Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.369/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
4A_369/2015

Arrêt du 25 avril 2016

Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Kiss, présidente,
Klett et Kolly.
Greffière: Mme Monti.

Participants à la procédure
A.________ Ltd, représentée par Me François Roger Micheli,
recourante,

contre

Banque B.________, représentée par Me Guy Stanislas,
intimée.

Objet
mandat; devoir d'information de la banque,

recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 5 juin 2015 par la Chambre
civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Faits :

A.

A.a. La société C.________ SA, sise à Genève, était active dans la gestion de
fortune et les transactions financières. Au moment des faits exposés
ci-dessous, elle était administrée par D.________ et E.________. Elle a été
dissoute par jugement de faillite en 2003, puis radiée d'office en 2011.
Cette entité collaborait en tant que gérante externe avec divers établissements
bancaires, dont la succursale genevoise de Banque B.________, société anonyme
de droit anglais sise à Londres (ci-après: la banque). Celle-ci exerçait une
activité de banque dépositaire des avoirs des clients amenés par la gérante
externe.

A.b. En 1997 et 1998, la banque a fonctionné comme banque dépositaire d'un
fonds de droit étranger F1.________ qui avait été créé par la gérante externe.
Au sein de la banque, les responsables de la relation avec la gérante externe
ont constaté que ce fonds n'était pas performant et générait des pertes. De
fait, les détenteurs de parts ont enregistré des pertes comprises entre 40 et
90 %, pertes que l'administrateur D.________ leur a cachées en produisant de
faux relevés de compte.
Le fonds a été clôturé en 1999 en raison de sa faible performance et du fait
que la Commission fédérale des banques avait demandé sa transformation en fonds
de droit suisse, ce dont ne voulait pas la gérante externe.

A.c. En 1999, la banque a proposé à la gérante externe de remplacer ce fonds
par un nouveau fonds dénommé F2.________, qui a été déposé auprès de la banque
et administré par une société appartenant au même groupe bancaire (BB.________
SA). Cette solution permettait à la banque de mieux suivre et contrôler la
gestion du fonds.
Celui-ci a été liquidé à la fin de l'année 2000. Il n'avait pas connu le
développement espéré, en ce sens qu'il n'avait pas atteint la masse critique
pour être opérationnel.

A.d. En mars 2000, la gérante externe a créé le fonds F3.________, qui
promettait des bénéfices importants sur des opérations de change tout en
garantissant le capital investi grâce à une assurance américaine (...).
La banque a refusé d'être la dépositaire de ce fonds. La documentation remise
par D.________ n'avait pas satisfait H.________, collaborateur de la banque
rattaché au département chargé des relations avec les gérants externes, dont il
fut le directeur entre 2000 et 2002. Ni lui, ni les personnes qu'il avait
consultées - notamment sa collègue I.________ et un doctorant de l'Université
de Lausanne - n'avaient pu comprendre le fonctionnement du montage sophistiqué.
D.________ a confirmé que le prénommé avait trouvé ce produit "nébuleux et
obscur".
Le fonds fermé a été déposé auprès d'une banque au Luxembourg (Banque
X.________) et administré par l'entité qui administrait déjà le fonds
F1.________ (soit...).

A.e. Au cours de l'année 2000, D.________ a été l'objet de divers articles de
presse. La société C.________ SA était en effet devenue le principal sponsor
d'un club de football, et le prénommé négociait un partenariat avec
l'actionnaire principale du club. Dans ce contexte, la presse a évoqué un
enlèvement et une tentative de racket dont D.________ avait été victime en
1999. En mai 2000, le journal... s'est interrogé à cet égard sur les
"troublantes fréquentations" d'un homme d'affaires se prétendant irréprochable;
il était précisé que l'intéressé tardait à produire les attestations
nécessaires sur l'origine des fonds qu'il voulait investir dans le partenariat.
Deux semaines plus tard, le même journal relatait la démission de quatre
administrateurs du club de football, dont un s'inquiétait de l'arrivée de
D.________, qu'il ne jugeait pas à la hauteur du club et de l'actionnaire
majoritaire, "notamment en ce qui concerne la transparence"; un autre
administrateur déclarait toutefois ne pas avoir de suspicion à l'égard de
D.________. L'article de presse ajoutait que C.________ SA avait reçu une
commination de faillite pour un montant de 235'376 fr.
En juin 2000, le journal précité a annoncé la rupture de l'accord de
partenariat, expliquant que D.________ avait tardé à fournir les attestations
garantissant l'origine légale de l'argent qu'il devait apporter, pour
finalement produire une attestation où il figurait seul; il s'était ensuite
montré incapable de régler en temps utile la première tranche (4 millions de
fr.) de son investissement.
En octobre 2000, l'établissement bancaire... a résilié sa relation d'affaires
avec C.________ SA. Le directeur du département concerné a expliqué que cette
décision était due au risque d'atteinte à la réputation résultant des articles
de presse; il n'avait cependant à l'époque aucune raison de penser que
D.________ fût malhonnête à l'égard de ses clients.
D'autres banques auprès desquelles des clients de C.________ SA avaient déposé
leurs avoirs ont en revanche maintenu leurs relations avec cette société, soit
notamment....

