Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.677/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
4A_677/2015

Arrêt du 22 septembre 2016

Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Kiss, présidente,
Kolly et Hohl.
Greffière: Mme Monti.

Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Michel De Palma,
recourante,

contre

B.________ SA, représentée par
Me Joël Vanvlaenderen,
intimée.

Objet
contrat de travail; salaire,

recours contre la décision rendue le 10 novembre 2015 par la Chambre civile du
Tribunal cantonal du canton du Valais.

Faits :

A. 
A.________ (ci-après: l'employée) a travaillé du 1 ^er janvier 2006 au 30
novembre 2012 comme peintre en bâtiment au service de la société B.________ SA.
Cette dernière (ci-après: l'employeuse) effectue des travaux de plâtrerie et de
peinture, conformément au but social inscrit au Registre du commerce.
Chaque mois, l'employeuse a opéré une retenue de 1% sur le salaire brut de
l'employée, déduction qui était intitulée "contributions sociales" dans les
fiches de salaire. Le total perçu s'élève à 4'151 fr. 05.
Ces retenues n'avaient pas fait l'objet d'un accord spécifique entre les
parties. L'employeuse ne les a pas reversées au Bureau des Métiers à
l'attention de la Commission professionnelle paritaire du second oeuvre
valaisan (ci-après: la commission paritaire). Elle a cessé depuis lors de les
prélever.

B.

B.a. L'employée a saisi l'autorité de conciliation le 13 novembre 2013, puis a
porté l'action devant le Tribunal du travail du canton du Valais, concluant au
paiement de 4'150 fr. plus intérêts à titre de remboursement des retenues
salariales pratiquées indûment.
L'employeuse a conclu au rejet en invoquant la prescription pour les
prétentions se rapportant à la période de janvier 2006 à novembre 2008 (1'863
fr. 35). Elle a en outre invoqué la compensation à hauteur de 1'254 fr. 30.
Le Tribunal a interrogé les parties. L'administrateur de l'employeuse a admis
que celle-ci était soumise à la Convention collective de travail du second
oeuvre romand (CCT). Il a déclaré que la retenue servait à assurer le salaire
des travailleurs à 100% en cas d'incapacité de travail. Il a concédé qu'aucun
accord spécifique n'avait été prévu avec les employés. Interpellé sur
l'affectation des prélèvements dans la comptabilité, il a répondu qu'ils
restaient dans les avoirs de la société et qu'il n'était pas capable de dire
quel montant cela représentait.
L'employée a pour sa part déclaré que d'après les informations de son syndicat,
le prélèvement était une déduction légale obligatoire destinée à la formation
des apprentis. Elle a admis avoir touché l'intégralité de son salaire en
janvier et février 2011, alors qu'elle était absente pour cause d'accident.
Elle n'avait appris qu'à la fin des rapports de travail la nature des
prélèvements et le fait qu'ils n'avaient pas été reversés au Bureau des
métiers.
Le Tribunal du travail a rejeté la demande par jugement du 24 mars 2015. Il a
considéré que l'employeuse, qui n'était pas membre du Bureau des métiers, était
néanmoins soumise à la CCT car des arrêtés du Conseil fédéral avaient étendu
cette convention au domaine d'activité de l'employeuse, soit les travaux de
peinture et de plâtrerie. L'art. 42 CCT imposait aux travailleurs de verser
0,7% de leur salaire brut, selon décompte AVS, retenu à chaque paie par
l'employeur pour les frais d'exécution, ainsi que 0,3% de leur salaire brut,
selon décompte AVS, retenu à chaque paie par l'employeur pour les frais de
formation et de perfectionnement professionnel. L'employeuse était donc
légitimée à prélever une retenue de 1% sur les salaires bruts versés, mais elle
aurait dû la reverser à la commission paritaire, ce qu'elle n'avait pas fait.
L'employeuse avait tenté de justifier le prélèvement en évoquant une
compensation pour les salaires versés à 100% pendant les périodes d'incapacité
de travail. Le tribunal n'était pas convaincu par cette explication fournie a
posteriori. Il relevait qu'aucun accord particulier préalable n'avait été
conclu avec l'employée et que l'art. 35 al. 1 CCT imposait à l'employeur de
verser au travailleur malade 100% du salaire assuré pendant le délai d'attente,
à l'exception de deux jours de carence. L'employeuse avait donc conservé sans
droit les montants prélevés, mais l'employée n'en était pas créancière: seule
la commission paritaire pouvait agir contre l'employeuse.

