Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.633/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
5A_633/2015

Arrêt du 18 février 2016

IIe Cour de droit civil

Composition
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
Marazzi et Bovey.
Greffière : Mme Achtari.

Participants à la procédure
A.________, représentée par Me Jean-Marc Reymond, avocat,
recourante,

contre

B.________,
représenté par Me Julien Fivaz, avocat,
intimé.

Objet
compétence matérielle (contribution extraordinaire
d'un époux),

recours contre l'arrêt de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton
de Vaud du 26 mars 2015.

Faits :

A.

A.a. Le 18 juin 1999, A.________ et B.________, tous deux de nationalité belge,
ont acquis, chacun par moitié, la propriété d'un bien immobilier à C.________,
en Belgique.

A.b. Les parties se sont mariées le 2 septembre 2000 à C.________. Elles ont
adopté le régime de la séparation de biens.

A.c. Les époux ont établi leur domicile en Suisse dès février 2004. A une date
indéterminée, ils ont vendu l'immeuble de C.________. Le 27 janvier 2005, ils
ont acquis en copropriété, chacun pour une demie, un bien immobilier à
D.________ (Vaud).

A.d. Le 5 janvier 2011, A.________ a déposé une requête de mesures protectrices
de l'union conjugale devant le Président du Tribunal civil de l'arrondissement
de La Côte (ci-après: le Président du Tribunal civil).
Par ordonnance du 14 février 2011, le Président du Tribunal civil, ratifiant
une convention partielle passée entre les parties le 19 janvier 2011, a
notamment autorisé celles-ci à vivre séparées et attribué la jouissance du
domicile conjugal à l'épouse.

A.e. Le 3 mars 2011, B.________ a déposé une demande en divorce auprès du
Tribunal de première instance de Bruxelles.
Par jugement du 24 février 2012, le Tribunal de première instance de Bruxelles
a prononcé le divorce des parties et désigné un premier notaire pour procéder
aux opérations de liquidation et de partage du régime matrimonial et un second
pour représenter la partie défaillante ou récalcitrante.

B.

B.a. Le 11 septembre 2012, A.________ a ouvert action devant la Chambre
patrimoniale cantonale du canton de Vaud. Elle a conclu à la condamnation de
B.________ au paiement immédiat des sommes de 8'449 euros, avec intérêt à 5 % à
compter du 13 juillet 2005, de 95'258 fr. 33, avec intérêt à 5 % à compter du
15 septembre 2008, et de 24'250 fr. 84, avec intérêt à 5 % à compter du 1 ^
er juillet 2006, ainsi qu'au prononcé de la mainlevée définitive de
l'opposition formée au commandement de payer notifié à B.________ par l'Office
des poursuites du district de Nyon dans la poursuite n°xxx à hauteur de 130'070
fr. avec intérêt à 5% l'an dès l'échéance moyenne du 31 décembre 2009.
Elle a soutenu que la prétention de 8'449 euros correspondait à la moitié du
solde du prix de vente de l'immeuble de C.________ que B.________ avait
indûment encaissée le 13 juillet 2005, que celle de 95'258 fr. 33 représentait
la moitié des charges hypothécaires relatives à l'immeuble de D.________ dont
elle s'était acquittée, et que celle de 24'250 fr. 84 était fondée sur des
remboursements d'impôts à la source effectués par les autorités fiscales en sa
faveur, dont B.________ s'était emparé.
B.________ a soulevé l'exception de litispendance au motif que les prétentions
entre époux devaient être traitées dans la procédure en divorce actuellement
pendante.

B.b.

B.b.a. Le 18 décembre 2012, A.________ a déposé une demande unilatérale en
divorce auprès du Tribunal civil de l'arrondissement de La Côte.
Le même jour, B.________ a introduit une nouvelle demande en divorce devant le
Tribunal de première instance de Bruxelles.
Le 28 mars 2013, la Cour d'appel de Bruxelles a déclaré non avenu le jugement
de divorce du 24 février 2012 (cf.  supra A.e).
Par jugement du 6 novembre 2013, le Tribunal de première instance de Bruxelles
a prononcé le divorce des parties, ordonné la tenue des opérations
d'inventaire, de comptes de liquidation et de partage du régime matrimonial des
parties et désigné un notaire à cette fin. Il a en outre notamment déclaré
irrecevable l'exception de litispendance soulevée par A.________.