A.f. Au début de l'année 2001, la société A.________ Ltd, sise aux Bermudes, a
cherché à investir sa fortune. Elle avait à l'époque comme ayant droit
économique J.________, citoyen hongrois ayant fait fortune en commercialisant
un logiciel informatique.
Le prénommé, qui n'avait pas de connaissances particulières en matière de
finance et d'investissements, est entré en contact avec C.________ SA, dont il
a rencontré les deux administrateurs. Il leur a demandé de faire établir par la
banque une lettre de recommandation portant sur leur société et sur eux-mêmes.
H.________ et I.________ ont établi une telle lettre en anglais, datée du 13
février 2001, dans laquelle ils décrivaient l'activité et l'organisation de la
gérante externe, présentaient le fonds F2.________ et mentionnaient que cette
société était membre de l'Association suisse des gérants de fortune dont elle
devait respecter le code de conduite. Au nom de la banque, les deux signataires
attestaient entretenir une très bonne relation avec la gérante externe et ses
administrateurs depuis le début de leur relation, soit depuis plus de deux ans;
ils se disaient heureux de pouvoir confirmer leur satisfaction dans l'évolution
de leurs affaires et l'"entrepreneurship" de ses administrateurs. Ils
précisaient que cette recommandation était rédigée à titre d'information et
n'emportait pas d'engagement de la part de la banque.
Aucun autre client de la banque n'a sollicité un tel document.

A.g. A la fin du mois de mars 2001, D.________, E.________ et H.________ se
sont rendus à Londres pour rencontrer J.________. Celui-ci souhaitait la
présence d'un représentant de la banque auprès de laquelle il envisageait
d'ouvrir un compte pour investir dans des fonds proposés par C.________ SA.
Au cours de cette rencontre, les deux administrateurs de la gérante externe ont
présenté les fonds de leur société, notamment le fonds F3.________.
H.________ a expliqué à J.________ que la banque ne serait aucunement impliquée
dans la gestion de ces fonds, qui était sous la seule responsabilité de la
gérante externe. Il n'a pas mentionné que le fonds F1.________ avait subi des
pertes et que la banque avait refusé de fonctionner comme dépositaire du fonds
F3.________. Il estimait ne pas avoir à le faire car il ne voulait pas
s'immiscer dans la gestion. De surcroît, le fait qu'il ne comprenait pas ce
dernier produit ne signifiait pas qu'il était mauvais; il avait été déposé
auprès d'une banque luxembourgeoise qui en avait visiblement compris le
fonctionnement. H.________ se sentait en quelque sorte vexé de ne pas avoir
compris le montage et se demandait si c'était lui qui ne comprenait pas ou s'il
devait réellement avoir des doutes. Quand J.________ lui a demandé s'il
risquait de perdre de l'argent, H.________ lui a répondu qu'il pouvait en
perdre ou en gagner; invité à préciser le montant de la perte maximale, il a
répondu 100 %.

A.h. C.________ SA faisait signer une formule d'"instructions d'investissement"
aux clients souscrivant des parts dans le fonds F3.________. Ces formules ont
connu trois versions. La première ne faisait aucune référence à la banque
dépositaire. Dès février 2001, il a été précisé que le gain recherché, soit 40
%, n'était garanti ni par la direction du fonds, ni par la banque dépositaire.
Enfin, dès août 2001, il a été mentionné que le remboursement de la valeur
initiale des parts n'était garanti ni par la direction du fonds, ni par la
banque dépositaire.

A.i. Le 18 avril 2001, A.________ Ltd (ci-après: la cliente) a ouvert une
relation avec la banque.
Le 18 juin 2001, la cliente a confié un mandat de gestion discrétionnaire à la
gérante externe, en vertu duquel 60 % environ des avoirs confiés devaient être
investis dans le fonds F3.________. A cette même date, la cliente a signé la
formule d'instructions d'investissement, par laquelle elle attestait notamment
avoir reçu toutes les explications nécessaires contenues dans un document
décrivant en détail le fonctionnement, les risques et les conditions du fonds.
Le même mois, elle a transféré 38 millions de dollars américains, avant de se
raviser et de réduire l'investissement à 15 millions de dollars environ. Elle a
placé 12 millions dans deux fonds (dont un sous-fonds de F2.________) et
conservé le solde en dépôt fiduciaire auprès de la banque.
En juillet 2001, la banque a accordé à la cliente un crédit lombard de 25
millions de francs, destiné à l'achat de parts dans les fonds F2.________ ou
F3.________ et garanti par le nantissement des titres achetés. De fait, 11
millions de dollars (soit à l'époque environ 20 millions de fr.) ont été
investis le même mois dans des parts du fonds F3.________.
Au 30 novembre 2001, le crédit était entièrement remboursé par le produit de la
vente des parts du sous-fonds précité et par les fonds du dépôt fiduciaire. Les
parts dans F3.________ s'élevaient à 206'098, en dépôt valeur de 12'681'609
dollars. L'investissement a augmenté à 236'958 parts au 31 décembre 2001, puis
à 241'384 parts au 31 janvier 2002 (dépôt valeur de 13'911'653 dollars).
En juin 2002, la banque a informé la cliente qu'elle n'entendait pas renouveler
la ligne de crédit. La cliente n'a pu revendre que 5870 parts F3.________ pour
le prix de 539'756 fr. en juillet 2002, conservant ainsi 235'514 parts
invendables dont la valeur a ensuite été jugée nulle.
Après que C.________ SA eut été déclarée en faillite, la cliente a récupéré
1'884'112 dollars en septembre 2008 et 443'637 dollars en juillet 2010.
En novembre 2009, les deux administrateurs de la gérante externe ont été
condamnés par la Cour correctionnelle genevoise pour escroquerie en lien avec
le fonds F3.________. Selon la brigade financière, il était impossible pour des
personnes sans connaissances financières spécifiques de déceler l'escroquerie.
Le prospectus indiquait que le capital était garanti, que le fonds gagne ou
perde en opérations de change.

