Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.362/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
4A_362/2015

Arrêt du 1er décembre 2015

Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Kiss, présidente,
Niquille et Abrecht, juge suppléant.
Greffière: Mme Monti.

Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Edmond Perruchoud,
défenderesse et recourante,

contre

1. B.________,
2. Caisse de chômage C.________,
toutes deux représentées par Me Jean-Michel Zufferey,
demanderesses et intimées.

Objet
contrat de travail; résiliation,

recours en matière civile contre le jugement rendu le 8 juin 2015 par la IIe
Cour civile du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Faits :

A.

A.a. A.________ exploite l'établissement public D.________, à... (VS). Par
contrat de travail de durée indéterminée prenant effet le 1 ^er août 2007, elle
a engagé B.________ en qualité de pizzaïola, pour un salaire mensuel brut de
3'260 fr. versé treize fois l'an. Dès le 1 ^er juillet 2010, cette employée a
été affectée en cuisine et son salaire mensuel brut est passé à 3'750 fr., 13 ^
e salaire en sus.
Alors qu'elle était enceinte d'un mois, B.________ a fait une fausse couche.
Son incapacité de travail, d'abord prévue pour un temps indéterminé, a
finalement duré deux jours, du 18 au 20 janvier 2011.
Le samedi 12 mars 2011, B.________ a effectué son service du matin jusqu'à 14
heures, mais ne s'est pas présentée pour celui du soir. Le mardi 15 mars 2011,
A.________ a adressé à B.________ une lettre de « mise en demeure » se référant
à son absence du samedi soir « sans aucune excuse ou motif valable », et lui
donnant un « dernier avertissement ».
Ce même 15 mars, B.________ a travaillé jusqu'à 14 heures, puis, se sentant
très mal, s'est rendue chez son médecin qui a diagnostiqué un début de
dépression. Elle n'a pas repris son service du soir et a été mise en incapacité
totale de travailler du 16 mars au 10 avril 2011.

A.b. Le 12 avril 2011, B.________ s'est présentée sur son lieu de travail et a
constaté que son poste était occupé. A.________ lui a alors présenté une lettre
de congé dont la teneur est la suivante:
« B.________
Par la présente, je t'informe que je te donne ton congé pour le 31 mai
prochain.
Ton incompatibilité d'humeur avec ta collègue, avec moi, rend tout rapport de
travail impossible.
Afin de ne pas mettre en péril la bonne marche de mon entreprise, j'ai donc
pris cette décision. Tu percevras les salaires d'avril et mai normalement. Un
décompte final te sera envoyé ainsi qu'un certificat de travail.
Je te libère de l'obligation de travailler dès le 12 avril 2011. »
B.________ a contresigné cette lettre de congé, puis a quitté les lieux. Lors
de son interrogatoire par le Tribunal du travail, elle a précisé qu'elle avait
apposé sa signature sur cette lettre pour acceptation. Selon ses explications,
elle savait que A.________ avait engagé quelqu'un pour la remplacer en cuisine
et elle espérait être licenciée, car les rapports de travail étaient devenus
difficiles à la suite des doutes émis sur la crédibilité de ses diverses
incapacités de travail; elle avait donc accepté sans autre le congé qui lui
avait été donné, puisqu'elle l'attendait.

