Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.322/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
4A_322/2015

Arrêt du 27 juin 2016

Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges Kiss, présidente, Kolly et Hohl.
Greffier: M. Carruzzo.

Participants à la procédure
X.________ SA, représentée par Mes Dominique Brown-Berset et Dominique Ritter,
avocates, ainsi que par Mes Eric Haymann et Daniel Bloch,
recourante,

contre

1. Y.________,
2. Z.________ Company,
toutes deux représentées par Mes Wolfgang Peter et Homayoon Arfazadeh,
intimées.

Objet
arbitrage international,

recours en matière civile contre la sentence finale rendue le 12 mai 2015 par
le Tribunal arbitral ad hoc.

Faits:

A. 
Le 29 février 1968, l'État d'Israël et la société de droit iranien Z.________
Company (ci-après: Z.________) ont conclu un accord de participation ( 
Participation Agreement), sur une base paritaire, pour la construction,
l'entretien et l'exploitation, sur le territoire d'Israël, d'un oléoduc au
moyen duquel le pétrole iranien amené par bateaux-citernes depuis les ports
iraniens du Golfe Persique jusqu'au port d'Eilat, sur les bords de la Mer
Rouge, devait être conduit à Ashkelon, sur la côte est de la Méditerranée. Les
cocontractants ont encore décidé de constituer un groupe de sociétés en vue de
l'exécution de cet accord: une société holding de droit canadien, dénommée
A.________ Ltd, détentrice pour 49 ans (i.e. de 1968 à 2017) de la concession
relative à l'oléoduc; une société sous-concessionnaire, dénommée B.________
Ltd, chargée de la construction, de l'entretien et de l'exploitation de
l'oléoduc; une société de négoce (  trading company), dénommée X.________ SA
(ci-après: X.________ ou la recourante), soumise au droit panaméen et disposant
d'une adresse commerciale à Tel Aviv (Israël). La participation iranienne dans
ces trois sociétés s'effectue par le truchement de Y.________ (ci-après:
Y.________), une société de droit liechtensteinois entièrement contrôlée par
Z.________, tandis que la participation israélienne s'opère via la société de
droit panaméen C.________ Corporation, entièrement contrôlée par le
Gouvernement de l'État d'Israël.
Le 18 août 1969, Y.________ et X.________ ont passé un accord portant sur la
création d'une société commune de droit liechtensteinois, dénommée D.________
Co Ltd (ci-après: D.________), actuellement en liquidation, dont le but
consistait à s'engager dans les transactions pétrolières et le transport de
pétrole (ci-après: l'accord de 1969). Elles ont inséré, à l'art. 4 de cet
accord, une clause compromissoire fixant le siège de l'arbitrage à Zurich.
Une fois créée, D.________ a été impliquée dans la livraison du pétrole brut
iranien produit par Z.________ et vendu à X.________ sur la base de contrats
annuels reconduits (  Oil Contracts). En particulier, le 18 janvier 1978, soit
un peu plus d'une année environ avant l'installation d'un gouvernement
islamique en Iran après le départ du shah, Z.________ et D.________ ont conclu
un contrat pour la livraison, durant l'année 1978, de quelque 14,75 millions de
tonnes de pétrole iranien à X.________ (ci-après: le contrat de 1978).

B. 

B.a. Le 13 janvier 1989, Y.________, se fondant sur la clause arbitrale de
l'accord de 1969, a introduit une requête d'arbitrage dirigée contre
X.________. Elle demandait que cette dernière fût condamnée à payer à
D.________, qui n'était pas partie à l'arbitrage, la somme de 445'336'076,36
USD correspondant à des factures en souffrance pour 50 livraisons de pétrole
brut effectuées par Z.________ de septembre à décembre 1978 en exécution du
contrat de 1978.
Un tribunal arbitral de trois membres a été constitué après plusieurs années de
procédure et la première phase de l'arbitrage a duré de longues années encore.
Par sentence du 17 juin 2003, intitulée  Interim Award on Liability for Claim
No. 2 and Final Award on Claim No. 3, le Tribunal arbitral a fait droit à la
demande de Y.________ tout en réservant la fixation des intérêts sur le montant
alloué ainsi que d'éventuelles demandes reconventionnelles de X.________
assorties de conclusions tendant à la compensation des créances réciproques des
parties.

