Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.484/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
5A_484/2015

Arrêt du 2 octobre 2015

IIe Cour de droit civil

Composition
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
Marazzi et Herrmann.
Greffière : Mme de Poret Bortolaso.

Participants à la procédure
A.A._______,
représentée par Me Romain Jordan, avocat,
recourante,

contre

B.________,
intimée,

C.A.________, représenté par Me Thomas Barth, avocat,

Service de protection des mineurs,

Objet
récusation d'un expert (droit de garde),

recours contre la décision de la Cour de justice
du canton de Genève, Chambre de surveillance,
du 13 mai 2015.

Faits :

A. 
D.________, né en 1999, et E._______, né en 2002, sont les enfants de
A.A.________ et C.A._______.

 Dans le cadre du divorce de leur parents, prononcé le 6 janvier 2005,
l'autorité parentale et la garde sur les enfants ont été attribuées à
A.A.________.

 Celle-ci a également une fille, F._______, née en 2008 de sa relation avec
G._______.

B.

B.a. Par décision de clause-péril prise le 15 octobre 2013, le Service de
protection des mineurs (ci-après: SPMi) a provisoirement retiré à A.A.________
la garde sur ses enfants, ordonné leur placement en foyer et suspendu le droit
aux relations personnelles entre ces derniers et leur mère.

 Cette mesure a été adoptée suite au signalement de la situation des trois
mineurs par un médecin et un assistant social du Kinderspital de Zurich, sur la
base des explications données par le père de F.________.

B.b. Le 5 décembre 2013, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant
(ci-après: Tribunal de protection) a ratifié cette clause et, sur mesures
provisionnelles, a retiré le droit de garde de A.A.________ sur son fils
D.________, levé avec effet immédiat le placement de D.________ et E.________
auprès du foyer, placé l'aîné auprès de son père avec un droit de visite en
faveur de sa mère et accordé un droit de visite usuel à C.A.________ sur son
fils E._______, qui demeurait avec sa mère. Le Tribunal a par ailleurs ordonné
la mise sur pied de différents traitements sur les plans médical, psychologique
et logopédique; il a également donné acte à la mère des enfants de son
intention d'entreprendre un suivi thérapeutique, instauré une curatelle
d'assistance éducative, de même qu'une curatelle en vue de surveiller le
placement de D.________ chez son père et désigné les curateurs à cet effet.

 La question de la garde de F.________ fait l'objet d'une procédure distincte
(cf. procédure 5A_485/2015).

B.c. Par ordonnance rendue sur mesures superprovisionnelles le 20 novembre
2014, le Tribunal de protection a retiré la garde et le droit de déterminer le
lieu de résidence des enfants à leur mère, placé ses fils en foyer avec effet
immédiat, aménagé un droit de visite à quinzaine en Point rencontre et instauré
une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles
entre les enfants et leur mère.

B.d. Un rapport d'expertise psychiatrique familiale a été établi le 27 novembre
2014 par la Dresse B._______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie,
en co-expertise avec la Dresse I.________, spécialiste FMH en psychiatrie et
psychothérapie de l'enfant et de l'adolescent.

 Pour effectuer cette expertise, les experts ont mené trois entretiens
individuels avec la mère, A.A.________, un entretien avec la mère en présence
de ses deux fils, un entretien de la mère en présence de ses trois enfants, un
entretien avec la mère en présence de D.________, un entretien de la mère en
présence de E.________, deux entretiens individuels avec C.A._______, père des
garçons, un entretien avec celui-ci en présence de ses deux fils. Les experts
ont en outre eu des contacts avec les différents professionnels entourant les
enfants (notamment: psychologue, pédiatres, éducateurs, psychiatres,
pédopsychiatre, neuropédiatre, intervenant en protection de l'enfance au SPMi,
logopédiste).

 Sur la base de l'ensemble de ces entrevues ainsi que du dossier que leur a
remis le Tribunal de protection, les experts ont conclu, s'agissant de
D.________, à ce que sa garde soit attribuée à sa mère, avec un large droit de
visite au père, à l'instauration d'un traitement psychiatrique en sa faveur
ainsi qu'à la désignation d'un médecin responsable de ses soins afin de les
organiser en fonction de ses besoins. S'agissant de E.________, les experts ont
recommandé le maintien de son placement, avec un droit de visite restreint
limité à une nuit maximum alternativement chez son père et sa mère, relevant
que le maintien de la garde à sa mère avec son frère D.________ constituerait
une entrave à son développement déjà altéré; un placement chez son père n'était
pas une option valable dès lors que celui-ci n'avait pas de place pour
l'accueillir; les experts ont également préconisé une évaluation régulière des
visites chez A.A.________, ainsi qu'une restriction du contact avec celle-ci en
cas de violence verbale ou physique. Les experts ont enfin recommandé
l'instauration d'une curatelle d'organisation et de surveillance du droit de
visite, de même qu'une curatelle d'assistance éducative; ils ont également
préconisé que les parents des garçons entreprennent un travail centré sur leur
parentalité, le thérapeute devant avoir accès aux informations officielles
concernant toute la situation familiale.

