Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.58/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
5A_58/2015

Arrêt du 28 avril 2015

IIe Cour de droit civil

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux von Werdt, Président, Escher, Marazzi, Herrmann
et Bovey.
Greffière : Mme Bonvin.

Participants à la procédure
A.A.________,
représentée par Me Ramon Rodriguez, avocat,
recourante,

contre

Banque B.________,
représentée par Me Christian Fischer, avocat,
intimée.

Objet
mainlevée définitive de l'opposition,

recours contre l'arrêt de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal
cantonal vaudois du 16 décembre 2014.

Faits :

A.

A.a. Le 10 janvier 2006, C.A.________ a vendu à son épouse, A.A.________, la
parcelle n° 296 de la commune de U.________ et lui a transféré la cédule
hypothécaire n° ID yyyy, constituée sur ce même immeuble.
Le 21 janvier 2008, ensuite d'une poursuite exercée contre C.A.______, la
Banque B.________ s'est vu délivrer un acte de défaut de biens définitif après
saisie d'un montant de 33'342'063 fr. 78. Statuant le 24 février 2011 sur
l'action révocatoire ouverte par B._______ contre A.A.________, la Cour civile
du Tribunal cantonal du canton de Vaud a prononcé:

" I. Le transfert de la parcelle n° 296 de la commune de U.________ par
C.A.________ à la défenderesse A.A.________, selon acte notarié du 10 janvier
2006, est révoqué.
II. La cession et le transfert par C.A.________ à la défenderesse de la
propriété de la cédule hypothécaire au porteur de 1'000'000 fr. (un million de
francs), premier rang, intérêt maximum 10%, ID yyyy, créée le 23 décembre 2005
et grevant la parcelle n° 296 de U.________, sont révoqués.
III. Faute pour la défenderesse de remettre à l'Office des poursuites procédant
aux saisies requises par la demanderesse Banque B.________ sur la base du
présent jugement, la cédule hypothécaire au porteur de 1'000'000 fr. (un
million de francs), premier rang, intérêt maximum 10%, ID yyyy, créée le 23
décembre 2005 et grevant la parcelle n° 296 de la commune de U.________, libre
de tous engagements, la défenderesse devra payer auprès dudit Office, pour être
saisie au préjudice de C.A.________,en lieu et place de la prédite cédule, la
somme de 1'000'000 fr. (un million de francs) ".
L'appel formé par A.A.________ contre ce jugement a été rejeté par la Cour
d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud par arrêt du 29 août
2011. Le Tribunal fédéral a rejeté, le 13 mars 2012, le recours interjeté
contre cette décision (arrêt 5A_28/2012 du 13 mars 2012).

A.b. Le 31 août 2012, le Président du Tribunal d'arrondissement de La Côte, en
sa qualité d'autorité inférieure de surveillance, a rejeté une plainte de
B.________ contre le refus de l'office de procéder à la saisie complémentaire
de la cédule hypothécaire. Il a considéré que celle-ci n'était pas saisissable,
puisque A.A.________ s'en était dessaisie en la remettant en nantissement à un
tiers de bonne foi. Par arrêt du 21 décembre 2012, la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal vaudois a confirmé ce point de vue, mais renvoyé
la cause à l'autorité inférieure pour instruction complémentaire sur la
question de la possession de la cédule par D.________ AG. Par décision du 15
novembre 2013, le Président du Tribunal d'arrondissement de La Côte a rejeté la
plainte, après avoir constaté que la cédule hypothécaire litigieuse avait été
incorporée dans le patrimoine de D.________ AG, qui l'avait acquise de bonne
foi. Cette décision est exécutoire, faute de recours, depuis le 3 décembre
2013.

B. 
Le 6 février 2014, B._______ a fait notifier à A.A._______ un commandement de
payer la somme de 1'000'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 13 janvier 2014
au titre de " montant dû en vertu du chiffre III du dispositif du jugement de
la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 24 février 2011
confirmé par l'arrêt de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du 29 août
2011 et à (sic) l'arrêt du Tribunal fédéral du 13 mars 2012" (poursuite n° xxxx
de l'Office des poursuites du district de Nyon). Cet acte ayant été frappé
d'opposition, la poursuivante a demandé la mainlevée définitive,
subsidiairement provisoire, le 28 février 2014. Le 21 mai 2014, le Juge de paix
du district de Nyon a levé définitivement l'opposition à concurrence de
1'000'000 fr., plus intérêts à 5% dès le 6 février 2014. Le 16 décembre
suivant, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a
rejeté le recours formé par la poursuivie.

C. 
Par mémoire du 23 janvier 2015, la poursuivie interjette un recours en matière
civile au Tribunal fédéral, concluant à la réforme de l'arrêt entrepris en ce
sens que la requête de mainlevée est rejetée. Subsidiairement, elle sollicite
le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il n'a
pas été requis d'observations sur le fond.
Par ordonnance présidentielle du 10 février 2015, l'effet suspensif a été
attribué au recours.