B.b. En date du 30 janvier 2004, X.________ a déposé une demande
reconventionnelle. Elle y a pris des conclusions non seulement à l'encontre de
Y.________, mais également envers Z.________ et, subsidiairement, D.________.
Cette dernière a soulevé une exception d'incompétence. Quant à Z.________,
après l'avoir contestée dans un premier temps, elle a fini par admettre la
compétence du Tribunal arbitral à son égard relativement aux demandes
reconventionnelles. Celles-ci étaient au nombre de trois. En premier lieu,
X.________ réclamait le paiement de dommages-intérêts du fait de la
non-livraison du solde des quantités de pétrole stipulées dans le contrat de
1978, soit environ 2,9 millions de tonnes, suite aux événements politiques
survenus en Iran (ce que la sentence attaquée désigne par l'expression "  the
1978 shortfall claim "). En deuxième lieu, X.________ demandait à être
indemnisée en raison de la violation par Z.________ et Y.________ de leur
obligation d'exécuter un contrat de fourniture de pétrole prétendument conclu
pour l'année 1979. En troisième et dernier lieu, X.________ entendait obtenir
des dommages-intérêts, motif pris de ce que Z.________ et Y.________ avaient
contrevenu à leur obligation, découlant de l'accord de 1969, de conclure des
contrats de fourniture de pétrole jusqu'en 2017.
Le 4 juillet 2006, après avoir instruit la cause, le Tribunal arbitral a rendu
une ordonnance de procédure n° 37 dans laquelle il a prononcé la clôture des
débats sur reconvention, sous réserve de certains points limités. Les parties
ont déposé ensuite, simultanément, deux mémoires après enquêtes chacune, le 29
novembre 2006 et le 29 juin 2007, puis ont plaidé, les 8 et 9 novembre 2007,
lors d'une  Closing Hearing au cours de laquelle elles ont répondu aux 43
questions que le Tribunal arbitral leur avait adressées le 11 octobre 2007. Par
courrier du 15 août 2008, le Tribunal arbitral leur a encore posé d'autres
questions en relation avec l'un des postes du dommage de X.________.
Alors que les parties étaient dans l'attente de la sentence finale, le
président du Tribunal arbitral est décédé, en novembre 2012. Par courrier du 3
février 2013, les deux arbitres restants ont pourvu à son remplacement. Le
Tribunal arbitral, dans sa nouvelle composition, a tenu une séance
d'organisation le 11 septembre 2013. A cette occasion, tout en acceptant de ne
pas reprendre la procédure probatoire  ab initio, X.________ a proposé la tenue
d'une audience additionnelle afin de permettre aux parties d'énoncer derechef
devant le Tribunal arbitral nouvellement composé les points saillants de
l'affaire et les circonstances particulières dans lesquelles le différend était
survenu. Z.________ et Y.________ se sont opposées à cette requête et le
Tribunal arbitral a refusé, à l'unanimité de ses membres, d'y donner suite par
ordonnance de procédure n° 49 du 26 septembre 2013.
Dans un courrier du 22 juillet 2014, le président du Tribunal arbitral a
informé les parties que la rédaction de la sentence prenait plus de temps
qu'initialement prévu, eu égard notamment à la complexité de l'affaire, et il
les a priées de bien vouloir excuser ce retard. En réponse à ce courrier,
X.________ lui a rappelé que c'était précisément la raison pour laquelle elle
avait suggéré la tenue d'une brève audience lors de la séance d'organisation du
11 septembre 2013, ajoutant qu'elle restait à sa disposition pour répondre à
toute question ou interrogation. Le Tribunal arbitral n'a cependant pas fixé de
nouvelle audience ni posé de questions aux parties, hormis une question
spécifique touchant la compensation. Enfin, dans une dernière lettre adressée
le 13 janvier 2015 aux parties, le président du Tribunal arbitral leur a
réitéré ses excuses en concédant qu'il avait sérieusement sous-estimé les
difficultés de sa tâche découlant du fait de n'avoir rejoint le panel qu'à un
stade très avancé d'un arbitrage complexe.
En date du 12 mai 2015, le Tribunal arbitral a rendu sa sentence finale à la
majorité de ses membres. En substance, après avoir exclu sa compétence à
l'égard de D.________ et l'avoir admise vis-à-vis de Z.________, il a déclaré
X.________ débitrice de Z.________ et Y.________, créancières solidaires, de la
somme de 445'336'076 USD, plus intérêts, à titre de paiement des 50 livraisons
de pétrole effectuées en 1978 et demeurées impayées, et a reconnu Z.________ et
Y.________ débitrices solidaires de X.________ à hauteur de 99'455'767 USD,
plus intérêts, au titre du  shortfall 1978(ch. 4 du dispositif). Cela fait,
après avoir ordonné la compensation de ces deux créances, il a condamné
X.________ à payer à Z.________ la somme de 1'123'709'315 USD augmentée des
intérêts calculés depuis le 1er janvier 2015 sur la somme de 362'054'085 USD en
fonction du taux Libor (ch. 6 du dispositif). Les motifs sur lesquels repose
cette sentence seront indiqués plus loin dans la mesure utile à la
compréhension des griefs formulés par la recourante.
Le président du Tribunal arbitral a notifié ladite sentence aux parties par
courrier du 13 mai 2015 auquel il a également annexé l'opinion dissidente ( 
dissenting opinion) de l'arbitre nommé par X.________.