B.b.b. Par jugement du 7 avril 2014, la Chambre patrimoniale cantonale a
déclaré irrecevable la demande du 11 septembre 2012 déposée par A.________
contre B.________. Elle a considéré que les prétentions de la demanderesse
devaient être tranchées par le juge du divorce ou celui des mesures
protectrices de l'union conjugale, de sorte qu'elle n'était compétente ni pour
statuer sur les prétentions de la demanderesse, ni pour trancher une éventuelle
litispendance entre le Tribunal d'arrondissement de La Côte et le Tribunal de
première instance de Bruxelles.

B.b.c. Le 2 octobre 2014, statuant sur l'appel de A.________, la Cour d'appel
de Bruxelles a déclaré l'exception de litispendence recevable mais infondée, la
saisine antérieure du juge suisse n'étant pas établie.
Le 11 mars 2015, A.________ a déposé une requête en cassation devant la Cour de
cassation de Belgique dirigée contre cet arrêt. Elle a conclu en substance au
renvoi de la cause devant une autre cour d'appel.

B.c. Par arrêt du 26 mars 2015, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté l'appel interjeté par A.________ contre le jugement de la
Chambre patrimoniale cantonale du 7 avril 2014.

C. 
Par acte posté le 18 août 2015, A.________ interjette un recours en matière
civile devant le Tribunal fédéral contre cet arrêt. Elle conclut principalement
à sa réforme en ce sens que sa demande du 11 septembre 2012 soit déclarée
recevable et la cause renvoyée devant la Chambre patrimoniale cantonale pour
qu'elle statue au fond. Subsidiairement, elle a conclu à l'annulation de
l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle
décision dans le sens des considérants. En substance, elle invoque la violation
des art. 165 et 649 CC, 62 et 148 al. 2 CO, 23, 59, 64 al. 1 let. b, 125 et 283
al. 1 CPC, 2 CL, 51 et 59 LDIP, ainsi que l'arbitraire dans l'établissement des
faits.
Invités à répondre, l'autorité cantonale s'est référée aux considérants de
l'arrêt attaqué alors que l'intimé s'en est remis à la justice.

Considérant en droit :

1. 
L'arrêt entrepris est une décision finale (art. 90 LTF), l'incompétence de la
juridiction de première instance y étant confirmée, rendue en matière civile
(art. 72 al. 1 LTF), dans une contestation pécuniaire dont la valeur litigieuse
atteint 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et al. 4 LTF, art. 74 al. 1 let. b
LTF). La recourante, qui a succombé dans ses conclusions prises devant
l'instance précédente, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF); elle a en
outre agi dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus
par la loi, de sorte que son recours est en principe recevable.

2.

2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel
qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le
droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de
motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que
les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de
première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser, lorsque
celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2; 137 III
580 consid. 1.3; 135 III 397 consid. 1.4). L'art. 42 al. 2 LTF exige par
ailleurs que le recourant discute les motifs de la décision entreprise et
indique précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le
droit (ATF 140 III 86 consid. 2).

2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF); il ne peut s'en écarter que si ces faits ont
été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens
de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est
susceptible d'influencer le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). La partie
recourante qui soutient que les faits ont été établis d'une manière
manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), à savoir arbitraire au sens de
l'art. 9 Cst. (ATF 137 III 268 consid. 1.2), doit démontrer, par une
argumentation précise, en quoi consiste la violation (art. 106 al. 2 LTF; ATF
134 II 244 consid. 2.2).

3.