B.e. Le SPMi a rendu son rapport le 9 décembre 2014.

B.f. Le 11 décembre 2014, le Tribunal de protection a tenu une audience en
présence de A.A.________, de C.A.________, du père de l'enfant F.________, du
curateur de représentation des enfants, et de la représentante du SPMi.

 Il a procédé à l'audition de la Dresse B._______, chargée de l'expertise
psychiatrique familiale.

B.f.a. L'intéressée a confirmé les termes et conclusions de son expertise
établie le 27 novembre 2014 en précisant que l'intervention de la Dresse
I.________ relevait de la supervision.

 L'expert a recommandé le retour de D.________ aux côtés de sa mère, dans la
mesure où loin d'elle, il se désorganisait au point de ne plus arriver à
penser, ni à avoir de liens avec l'extérieur, ce qui l'amenait à commettre des
actes non anodins, voire délictueux, s'il était placé dans une autre structure.
Les effets que ses comportements pouvaient avoir sur autrui, ainsi que les
difficultés en découlant dans sa gestion des relations avec autrui,
inquiétaient l'expert, qui doutait que D.________, sévèrement atteint dans sa
capacité d'autonomisation, ait un jour les capacités de se séparer de sa mère.
L'expert a insisté sur la gravité de la situation, indiquant que les mesures
préconisées pour l'enfant D.________ étaient plus d'ordre palliatif que
curatif.

 S'agissant de la relation entre D.________ et E.________, l'expert a fait état
d'un attachement réciproque entre les deux frères, en relevant également que
leur relation était marquée par une emprise et une domination de D.________ sur
E.________, qui empêchait celui-ci de s'autonomiser et l'atteignait dans sa
capacité de penser. Souffrant d'une inhibition allant au-delà de celle que l'on
trouvait chez un adolescent de son âge, l'expert a indiqué qu'un placement lui
serait profitable en ce qu'il lui permettrait d'avoir un espace à lui, de
s'émanciper, et d'être confronté à des adultes susceptibles de faire preuve
d'autorité.

 De manière générale, l'expert a indiqué ne pas être favorable à ce que les
relations entre les trois enfants se déroulent sous la forme de week-ends
entiers auprès de leur mère.

B.f.b. Concernant la forme et les modalités d'exécution de son expertise, la
Dresse B.________ a précisé que l'utilisation de la forme conditionnelle
procédait d'un choix rédactionnel, mais n'impliquait aucun doute sur le contenu
des observations formulées.

 Elle a par ailleurs exposé être parvenue aux conclusions exprimées dans son
rapport sur la base de l'ensemble des éléments recueillis au cours des
entretiens menés. Le signalement émis par G._______, père de F.________,
n'était qu'un élément parmi d'autres.

B.f.c. En cours d'audience, à plusieurs reprises durant l'audition de l'expert,
la juge a rappelé au conseil de A.A.________ que la procédure concernait les
mineurs D.________ et E.________, que l'expert avait clairement indiqué que le
signalement effectué par G.________ n'avait pas été un élément prédominant dans
les constats et les conclusions effectués dans son rapport, que l'objectif de
l'audience était de trouver des solutions conformes à l'intérêt des enfants,
dont la situation était préoccupante, et non pas dans l'intérêt exclusif de
leurs parents, et que le conseil était invité à tenir compte de ces éléments.

 A la suite de ces rappels, le conseil de A.A.________, avec l'appui du conseil
de C.A.________, a sollicité la récusation de la juge.

 La Dresse B.________ a alors exprimé être choquée de ces échanges, a insisté
sur le fait que les enfants allaient mal et a déclaré revendiquer leur droit
d'aller mieux.

B.g. A l'issue de l'audience, la cause a été transmise au Président de
juridiction pour instruction sur récusation.

 Les conseils des parents ont sollicité le prononcé de mesures provisionnelles,
s'agissant notamment du droit de visite du père des deux garçons.