C. 
Le 15 juin 2015, X.________ a formé un recours en matière civile, assorti d'une
requête de mesures provisionnelles. Reprochant à l'arbitre d'avoir violé son
droit d'être entendue, la recourante conclut à l'annulation des chiffres 4 et 6
du dispositif de la sentence finale.
Le Tribunal arbitral a prononcé, le 9 septembre 2015, un  Addendum to Final
Award qui a rendu sans objet la requête de mesures provisionnelles.
Par ordonnance présidentielle du 24 novembre 2015, la recourante a été invitée
à verser, jusqu'au 17 décembre 2015, à la Caisse du Tribunal fédéral, le
montant de 250'000 fr. en garantie des dépens des intimées Y.________ et
Z.________. Elle s'est exécutée dans le délai supplémentaire qui lui a été
octroyé à cette fin.
Le 9 mars 2015, le président du Tribunal arbitral a déposé une réponse en son
propre nom. Il y conclut implicitement au rejet du recours.
Au terme de leur réponse conjointe du 10 mars 2016, les intimées ont conclu
principalement à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement, à son rejet.
Elles ont requis, en outre, le versement en leurs mains du montant déposé par
la recourante en garantie de leurs dépens.
Dans sa réplique du 1er avril 2016, la recourante a maintenu ses précédentes
conclusions et invité le Tribunal fédéral à déclarer irrecevable l'écriture
déposée par le président du Tribunal arbitral. Elle a requis, par ailleurs, la
transmission au Tribunal fédéral de l'intégralité des ordonnances rendues dans
la procédure arbitrale.
Les intimées ont renoncé à développer plus avant leurs arguments dans leur
duplique du 18 avril 2016. Pour le reste, elles y contestent la prétendue
irrecevabilité des observations déposées par le président du Tribunal arbitral.

Considérant en droit:

1. 
D'après l'art. 54 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral rédige son arrêt dans une
langue officielle, en règle générale dans la langue de la décision attaquée.
Lorsque cette décision a été rendue dans une autre langue (ici l'anglais), le
Tribunal fédéral utilise la langue officielle choisie par les parties. Devant
lui, celles-ci se sont servies toutes deux du français. Aussi convient-il de
rendre le présent arrêt dans cette langue.