3.1. Tout d'abord, l'autorité cantonale a jugé que l'exception de litispendance
que l'intimé avait soulevée devait être rejetée. Elle a retenu que, sous
l'angle de la litispendance nationale, lors de l'introduction de l'action
devant la Chambre patrimoniale cantonale le 11 septembre 2012, aucune procédure
portant sur les créances litigieuses n'était pendante en Suisse. Sous l'angle
de la litispendance internationale, il existait une procédure de divorce en
Belgique, mais le jugement auquel celle-ci a abouti avait été déclaré non avenu
en appel par arrêt du 28 mars 2013.
Ensuite, l'autorité cantonale a jugé que l'art. 165 al. 2 CC s'appliquait aux
trois créances réclamées par la recourante au motif que celle-ci avait fourni
ces contributions dans l'intérêt de la famille.
Enfin, l'autorité cantonale a jugé que la Chambre patrimoniale cantonale
n'était pas compétente pour juger le litige portant sur ces créances.
S'agissant de la compétence à raison du lieu, elle a jugé que, dans la mesure
où l'intimé ne résidait principalement plus en Suisse mais en Belgique depuis
que la décision attaquée avait été rendue, l'art. 23 CPC ne s'appliquait pas.
S'agissant de la compétence à raison de la matière, elle a considéré que, au
moment de l'ouverture d'action et en dehors de toute procédure de divorce, la
Chambre patrimoniale cantonale était compétente. En revanche, elle ne l'était
plus une fois l'action en divorce ouverte. Selon elle, il n'existait pas de
nécessité de conserver dans tous les cas la compétence matérielle du juge
initialement saisi. Dès lors que la prétention en indemnité équitable déduite
de l'art. 165 CC devait être élevée au plus tard lors de la procédure de
divorce, car elle était susceptible d'influer sur la liquidation du régime
matrimonial et sur la créance d'entretien fondée sur l'art. 125 CC, quel que
soit le régime matrimonial adopté par les époux, cela justifiait qu'elle fût
invoquée dans le cadre de la procédure de divorce, en vertu du principe de
l'unité du jugement de divorce. Le principe d'économie de la procédure
postulait que le juge du divorce entre-temps saisi tranchât également les
prétentions litigieuses, d'autant que celles-ci étaient susceptibles d'influer
sur les autres effets du divorce. A cela s'ajoutait que la procédure litigieuse
n'était pas plus avancée que les procédures de divorce, ouvertes peu de temps
après. De ce point de vue également, l'économie de la procédure n'imposait pas
le maintien de la compétence de la Chambre patrimoniale cantonale. On devait au
contraire admettre qu'au vu de l'ouverture subséquente de la procédure de
divorce, le principe d'unité du jugement de divorce devait prévaloir.

3.2. La recourante soutient que ses créances sont fondées sur des rapports
juridiques indépendants du mariage et que la Chambre patrimoniale cantonale
était compétente tant à raison du lieu que de la matière, quel que soit le
fondement de ses créances.

4. 
La question qui se pose est de savoir si, malgré l'introduction d'une procédure
de divorce et le déplacement du domicile de l'époux de Suisse en Belgique, la
Chambre patrimoniale cantonale demeure compétente quant à la matière (cf. 
infra consid. 4.1) et quant au lieu (cf.  infra consid. 4.2) pour statuer sur
les créances de la recourante, que celles-ci soient fondées sur le rapport
matrimonial des parties ou un autre rapport juridique, contractuel ou
extracontractuel.

4.1. Il faut tout d'abord déterminer si la Chambre patrimoniale cantonale est
compétente à raison de la matière pour trancher le litige relatif aux créances
invoquées par la recourante.

4.1.1. Le tribunal n'entre en matière que sur les demandes qui satisfont aux
conditions de recevabilité de l'action, dont fait partie la compétence à raison
de la matière (art. 59 al. 1 et 2 let. b et 4 al. 1 CPC). Les critères de
répartition entre les différents tribunaux d'un même lieu sont la nature de la
cause et, lorsque celle-ci est de nature pécuniaire, la valeur litigieuse
(HOHL, Procédure civile, tome II, 2 ^ème éd., 2010, n°419 s.).
Le tribunal saisi examine d'office si les conditions de recevabilité sont
remplies (art. 60 CPC). D'après les principes généraux du droit de procédure
civile, celles-ci doivent encore exister au moment du jugement, mais il suffit
qu'elles soient réunies à ce moment (ATF 140 III 159 consid. 4.2.4; 133 III 539
consid. 4.3; 116 II 9 consid. 5; arrêt 5A_15/2009 du 2 juin 2009 consid. 4.1).
Bien que l'examen des conditions de recevabilité doive avoir lieu aussitôt que
possible et avant d'entrer en matière sur le fond de la cause, il n'existe,
mises à part quelques exceptions, aucune règle légale sur le moment où le
tribunal doit y procéder (ATF 140 précité).