B.b. L'employée a déposé un recours stricto sensu (art. 319 let. a CPC) auprès
du Tribunal cantonal valaisan, en concluant derechef au paiement de 4'150 fr.
plus intérêts. Elle a dénoncé une violation de l'art. 322 CO et reproché aux
premiers juges d'avoir effectué une constatation manifestement inexacte des
faits (art. 320 let. b CPC) en considérant que le prélèvement opéré par
l'employeuse était destiné à la commission paritaire; en réalité, il s'agissait
d'une auto-assurance complémentaire pratiquée sans droit par l'employeuse, qui
devait lui rembourser les prélèvements illicites.
La Chambre civile du Tribunal cantonal a relevé que durant les rapports de
travail, l'employée s'était accommodée du prélèvement qu'elle pensait être une
contribution professionnelle conforme à ses devoirs syndicaux. L'employeuse
affirmait qu'il s'agissait d'une sorte d'assurance en cas d'incapacité de
travail, mais elle s'était abstenue d'obtenir l'accord exprès des salariés et
de la mentionner comme telle sur les fiches de salaire, utilisant une
dénomination qui prêtait à confusion. Elle n'avait fourni aucune explication
relative à l'affectation des prélèvements litigieux dans sa comptabilité et ne
pouvait pas dire quel montant cela représentait dans ses comptes, confirmant
ainsi qu'aucune destination particulière n'était prévue. Dès lors, les premiers
juges pouvaient conclure sans arbitraire que l'unique déduction de 1% pratiquée
par l'employeuse était une contribution professionnelle découlant des
obligations de la CCT. Au demeurant, poursuivait la Chambre, l'art. 42 CCT
s'appliquait directement et de façon impérative aux parties. Affirmer que
l'unique prélèvement de 1% pratiqué sur les salaires n'était pas destiné à
couvrir les cotisations professionnelles prévues par la CCT reviendrait à
admettre une clause illicite qui, par l'effet de l'art. 357 CO, devrait être
remplacée par l'obligation de cotisation prévue à l'art. 42 CCT. En tout état
de cause, l'employée n'était donc pas titulaire d'une créance envers son
ancienne employeuse. Le prélèvement litigieux était une contribution
professionnelle légitime, de sorte que le grief de violation de l'art. 322 al.
1 CO tombait à faux.

C. 
L'employée a interjeté un recours en matière civile et un recours
constitutionnel subsidiaire à l'issue desquels elle demande au Tribunal fédéral
d'ordonner la production de la comptabilité de l'employeuse pour les années
2006 à 2012 et, sur le fond, de condamner l'employeuse à lui verser 4'150 fr.
plus intérêts (recours en matière civile), respectivement d'annuler l'arrêt
attaqué et de renvoyer la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision
(recours constitutionnel).
Par courrier du 1 ^er septembre 2016, l'employeuse a produit une convention
qu'elle a signée le 31 août 2016 avec la commission paritaire.

Considérant en droit :

1. 
A teneur de l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut
être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. En
l'occurrence, la recourante entend tirer argument d'un fait nouveau postérieur
au jugement attaqué. Il s'agit d'un véritable  novum qui ne peut pas être
introduit devant l'autorité de céans (cf. ATF 139 III 120 consid. 3.1.2). La
pièce et les explications données dans le courrier d'accompagnement sont ainsi
irrecevables.