B.

B.a. Le 17 novembre 2011, la cliente a assigné la banque devant le Tribunal de
première instance du canton de Genève. Elle concluait au paiement de 24'200'340
fr., dont à déduire 1'884'112 dollars (contrevaleur de 2'033'108 fr.) et
443'637 dollars (contrevaleur de 469'408 fr.), et requérait la mainlevée de
l'opposition au commandement de payer notifié à la banque le 3 août 2011.
La cliente a encore touché ultérieurement 219'261 fr. et réduit d'autant ses
conclusions.
Par jugement du 17 septembre 2014, le tribunal saisi a condamné la banque à
payer à la cliente 21'478'563 fr. plus intérêts et a prononcé la mainlevée de
l'opposition à due concurrence. En substance, il a jugé que la banque, à qui la
cliente avait demandé un conseil et montré ainsi la confiance particulière
qu'elle plaçait en elle, avait violé son devoir d'information en omettant de
transmettre à la cliente les renseignements dont elle disposait, à savoir
qu'elle ne comprenait rien au fonctionnement du fonds F3.________, considéré
comme du "bricolage"; qu'elle avait fait modifier les formulaires
d'instructions d'investissement; qu'un autre fonds avait dû être liquidé sur
ordre de la Commission fédérale des banques; et enfin, que la presse faisait
une réputation douteuse à l'administrateur D.________. Cette omission avait eu
pour conséquence que la cliente n'avait pas pu identifier le danger lié aux
placements dans le fonds F3.________. Le dommage, correspondant à la perte de
l'investissement après déduction des montants récupérés (24'200'340 fr. -
[2'033'108 fr. + 469'408 fr. + 219'261 fr.] = 21'478'563 fr.), était en
relation de causalité adéquate avec les omissions de la banque.

B.b. Statuant le 5 juin 2015 sur appel de la banque, la Cour de justice du
canton de Genève a réformé cette décision en rejetant entièrement la demande en
paiement intentée par la cliente. En substance, la Cour a exclu toute violation
du devoir d'information (cf. infra consid. 2.4).

C. 
La cliente a saisi le Tribunal fédéral d'un recours en matière civile tendant
principalement à faire condamner la banque au paiement de 21'478'563 fr. et à
lever l'opposition formée dans la poursuite en cours à due concurrence.
Après que la recourante eut fourni 65'000 fr. de sûretés en garantie des dépens
de la banque intimée, celle-ci a déposé une réponse dans laquelle elle conclut
au rejet du recours. L'autorité précédente s'est référée à son arrêt.
Sur requête de la recourante, l'effet suspensif a été octroyé par ordonnance
présidentielle du 30 novembre 2015.

Considérant en droit :

1. 
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont satisfaites
sur le principe, notamment celles afférentes au délai (art. 100 al. 1 LTF) et à
la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF).

2.

2.1. Le litige porte sur le point de savoir si la banque aurait dû informer la
cliente ou la mettre en garde compte tenu des connaissances dont elle
disposait.

2.2. Devant l'autorité de céans, la cliente n'invoque plus l'art. 11 LBVM (loi
fédérale sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières; RS 954.1) ni
l'art. 9 al. 2 aOB (ancienne ordonnance du 17 mai 1972 sur les banques et les
caisses d'épargne), dispositions dont la Cour de justice a exclu l'application.
Subsiste ainsi la question du devoir d'information fondé sur les règles du
mandat et le principe de la bonne foi.