4.1.2. Selon l'art. 165 al. 2 CC, l'époux qui, par ses revenus ou sa fortune, a
contribué à l'entretien de la famille dans une mesure notablement supérieure à
ce qu'il devait a droit à une indemnité équitable. Ressortissant aux
dispositions générales du droit du mariage, cette règle est applicable quel que
soit le régime matrimonial adopté par les époux (ATF 138 III 348 consid.
7.1.1). Les dispositions contractuelles ou délictuelles s'appliquent uniquement
si les prestations d'un conjoint envers l'autre sont effectuées dans un but
autre que l'entretien de la famille (ATF 127 III 46 consid. 4).
La créance résultant de l'art. 165 al. 2 CC est une prétention d'ordre
patrimonial qui ressortit au droit matrimonial. Pendant le mariage, elle est
exigible en tout temps et ne se prescrit pas. Le litige ressortit au juge
ordinaire (ATF 123 III 433 consid. 4a et 4b; Message concernant la révision du
code civil suisse - effets généraux du mariage, régimes matrimoniaux et
successions - du 11 juillet 1979,  in FF 1979 II p. 1179 ss [1241]).
Toutefois, la reconnaissance et l'étendue de l'indemnité équitable peuvent
dépendre d'effets accessoires du divorce, notamment d'éventuelles contributions
d'entretien. Il n'est en outre pas exclu qu'elle ait une influence sur la
liquidation du régime matrimonial (ATF 123 III 433 consid. 4c; arrêts 5A_599/
2007 du 2 octobre 2008 consid. 6.1, publié  in FamPra.ch 2009 p. 749; 5C.270/
2004 du 14 juillet 2005 consid. 4.1, publié  in FamPra.ch 2006 p. 438). Or, en
vertu du principe de l'unité du jugement de divorce consacré à l'art. 283 CPC,
l'autorité de première instance, ou de recours, qui prononce le divorce, de
même que l'autorité de recours appelée à régler certains effets accessoires
alors que le principe du divorce n'est plus litigieux, ne peuvent pas mettre
fin à la procédure sans avoir réglé tous les effets accessoires du divorce (ATF
134 III 426 consid. 1.2; arrêts 5A_874/2012 du 19 mars 2013 consid. 2.1,
publié  in FamPra.ch 2013 p. 752; 5A_619/2012 du 20 novembre 2012 consid.
1.2.1; 5A_498/2012 du 14 septembre 2012 consid. 1.2.1; 5A_25/2008 du 14
novembre 2008 consid. 4.1, non publié  in ATF 135 III 153, mais  in Pra 2009
(100) p. 668; 5A_682/2007 du 15 février 2008 consid. 3; 5C.234/2003 du 2 avril
2004 consid. 2.1). Ce principe s'applique aussi aux créances entre conjoints
qui ne résultent pas du régime matrimonial, pourvu qu'elles soient en rapport
avec l'union conjugale et avec l'obligation d'assistance mutuelle qui en
résulte (ATF 111 II 401 consid. 4b; 109 Ia 53 consid. 2; arrêts 5A_91/2013 du
14 juin 2013 consid. 4 et 6.2; 5C.221/2001 du 20 février 2002 consid. 3a,
publié  in Pra 2002 (86) p. 493 et SJ 2002 I p. 276). La seule exception
concerne la liquidation du régime matrimonial, qui peut être renvoyée à une
procédure séparée pour de justes motifs (art. 283 al. 2 CPC; ATF 137 III 49
consid. 3.5). Cette contestation devra, elle aussi, être tranchée par le juge
du divorce (arrêts 5A_477/2012 et 482/2012 du 11 janvier 2013 consid. 3.4.1,
publié  in FamPra.ch 2013 p. 469). Le but de l'art. 283 CPC est notamment de
permettre de connaître les ressources des parties pour régler les effets
patrimoniaux du divorce dans leur ensemble (TAPPY,  in Code de procédure civile
commenté, 2011, n°4 ad art. 283 CPC). Le principe de l'unité du jugement de
divorce fait l'objet de critiques en doctrine, selon lesquelles il serait
aujourd'hui dépassé (cf. not. KLOPFER, Die Einheit des Scheidungsurteils - ein
überholter Grundsatz?,  in RSJ 2015 (11) p. 493 ss et les auteurs cités); il
n'y a toutefois pas lieu, pour trancher le présent litige, d'examiner ces
différentes critiques.
Le principe de l'unité du jugement de divorce impose à l'époux d'invoquer sa
prétention fondée sur l'art. 165 al. 2 CC au plus tard avant la fin de la
procédure de divorce. Par attraction de compétence, c'est alors le juge de
cette procédure qui est compétent pour trancher cette question (ATF 123 III 433
consid. 4c; arrêt 5A_673/2007 du 24avril 2008 consid. 3.7.1, publié  in
 FamPra.ch 2008 p. 918; BRÄM/HASENBÖHLER,  in Zürcher Kommentar, Art. 90-251
ZGB, tome II/1c, 3 ^ème éd., 1998, n°107 ad art. 165 CC; DESCHENAUX/ STEINAUER/
BADDELEY, Les effets du mariage, 2 ^ème éd., 2009, n°529 s.; DE WECK-IMMELÉ, 
in Commentaire pratique, Droit matrimonial, 2016, n°44 ad art. 165 CC; HAUSHEER
/REUSSER/GEISER,  in Berner Kommentar, Art. 159-180 ZGB, tome II/1/2, 2 ^
ème éd., 1999, n°50 et 52 ad art. 165 CC; HUBER, Ausserordentliche Beiträge
eines Ehegatten (Art. 165 ZGB), 1990, p. 306; ISENRING/KESSLER,  in Basler
Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 5 ^ème éd., 2014, n°24 ad art. 165 CC;
PICHONNAZ,  in Commentaire romand, Code civil I, 2010, n°61 ad art. 165 CC;
ZEITER,  in Handkommentar zum Schweizer Privatrecht, Art. 1-456 ZGB, 2 ^
ème éd., 2012, n°18 ad art. 165 CC; critique sur l'ATF 123 précité: MEIER,
Arrêt du Tribunal fédéral du 25 septembre 1997 (IIe Cour civile), dans la cause
C. c/K. (5C.32/1997), Commentaire,  in PJA 1998 p. 221 [223 ss]).