A.c. A une date indéterminée, mais qui se situe aux alentours du 20 avril 2011,
B.________ est tombée enceinte, information qu'elle a portée à la connaissance
de A.________ par courrier du 26 mai 2011. Invoquant la suspension du congé
pendant la grossesse et au cours des seize semaines qui suivent l'accouchement,
l'intéressée a offert ses services à A.________ et l'a mise en demeure de lui
fournir du travail, ce que cette dernière a refusé. S'estimant ainsi libérée de
son obligation de travailler, B.________ a invité A.________ à lui verser son
salaire jusqu'à seize semaines après son accouchement, sans succès. Toutes ces
démarches ont été effectuées avec l'aide du Syndicat E.________, auquel
B.________ est affiliée.
Par lettre du 18 novembre 2011, la Caisse de chômage C.________ (ci-après: la
caisse de chômage) a informé A.________ qu'elle avait décidé de verser
l'indemnité de chômage à B.________ tant que durerait le litige relatif à
l'obligation de payer le salaire durant le délai de congé; elle a précisé que
le versement entraînait une subrogation légale en sa faveur.
B.________ a accouché d'une fille le 16 janvier 2012. Par décision du 20 avril
2012, la caisse de compensation lui a accordé une allocation de maternité de
10'662 fr. 40. Quant aux indemnités de chômage perçues par l'intéressée, elles
se sont élevées au montant brut de 27'075 fr. 05 pour la période de juin 2011 à
juin 2012.

B.

B.a. Après une tentative de conciliation infructueuse, B.________ a assigné
A.________ le 2 avril 2012 devant le Tribunal du travail du canton du Valais en
paiement de la somme brute de 18'525 fr. 75 avec intérêts à 5% dès le 15
décembre 2011 (date moyenne). Par écriture séparée du même jour, la caisse de
chômage a fait de même; se prévalant de la subrogation, elle a chiffré ses
prétentions au montant brut de 19'051 fr. 25, avec intérêts à 5% dès le 15
décembre 2011.
Par la suite, tenant compte des indemnités de chômage perçues pour la période
de juin 2011 à juin 2012, B.________ a réduit ses prétentions au montant brut
de 10'501 fr. 95, tandis que la caisse de chômage a porté les siennes au
montant brut de 27'075 fr. 05.
A.________ a conclu au rejet des demandes.

B.b. Par jugement du 25 juin 2013, le Tribunal du travail a condamné A.________
à verser le montant net de 8'003 fr. 55 à B.________, à payer auprès des
caisses afférentes les charges sociales et impôts à la source calculés sur un
montant brut de 10'501 fr. 95, le tout avec intérêts à 5% dès le 15 décembre
2011, et enfin, à verser à la caisse de chômage le montant net de 27'075 fr. 05
avec intérêts à 5% dès le 15 décembre 2011.

B.c. Par jugement du 8 juin 2015, la II ^e Cour civile du Tribunal cantonal du
Valais a rejeté l'appel déposé par A.________.
En bref, les juges cantonaux, procédant à une interprétation objective de la
volonté des parties, ont retenu que la lettre de congé présentée à la
travailleuse et contresignée par celle-ci le 12 avril 2011 ne constituait pas
une résiliation conventionnelle, mais une résiliation unilatérale. D'après les
éléments du dossier, la volonté réelle de la défenderesse était de mettre un
terme au contrat de travail pour l'échéance légale, tout en libérant la
demanderesse de son obligation de travailler; les juges en ont déduit que le
congé notifié le 12 avril 2011 était un congé ordinaire et non un licenciement
pour justes motifs. Ils ont dès lors rejeté la requête de la défenderesse
tendant à l'interrogatoire des parties et à l'audition de témoins. Cette mesure
visait à démontrer un comportement de la travailleuse propre à justifier une
résiliation immédiate des relations de travail; elle ne portait donc pas sur
des faits pertinents, puisqu'on était en présence d'un licenciement ordinaire.
La travailleuse n'avait pas commis d'abus de droit en attendant près d'un mois
pour annoncer sa grossesse; elle bénéficiait de la protection accordée par
l'art. 336c al. 1 let. c CO. Elle avait valablement offert ses services par
lettre du 26 mai 2011; en raison de la suspension du délai de congé (art. 336c
al. 2 et 3 CO), les rapports de travail avaient cessé le 30 juin 2012 et la
travailleuse avait droit à son salaire jusque-là.