2.3. A teneur de l'art. 398 al. 2 CO, le mandataire est responsable envers le
mandant de la bonne et fidèle exécution du mandat. Selon la jurisprudence, la
banque qui s'engage uniquement à exécuter les instructions ponctuelles d'un
investisseur, sans se charger d'un mandat de gestion, n'est pas tenue d'assurer
une sauvegarde générale des intérêts de son client. En principe, elle ne doit
fournir des renseignements que si son client le lui demande; s'il apparaît
toutefois qu'il n'a aucune idée des risques qu'il court, la banque doit l'y
rendre attentif. L'étendue de ce devoir s'apprécie plus sévèrement lorsque le
client spécule non seulement avec ses propres avoirs, mais aussi avec des
crédits ouverts par la banque (ATF 133 III 97 consid. 7.1.1).
Le devoir de fidélité n'impose pas non plus à la banque chargée d'exécuter des
ordres déterminés de conseiller spontanément le client sur les développements
probables des investissements choisis et sur les mesures à prendre pour limiter
les risques. Ces principes s'imposent encore plus strictement lorsque la
gestion a été confiée à un gérant indépendant. Le Tribunal fédéral a ainsi
admis qu'en présence d'un gérant externe au bénéfice d'une procuration très
large, la banque dépositaire des avoirs n'avait pas à rendre le client attentif
aux risques élevés qu'il encourait, ni à requérir son autorisation avant de
procéder aux opérations dont la réalisation lui avait été confiée par le
gérant. En d'autres termes, le banquier n'est pas le tuteur de son client; il
doit en principe exécuter les ordres licites qui lui sont régulièrement donnés
(arrêt 4C.108/2002 du 23 juillet 2002 consid. 2b, in Praxis 2003 244).
Lorsque le client adresse à la banque des ordres précis et inconditionnels, la
banque n'a un devoir d'information que dans des situations exceptionnelles,
soit lorsqu'en faisant preuve de l'attention requise, elle doit reconnaître que
le client n'a pas identifié un danger lié au placement, ou lorsqu'un rapport
particulier de confiance s'est développé dans le cadre d'une relation
d'affaires durable entre le client et la banque, en vertu duquel le premier
peut, sur la base des règles de la bonne foi, attendre conseil et mise en garde
même s'il ne le demande pas explicitement (ATF 133 III 97 consid. 7.1.2; arrêt
4A_271/2011 du 16 août 2011 consid. 3).

2.4. En l'occurrence, la Cour de justice a jugé que les parties étaient liées
par un contrat de dépôt bancaire auquel s'appliquaient les règles du mandat,
ainsi que par des contrats de commission conclus pour l'exécution des ordres et
par un contrat de nantissement relatif au crédit lombard. Cette relation de
type "execution only" - où la banque se charge uniquement d'exécuter les ordres
du client - n'emportait en principe pas un devoir d'information spontané de la
banque. Toutefois, la délivrance d'une lettre de recommandation puis la
participation d'un des signataires à la réunion londonienne de mars 2001
avaient créé un rapport de confiance accrue avec la banque, dont la cliente
pouvait se prévaloir. Encore fallait-il déterminer si la banque connaissait des
éléments dignes d'être communiqués à la cliente. Or, du point de vue de la Cour
de justice, une réponse négative s'imposait.
Les déclarations concordantes de trois employés de la banque et d'un
administrateur de la gérante externe attestaient que la collaboration entre ces
deux partenaires d'affaires était très bonne, en tout cas jusqu'à la fin de
l'année 2001. Les seules difficultés rencontrées avec la gérante externe
concernaient l'existence de débits sur quelques comptes, qui avaient été dûment
couverts à la demande de la banque.
La clôture du fonds F1.________ était due à sa faible performance et au fait
que la gérante externe refusait de le transformer en fonds de droit suisse
comme l'exigeait la Commission fédérale des banques. Il importait peu de savoir
dans quelle mesure la banque avait connaissance de l'ampleur des pertes subies
par ses clients; en effet, il est notoire que certains fonds sont performants
tandis que d'autres subissent des pertes plus ou moins importantes. Il ne
ressortait pas de la procédure que la gérante externe aurait essuyé d'autres
échecs de cet ordre, ses affaires étant au contraire très prospères.
Le fonds F2.________ avait été liquidé parce qu'il n'avait pas atteint la
taille critique pour être opérationnel, c'est-à-dire qu'il n'avait pas réuni
les capitaux nécessaires à son fonctionnement. Cette liquidation n'avait pas
généré de pertes pour les clients de la gérante.
S'agissant du fonds F3.________, la banque avait refusé d'en être la
dépositaire, mais le fonds avait pu être déposé auprès d'une autre banque et
semblait fonctionner. Le collaborateur H.________ avait expliqué qu'il était en
quelque sorte vexé de ne pas avoir compris le montage sophistiqué et s'était
demandé s'il n'avait simplement pas compris un montage complexe ou si ses
doutes étaient justifiés. La modification des formulaires d'investissement dans
ce fonds avait été sollicitée par la banque dépositaire du fonds, et non par la
banque détenant les avoirs de la cliente. Il n'était pas établi que cette
dernière aurait été informée des changements; elle n'avait au demeurant pas à
fournir de renseignements précis sur le fonctionnement du fonds, que la cliente
était réputée connaître.
Quant aux articles de presse, ils visaient pour l'essentiel la vie personnelle
de l'administrateur D.________, soit en particulier les agressions dont il
avait été victime et une transaction financière qui avait échoué. Ces
événements n'étaient pas de nature à remettre en cause son honnêteté et son
professionnalisme. Le seul élément qui aurait pu ébranler la réputation de la
gérante était la mention d'une commination de faillite, mais cet événement
n'avait eu aucune suite.
En bref, concluait la Cour de justice, la banque ne détenait pas d'informations
qu'elle aurait été tenue de communiquer à la cliente; aucune violation du
devoir d'informer ne pouvait lui être reprochée.