2. 
La recourante admet que la valeur litigieuse (4'150 fr.) n'atteint pas le seuil
de 15'000 fr. requis en matière de droit du travail (art. 74 al. 1 let. a LTF
en lien avec l'art. 51 al. 1 let. a LTF). Elle plaide que le recours serait
néanmoins recevable au motif que la contestation soulèverait une question
juridique de principe au sens de l'art. 74 al. 2 let. a LTF.
Selon la jurisprudence, cette hypothèse est réalisée lorsqu'il est nécessaire,
pour résoudre le cas d'espèce, de trancher une question juridique qui donne
lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un
éclaircissement de la part du Tribunal fédéral, en tant qu'autorité judiciaire
suprême chargée de dégager une interprétation uniforme du droit fédéral (ATF
141 III 159 consid. 1.2; 139 III 209 consid. 1.2).
La recourante plaide qu'il s'agit de déterminer si un prélèvement pratiqué sans
droit, qui devrait en soi être restitué au travailleur, peut être compensé avec
un prélèvement relevant de dispositions légales en vigueur dont l'employeur ne
s'est pas acquitté; cette question juridique présenterait une incidence majeure
pour tous les autres salariés de l'entreprise et pour les syndicats, de sorte
que la solution à donner aurait valeur de principe.
En réalité, cette soi-disant question de principe a trait aux conséquences du
caractère impératif d'une disposition de la convention collective applicable en
la matière (cf. art. 357 CO; ATF 134 I 269 consid. 6.3.1), ce qui ne nécessite
aucun éclaircissement de la part du Tribunal fédéral.
Cet élément implique déjà l'irrecevabilité du recours en matière civile.
Subsiste la voie subsidiaire du recours constitutionnel (art. 113 LTF).

3. 
Le recours constitutionnel peut être formé uniquement pour violation des droits
constitutionnels (art. 116 LTF). Ce type de grief est soumis à une exigence de
motivation très stricte: le recourant doit invoquer le droit constitutionnel
dont il se prévaut et expliquer de manière circonstanciée en quoi consiste sa
violation. Le Tribunal n'examine pas d'office si l'arrêt attaqué enfreint le
droit constitutionnel; il se contente d'examiner les griefs dûment motivés
(art. 106 al. 2 LTF, en lien avec l'art. 117 LTF; ATF 133 II 396 consid. 3.2).
Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité pr
écédente (art. 118 al. 1 LTF). Il peut rectifier ou compléter les constatations
de l'autorité précédente si les faits ont été établis en violation du droit au
sens de l'art. 116 LTF (art. 118 al. 2 LTF), soit en particulier de manière
arbitraire, ce qui correspond à la notion de "manifestement inexacte" figurant
à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 140 III 115 consid. 2 p. 117; 135 III 397 consid.
1.5).
Une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. lorsqu'elle est
manifestement insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation de
fait, viole de façon crasse une norme ou un principe juridique indiscuté, ou
heurte de façon choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Il ne
suffit pas que les motifs de la décision soient insoutenables; celle-ci doit
être arbitraire dans son résultat. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait
qu'une autre solution soit concevable ou même préférable (ATF 140 III 16
consid. 2.1).

4.

4.1. La recourante reproche au Tribunal cantonal d'avoir violé l'interdiction
de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Plus précisément, elle lui fait grief de ne pas
avoir retenu la version de l'employeuse selon laquelle le prélèvement de 1%
devait assurer le paiement des salaires à 100% en cas d'incapacité de travail.
En tant qu'employée, la recourante aurait une créance en remboursement de ce
prélèvement pratiqué sans base légale ni contractuelle. Cette question n'aurait
rien à voir avec le prélèvement de 1% que l'art. 42 CCT imposait de prélever et
verser à la commission paritaire. Le Tribunal cantonal aurait procédé indûment
à une compensation entre les deux types de créances.