C. 
La défenderesse a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral
contre le jugement du 8 juin 2015, en concluant principalement à sa réforme
dans le sens du rejet des demandes de B.________ et de la caisse de chômage, et
subsidiairement à son annulation, la cause étant renvoyée aux instances
cantonales pour instruction complémentaire.
Invitée à se déterminer sur le recours, la cour cantonale a indiqué ne pas
avoir d'observations à formuler et se référer aux considérants de son jugement.
Egalement invitées, par leur conseil commun, à déposer des déterminations,
B.________ et la caisse de chômage n'ont pas procédé.

Considérant en droit :

1.

1.1. Le recours est interjeté par la partie défenderesse qui a succombé dans
ses conclusions en libération et bénéficie ainsi de la qualité pour recourir
(art. 76 al. 1 LTF). Dirigé contre un jugement rendu en matière civile (art. 72
al. 1 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur recours (art. 75 LTF) dans
une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 15'000 fr.
requis par l'art. 74 al. 1 let. a LTF pour les conflits de droit du travail, le
recours est par principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art.
100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.

1.2. Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit
fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 136 I 241
consid. 2.1 p. 247; 136 II 304 consid. 2.4 p. 313). Le Tribunal fédéral
applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est pas lié par
l'argumentation des parties (ATF 138 II 331 consid. 1.3 p. 336) et apprécie
librement la portée juridique des faits; il s'en tient cependant aux questions
juridiques que la partie recourante soulève dans la motivation du recours et
s'abstient de traiter celles qui ne sont plus discutées par les parties, sous
réserve d'erreurs manifestes (art. 42 al. 2 LTF; ATF 140 III 115 consid. 2 p.
116; 137 III 580 consid. 1.3 p. 584).

1.3. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). En tant que cour suprême, il est instance de
révision du droit, et non juge du fait. Il peut certes, à titre exceptionnel,
rectifier ou compléter les faits s'ils ont été établis de façon manifestement
inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst.
(ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137 II 353 consid. 5.1 p. 356) - et pour
autant que la correction soit susceptible d'influer sur le sort de la cause
(art. 97 al. 1 et art. 105 al. 2 LTF). Cette exception ne permet toutefois pas
aux parties de rediscuter dans leurs mémoires les faits de la cause comme si
elles plaidaient devant un juge d'appel. La partie recourante qui entend faire
rectifier ou compléter un fait doit expliquer de manière circonstanciée en quoi
les conditions d'une telle modification seraient réalisées (ATF 137 II 353
consid. 5.1 p. 356; 136 I 184 consid. 1.2 p. 187), au même titre que la partie
qui invoque une violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire
dans l'appréciation des preuves et l'établissement des faits (cf. art. 106 al.
2 LTF; ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254 s.).

1.4. En l'espèce, la défenderesse présente dans son recours un « résumé des
faits » dans lequel elle s'écarte largement des constatations de fait du
jugement entrepris, sans toutefois aucunement démontrer en quoi les conditions
d'un complètement ou d'une rectification de cet état de fait seraient
réalisées. Le Tribunal fédéral statuera dès lors sur la base des faits établis
par l'autorité précédente (cf. consid. 1.3 supra) et s'en tiendra aux questions
juridiques soulevées devant lui par la défenderesse (cf. consid. 1.2 supra).

2.

2.1. Dans un grief intitulé « Violation du droit à la preuve », la défenderesse
reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 8 CC en refusant de donner
suite aux réquisitions tendant à l'audition de cinq témoins - à savoir sa mère,
qui travaillait régulièrement dans l'établissement, ainsi que quatre
collaboratrices - et au nouvel interrogatoire de la demanderesse aux fins de
prouver que « toute collaboration avec la demanderesse était devenue
objectivement impossible du fait du comportement imprévisible et des
insubordinations de la demanderesse ».