2.5. Recourante et intimée ne contestent pas les qualifications juridiques
données à leurs relations contractuelles, ni l'existence d'un rapport de
confiance accru. Est seul discuté le point de savoir si la banque détenait des
informations dignes d'être communiquées.

3.

3.1. La recourante dénonce un état de fait arbitraire et incomplet. La Cour de
justice aurait notamment constaté à tort que la collaboration entre la banque
et la gérante externe était très bonne jusqu'à fin 2001, l'unique difficulté
constatée ayant trait à quelques comptes débiteurs qui avaient été couverts
lorsque la banque l'avait demandé. La Cour aurait ignoré des éléments pourtant
pertinents des dépositions faites par des collaborateurs de la banque.

3.2. Le recours se réfère à des déclarations de témoins déjà alléguées dans la
demande et en appel pour asseoir l'affirmation selon laquelle la banque avait
observé un manque de professionnalisme de la gérante externe.
Ainsi, dans le cadre de l'enquête pénale, H.________ a fait les déclarations
suivantes le 15 janvier 2004:

" (...) Au départ, aux environs de 1997 ou 1998, sur les comptes des clients,
il y avait du... et un peu de F1.________ (...). (...) Pour moi et pour le
service, ces fonds étaient du 'bricolage', soit des fonds de placement sans
rendement vraiment intéressant. De plus, nous nous étions aperçus que
C.________ SA ne gérait pas bien ses portefeuilles, à savoir que C.________ SA
ne respectait pas les critères de gestion basés sur la diversification des
produits.
(...)
C.________ SA demandait des avoirs et des prêts à la Banque B.________ pour
leurs clients, contre le nantissement de leurs placements. Par conséquent, la
banque s'est intéressée davantage aux produits qu'étaient le... et le
F1.________ et est arrivée à la conclusion, comme mentionné ci-dessus, que pour
octroyer une avance aux clients, il nous fallait traiter avec des produits de
meilleure qualité.
(...)
Vu que les fonds dans ces comptes n'étaient encore une fois pas très fructueux,
nous avons proposé à C.________ SA de remplacer les fonds F1.________ par des
fonds de droit suisse qui seraient administrés par la BB.________ SA à...,
récemment créée. Ainsi, la banque pouvait avoir un contrôle sur le bon
fonctionnement et la qualité des produits.
(...) "
Réentendu le 3 mars 2004 en présence de l'inculpé D.________, ce témoin
précisait encore:

" (...) s'agissant des produits... et F1.________, je dirais que leur gestion
n'était pas très professionnelle, en ce sens que les propres règles
d'investissement de ces fonds en matière de diversification n'étaient pas
respectées. Par exemple, si un titre était acheté de manière plus importante
que prévue par le règlement, la correction ne venait pas immédiatement. (...) "
L'inculpé a relativisé ces critiques, tout en admettant qu'"à la fin le fonds
en actions n'était pas diversifié".
Au sein de la banque, K.________ s'est occupée de la relation avec la gérante
externe jusqu'à fin 1999, période à laquelle elle a transféré la clientèle y
relative à I.________. Celle-ci a évoqué un problème de comptes débiteurs
résolu sur intervention de la banque. Quant à la première, elle a déclaré ce
qui suit le 30 mars 2004 dans la procédure pénale:

" (...) J'étais également chargée du suivi des comptes des fonds 'F1.________'
administrés par.... A un moment donné, il m'a semblé que MM. D.________ et
E.________ étaient un peu 'perdus' avec la gestion de ces fonds. Par exemple,
cela traînait pour avoir la valeur nette d'inventaire et certaines pertes
faisaient souci. Je leur ai alors suggéré, pour qu'ils bénéficient des conseils
et du suivi de la part de la Banque B.________ et afin d'améliorer la
performance de leurs fonds, de terminer la relation avec... et qu'ils créent de
nouveaux fonds auprès de BB.________ SA à.... MM. D.________ et E.________ ont
suivi mes conseils et se sont exécutés. Cela devait permettre à la banque de
mieux suivre la gestion des fonds. (...) "
H.________ s'est encore exprimé en ces termes sur le fonds F3.________
(déposition précitée du 15 janvier 2004) :

" (...) la Banque B.________ était le premier établissement bancaire auquel
C.________ SA demandait d'être dépositaire du fonds. J'étais donc, en vertu de
ma fonction dans cette banque, le premier interlocuteur de ce nouveau produit
de placement (...). J'ai reçu par la suite des documents remis par D.________
mais ils ne 'tenaient pas la route'. Je n'arrivais pas à comprendre les
mécanismes mis en place par D.________. Je lui ai demandé des documents
complémentaires pour comprendre la structure du fonds mais en vain. Sur ce, je
lui ai dit que la Banque B.________ refusait d'être la banque dépositaire de ce
nouveau fonds. (...) "
Le 3 mars 2004, il précisait:

" (...) Normalement, les prospectus et le master agreement doivent être
cohérents et c'est cette cohérence que je n'ai pas trouvée à la lecture des
documents qui m'ont été remis. J'en ai parlé à M. D.________, qui m'a dit que
je devais avoir la version n° X du prospectus et la version Y du master
agreement. Je lui ai demandé la même mouture des deux documents, mais je ne
l'ai jamais obtenue. Nos discussions se sont arrêtées à ce stade, parce que
C.________ avait pris contact, à mon avis, avec un autre établissement
bancaire.
Je précise que je ne parvenais pas à comprendre le montage effectué sur la base
des documents en ma possession. Il en a été de même pour les personnes à qui
j'ai soumis ces documents, à commencer par Mme I.________ (...). Après les
avoir anonymisées, j'ai également soumis quelques pages essentielles de ces
documents à un doctorant de l'HEC Lausanne, qui me donnait des cours à
l'époque. Je lui ai demandé ce qu'il comprenait de cela, mais il n'a pas été à
même de me donner une réponse. (...) "
Devant la Cour correctionnelle, le témoin H.________ a confirmé ses propos:

" (...) Le fonds avait son capital garanti par... (assurance américaine), mais
les documents remis par D.________ ne fonctionnaient pas entre eux. (...) "
Dans le cadre de la procédure civile, H.________ a été entendu comme témoin le
3 septembre 2013. Le tribunal lui a donné lecture de sa déclaration faite à la
police judiciaire en janvier 2004. Le témoin a confirmé que le fonds
F1.________ était du "bricolage" tout en donnant des explications qui se
rapportaient en réalité au fonds F3.________, ce dont il s'est aperçu peu
après. Le témoin a précisé à cet égard:

" (...) Il s'agissait, selon C.________ SA, d'un montage sophistiqué. J'avoue
n'y avoir rien compris. A l'époque, j'étais en contact avec un doctorant de
l'Université de Lausanne qui s'occupait de produits dérivés. (...) le doctorant
en question m'a indiqué que personne n'y comprenait rien. (...) Monsieur
D.________ a tenté de se justifier en expliquant que l'un des documents qu'il
m'avait remis était la deuxième version du projet et l'autre document la
troisième et que cela expliquait pourquoi le tout n'était pas très clair. Cette
explication ne m'a pas convaincu. (...) "
L.________ fut directeur adjoint dans le même département que H.________
jusqu'en août 2000, avant de partir travailler brièvement pour C.________ SA.
Entendu par le juge civil le 14 octobre 2013, il a déclaré que le fonds
F3.________ était pour lui une affaire "pas très sérieuse", cette impression
étant due au matériel mis à disposition, qu'il ne trouvait pas adéquat.

3.3. La Cour de justice s'est manifestement fondée sur les déclarations de
H.________ et K.________ pour retenir qu'au sein de la banque, les personnes
responsables de la relation avec la gérante externe avaient constaté que le
fonds F1.________ générait des pertes. Sur cette même base, la Cour a en outre
constaté que l'administration du nouveau fonds F2.________ avait été confiée à
une société du groupe bancaire pour permettre à la banque de mieux suivre et
contrôler la gestion de ce fonds. La Cour ne dit pas pour quels motifs elle a
en revanche ignoré les déclarations des deux prénommés en tant qu'elles
relataient des problèmes rencontrés avec la gérante externe, retenant
uniquement la remarque faite par une autre collaboratrice au sujet des comptes
débiteurs. Devant le juge civil, H.________ a certes affirmé qu'il ne
s'occupait pas du fonds F1.________ et n'avait pas à se prononcer sur la
qualité de la gestion opérée par la gérante externe. Si la banque n'était pas
l'administratrice du fonds, cela n'excluait pas qu'elle ait pu constater des
problèmes. Au demeurant, la déposition devant le juge civil est plus éloignée
des faits que celle devant le juge pénal, et dans l'intervalle la banque avait
été actionnée en responsabilité.
Or, les déclarations citées ci-dessus (consid. 3.2) ont une incidence pour
l'issue de la cause. En effet, si tant est que la banque ait constaté un manque
de diversité dans la gestion opérée par sa partenaire d'affaires, ait jugé
nécessaire de travailler avec des produits financiers de meilleure qualité dans
la perspective d'octroyer des crédits lombards, ait fait en sorte de pouvoir
contrôler la gestion du fonds nouvellement créé par sa partenaire et, enfin,
ait refusé d'être la banque dépositaire d'un autre nouveau fonds dont elle ne
comprenait pas le fonctionnement, elle ne pouvait alors rester silencieuse en
voyant que la cliente s'apprêtait à investir massivement dans un tel fonds et
lui demandait de surcroît un crédit. Le témoin H.________ a qualifié de
"bricolage" les fonds F1.________ et... en associant ce mot au mauvais
rendement des fonds. Le terme comporte une connotation péjorative indiquant un
manque de professionnalisme, qui s'explique en l'occurrence par une gestion
insuffisamment diversifiée et par la qualité insuffisante des produits
financiers. La banque n'a pas voulu assumer la responsabilité de banque
dépositaire du nouveau fonds F3.________ nonobstant la rémunération normalement
inhérente à ce type de fonction. Le directeur du département concerné, soit
H.________, a expliqué avoir décelé une inconsistance dans la documentation,
que l'administrateur de la gérante externe a tenté d'expliquer sans parvenir à
le convaincre; la collaboratrice I.________ n'a pas davantage compris le
montage, et le directeur s'est encore fait confirmer par un doctorant
spécialisé dans les produits dérivés que le montage n'était pas compréhensible.
Dans ce contexte, les doutes que la banque a éprouvés ne sauraient se réduire à
un simple problème de compréhension généré par un montage sophistiqué qu'une
personne plus avisée aurait su résoudre au sein d'une autre banque.
Par ailleurs, l'on ne saurait priver de toute portée les articles de presse
parus au cours de l'année 2000. Même si ceux-ci se rapportaient à un projet de
partenariat inabouti concernant un club de football, ils faisaient planer des
doutes quant au sérieux de certaines relations d'affaires entretenues par
D.________, doute qui semblait aussi planer dans l'esprit de certains
partenaires. Pris dans le contexte global, cet élément n'est pas sans
incidence, même s'il ne constitue pas un point déterminant.
La banque a certes pu considérer que le risque inhérent à l'importante ligne de
crédit qu'elle octroyait était faible eu égard à l'assise financière de sa
cliente. L'on rappelle que celle-ci avait versé dans un premier temps 38
millions de dollars avant de réduire son investissement à 15 millions (supra
let. A.i); le crédit a du reste été rapidement remboursé. Cela étant, le fait
que la banque ait elle-même encouru un risque limité ne l'autorisait pas à
méconnaître son devoir d'information et d'avertissement résultant du rapport de
confiance particulier. Or, les craintes que la banque éprouvait déjà par
rapport à l'octroi de crédits garantis par les précédents fonds
d'investissement (notamment F1.________) devaient a fortiori s'appliquer au
nouveau fonds F3.________, dont la banque ne voulait pas même endosser la
responsabilité de dépositaire. Dans un tel contexte, la banque devait mettre en
garde la cliente en lui révélant notamment qu'elle ne comprenait pas le montage
et le fonctionnement du fonds et qu'il lui paraissait risqué d'investir dans un
tel fonds.