C.

C.a. Par courriers du 11 décembre 2014, A.A.________ et C.A.________ ont tous
deux sollicité la récusation de l'expert, ainsi que l'annulation et le
renouvellement des expertises qu'il avait diligentées, au motif que
l'impartialité de l'intéressée avait été gravement mise à mal par les
déclarations tenues au terme de l'audience du 11 décembre 2014, ainsi que par
celles faites à l'attention de leurs conseils en sortant de la salle
d'audience, à savoir : " c'est vraiment honteux et dégueulasse, ce que vous
avez fait ".

C.b. Le 6 janvier 2015, la Dresse B.________ a contesté la demande de
récusation, arguant de son impartialité. Revenant sur le contexte de son
audition du 11 décembre 2014, elle a relevé les circonstances difficiles de
celle-ci, précisant qu'après avoir longuement répondu au Tribunal de protection
sur une question aussi difficile que la psychopathologie et les carences
parentales de A.A.________, le conseil de celle-ci lui avait demandé de manière
répétitive de développer un seul point de son expertise. Elle avait en outre
été choquée par l'interruption brutale de ladite audience à la veille des fêtes
de Noël, annulant ainsi tout le processus engagé par différents professionnels
depuis plusieurs semaines, alors qu'il était dans l'intérêt des enfants de
comprendre comment les protéger et de leur permettre de voir leurs parents
durant cette période de fêtes. Les propos qui lui étaient reprochés visaient la
manière dont les conseils de C.A.________ et A.A.________ avaient agi, et non
les parents eux-mêmes ou les autres personnes présentes dans la salle.

C.c. Le SPMi a rendu un rapport complémentaire le 15 janvier 2015, concluant
notamment à la confirmation de l'expertise réalisée par la Dresse B.________ et
de ses conclusions.

C.d. A.A.________, C.A.________, le curateur des enfants et la représentante du
SPMi ont été entendus par le Tribunal de protection le 15 janvier 2015.

C.e. Par ordonnance du 15 janvier 2015, le Tribunal de protection a rejeté les
requêtes formulées par C.A.________ et A.A.________ tendant à la récusation de
la Dresse B.________ (ch. 1), à l'annulation, au renouvellement de l'expertise
et à la privation de la rémunération de l'expert (ch. 2), renonçant à
l'audition de D.________ et E.________ (ch. 3).

 La juridiction a par ailleurs réglé la garde des enfants sur mesures
provisionnelles, maintenant notamment le retrait du droit de garde et du droit
de déterminer le lieu de résidence de A.A.________ sur ses fils D.________ (ch.
4) et E.________ (ch. 5), levé le placement de ceux-ci auprès du foyer
J.________ (ch. 6), ordonné le placement à l'essai du mineur D.________ chez sa
mère (ch. 7) et du mineur E.________ chez son père (ch. 8), accordé à
C.A.________ un droit de visite sur son fils D.________ (ch. 9), accordé à la
mère un droit de visite sur son fils E.________ (ch. 10), maintenu la curatelle
d'organisation et de surveillance des relations personnelles entre E.________
et sa mère (ch. 11), instauré une curatelle d'organisation et de surveillance
des relations personnelles entre D.________ et son père (ch. 12), maintenu la
curatelle aux fins d'organiser et de surveiller le placement de D.________ chez
sa mère (ch. 13), instauré une curatelle aux fins d'organiser et de surveiller
le placement de E.________ chez son père (ch. 14)

C.f. A.A.________ et C.A.________ ont tous deux formé recours contre
l'ordonnance, sollicitant l'annulation des chiffres 1 à 5 et 7 à 14 de son
dispositif.

 La Cour de justice a rejeté les recours le 13 mai 2015. L'arrêt a été notifié
au conseil de A.A.________ le 18 mai 2015 .

D. 
Agissant par la voie du recours en matière civile le 17 juin 2015, A.A.________
(ci-après: la recourante) conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et à sa
réforme en ce sens que l'expert est récusé et son rapport retiré de la
procédure, le dossier étant pour le surplus retourné à l'autorité cantonale
pour nouvelle décision au sens des considérants.

 Des déterminations n'ont pas été demandées.

