Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.689/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
4A_689/2015

Arrêt du 16 juin 2016

Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Kiss, présidente,
Klett et Kolly.
Greffière: Mme Monti.

Participants à la procédure
1. C1.________,
2. C2.________,
tous deux représentés par Me Christian Dénériaz,
demandeurs et recourants,

contre

1. D1.________, et
h oirie de D2.________, à savoir:

2. D3.________ et
3. D4.________,
tous trois composant par ailleurs l'hoirie de
D5.________,
tous trois représentés par Me Henri Baudraz,
défendeurs et intimés.

Objet
action en dommages-intérêts; départ du délai de prescription,

recours en matière civile contre l'arrêt rendu le
1er octobre 2015 par la Cour d'appel civile du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Faits :

A.

A.a. C1.________ et C2.________ sont copropriétaires d'une parcelle dans la
commune de... (VD). Sur ce bien-fonds a été érigé un bâtiment dans lequel les
deux prénommés vivent et exploitent une épicerie. Le fonds voisin, au moment
des faits litigieux, appartenait à D1.________, D2.________ et D5.________.
Les deux parcelles sont séparées par un mur construit dans les années
cinquante, situé sur la parcelle des deux commerçants. Initialement, aucune
construction n'était adossée à ce mur. La partie du bâtiment des commerçants
attenante à la parcelle de la famille D.________ a été construite après février
1986 (période de mise à l'enquête). En 1997, les commerçants ont aménagé un
"laboratoire" et un local de stockage dans la partie du bâtiment qui touche
directement le mur mitoyen.

A.b. Par requête du 7 décembre 2004 complétée ultérieurement, les commerçants
ont initié devant la justice de paix une procédure contre la famille D.________
tendant notamment au paiement de 2'296 fr. 15 et de 100 fr. (I) ainsi qu'à
l'arrachage de leur haie de laurelles (II), subsidiairement à l'enlèvement des
racines ayant d'ores et déjà causé un dommage (III). A l'appui de ces
conclusions, les commerçants alléguaient en substance que les racines d'une
haie de laurelles plantée sur la parcelle voisine avaient perforé le mur
mitoyen et causé un dommage aux installations sanitaires de leur laboratoire en
écrasant un tuyau.
Dans le cadre de cette procédure, les commerçants ont déposé le 11 septembre
2007 une requête de mesures provisionnelles concluant notamment à ce que la
famille D.________ reçoive l'ordre de faire tailler immédiatement au ras du sol
la haie de laurelles s'appuyant sur le mur mitoyen. Au chiffre 14 de cette
requête, les commerçants alléguaient que si la procédure pendante portait sur
un dommage de 2'296 fr. 15, le dommage total était bien plus important. Ils
évoquaient un dommage supérieur à 43'000 fr. sur la base d'un devis du 7
novembre 2006 chiffrant à 43'287 fr. 50 le coût d'assainissement du mur.
Dans un rapport d'expertise complémentaire du 23 mars 2009, l'architecte
A.________ expliquait que les racines de laurelles étaient la cause première de
l'excès d'humidité régnant dans le laboratoire des commerçants. Même après le
retrait des racines, l'humidité pénétrait dans le mur. Il était dès lors
nécessaire de déplacer la haie de laurelles et, après terrassement, d'effectuer
des travaux d'étanchéité sur le mur litigieux en posant un nouveau crépi, une
couche d'étanchéité et un drainage.
Le 11 septembre 2009, les voisins intimés ont passé expédient sur les
conclusions I et II de la requête du 7 décembre 2004.

A.c. Le 7 mai 2010, la justice de paix a effectué un constat d'urgence à la
requête des commerçants. Elle a constaté que de l'eau s'infiltrait dans leur
laboratoire par le mur mitoyen.
Les commerçants ont sollicité trois devis. Le premier, du 21 mai 2010, chiffre
à 11'812 fr. le coût de remplacement de meubles; le deuxième, du 11 octobre
2010, s'élève à 1'835 fr. 10 pour des installations sanitaires. Quant au
troisième, du 18 octobre 2010, il évalue à 35'525 fr. 05 le coût de réfection
de la protection du mur enterré.

B.