3.4. Il appartiendra à l'autorité cantonale d'indiquer si elle avait une raison
d'écarter les déclarations évoquées ci-dessus, auquel cas elle motivera son
appréciation des preuves. S'il appert en revanche que ces déclarations doivent
être retenues, s'imposera alors la conclusion que la banque a violé son devoir
d'information et de mise en garde. La cour devra examiner si les autres
conditions de la responsabilité contractuelle sont réalisées.

4.

4.1. La recourante soulève encore d'autres griefs contre l'état de fait. Elle
reproche à la cour cantonale d'avoir arbitrairement retenu que la modification
des formulaires d'investissement dans le fonds F3.________ était due à la
banque dépositaire du fonds (Banque X.________), alors qu'il s'agirait de la
banque dépositaire de ses avoirs, soit la Banque B.________. La cour aurait
aussi omis de constater que cette banque-ci avait exigé des clients de la
gérante externe qu'ils signent une décharge spécifique quant au risque
résultant de la violation des règles sur la diversification. Ces éléments
démontreraient que la banque éprouvait un malaise à l'égard de la gestion
pratiquée par la gérante externe.

4.2. L'on rappelle que dans sa deuxième version, le formulaire d'investissement
déclinait toute responsabilité de la direction du fonds et de la "banque
dépositaire" quant à la perspective d'obtenir 40 % de gain. La version 3 du
formulaire excluait de surcroît toute responsabilité des mêmes acteurs quant au
recouvrement de la mise de fonds (supra let. A.h). Logiquement, l'exclusion de
responsabilité concerne la banque dépositaire du fonds, par opposition à la
banque détenant les avoirs des clients investisseurs, qui n'assume en principe
aucune responsabilité pour l'investissement dans le fonds. Comme le relève
l'intimée, le texte anglais de la version 2 confirme cette interprétation; plus
précis que le texte français, il parle de "custodian bank" par opposition à
"holding bank", auprès de laquelle sont détenus les avoirs des clients.
L'exclusion de responsabilité concerne donc bel et bien la banque dépositaire
du fonds.
Le témoin M.________, qui fut à l'époque chargé de revoir la documentation
juridique concernant le contrat de dépositaire, s'est souvenu avoir eu
l'intention d'insérer une clause libérant sa banque (Banque X.________) de
toute responsabilité, sans toutefois parvenir à la faire figurer dans le
prospectus (audition du 27 janvier 2014).
Entendu par le juge civil le 27 novembre 2012, le représentant de la Banque
B.________ (...) a confirmé que celle-ci n'avait pas demandé la modification
des formulaires. Auditionné le 14 mai 2013, l'administrateur de la gérante
externe D.________ ne se souvenait pas non plus que la banque précitée ait fait
une telle requête.
Dans ces circonstances, la cour cantonale pouvait retenir sans arbitraire que
la banque dépositaire du fonds avait requis la modification des formulaires.
Contrairement à ce que plaide la recourante, cette conclusion ne saurait être
remise en cause par les déclarations du témoin M.________ selon lesquelles la
banque dépositaire du fonds n'était pas intervenue dans les relations entre
investisseurs et la gérante externe, respectivement par le témoignage de
D.________ selon lequel la banque dépositaire du fonds n'avait jamais émis la
moindre exigence de transparence.