Considérant en droit :

1. 
Le recours a été déposé dans une boîte postale le dernier jour du délai, avec
mention et signature de deux témoins; le même jour, le mandataire de la
recourante a adressé le mémoire de recours par fax au Tribunal de céans. Il
faut ainsi admettre que l'écriture a été déposée à temps (art. 100 al. 1 LTF;
ATF 124 V 372 consid. 3b; arrêt 1B_488/2011 du 2 décembre 2011 consid. 1.2). Le
recours est par ailleurs dirigé contre une décision rendue en matière de
protection de l'enfant (art. 72 al. 2 let. b ch. 6 LTF) par le tribunal
supérieur du canton statuant dans le cadre d'une procédure de recours (art. 75
al. 1 LTF; ATF 137 III 424 consid. 2.2); le litige, de nature non pécuniaire,
porte principalement sur la récusation d'un expert (art. 92 al. 1 LTF; cf. ATF
138 V 271 consid. 2.2.1; arrêts 5A_254/2014 du 5 septembre 2014 consid. 1;
5A_48/2014 du 27 mai 2014 consid. 3), les autres conclusions formulées par la
recourante en constituant les conséquences logiques (annulation de l'expertise
et renvoi de la cause à l'instance cantonale pour nouvelle décision sur la
garde des enfants à titre provisionnel); la recourante a enfin la qualité pour
recourir (art. 76 al. 1 LTF).

2. 
La recourante dénonce la violation des art. 29 al. 1 Cst. et 6 CEDH ainsi que
l'application arbitraire des art. 46 de la Loi d'application du code civil
suisse et d'autres lois fédérales en matière civile du canton de Genève
(ci-après: LACC; RSGE E 1 05) et 47 let. f CPC, soutenant que l'expert aurait
dû être récusé en raison de son comportement et de sa prévention. La recourante
axe sa motivation exclusivement sur les déclarations tenues par l'expert à
l'issue de l'audience du 11 décembre 2014 ainsi que sur sa détermination du 6
janvier 2015 relative à la demande de récusation formée à son encontre. C'est
donc sous ce seul angle que sera examinée l'éventuelle prévention de
l'intéressée.

2.1. La cour cantonale a avant tout souligné qu'il convenait de replacer les
déclarations contestées de l'expert dans leur contexte (en audience: " Je
revendique le droit des trois enfants d'aller bien. Je suis donc
particulièrement choquée de ce qui vient de se passer [i.e. requête de
récusation formée à l'encontre de la magistrate], étant précisé que D.________,
E.________ et F.________ vont très mal "; à l'issue de l'audience, à
l'intention des conseils de la recourante et de C.A.________: " c'est vraiment
honteux et dégueulasse, ce que vous avez fait ") : au terme d'une audience
tendue et longue, dont l'objet était de parvenir à trouver une solution
adéquate pour les enfants à la veille des fêtes de Noël, la suspension de la
procédure avait été ordonnée suite à la demande de récusation formée par la
recourante à l'encontre de la magistrate de première instance. Le Tribunal
cantonal a considéré qu'en exprimant, dans ce contexte particulier, son souci
pour les enfants, dont la situation était alarmante et dont le sort allait être
différé suite à la récusation requise, l'expert avait certes fait état d'une
critique de l'acte de procédure ainsi formé par les conseils des recourants,
mais jugé que l'avis exprimé se limitait toutefois à cette issue procédurale
ainsi qu'aux conséquences qui en résultaient pour les enfants, qu'elle
considérait préjudiciables à l'intérêt de ceux-ci. Selon la juridiction
cantonale, les déclarations de l'expert ne contenaient aucune critique à
l'égard des parties elles-mêmes ou de leur conseils de sorte qu'aucune
prévention à l'encontre de ceux-ci ne pouvait lui être reprochée. Les propos
tenus par l'expert ne permettaient donc pas de douter de son impartialité et
n'avaient aucune incidence sur l'expertise réalisée et ses conclusions.