2. 

2.1. Dans le domaine de l'arbitrage international, le recours en matière civile
est recevable contre les décisions de tribunaux arbitraux aux conditions fixées
par les art. 190 à 192 LDIP (art. 77 al. 1 LTF). Qu'il s'agisse de l'objet du
recours, de la qualité pour recourir, du délai de recours, des conclusions
prises par la recourante ou encore du motif de recours invoqué, aucune de ces
conditions de recevabilité ne fait problème en l'espèce. Rien ne s'oppose donc
à l'entrée en matière.

2.2. 

2.2.1. A plusieurs reprises, la recourante déclare faire sien l'avis de
l'arbitre minoritaire, en renvoyant le Tribunal fédéral à la lecture du passage
topique de la  dissenting opinion émise par l'arbitre qu'elle a désigné. Ce
faisant, elle oublie qu'une opinion dissidente ne fait pas partie de la
sentence, qu'elle y ait été formellement intégrée ou non, si bien qu'elle
demeure un avis indépendant n'ayant aucune portée juridique propre (arrêt
4A_319/2015 du 5 janvier 2016 consid. 4.2.2 et les précédents cités). Dès lors,
pareille opinion ne doit pas être prise en considération par l'autorité de
recours (BERGER/KELLERHALS, International and Domestic Arbitration in
Switzerland, 3e éd. 2015, n. 1501).

2.2.2. En tête des observations déposées par lui le 9 mars 2015, le président
du Tribunal arbitral a formulé la remarque suivante:

" Die Vernehmlassung reflektiert meine Auffassung als Vorsitzender des
Schiedsgerichts und stellt keine Eingabe im Namen des Gesamtschiedsgerichtes
dar. Ich sehe mich zur Vernehmlassung veranlasst, weil die Beschwerdeführerin
einen angeblichen Verfahrensfehler des Schiedsgerichtes rügt. "
Dans sa réplique, la recourante invite le Tribunal fédéral à déclarer cette
écriture irrecevable au double motif, d'une part, que son auteur l'a rédigée à
titre personnel et non pas au nom du collège arbitral ou de la majorité de ses
membres et, d'autre part, que ce mémoire détaillé contiendrait "un véritable
réquisitoire" contre elle. De leur côté, les intimées concluent au rejet de
cette conclusion préliminaire dans leur duplique. Niant que l'on puisse mettre
en doute l'impartialité desdites observations, elles soulignent, en outre, que
le président du Tribunal arbitral a formulé celles-ci ès qualités, c'est-à-dire
en toute indépendance par rapport aux parties. Elles ajoutent qu'une telle
approche n'avait rien de surprenant dans la mesure où le recours porte sur des
questions ayant fait l'objet d'une opinion dissidente de la part de l'un des
coarbitres, questions "sur lesquelles les avis des membres du Tribunal arbitral
ont dû être divergents".
A lire la remarque introductive précitée, il n'est pas du tout certain que le
président du Tribunal arbitral se soit exprimé au nom de la majorité des
membres du panel. Sans doute ne l'a-t-il pas fait en son nom personnel, soit en
tant que simple particulier, mais bien comme président de la formation
arbitrale. Cependant, dès lors qu'il a déclaré ne pas agir au nom de celle-ci,
il paraît difficile d'admettre qu'il l'ait fait aussi pour le compte de
l'arbitre qui s'est joint à lui relativement à la solution adoptée dans le
dispositif de la sentence attaquée. Force est d'en conclure qu'il a exposé son
propre point de vue, fût-il président du Tribunal arbitral, comme auraient pu
le faire ses coarbitres si l'occasion leur en avait été fournie. Ce point de
vue n'est donc pas déterminant puisque sa paternité ne peut pas être attribuée
à la majorité des arbitres. Partant, abstraction en sera faite dans l'examen du
présent recours, sans égard à son prétendu manque d'objectivité. La conséquence
logique de cette conclusion est que toutes les remarques formulées dans la
réplique au sujet des observations du président du Tribunal arbitral ne seront
pas non plus prises en considération dans le cadre de cet examen.