2.2. Conformément à l'art. 316 al. 3 CPC, l'instance d'appel peut librement
décider d'administrer des preuves : elle peut ainsi ordonner que des preuves
administrées en première instance le soient à nouveau devant elle, faire
administrer des preuves écartées par le tribunal de première instance ou encore
décider l'administration de toutes autres preuves. Ces mesures ne peuvent avoir
pour objet que des faits pertinents et contestés (art. 150 al. 1 CPC), les
faits pertinents étant ceux de nature à influer sur le sort du litige (arrêt
4A_502/2012 du 22 janvier 2013 consid. 3.1; SCHWEIZER, in Bohnet et al. [éd.],
Code de procédure civile commenté, 2011, n. 9 ad art. 150 CPC; GUYAN, in
Commentaire bâlois, 2 ^e éd. 2013, n. 12 ad art. 150 CPC).
L'art. 316 al. 3 CPC ne confère toutefois pas à l'appelant un droit à la
réouverture de la procédure probatoire et à l'administration de preuves. Le
droit à la preuve, comme le droit à la contre-preuve, découlent de l'art. 8 CC
ou, dans certains cas, de l'art. 29 al. 2 Cst., dispositions qui n'excluent pas
l'appréciation anticipée des preuves (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1 p. 376 et
les arrêts cités). Il s'ensuit que l'instance d'appel peut rejeter la requête
de réouverture de la procédure probatoire et d'administration d'un moyen de
preuve déterminé présentée par l'appelant si celui-ci n'a pas suffisamment
motivé sa critique de la constatation de fait retenue par la décision attaquée;
elle peut également refuser une mesure probatoire en procédant à une
appréciation anticipée des preuves, lorsqu'elle estime que le moyen de preuve
requis ne pourrait pas fournir la preuve attendue ou ne pourrait en aucun cas
prévaloir sur les autres moyens de preuve déjà administrés par le tribunal de
première instance, à savoir lorsqu'il ne serait pas de nature à modifier le
résultat des preuves qu'elle tient pour acquis (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2
p. 376 et les arrêts cités).

2.3. En l'espèce, dans la mesure où la défenderesse entend, par les auditions
requises, établir l'existence de faits qui auraient justifié une résiliation
immédiate des relations de travail, force est de constater, à l'instar de la
cour cantonale, que les moyens de preuve invoqués ne portent pas sur des faits
pertinents pour le sort de la cause. En effet, dès lors que la cour cantonale a
qualifié à juste titre la lettre de résiliation du 12 avril 2011 de
licenciement ordinaire (cf. consid. 3 infra), il est sans importance que la
défenderesse ait pu avoir de bonnes raisons de mettre immédiatement fin aux
rapports de travail entre les parties.
La défenderesse plaide aussi que les dépositions sur le comportement de
l'employée devraient permettre de préciser le contexte dans lequel les parties
ont signé la lettre du 12 avril 2011 et contribuer à retenir une résiliation
conventionnelle, respectivement à prouver que l'exécution de l'obligation était
devenue impossible au sens de l'art. 119 CO. Force est d'admettre que ces
mesures probatoires ne résistent pas à l'examen d'une appréciation anticipée;
en effet, ces auditions sont impropres à établir que les parties ont mis fin
contractuellement au contrat de travail (cf. consid. 3.3 infra) ou que
l'exécution des obligations contractuelles est devenue objectivement impossible
(cf. consid. 4.2 infra).

3.

3.1. Dans un grief intitulé « Fin contractuelle du contrat de travail », la
défenderesse, s'écartant largement et de manière irrecevable des constatations
de fait du jugement entrepris (cf. consid. 1.4 supra), reproche aux juges
cantonaux d'avoir sorti de son contexte la lettre de licenciement du 12 avril
2011. Admettant qu'elle « envisageait dans un premier temps un licenciement
unilatéral tout en souhaitant obtenir l'adhésion de sa collaboratrice », elle
relève que la demanderesse, lors de son interrogatoire par le Tribunal du
travail, a déclaré qu'elle espérait être licenciée et qu'elle avait donc
accepté sans autre le congé qui lui avait été donné, puisqu'elle l'attendait
(cf. lettre A.b supra); il y aurait donc lieu de constater qu'en se quittant le
12 avril 2011, les parties « étaient convaincues et l'une et l'autre que la
relation de travail avait définitivement pris fin et qu'elles ne se verraient
pas de sitôt vu leurs relations exacerbées ».