2.2. La recourante affirme en substance que les garanties d'un procès
équitables ne seraient plus respectées: la cour cantonale aurait minimisé
l'attitude de l'expert de façon absolument inadmissible, alors que la
prévention de celui-ci était objectivement donnée. Cette prévention se
matérialiserait d'abord dans les propos inacceptables tenus par l'intéressée à
l'égard des conseils de la recourante et de C.A.________ à l'issue de
l'audience du 11 décembre 2014 et dans ses déterminations du 6 janvier 2015 sur
la demande de récusation formée à son encontre: leur comportement serait ainsi
" brutal ", " choquant ", " dégueulasse ", " honteux ", manquant d'" éthique "
et de " respect " ou encore de " considération " envers les enfants,
qualificatifs dépassant manifestement la limite de l'inimitié au sens de l'art.
47 al. 1 let. f CPC. Contrairement ensuite à ce que retenaient les magistrats
cantonaux, l'audience n'aurait pas été " longue " et son contexte n'excuserait
en rien le comportement de l'expert: il serait en effet choquant de l'admettre
au motif que les questions posées n'auraient soi-disant pas été opportunes ou
mettraient à mal la patience de l'intéressée, étant précisé que la recourante
avait exercé son droit à l'interrogatoire de manière respectueuse et
professionnelle. La prévention de l'expert se concrétiserait enfin par son
comportement: celui-ci serait en effet sorti de son rôle, se positionnant bien
plus comme une thérapeute partiale que comme un expert neutre, faisant preuve
de distance face aux enjeux de la procédure. Ses déterminations du 6 janvier
2015, virulentes alors que presque un mois avait passé, plaideraient ainsi
fortement en faveur d'un sentiment tenace d'inimitié et de rancoeur.

2.3.

2.3.1. En matière de protection de l'enfant, les dispositions relatives à la
procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par
analogie (art. 314 al. 1 CC). En tant qu'il ne contient pas de règles
particulières, ce qui est le cas pour la récusation (arrêt 5A_254/2014 du 5
septembre 2014 consid. 2.1 et la référence), le droit fédéral attribue aux
cantons la compétence de régir la procédure dans ce domaine. Si les cantons
n'en disposent pas autrement, les normes de la procédure civile s'appliquent
par analogie (art. 450f CC); dès lors que celles-ci sont applicables à titre de
droit cantonal supplétif (cf. ATF 140 III 167 consid. 2.3 [art. 122 al. 2 CPC];
arrêt 5A_254/2014 précité et les exemples donnés), le Tribunal fédéral ne peut
intervenir que si l'autorité précédente a versé dans l'arbitraire ou enfreint
d'autres droits constitutionnels (ATF 139 III 225 consid. 2.3; 138 I 232
consid. 2.4 et les arrêts cités), et autant qu'un tel grief a été invoqué et
régulièrement motivé (art. 106 al. 2 LTF; cf. sur ces exigences, notamment: ATF
133 II 249 consid. 1.4.2; 134 II 244 consid. 2.2 et 349 consid. 3).

 La LACC prévoit à ses art. 43 ss des règles particulières quant à l'expertise
ordonnée devant le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (Titre III
" Procédure devant le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant ",
Chapitre I " Principes - Règles de procédure ", Section 4 " Preuve - Expertise
"). Selon l'art. 46 al. 1 LACC, " [ p]our les mêmes causes que pour les juges,
la récusation d'un expert peut être sollicitée par requête motivée, adressée au
Tribunal de protection, dans les 10 jours de sa nomination ou de la
connaissance d'une cause de récusation ". Dès lors qu'aucune disposition
particulière n'est prévue dans la LACC sur la récusation des juges, il faut
admettre que ce sont les motifs de récusation prévus par le code de procédure
civile (art. 47 CPC) qui s'appliquent par analogie, à titre de droit cantonal
supplétif.

2.3.2. L'art. 47 al. 1 CPC énumère divers motifs de récusation aux let. a à f,
la let. f imposant la récusation lorsque les magistrats ou fonctionnaires
judiciaires " pourraient être prévenus de toute autre manière, notamment en
raison d'un rapport d'amitié ou d'inimitié avec une partie ou son représentant
". Cette disposition concrétise les garanties découlant des art. 30 al. 1 Cst.
et 6 § 1 CEDH. Certes, dès lors que l'expert ne fait pas partie du tribunal, sa
récusation ne s'examine pas au regard de l'art. 30 al. 1 Cst. mais sous l'angle
de l'art. 29 al. 1 Cst. garantissant l'équité du procès (ATF 125 II 541 consid.
4a p. 544). S'agissant des exigences d'impartialité et d'indépendance requises
d'un expert, cette disposition assure toutefois au justiciable une protection
équivalente à celle de l'art. 30 al. 1 Cst. (ATF 127 I 196 consid. 2b p. 198),
qui a, de ce point de vue, la même portée que l'art. 6 § 1 CEDH (ATF 134 I 20
consid. 4.2; 138 I 1 consid. 2.2). La jurisprudence rendue en application de
cette norme reste ainsi pertinente (arrêts 4A_3/2012 du 27 juin 2012 consid.
2.3; 5A_109/2012 du 3 mai 2012 consid. 3.1, avec les citations).