B.a. Les commerçants C1.________ et C2.________ (ci-après: les demandeurs) ont
saisi l'autorité de conciliation le 29 novembre 2011, puis déposé une demande
le 6 juin 2012 devant le Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois.
Ils concluaient à ce que D1.________, D2.________ et D5.________ (ci-après: les
défendeurs) soient condamnés à leur payer 49'172 fr. 15, montant résultant de
l'addition des trois devis précités. Les demandeurs se réservaient le droit
d'exiger des dommages-intérêts si leur commerce devait être fermé pendant les
travaux de réfection du mur.
Les défendeurs ont déposé une réponse concluant au rejet. Ultérieurement, ils
ont produit un certificat attestant du décès de D2.________, dont les héritiers
étaient D6.________, D3.________ et D4.________; ceux-ci lui ont dès lors
succédé dans la procédure.
Le Tribunal a rejeté la requête des défendeurs visant à limiter la procédure à
l'examen des exceptions de chose jugée et de prescription. Il a désigné un
expert (l'architecte E.________) qui s'est adjoint les services d'un
paysagiste. L'expert a déposé son rapport principal le 25 juillet 2013 et un
complément le 10 juin 2014.
En substance, l'expert observe que l'arrachage de la haie de laurelles
intervenu ensuite du passé-expédient a été effectué de manière incomplète. Des
racines continuent de pousser dans le terrain et sont toujours présentes dans
le mur. Sur la base du constat d'urgence de la justice de paix, l'expert
retient que des eaux se sont infiltrées dans le laboratoire des demandeurs au
printemps 2010; après examen des échantillons de tuyaux et de racines conservés
par le demandeur, l'expert et son adjoint confirment que des racines ont
perforé une canalisation. Les racines de laurelles ne sont toutefois pas la
cause unique de ces infiltrations. Le mur a été conçu pour abriter des locaux
non chauffés tels que des caves ou des dépôts, et non des locaux d'exploitation
chauffés. L'isolation thermique et l'étanchéité sont défectueuses et ne
permettent pas d'assurer l'exploitation d'un local chauffé. L'absence de
drainage et une mauvaise ventilation sont aussi incriminées.
Des travaux pour assurer l'isolation et l'étanchéité du mur auraient dû être
entrepris en 1997 lors de la transformation du local, ou à tout le moins en
2009 après l'expertise du 23 mars 2009. Des infiltrations peuvent toujours se
produire du fait de la structure du mur en maçonnerie brute, qui n'offre aucune
protection contre l'eau et le froid. Les racines qui continuent de pousser
représentent un risque. L'expert estime à 45'000 fr. le coût des travaux
d'assainissement du mur (cf. au surplus consid. 3.2 infra).

B.b. Par jugement du 3 février 2015, le Tribunal d'arrondissement a rejeté la
demande. En substance, il a rejeté l'exception de chose jugée et considéré que
l'action intentée le 29 novembre 2011 était prescrite. Après avoir rappelé que
l'art. 60 al. 1 CO impartit un délai d'un an pour agir à compter de la
connaissance du dommage, le Tribunal a constaté que les demandeurs avaient reçu
le 7 novembre 2006 un devis chiffrant leur dommage à 43'287 fr. 50. Ils avaient
produit ce devis à l'appui de leur requête provisionnelle du 11 septembre 2007.
L'action était prescrite depuis le 11 septembre 2008 à tout le moins.

B.c. Les demandeurs ont déféré ce jugement à la Cour d'appel civile du Tribunal
cantonal vaudois, qui l'a confirmé par arrêt du 1 ^er octobre 2015. En bref,
cette autorité a retenu que dans l'hypothèse la plus favorable aux demandeurs,
ceux-ci avaient eu connaissance du dommage objet de leur demande au plus tard
le 18 octobre 2010, date à laquelle ils avaient réuni tous les devis précis sur
la base desquels ils avaient chiffré leurs prétentions. Dès ce moment en tout
cas, ils n'avaient aucun motif de différer leur action. Certes, le dommage dont
il était question résultait de la pousse de racines dans le mur mitoyen,
phénomène qui pouvait être qualifié d'évolutif. L'expertise révélait toutefois
que la situation s'était stabilisée depuis le dégât d'eau survenu au printemps
2010, les racines n'ayant ensuite plus causé de nouvelles infiltrations d'eau
ni été le motif de nouvelles dégradations. Dès le printemps 2010 à tout le
moins, les demandeurs ne pouvaient rien déduire en leur faveur du principe
selon lequel la prescription d'un dommage évolutif ne court pas avant le terme
de son évolution.