4.2. La cour cantonale a invoqué deux arguments alternatifs pour rejeter la
demande. On peut se demander si le recours satisfait aux exigences de
motivation strictes s'agissant du premier des deux arguments. Quoi qu'il en
soit, le recours doit de toute façon être rejeté. La recourante elle-même
soutient que l'affectation invoquée par l'employeuse ("assurance" pour financer
des salaires à 100% en cas d'incapacité de travail) était dépourvue de base
légale ou contractuelle. Elle ne discute pas non plus l'analyse des juges
valaisans quant à l'applicabilité de la CCT et au caractère impératif et direct
de l'art. 42 CCT, qu'ils ont déduit de l'art. 357 CO, dont la recourante
n'affirme pas qu'il a été appliqué arbitrairement. Dans ces circonstances, il
n'était pas arbitraire d'en déduire que le régime impératif de l'art. 42 CCT,
contraignant le travailleur à verser 1% de son salaire brut à la commission
paritaire, par l'intermédiaire de l'employeuse, devait se substituer à la
volonté d'affecter cette contribution à une autre fin sans qu'une base légale
ou contractuelle ne le prescrive. En conséquence, la cour pouvait sans
arbitraire conclure que la commission paritaire était créancière des
prélèvements effectués.

4.3. La recourante objecte que le "comportement malhonnête" de l'employeuse l'a
privée du remboursement "de tout ou partie" de sa contribution professionnelle,
auquel elle avait droit en tant qu'employée syndiquée. Elle cite l'art. 2 du
Règlement d'application concernant l'utilisation des fonds paritaires du second
oeuvre valaisan, selon lequel "les contributions professionnelles encaissées
auprès de travailleurs membres d'une organisation syndicale sont rétrocédées
aux organisations syndicales concernées à raison de 80% dès le 1 ^er janvier
2014".
L'argument n'a pas été soulevé devant l'autorité précédente. Les décisions
cantonales ne mentionnent pas ce règlement qui, tel que cité dans le recours,
ne permet de toute façon pas de conclure à une créance directe de l'employée
contre l'employeuse, sans parler de la question du champ d'application
temporel. Même en se plaçant dans la perspective d'une éventuelle
responsabilité délictuelle, on ignore à quelle part de remboursement l'employée
syndiquée pourrait elle-même prétendre, étant entendu que son syndicat pourrait
en soi conserver une partie du remboursement.

5. 
La recourante invoque encore l'art. 36 Cst. régissant les conditions pour
restreindre les droits fondamentaux. Tel que formulé, le grief se confond avec
celui tiré de l'art. 9 Cst.

6. 
A l'appui de son recours en matière civile, la recourante a dénoncé une
violation de son droit à la preuve et des art. 152 CPC, art. 29 al. 2 Cst. et
art. 6 CEDH, en lien avec le refus des juges valaisans d'ordonner la production
de la comptabilité de l'employeuse. Elle a pris une conclusion en ce sens pour
l'un et l'autre recours, mais elle s'est abstenue de faire valoir ce grief dans
son recours constitutionnel. Quoi qu'il en soit, les juges valaisans n'ont pas
enfreint le droit constitutionnel en refusant d'ordonner la production d'une
telle preuve, alors que l'administrateur de l'employeuse a implicitement admis
lors de son audition qu'aucune rubrique spéciale n'avait été créée dans la
comptabilité pour le capital accumulé grâce à ces prélèvements.

7. 
En définitive, le recours en matière civile est irrecevable et le recours
constitutionnel subsidiaire doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable.
La recourante succombe. En conséquence, elle supportera les frais de la
présente procédure et versera à l'intimée une indemnité de dépens (art. 66 al.
1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1. 
Le recours en matière civile est irrecevable.

2. 
Le recours constitutionnel subsidiaire est rejeté dans la mesure où il est
recevable.

3. 
Les frais judiciaires, fixés à 500 fr., sont mis à la charge de la recourante.

4. 
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens.

5. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre
civile du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 22 septembre 2016

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Kiss

La Greffière: Monti

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