3.2. Aux termes de l'art. 341 al. 1 CO, le travailleur ne peut pas renoncer,
pendant la durée du contrat et durant le mois qui suit la fin de celui-ci, aux
créances résultant de dispositions impératives de la loi ou d'une convention
collective. Selon la jurisprudence, cette norme prohibe la renonciation
unilatérale du travailleur, mais elle n'interdit pas aux parties de rompre en
tout temps le contrat d'un commun accord, pour autant qu'elles ne cherchent
pas, par ce biais, à détourner une disposition impérative de la loi (ATF 119 II
449 consid. 2a; 118 II 58 consid. 2b p. 61). L'accord entre les parties doit
être interprété restrictivement et ne peut constituer un contrat de résiliation
conventionnelle que dans des circonstances exceptionnelles, notamment
lorsqu'est prouvée sans équivoque la volonté des intéressés de se départir du
contrat (arrêt 4C.127/2005 du 2 novembre 2005 consid. 4.1, reproduit in JAR
2006 p. 351; arrêt 4C.37/2005 du 17 juin 2005 consid. 2.2; arrêt 4C.27/2002 du
19 avril 2002, publié in SJ 2003 I p. 220, consid. 2; arrêt 4C.310/1998 du 8
janvier 1999, publié in SJ 1999 I p. 277, consid. 2c p. 279).
L'art. 336c CO prévoit la nullité du congé ou le report de l'échéance
contractuelle lorsque l'employeur résilie en temps inopportun, notamment en cas
de grossesse de l'employée. Nonobstant son caractère semi-impératif, cette
disposition ne s'applique pas lorsque les parties mettent fin au contrat de
travail d'un commun accord, pour autant que ce dernier comporte des concessions
réciproques - d'importance comparable (arrêt 4A_563/2011 du 19 janvier 2012,
consid. 4.1) - et qu'il s'agisse nettement d'un cas de transaction
(Aufhebungsvertrag; ATF 118 II 58 consid. 2b p. 61; 110 II 168 consid. 3b p.
171; arrêt 4C.27/2002 précité, consid. 2). En revanche, lorsque l'employeur
résilie unilatéralement le contrat et que les parties passent simultanément ou
postérieurement un accord régissant uniquement les modalités de la fin du
contrat, l'art. 336c CO reste applicable. L'acceptation de la résiliation par
l'employé ne suffit pas à elle seule pour déduire l'existence d'une résiliation
conventionnelle et par là même d'une volonté implicite de celui-ci de renoncer
à la protection accordée par les art. 336 ss CO (arrêt 4A_563/2011 précité,
consid. 4.1; arrêt 4C.37/2005 précité, consid. 2.2; arrêt 4C.27/2002 précité,
consid. 2).
La résiliation conventionnelle n'est soumise à aucune exigence de forme (cf.
art. 115 CO) et peut donc être donnée par écrit, oralement ou même tacitement
(cf. MÜLLER, Die einvernehmliche Beendigung des Arbeitsverhältnisses, 1991, pp.
26 et 42). Pour savoir si un tel accord a été passé, il y a lieu de rechercher,
tout d'abord, la réelle et commune intention des parties (art. 18 al. 1 CO;
interprétation subjective); si le juge ne parvient pas à établir en fait une
telle volonté, ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté réelle
manifestée par l'autre, il recherchera quel sens les parties pouvaient et
devaient donner, selon les règles de la bonne foi, à leurs manifestations de
volonté réciproques (interprétation objective; arrêt 4A_474/2008 du 13 février
2009 consid. 3.1; ATF 133 III 675 consid. 3.3).