C. 
Les demandeurs ont saisi le Tribunal fédéral d'un recours en matière civile
dans lequel ils concluent à l'admission de leur action tendant au paiement de
49'172 fr. 15.
Les défendeurs ont conclu au rejet du recours. Leur avocat a annoncé que
D6.________, épouse de feu D2.________, était décédée le 21 décembre 2015 et
avait laissé pour seuls héritiers ses deux enfants D3.________ et D4.________.
Par ailleurs, D5.________ était aussi décédée en cours d'instance, ses
héritiers étant sa fille D1.________ et ses deux petits-enfants D3.________ et
D4.________.
L'autorité précédente s'est référée à son arrêt.

Considérant en droit :

1. 
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur
le principe, notamment celles afférentes au délai (art. 100 al. 1 LTF en lien
avec l'art. 45 al. 1 LTF) et à la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr.
(art. 74 al. 1 let. b LTF).
Les héritiers des défuntes D5.________ et D6.________ leur succèdent de plein
droit dans la procédure à laquelle ils étaient au demeurant déjà parties (art.
17 al. 3 PCF par renvoi de l'art. 71 LTF). Le  rubrum du présent arrêt tient
compte de ces modifications.

2.

2.1. Les demandeurs dénoncent un "établissement inexact des faits" à deux
égards. D'une part, les juges cantonaux auraient résumé imparfaitement leur
procédé provisionnel du 11 septembre 2007 en retenant qu'il faisait état d'un
dommage supérieur à 43'000 fr. pour l'assainissement du mur; en réalité, les
demandeurs avaient à l'époque renoncé à chiffrer leur dommage, qui était loin
d'être connu ou même estimable. D'autre part, les juges auraient omis de
préciser que pour l'expert E.________, le principal poste du dommage, soit la
réfection du mur, n'était pas suffisamment connu, notamment en raison de la
nécessité de poser une isolation thermique.

2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF); il tient compte des faits figurant dans le
jugement de première instance dans la mesure où ils ont été repris au moins
implicitement par l'arrêt attaqué (arrêt 4A_182/2014 du 16 juillet 2014 consid.
1.2; sous l'OJ, ATF 129 IV 246 consid. 1). Conformément à ce principe, les
faits résumés ci-dessus intègrent aussi des éléments figurant dans le jugement
du Tribunal d'arrondissement (ayant trait principalement au résumé de
l'expertise).
Cela étant, l'autorité de céans peut rectifier ou compléter les faits retenus
dans l'arrêt attaqué s'ils ont été établis en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF ou de façon manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire. Il
incombe en principe au recourant de dénoncer ces vices, l'autorité de céans
pouvant toutefois intervenir d'office (cf. art. 97 al. 1 et art. 105 al. 2 LTF;
ATF 133 IV 286 consid. 6.2). La correction du vice doit être susceptible
d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 in fine LTF). Le grief
d'arbitraire dans l'établissement des faits doit satisfaire aux exigences de
motivation plus strictes posées par l'art. 106 al. 2 LTF; le recourant doit
invoquer expressément ce droit constitutionnel (art. 9 Cst.) et exposer de
manière claire et circonstanciée, si possible documentée, en quoi consiste la
violation (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266; 133 II 249 consid. 1.4.3).

2.3. La recevabilité du grief prête à discussion au regard des règles de
motivation rappelées ci-dessus. Quoi qu'il en soit, les précisions que les
demandeurs souhaiteraient apporter sont de toute façon sans pertinence pour
l'issue de la cause dans la mesure où elles ne permettraient pas de retenir
leur thèse d'un dommage évolutif. Dans la perspective de cette démonstration
(consid. 3.2 infra), l'on précisera ici que dans leur requête provisionnelle du
11 septembre 2007, les demandeurs ont insisté sur la nécessité d'effectuer de
suite les travaux requis (taille de la haie au ras du sol et pose d'une bâche
étanche sur le mur) en ajoutant le commentaire suivant: "Il en va de la
prévention d'un dommage beaucoup plus important comme de la poursuite de
l'exploitation de notre commerce".
L'on mentionnera encore que l'expert, interpellé sur le devis chiffrant à
35'525 fr. le coût d'assainissement du mur, a notamment fait la remarque
suivante:
(...) il n'est pas fait allusion à l'isolation thermique qu'il est nécessaire
de poser également afin d'éviter la création de ponts de froid (...).
(...)
Même si le montant du devis devait faire l'objet d'un affinage en fonction de
la réalisation d'une isolation thermique (non comprise dans le devis), le
montant estimatif général pour une exécution offrant le maximum de garantie
pourrait bien atteindre le montant d'environ frs 45'000.-. Un appel d'offre est
nécessaire (...). "

3.