4.1.3. Il résulte de ce qui précède que l'introduction de la procédure de
divorce ne modifie en rien la nature de la créance fondée sur l'art. 165 CC,
qui détermine la compétence matérielle du juge. Elle ne fait que délimiter, en
vertu du principe de l'unité du jugement de divorce et par attraction de
compétence uniquement, la compétence entre le juge ordinaire et le juge du
divorce pour statuer sur cette créance. Avant l'introduction de l'action en
divorce, cette compétence revient au juge ordinaire, qui demeure compétent même
si l'un des époux engage ensuite une procédure de divorce. Après l'introduction
de cette action, si le juge ordinaire n'a pas déjà été saisi, la contestation
devra être tranchée par le juge du divorce. Dans les deux hypothèses, le
principe de l'unité du jugement de divorce est respecté étant donné que l'époux
a fait valoir sa prétention avant que le divorce soit prononcé. Au demeurant,
si le juge du divorce est saisi après qu'un époux a introduit une action en
paiement fondée sur l'art. 165 CC devant le juge ordinaire, il peut, s'il
l'estime nécessaire pour assurer le respect du principe précité, suspendre la
procédure de divorce sur la base de l'art. 126 CPC.

4.1.4. En l'espèce, la recourante a engagé devant la Chambre patrimoniale
cantonale, soit le juge ordinaire, une action en paiement fondée sur l'art. 165
CC avant l'introduction d'une action en divorce, étant précisé que le divorce
prononcé le 24 février 2012 par le Tribunal de première instance de Bruxelles a
été déclaré non avenu. Il en résulte que, quelle que soit la nature du rapport
juridique sur lequel reposent les créances invoquées par la recourante, ce juge
reste compétent, même après l'introduction de procédures en divorce en Suisse
et Belgique le 18 décembre 2012. En retenant le contraire sur la base du
principe de l'unité du jugement de divorce consacré à l'art. 283 CPC,
l'autorité cantonale a méconnu la portée de ce principe en lien avec l'art. 165
CC.

4.2. Il faut ensuite déterminer si la Chambre patrimoniale cantonale était
compétente à raison du lieu pour trancher le litige relatif aux créances
invoquées par la recourante.