3.3. En l'espèce, il est constant que la défenderesse a pris l'initiative de la
résiliation des rapports de travail en rédigeant une lettre de congé et en la
présentant le 12 avril 2011 à la demanderesse qui reprenait son travail après
un arrêt maladie. Comme l'ont relevé à raison les juges cantonaux, les termes
utilisés dans cet écrit ne permettent pas de douter du caractère unilatéral de
son contenu.
La défenderesse soutient toutefois que le comportement adopté par la
demanderesse avant ou pendant la réception et la signature de cette lettre
devrait faire inférer qu'elle a donné son accord à la résiliation des rapports
de travail et que l'on serait ainsi en présence d'une résiliation
conventionnelle.
Or, le fait que la demanderesse ait contresigné la lettre de résiliation,
qu'elle ait accepté la résiliation, et même qu'elle ait espéré recevoir son
congé, compte tenu des tensions provoquées par ses divers arrêts de travail, ne
constitue pas un comportement sans équivoque permettant de déduire l'existence
d'une résiliation conventionnelle et d'une volonté implicite de la demanderesse
de renoncer à la protection accordée par les art. 336 ss CO.
Au surplus, on ne voit pas, dans l'hypothèse d'une résiliation conventionnelle,
en quoi il y aurait eu des concessions réciproques d'importance comparable
permettant de conclure qu'il s'agit nettement d'un cas de transaction. La
défenderesse entendait de toute façon renoncer à la prestation de travail
puisqu'elle avait déjà engagé une autre personne; une telle renonciation ne
peut constituer une concession suffisante puisque l'art. 324 al. 1 CO ne libère
pas l'employeur de l'obligation de rémunérer le travailleur (arrêt 4C.250/2001
du 21 novembre 2001 consid. 1b, cité par CARRUZZO, Le contrat individuel de
travail, 2009, n. 3 ad art. 335c CO p. 494). En revanche, la demanderesse
aurait fait une concession importante en se privant de la protection conférée
par les règles sur le report de l'échéance contractuelle en cas de grossesse ou
d'incapacité de travail non imputable à sa faute (art. 336c al. 1 let. b et c,
al. 2 et 3 CO), hypothèses qui n'avaient rien d'aléatoire au moment où la
lettre de congé a été contresignée (cf. arrêt 4C.27/2002 précité, consid. 3c).
Par ailleurs, la défenderesse ne saurait sérieusement prétendre qu'elle aurait
renoncé à titre transactionnel à un licenciement pour justes motifs le 12 avril
2011, alors qu'elle indique elle-même qu'elle avait choisi d'adresser un
licenciement ordinaire à la demanderesse, sur les conseils de sa fédération.
En réalité, comme l'ont relevé à raison les juges cantonaux, force est de
constater que l'on n'est pas en présence d'un accord de résiliation, mais bien
d'un accord sur les modalités de la résiliation, qui avait pour seul objet de
régler les conditions de la fin des rapports de travail ensuite de la
résiliation unilatérale signifiée par la défenderesse, avec pour conséquence
que la protection accordée par l'art. 336c CO restait applicable.

4.

4.1. Dans un grief intitulé « Impossibilité réciproque de prester », la
défenderesse, s'écartant ici aussi largement et de manière irrecevable des
constatations de fait du jugement entrepris (cf. consid. 1.4 supra), reproche
aux juges cantonaux d'avoir considéré qu'il n'y avait aucune raison de douter
du sérieux de l'offre de service émise par la demanderesse le 26 mai 2011,
lorsqu'elle avait constaté que le délai de congé était suspendu en raison de sa
grossesse. Selon la défenderesse, la prétendue volonté de prester de la
demanderesse ne serait « qu'une mise en scène orchestrée par le Syndicat »
auquel elle est affiliée; dans la mesure où il apparaîtrait clairement de la
position de la demanderesse que celle-ci ne voulait en réalité plus reprendre
le travail auprès de la défenderesse et que toute collaboration était ainsi
devenue absolument impossible, il y aurait lieu de retenir une impossibilité
objective subséquente au sens de l'art. 119 CO, qui libérerait les parties de
leurs obligations respectives.