3.1. En droit, les demandeurs dénoncent une violation de l'art. 60 al. 1 CO.
Cette disposition - dont l'applicabilité à l'action intentée par les demandeurs
n'est pas contestée - énonce que l'action en dommages-intérêts se prescrit par
un an à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi
que de la personne qui en est l'auteur, et, dans tous les cas, par dix ans dès
le jour où le fait dommageable s'est produit.
Selon la jurisprudence, le créancier connaît suffisamment le dommage lorsqu'il
apprend, concernant son existence, sa nature et ses éléments, les circonstances
propres à fonder et à motiver une demande en justice (ATF 131 III 61 consid.
3.1.1). Eu égard à la brièveté du délai de prescription, on ne saurait se
montrer trop exigeant à l'égard du lésé; suivant les circonstances, un certain
temps doit lui être laissé pour lui permettre d'estimer l'étendue définitive du
dommage, seul ou avec le concours d'un tiers (ATF 111 II 55 consid. 3a p. 57).
Si le législateur cherchait à éviter, pour la sécurité du droit, que le lésé ne
tarde à agir, il n'a pu vouloir l'obliger à intenter action avant de connaître
les éléments essentiels de son préjudice, ce qui le contraindrait à réclamer
d'emblée le maximum de ce à quoi il pourrait avoir droit, ou à amplifier ses
conclusions au fur et à mesure que les suites du fait dommageable se déclarent;
or, de tels procédés présentent de graves inconvénients sous l'angle de
l'administration de la justice (ATF 74 II 30 consid. 1a p. 34 s.).
Le dommage n'est réputé réalisé qu'au moment où il s'est manifesté
complètement. Lorsque l'ampleur du préjudice dépend d'une situation qui évolue,
le délai de prescription ne court pas avant le terme de cette évolution. Tel
est le cas notamment du préjudice consécutif à une atteinte à la santé dont il
n'est pas possible de prévoir d'emblée l'évolution avec suffisamment de
certitude. En particulier, la connaissance du dommage résultant d'une
invalidité permanente suppose que l'état de santé soit stabilisé sur le plan
médical et que le taux de l'incapacité de travail soit fixé au moins
approximativement; le lésé doit en outre savoir, sur la base des rapports
médicaux, quelle peut être l'évolution de son état (arrêt 4A_136/2012 du 18
juillet 2012 consid. 4.2; 112 II 118 consid. 4 p. 123; 92 II 1 consid. 3 p. 4).
La jurisprudence vise essentiellement des cas de préjudice consécutif à une
atteinte à la santé de la victime, mais elle peut inclure d'autres situations
où un acte illicite exerce sur le patrimoine un effet médiat dans une mesure
qu'il n'est pas possible de prévoir avec assez de sécurité (ATF 108 Ib 97
consid. 1c p. 100).