4.3. La recourante voudrait en outre faire constater que la banque avait
connaissance d'un manque de diversification dans la gestion pratiquée par la
gérante externe, ce qui serait attesté par le fait qu'elle a exigé de ses
clients une décharge spécifique.
Après avoir évoqué l'existence d'une telle décharge, H.________ a admis devant
le juge civil que les formules d'investissement évoquées ci-dessus (consid. 4.2
et let. A.h) étaient peut-être le document auquel il songeait et qu'il avait pu
se tromper en ce sens que la gérante externe plutôt que la banque était
l'auteur d'une telle décharge, l'important étant que les clients signent un tel
document.
Quoi qu'il en soit, et comme le relève la recourante, le seul fait que des
collaborateurs de la banque aient constaté un manque de diversification dans la
gestion pratiquée par la gérante externe peut concourir au fondement d'un
devoir d'information et de mise en garde; encore une fois, il appartiendra à
l'autorité cantonale de dire si elle retient un tel fait notamment sur la base
des déclarations retranscrites ci-dessus.

5.

5.1.

5.1.1. La recourante fait grief à la cour cantonale de s'être fondée sur les
déclarations de H.________ pour établir la teneur de l'entretien londonien de
mars 2001, alors que les autres participants livraient une version divergente.

5.1.2. Le fait d'accorder la préférence à une version plutôt qu'à une autre
n'est pas nécessairement constitutif d'arbitraire; l'arbitraire ne résulte pas
du seul fait qu'une autre solution serait défendable, voire même préférable (
ATF 137 I 1 consid. 2.4). Que les administrateurs de la gérante externe se
soient déclarés satisfaits de la tournure de l'entretien n'exclut pas que le
cadre bancaire H.________ ait décliné toute responsabilité de sa banque dans la
gestion des fonds et ait informé la cliente qu'elle pouvait obtenir un gain ou
au contraire perdre 100 % de ses investissements. Quoi qu'il en soit, ces
éléments ne suffisent pas à exempter la banque de sa responsabilité, dans la
mesure où il s'agit d'affirmations générales ne permettant pas de mesurer le
degré concret de risque concernant le fonds F3.________.

5.2.

5.2.1. La cour cantonale aurait indûment omis de constater que de nombreuses
parts du fonds F3.________ avaient été offertes gratuitement aux clients ayant
subi des pertes dans le fonds F1.________, fait dont la banque aurait eu
connaissance.

5.2.2. La Cour de justice a jugé qu'il importait peu de savoir si la banque
connaissait l'ampleur des pertes subies par ses clients détenteurs de parts
F1.________, dans la mesure où il est inhérent à la finance que certains fonds
occasionnent des pertes.
L'on peut donner acte à la recourante que la distribution gratuite d'un nombre
très important de parts du fonds peut révéler un risque particulier à miser
dans un tel fonds. Encore faut-il que la banque ait eu un aperçu suffisant de
la situation pour réaliser l'existence d'un risque inhérent au mode de
financement du fonds F3.________. La recourante a aussi fait valoir que des
irrégularités avaient été commises au su de la banque quant à la
comptabilisation différenciée des profits et pertes du fonds F1.________.
Ces faits, non traités par la cour cantonale, n'ont pas nécessairement de
pertinence, dans la mesure où la cour viendrait déjà à retenir les éléments
précités qui suffisent à fonder une violation du devoir d'informer et d'avertir
(supra consid. 3). Dans le cas contraire, l'autorité cantonale devra déterminer
si et dans quelle mesure ces faits sont établis et susceptibles de fonder une
violation du devoir d'informer et d'avertir.

6. 
Pour le surplus, la recourante souhaiterait encore faire compléter l'état de
fait par des éléments qui n'ont en réalité pas d'incidence particulière. Ainsi
en est-il des propos d'un témoin affirmant avoir soupçonné la gérante externe
de n'être pas très regardante en matière de blanchiment, tout en concédant
n'avoir pas pu envisager la suite des événements. De même, il importe peu que
la Commission fédérale des banques, qui souhaitait une transformation du fonds
F1.________ en fonds de droit suisse, ait menacé la gérante d'ouvrir une
enquête; sans autre précision, l'on ne peut en tirer des conclusions quant à la
probité et au professionnalisme de la gérante externe.

7. 
En définitive, le recours doit être admis et l'arrêt attaqué annulé. La cause
est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle rende une nouvelle décision.
L'intimée, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF)
et versera à la recourante une indemnité à titre de dépens (art. 68 al. 1 et 2
LTF). Les sûretés fournies par la recourante seront libérées.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est admis.

2. 
L'arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour
qu'elle rende une nouvelle décision.

3. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 55'000 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

4. 
L'intimée versera à la recourante une indemnité de 65'000 fr. à titre de
dépens.

5. 
Les sûretés fournies par la recourante sont libérées.

6. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre
civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 25 avril 2016

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Kiss

La Greffière: Monti

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