Considérant en droit :

1.

1.1. Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) à l'encontre
d'une décision finale (art. 90 LTF; ATF 133 III 399 consid. 1.4 p. 400) rendue
en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF; ATF 134 III 520
consid. 1.1 p. 521) par un tribunal supérieur ayant statué sur recours en
dernière instance cantonale (art. 75 LTF). La valeur litigieuse atteint
amplement le seuil légal (art. 74 al. 1 let. b LTF; ATF 133 III 399 consid. 1.3
p. 399). La poursuivie, qui a succombé devant la cour cantonale, a qualité pour
recourir (art. 76 al. 1 LTF).

1.2. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit
fédéral, y compris les droits constitutionnels (art. 95 let. a LTF; ATF 133 III
399 consid. 1.5 p. 400; arrêt 5A_144/2014 du 23 juin 2014 consid. 1 non publié
in ATF 140 III 372).

2. 
La Cour des poursuites et faillites a constaté que le jugement de la Cour
civile du 14 mars 2011 (recte: 24 février 2011) était définitif et exécutoire.
Elle a considéré que le chiffre III de son dispositif contenait une double
condition, suspensive et résolutoire, en ce sens que si A.A.________ ne
remettait pas à l'office la cédule hypothécaire grevant la parcelle n° 296 de
la commune de U.________, elle devait verser à B.________ un montant de
1'000'000 fr. L'office, procédant à la saisie complémentaire requise par
B._______ à la suite du jugement de la Cour civile, a ordonné à A.A._______ de
lui remettre la cédule hypothécaire litigieuse dans un délai au 21 mai 2012;
cet élément ressortait en particulier de l'arrêt de la Cour des poursuites et
faillites du 21 décembre 2012 et de la décision de l'autorité inférieure de
surveillance du 15 novembre 2013. La recourante ne prétendait pas, ni n'avait
établi, avoir restitué la cédule; il était au contraire démontré qu'elle ne
l'avait pas restituée, puisqu'elle l'avait remise en nantissement à un tiers.
La condition prévue par le dispositif du jugement révocatoire étant réalisée,
la mainlevée définitive de l'opposition devait être accordée.

3. 
La procédure de mainlevée est une pure procédure d'exécution forcée (ATF 94 I
365 consid. 6 p. 373; 72 II 52 p. 54), un incident de la poursuite. Dans la
procédure de mainlevée définitive, le juge se limite à examiner le jugement
exécutoire ou les titres y assimilés, ainsi que les trois identités -
l'identité entre le poursuivant et le créancier désigné dans ce titre (ATF 140
III 372 consid. 3.1 p. 374), l'identité entre le poursuivi et le débiteur
désigné et l'identité entre la prétention déduite en poursuite et le titre qui
lui est présenté - et à statuer sur le droit du créancier de poursuivre le
débiteur, c'est-à-dire à décider si l'opposition doit ou ne doit pas être
maintenue (ATF 139 III 444 consid. 4.1.1 p. 446 s.). Il n'a ni à revoir ni à
interpréter le titre qui lui est soumis (ATF 140 III 180 consid. 5.2.1 p. 190;
124 III 501 consid. 3a p. 503).

4. 
Au sens de l'art. 291 al. 1 LP, celui qui a profité d'un acte révocable doit
restituer ce qu'il a reçu.

4.1. Le jugement révocatoire a pour effet de rendre aux biens atteints par
l'acte révocable du débiteur leur destination primitive, c'est-à-dire de les
mettre en état de servir au désintéressement des créanciers, en les faisant
retomber sous le droit d'exécution de ceux-ci (ATF 136 III 341 consid. 3 p. 343
et les références; 135 III 265 consid. 3 p. 268). La restitution des biens
litigieux doit avoir principalement lieu en nature (ATF 135 III 513 consid. 9.1
p. 530). Le jugement révocatoire n'a pas d'incidence sur la validité du
transfert de propriété de ces biens (ATF 136 III 341 consid. 3 p. 343). Il
constate que le créancier a le droit de les faire saisir et réaliser à son
profit, comme s'ils appartenaient encore au débiteur (ATF 47 III 89 consid. 1
p. 92), sans poursuite préalable (ATF 43 III 212 spéc. p. 214 s.; Pierre-Robert
Gilliéron, Poursuite pour dettes, faillite et concordat, 5e éd. 2012, n° 2968
p. 580).