3.2. En l'occurrence, les demandeurs ont subi le 7 mai 2010 une infiltration
d'eau dans leur laboratoire. Selon l'expert, cette infiltration est
partiellement imputable aux racines de laurelles plantées sur le fonds des
défendeurs, racines qui ont perforé le mur mitoyen et une canalisation. Les
demandeurs exigent que les défendeurs assument le coût de remplacement du
mobilier prétendument endommagé par l'eau (11'812 fr. selon devis du 21 mai
2010), le coût de travaux sur des installations sanitaires du laboratoire
(1'835 fr. 10 selon devis du 11 octobre 2010), et le coût de réfection du mur
mitoyen (35'525 fr. 05 selon devis du 18 octobre 2010). Ils n'ont agi en
justice que le 29 novembre 2011, chiffrant leur dommage sur la base de ces
trois devis.
Pour justifier l'intervalle supérieur à un an entre le dernier devis et le
dépôt de la requête de conciliation, les demandeurs font valoir que les racines
des plantations poussent constamment et créent une situation évolutive propre à
repousser le point de départ de la prescription.
Les dégâts que l'infiltration d'eau a pu causer sur le mobilier, les
installations sanitaires ou autres équipements situés dans le laboratoire des
défendeurs sont en principe constatables rapidement, sans qu'on ne discerne une
situation évolutive. Se pose la question du risque de nouvelles infiltrations.
La cour cantonale relève que les racines ont continué de pousser, mais n'ont
plus causé de nouvelles infiltrations ni été le motif de nouvelles dégradations
depuis le printemps 2010. On ne saurait toutefois ignorer le risque évoqué par
l'expert, qui fait état de possibles nouvelles infiltrations en raison de la
perméabilité du mur, en maçonnerie brute. Après avoir affirmé dans un premier
temps que les racines de laurelles avaient pu être enlevées et ne
représentaient plus un motif de dégradation du mur, l'expert a effectué deux
nouveaux constats locaux et nuancé ses propos en ce sens que des racines
continuent de pousser dans le terrain et représentent un risque de perforation
pour ce genre de mur, mal protégé contre les perforations de racines (jgt 1 ^
re instance p. 7 et complément d'expertise ch. 1 ad all. 6 et 10 et ch. 2 ad
all. 10). Il semble qu'il existe ainsi un risque de nouvelles infiltrations
partiellement imputables aux racines des plantations venant du fonds voisin.
Quoi qu'il en soit, ce type de risque ne justifie pas de repousser indéfiniment
le départ du délai de prescription. Les décisions cantonales n'évoquent qu'un
seul précédent d'infiltration d'eau ayant donné lieu à la requête du 7 décembre
2004, dont il ressortait que l'épisode remontait à janvier 2003. Dans ce
contexte, les demandeurs ne pouvaient se fonder sur ce précédent et sur le
risque aléatoire d'une nouvelle infiltration d'eau pour repousser leur demande
en réparation du dommage. La réserve émise dans leur procédé provisionnel de
2007 en prévision d'un dommage beaucoup plus important (consid. 2.3 supra) ne
leur est d'aucun secours. Au passage, on ne peut s'empêcher de discerner une
certaine contradiction à reporter le dépôt d'une action en raison d'un prétendu
dommage évolutif, alors que le principal poste du dommage dont les demandeurs
exigent réparation est l'assainissement du mur susceptible de causer de
nouveaux dommages.
Les demandeurs croient pouvoir justifier leur retard en arguant du fait que la
Présidente du Tribunal d'arrondissement elle-même a jugé nécessaire d'établir
par expertise la cause de l'infiltration d'eau survenue en mai 2010 avant de
pouvoir statuer sur l'exception de prescription. En réalité, la cause de
l'infiltration ne faisait aucun doute pour les demandeurs; ils ont ainsi
allégué qu'elle était due à des racines ayant régulièrement perforé le mur
mitoyen, dénonçant le fait que les travaux d'assainissement du mur n'avaient
jamais pu être effectués (all. 6-8 de la demande). C'est du reste sur la base
d'échantillons de tuyaux et de racines conservés par le demandeur que l'expert
a retenu que des racines avaient perforé une canalisation le 7 mai 2010 (jgt 1
^re instance p. 7); les demandeurs ne peuvent dès lors prétendre avoir été dans
l'incertitude. Rien n'indique au demeurant qu'ils aient recueilli ou cherché à
recueillir des renseignements spécialisés avant d'ouvrir action le 29 novembre
2011.
Enfin, contrairement à ce que plaident les demandeurs, l'expert E.________ n'a
pas affirmé que le dommage concernant le mur mitoyen ne pouvait pas encore être
déterminé; tout au plus a-t-il recommandé une mesure supplémentaire (isolation
thermique) non prévue par le devis, en précisant que celui-ci devrait faire
l'objet d'un "affinage". Il n'y a pas, là non plus, matière à reporter le point
de départ de la prescription.
La demande en paiement du 29 novembre 2011 est fondée sur trois devis dont le
plus récent date du 18 octobre 2010. Les deux décisions cantonales ne
retiennent aucune activité entre cette date et le dépôt de la demande. Dans un
tel contexte, force est de constater que le délai de prescription annuel était
manifestement échu lorsque l'action a été intentée. La cour cantonale n'a pas
enfreint l'art. 60 al. 1 CO en admettant l'exception de prescription.

4. 
En définitive, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
En conséquence, les demandeurs et recourants supporteront solidairement les
frais de la présente procédure ainsi que l'indemnité due aux défendeurs et
intimés pour leurs frais d'avocat (art. 66 al. 1 et 5, art. 68 al. 1, 2 et 4
LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 
Un émolument judiciaire de 2'500 fr. est mis à la charge des recourants,
solidairement entre eux.

3. 
Les recourants sont condamnés solidairement à verser aux intimés, créanciers
solidaires, une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens.

4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour
d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 16 juin 2016

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Kiss

La Greffière: Monti

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