4.2.1. L'art. 64 al. 1 let. b CPC prévoit une exception à la règle selon
laquelle les conditions de recevabilité doivent encore être réunies au moment
où le juge rend sa décision. S'agissant de la compétence à raison du lieu, il
consacre en effet le principe de la  perpetuatio fori selon lequel le juge
localement compétent au moment de la création de la litispendence le demeure
même si les faits constitutifs de sa compétence se modifient par la suite
(HOHL,  op. cit., n°386).
Ce principe vaut, sauf exceptions non réalisées en l'espèce (cf. art. 5 CLaH96;
arrêt 5A_324/2014 du 9 octobre 2014 consid. 5.2 et les références), également
en matière internationale (cf. not. ATF 129 III 404 consid. 4.3.1; KNOEPFLER/
SCHWEIZER/OTHENIN-GIRARD, Droit international privé suisse, 3ème éd., 2004,
n°652b; BUCHER,  in Commentaire romand, Loi sur le droit international privé,
Convention de Lugano, 2011, n°4 ad art. 2 CL).

4.2.2. En l'espèce, s'agissant du domicile de l'intimé et de la détermination
de la compétence à raison du lieu de la Chambre patrimoniale cantonale,
l'autorité cantonale s'est montrée peu précise tant dans les notions qu'elle a
utilisées et la chronologie qu'elle a retenue, que dans sa subsomption. En
effet, dans la partie en fait de son arrêt, elle a retenu que l'intimé était "
désormais domicilié à Bruxelles ". En revanche, dans la partie en droit de son
arrêt, elle a affirmé que " depuis que l'arrêt attaqué [avait] été rendu, l'
[intimé] ne résid[ait] - principalement - plus en Suisse mais en Belgique ",
puis s'est bornée à juger que, au vu de ces faits, l'art. 23 CPC ne
s'appliquait pas.
Il n'est toutefois pas nécessaire de renvoyer la cause à l'autorité cantonale
pour qu'elle établisse les faits relatifs au domicile de l'intimé. En effet, la
Chambre patrimoniale cantonale était compétente, que l'intimé soit, ou non,
encore domicilié en Suisse. Dans la première hypothèse, le for du domicile de
l'intimé serait de toute façon donné (art. 10 al. 1 let. a CPC), que la créance
en paiement soit fondée sur un rapport matrimonial, contractuel (art. 31 CPC),
ou extracontractuel (art. 36 CPC), sans qu'il y ait lieu de trancher la
question de savoir si l'art. 23 CPC s'applique également aux créances fondées
sur l'art. 165 al. 2 CC (sur cette question, cf. TAPPY,  op. cit., n°11 ad art.
294 CPC). Dans la seconde hypothèse, l'intimé aurait déplacé son domicile en
Belgique dans tous les cas après la litispendance créée suite à l'introduction
de l'action valablement ouverte au for de son domicile en Suisse, de sorte que
la compétence de la Chambre patrimoniale cantonale serait perpétuée.

4.3. En résumé, la Chambre patrimoniale cantonale était compétente pour statuer
sur l'action en paiement fondée sur l'art. 165 CC, tant à raison de la matière
que du lieu. La question de savoir si les créances réclamées par la recourante
reposent sur le rapport matrimonial (art. 165 al. 2 CC) ou un autre rapport,
contractuel ou extracontractuel (art. 165 al. 3 CC), peut dès lors rester
indécise.

5. 
En conclusion, le recours en matière civile doit être admis et l'arrêt attaqué
réformé en ce sens que la cause est renvoyée à la Chambre patrimoniale
cantonale pour examen de la demande du 11 septembre 2012. Les frais
judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé, qui
succombe (art. 66 al. 1 LTF). L'intimé versera en outre à la recourante la
somme de 4'500 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal
fédéral (art. 68 al. 1 LTF). La cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour
nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale (art. 67 et
68 al. 5 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est réformé en ce sens que la cause est
renvoyée à la Chambre patrimoniale cantonale pour examen de la demande du 11
septembre 2012.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3. 
L'intimé versera à la recourante la somme de 4'500 fr. à titre de dépens pour
la procédure devant le Tribunal fédéral.

4. 
La cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision sur les
frais et dépens de la procédure cantonale.

5. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel civile du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 18 février 2016

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : von Werdt

La Greffière : Achtari

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