4.2. Subsidiairement, si la restitution en nature est impossible, parce que les
biens ne se trouvent plus dans le patrimoine du bénéficiaire, elle doit avoir
lieu par équivalent, sous la forme de dommages-intérêts au sens des art. 97 ss
CO, dont le montant correspond à la contre-valeur des biens à la date où
l'impossibilité est survenue (ATF 136 III 341 consid. 4.1 p. 344; 135 III 513
consid. 9.3 p. 531 et consid. 9.6 p. 535; 30 II 559 consid. 5 et 6 p. 563; dans
la procédure de saisie, cf. arrêts 5A_748/2013 du 25 novembre 2014 consid. 5.1;
5A_28/2012 du 13 mars 2012 consid. 5; 5C.219/2006 du 16 avril 2007 consid.
4.2). A cet égard, le jugement révocatoire est de nature condamnatoire (
HENRI-ROBERT SCHÜPBACH, Droit et action révocatoires, 1997, n° 43 s. ad art.
291 LP). Il confère au créancier (demandeur dans l'action révocatoire) une
créance en paiement d'une somme d'argent à l'encontre du tiers (défendeur dans
l'action révocatoire). Si le tiers n'exécute pas son obligation, le créancier
peut faire procéder à l'exécution forcée de la créance par la voie de la
poursuite pour dettes (art. 38 al. 1 LP; Thomas Bauer, in: Basler Kommentar,
Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs II, Art. 159-352 SchKG, 2e éd.
2010, n° 15 ad art. 291 LP; Schüpbach, op. cit., n° 228 ad art. 291 LP; Hanz
Peter Berz, Der paulianische Rückerstattungsanspruch, 1960, note 34 p. 146). En
tant qu'il condamne le tiers à verser des dommages-intérêts au créancier, le
jugement révocatoire constitue un titre de mainlevée définitive (art. 80 al. 1
LP; Bauer, op. cit., n° 15 ad art. 291 LP).

5. 
La recourante fait valoir que la décision entreprise viole l'art. 80 LP. Elle
explique que selon le titre de mainlevée produit par la poursuivante, son
obligation de payer 1'000'000 fr. ne serait exécutoire qu'à partir du moment où
elle ne remet pas la cédule hypothécaire à l'office. Le jugement révocatoire
serait ainsi assorti d'une condition suspensive négative. La recourante ajoute
que selon la doctrine majoritaire et la jurisprudence, la mainlevée définitive
de l'opposition ne peut pas être accordée sur la base d'une condamnation
conditionnelle, non assortie d'un jugement au fond constatant la réalisation de
la condition, sauf s'il s'agit de faits notoires ou non contestés, ce qui ne
serait pas le cas en l'espèce. En définitive, elle explique qu'elle est "
disposée à remettre à l'office des poursuites la cédule hypothécaire dès
qu'elle en recouvrera la possession ". L'arrêt entrepris contreviendrait encore
à l'art. 80 LP, dans la mesure où il n'y aurait pas identité entre la
poursuivante (B.________) et la personne désignée dans le titre comme
créancière (l'office), ce que le juge de la mainlevée aurait dû examiner
d'office.

6. 
A juste titre, la juridiction précédente a constaté que le jugement du 24
février 2011 constitue un titre de mainlevée définitive, en tant qu'il condamne
A.A.________ à verser 1'000'000 fr. en mains de l'office, faute pour elle de
restituer la cédule hypothécaire (cf. supra consid. 4.2). Les critiques de la
recourante à propos du mode de preuve requis pour établir l'absence de
restitution de la cédule sont, en l'occurrence, dénuées de pertinence. Il
ressort en effet de sa propre argumentation qu'elle n'a pas remis cette cédule
à l'office. Vu le contenu du titre de mainlevée, en particulier le texte clair
du chiffre III de son dispositif - qu'il n'appartient pas au juge de la
mainlevée définitive d'interpréter (cf. supra consid. 3) -, elle doit donc
procéder au versement de 1'000'000 fr. en mains de l'office. C'est le lieu de
préciser que, contrairement à ce qu'elle affirme, l'office n'est nullement
désigné comme créancier de ce montant. Le jugement du 24 février 2011 condamne
simplement la recourante à verser ce montant en mains de l'office, qui doit
procéder à son encaissement. Toutefois, dans le cadre de l'action révocatoire,
c'est bien la demanderesse, en l'occurrence B.________, qui est devenue
titulaire d'une prétention en dommages-intérêts à l'encontre du tiers (cf.
supra consid. 4.2). Il en découle que le grief tiré de l'absence d'identité
entre le créancier désigné dans le titre et la poursuivante tombe à faux.
Vu ce qui précède, c'est à bon droit que l'autorité cantonale a levé
définitivement l'opposition.

7. 
En conclusion, le recours doit être rejeté (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas
lieu d'allouer des dépens à l'intimée, qui n'a pas été appelée à répondre sur
le fond et a succombé quant au sort de la requête d'effet suspensif.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal vaudois et à l'Office des poursuites du district
de Nyon.

Lausanne, le 28 avril 2015

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : von Werdt

La Greffière : Bonvin

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