4.2. Les juges cantonaux ont exposé de manière circonstanciée les raisons pour
lesquels ils ont retenu en fait - d'une manière qui lie le Tribunal fédéral -
que la demanderesse avait la volonté réelle d'offrir ses services après avoir
constaté que le délai de congé était suspendu en raison de sa grossesse. Dès
lors, le grief de la défenderesse, purement appellatoire, doit être écarté. Au
demeurant, l'art. 119 CO vise la situation où l'exécution d'une obligation
devient objectivement impossible, par suite de circonstances non imputables au
débiteur. Or, l'absence de volonté réelle de la demanderesse de fournir sa
prestation, si elle avait été établie, n'aurait à l'évidence pas constitué un
cas d'impossibilité d'exécution, mais un cas de demeure du débiteur.

5.

5.1. La défenderesse soutient enfin que la demanderesse et la caisse de chômage
« avaient une obligation - si responsabilité il y avait - de diminuer le
dommage » et que « [d]'un point de vue processuel, il incombait aux
demanderesses d'alléguer et de prouver avoir entrepris des démarches pour
obtenir un emploi (art. 17 LACI [...]) ». Elle produit deux attestations datées
des 3 et 9 juillet 2015, destinées à démontrer qu'en Valais, le secteur de la
restauration et de l'hôtellerie était demandeur d'emplois en 2011 et 2012; il
s'agirait du reste d'un fait notoire dont les juges valaisans devaient avoir
connaissance.

5.2. Lorsque l'employeur est en demeure d'accepter la prestation du travailleur
ou qu'il lui a signifié un congé immédiat injustifié, il doit payer son
salaire, le cas échéant jusqu'à ce qui aurait été l'échéance ordinaire du
contrat. Toutefois, en vertu des art. 324 al. 2 CO et 337c al. 2 CO,
l'employeur peut imputer sur sa dette salariale le revenu que le travailleur a
gagné en exécutant un autre travail, ou le gain auquel il a intentionnellement
renoncé. Sur le principe, l'autorité de céans et bon nombres d'auteurs sont
d'avis que cette obligation d'imputation vaut aussi lorsque l'employé a été
libéré du devoir de travailler (cf. ATF 128 III 212 consid. 3b/cc p. 220; 128
III 271 consid. 4a/bb; 118 II 139 consid. 1b p. 142; cf. aussi arrêt 4A_509/
2014 du 4 février 2015 consid. 4.1; GEISER/MÜLLER, Arbeitsrecht in der Schweiz,
3 ^e éd. 2015, n. 659 s.; BRÜHWILER, Einzelarbeitsvertrag, 3 ^e éd. 2014, n.
10b ad art. 324 CO; VISCHER/MÜLLER, Der Arbeitsvertrag, 4 ^e éd. 2014, p. 313
n. 53; REHBINDER/STÖCKLI, Berner Kommentar, 2010, n. 24 ad art. 324 CO; pour
une présentation circonstanciée, cf. BLESI, Die Freistellung des Arbeitnehmers,
2 ^e éd. 2010, n. 344 ss). S'agissant du gain hypothétique, les circonstances
d'espèce sont déterminantes; l'on doit pouvoir raisonnablement exiger du
travailleur qu'il reprenne une place de travail; la doctrine insiste sur la
nécessité de respecter l'exigence légale d'un comportement intentionnel (arrêt
4C.246/2005 du 12 octobre 2005 consid. 6.1; BLESI, op. cit., n. 374 ss; STREIFF
/VON KAENEL/RUDOLPH, Arbeitsvertrag, 7 ^e éd. 2012, p. 1155). D'aucuns
soutiennent qu'il n'y a pas d'obligation d'imputation lorsque la libération du
devoir de travailler résulte d'un accord (PORTMANN/RUDOLPH, in Basler
Kommentar, 6 ^e éd. 2015, n. 7 ad art. 324 CO; STREIFF/VON KAENEL/RUDOLPH, op.
cit., p. 396), ou nient même sans distinction l'obligation de chercher un
nouvel emploi avant l'échéance du contrat (WYLER/HEINZER, Droit du travail, 3 ^
e éd. 2014, p. 364).
L'employeur doit prouver l'existence et le montant des gains imputables sur le
salaire dû, le travailleur étant tenu de collaborer en vertu du principe de la
bonne foi (arrêt 4C.246/2005 précité, consid. 6.1; STAEHELIN, Zürcher
Kommentar, 4 ^e éd. 2006, n. 31 ad art. 324 CO). Cette preuve est difficile à
rapporter s'agissant du gain hypothétique. En principe, l'employeur peut se
contenter de démontrer que dans la profession concernée, il existait au moment
concerné une demande de forces de travail (ATF 96 II 52 consid. 3 p. 57;
STREIFF/VON KAENEL/RUDOLPH, op. cit., p. 394).

