été de manière
manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), c'est-à-dire arbitraire (cf. ATF
138 III 378 consid. 6.1 p. 379). On peut renvoyer, sur la notion d'arbitraire,
aux principes maintes fois exposés par le Tribunal fédéral (cf. ATF 140 III 16
consid. 2.1 p. 18 s.). En bref, pour qu'il y ait arbitraire, il ne suffit pas
que la décision attaquée apparaisse discutable ou même critiquable, il faut
qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa
motivation, mais aussi dans son résultat.

2.2. L'autorité cantonale a indiqué que la causalité hypothétique n'était pas
réalisée en l'occurrence puisque l'accomplissement de l'acte omis n'aurait
vraisemblablement pas empêché la survenance du résultat au sens où l'entend la
jurisprudence. En effet, en cas d'omission, la question de la causalité ne se
présente pas de la même manière qu'en cas de commission (ATF 134 IV 255 consid.
4.4.1 p. 264 s.). L'omission d'un acte est en relation de causalité naturelle
avec le résultat de l'infraction présumée si son accomplissement eût empêché la
survenance de ce résultat avec une vraisemblance confinant à la certitude ou,
du moins, avec une haute vraisemblance (ATF 116 IV 306 consid. 2a p. 310; cf.
également ATF 121 IV 286 consid. 4c p. 292; 118 IV 130 consid. 6a p. 141). Elle
est en relation de causalité adéquate avec le résultat si l'accomplissement de
l'acte omis aurait, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la
vie, évité la survenance de ce résultat (ATF 117 IV 130 consid. 2a p. 133).

2.3. En l'occurrence, si le chef de circulation avait suivi les prescriptions
de signalisation qui s'imposaient, le conducteur du train aurait dû entrer en
gare à une vitesse de 20 km/h et la distance de freinage aurait été de 20,693
m, alors que le train est entré en gare à une vitesse de 22 km/h mais en
décélérant puisqu'au début du freinage d'urgence, la vitesse était de 16-17 km/
h et que la distance de freinage n'a été que de 12 m. La vitesse du convoi a
certes exercé une influence sur la survenue de l'accident mais dans la mesure
où elle était, de fait, celle que les prescriptions exigeaient, il n'y a pas
lieu de rechercher ce qui se serait passé si le conducteur du train avait
circulé en-dessous des 20 km/h autorisés. Dans cette hypothèse, en effet,
quelle que soit la vitesse effective, ni un comportement ni une omission
pénalement répréhensible n'auraient pu être reprochés au chef de circulation.
Dès lors, l'observation des prescriptions relatives aux feux n'aurait, très
vraisemblablement, pas évité le résultat. Le raisonnement de la cour cantonale
ne prête pas le flanc à la critique.

2.4. Il s'ensuit, par ailleurs, le conducteur du train n'ayant jamais été mis
en prévention puisqu'il avait adapté son comportement de façon optimale aux
indications reçues du chef de circulation, qu'il n'y a pas lieu de s'écarter de
l'appréciation de l'autorité cantonale, selon laquelle l'audition des experts
visant à déterminer à quelle vitesse le train serait entré en gare si la
signalisation avait été correctement donnée, n'est pas pertinente pour
l'établissement des faits déterminant la responsabilité pénale de l'intimé.

3. 
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. La recourante,
qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'Etat
de Fribourg, Chambre pénale. Il est transmis en copie à la société Service
Sinistres Suisse SA.

Lausanne, le 26 août 2015

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

Le Greffier : Vallat

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