 Les dispositions précitées permettent aux parties d'exiger la récusation d'un
expert dont la situation ou le comportement sont de nature à faire naître un
doute sur son impartialité. Ces garanties tendent notamment à éviter que des
circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en
faveur ou au détriment d'une partie. Elles n'imposent pas la récusation
seulement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition
interne de l'expert ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances
donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale.
Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en
considération; les impressions individuelles d'une des parties au procès ne
sont pas décisives (ATF 138 I 1 consid. 2.2; 137 I 227 consid. 2.1; 136 III 605
consid. 3.2.1; 136 I 207 consid. 3.1; 134 I 20 consid. 4.2).

 Le juge ou l'expert doit faire preuve de la distance professionnelle
nécessaire et s'exprimer ainsi avec la retenue requise. Si des réactions
d'impatience sont inévitables de la part d'êtres humains exerçant des fonctions
judiciaires, ceux-ci doivent veiller à garder leur sang-froid en toutes
circonstances, sans que cela ne les empêche toutefois de porter des
appréciations critiques sur la manière dont une partie mène le procès (arrêts
1P.687/2005 du 9 janvier 2006 consid. 7.2; 1P.314/2001 du 2 juillet 2001
consid. 1; Wullschleger, in Sutter-Sohm et al. (éd.), Kommentar zur
schweizerischen Zivilprozessordnung [ZPO], 2e éd. 2013, n. 33 ad art. 47 CPC);
ils ne peuvent en revanche généralement émettre un jugement de valeur sur la
partie elle-même sans donner l'apparence d'une certaine prévention (ATF 127 I
196 consid. 2d; 120 V 357 consid. 3b; arrêt 1B_303/2008 du 25 mars 2009 consid.
2.4; WULLSCHLEGER, op. cit., ibid; KIENER, in Oberhammer et al. (éd.), ZPO,
Schweizerische Zivilprozessordnung, 2e éd. 2014, n. 19 ad art. 47 CPC).

2.4. Il a été établi que les déclarations contestées de l'expert ont été
formulées à l'issue d'une audience tendue et longue, dont l'objet était de
parvenir à trouver une solution adéquate pour les enfants à la veille des fêtes
de Noël. Dès lors qu'en cours d'audience, les conseils de la recourante et de
son ex-époux ont sollicité la récusation de la magistrate en charge du dossier,
l'audience a été suspendue et la question du sort des enfants différée. Ainsi
que l'ont parfaitement souligné les instances précédentes, les déclarations
contestées de l'expert doivent être replacées dans ce cadre particulier. L'on
ne peut alors qu'en déduire que ces propos, que l'on peut certes juger
maladroits, visaient exclusivement le comportement procédural des conseils
précités et sa conséquence principale, à savoir le report de la problématique
du sort des enfants (ainsi, pour replacer les critiques de la recourante dans
leur contexte: " j'étais interloquée que l'on puisse interrompre brutalement
toute discussion constructive "; " l'audience s'est terminée par une demande
brutale de récusation " [cf. déterminations du 6 janvier 2015, p. 2]; " c'est
vraiment honteux et dégueulasse ce que vous avez fait " [à la sortie de la
salle d'audience, à l'intention des conseils de la recourante et de son
ex-époux]; " je m'attendais à des conseils plus éthiques et respectueux non
seulement des enfants mais également des professionnels engagés dans cette
procédure " [déterminations du 6 janvier 2015, p. 2]). Ces déclarations
exprimaient manifestement l'inquiétude de l'intéressée face au sort de ces
enfants, dont la situation est à l'évidence particulièrement préoccupante, et
s'articulaient uniquement dans leur intérêt qui, il sied de le souligner,
demeure l'objectif principal des conclusions établies par ce type d'expertise
judiciaire. Dans ces conditions, l'on ne saurait retenir l'apparence d'une
prévention de la part de l'expert, étant au demeurant précisé que son rapport a
été réalisé fin novembre 2014, à savoir antérieurement aux déclarations qui lui
sont reprochées. Il n'y a en conséquence pas lieu de retirer l'expertise du
dossier et de retourner la cause à l'instance cantonale.

3. 
En définitive, le recours doit être rejeté, aux frais de son auteur (art. 66
al. 1 LTF). Aucun dépens n'est attribué à l'intimée qui n'a pas été invitée à
se déterminer.

 

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à C.A.________, au Service de
protection des mineurs et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre de
surveillance.

Lausanne, le 2 octobre 2015

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : von Werdt

La Greffière : de Poret Bortolaso

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