5.3. Ni le jugement de première instance, ni l'arrêt attaqué ne traitent de
cette problématique. La défenderesse ne prétend pas avoir soulevé ce grief
devant l'autorité précédente, à qui elle ne reproche aucune violation du droit
d'être entendu. L'on peut donc inférer que ce moyen est soulevé pour la
première fois devant l'autorité de céans. La présentation d'un argument
juridique nouveau est admissible dans les limites de l'art. 99 LTF, qui prohibe
la présentation de faits et de moyens de preuve nouveaux (al. 1),
respectivement la prise de conclusions nouvelles (al. 2). En l'occurrence,
l'état de fait de l'arrêt attaqué ne renseigne pas sur la situation du marché
de l'emploi, ni sur l'attitude de l'employée après qu'elle eut offert vainement
ses services le 26 mai 2011. La défenderesse lui reproche de ne pas avoir
allégué ni prouvé qu'elle avait fait des recherches d'emploi; ce grief est
infondé. En effet, dans la mesure où il s'agissait de réduire sa dette de
salaire, la défenderesse devait alléguer et prouver les circonstances
permettant d'inférer que la demanderesse aurait pu raisonnablement reprendre un
emploi, auquel cas celle-ci aurait pu contre-attaquer en alléguant et offrant
de prouver des éléments à sa décharge tels que la recherche infructueuse d'un
nouvel emploi. La défenderesse ne prétend pas avoir fait des allégations et
offres de preuve topiques dans ses écritures. Elle produit deux pièces
nouvelles sur la situation de l'emploi, qui sont irrecevables, et de toute
façon inutiles du moment que la procédure n'a pas porté sur cette question.
L'on précisera encore que la défenderesse, qui était assistée d'un avocat dès
le début de la procédure, ne se plaint pas de ce que le tribunal aurait
enfreint la maxime inquisitoire sociale (cf. art. 93 al. 2, 243 al. 1 et 247
al. 2 CPC), ce qui suffit déjà à clore toute discussion.
Le grief se révèle infondé.

6. 
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté.
Vu l'issue du recours, les frais de la présente procédure seront mis à la
charge de la défenderesse (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de
dépens, dès lors que les demanderesses n'ont pas déposé d'observations et n'ont
donc pas encouru de frais pour la procédure devant le Tribunal fédéral (cf.
art. 68 al. 1 et 2 LTF).

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la
défenderesse.

3. 
Il n'est pas alloué de dépens.

4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la II ^e Cour
civile du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 1er décembre 2015

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Kiss

La Greffière: Monti

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