2.2.3. La partie recourante ne peut se servir de la réplique ni pour invoquer
des moyens, de fait ou de droit, qu'elle n'avait pas présentés en temps utile,
c'est-à-dire avant l'expiration du délai de recours non prolongeable (art. 100
al. 1 LTF en liaison avec l'art. 47 al. 1 LTF), ni pour compléter, hors délai,
une motivation insuffisante (arrêt 4A_34/2015 du 6 octobre 2015 consid. 2.2).
En l'espèce, on peut douter, à la lecture de la réplique, que la recourante ait
respecté cette limitation jurisprudentielle en se bornant à répondre aux
arguments soulevés dans la réponse des intimées, en particulier dans le
chapitre IV de son écriture, intitulé: "De la pratique du Tribunal arbitral
durant l'arbitrage".

2.2.4. Enfin, sur le vu des pièces qui lui ont été soumises, la Cour de céans
estime être tout à fait en mesure de statuer en l'état du dossier qu'elle a
constitué. Aussi ne donnera-t-elle pas suite à la requête de la recourante,
d'ailleurs insuffisamment motivée, tendant à ce qu'au minimum l'intégralité des
ordonnances de procédure rendues dans cet arbitrage soit soumise au Tribunal
fédéral par le Tribunal arbitral.

3. 
Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits constatés dans la sentence
attaquée (cf. art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter d'office
les constatations des arbitres, même si les faits ont été établis de manière
manifestement inexacte ou en violation du droit (cf. l'art. 77 al. 2 LTF qui
exclut l'application de l'art. 105 al. 2 LTF). En revanche, comme c'était déjà
le cas sous l'empire de la loi fédérale d'organisation judiciaire (cf. ATF 129
III 727 consid. 5.2.2; 128 III 50 consid. 2a et les arrêts cités), le Tribunal
fédéral conserve la faculté de revoir l'état de fait à la base de la sentence
attaquée si l'un des griefs mentionnés à l'art. 190 al. 2 LDIP est soulevé à
l'encontre dudit état de fait ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux
doivent être exceptionnellement pris en considération dans le cadre de la
procédure du recours en matière civile (arrêt 4A_42/2016 du 3 mai 2016
consid.3).
C'est le lieu d'observer que les constatations du tribunal arbitral quant au
déroulement de la procédure lient aussi le Tribunal fédéral, sous les mêmes
réserves, qu'elles aient trait aux conclusions des parties, aux faits allégués
ou aux explications juridiques données par ces dernières, aux déclarations
faites en cours de procès, aux réquisitions de preuves, voire au contenu d'un
témoignage ou d'une expertise ou encore aux informations recueillies lors d'une
inspection oculaire (arrêt 4A_54/2015 du 17 août 2015 consid. 2.3 citant l'ATF
140 III 16 consid. 1.3.1).

4. 
Dans un unique moyen divisé en deux branches, la recourante, invoquant l'art.
190 al. 2 let. d LDIP, reproche au Tribunal arbitral d'avoir traité deux
problèmes litigieux touchant le calcul du dommage subi par elle en raison du
défaut de livraison des quantités résiduelles du contrat de 1978 (  the 1978
shortfall) sans avoir interpellé, au préalable, les parties sur des questions
juridiques et factuelles qu'elles n'avaient jamais plaidées, ce qui l'aurait
amené à fonder sa sentence sur des motifs imprévisibles pour les parties et à
violer de la sorte son droit d'être entendue.

4.1. En Suisse, le droit d'être entendu se rapporte surtout à la constatation
des faits. Le droit des parties d'être interpellées sur des questions
juridiques n'est reconnu que de manière restreinte. En règle générale, selon
l'adage  jura novit curia, les tribunaux étatiques ou arbitraux apprécient
librement la portée juridique des faits et ils peuvent statuer aussi sur la
base de règles de droit autres que celles invoquées par les parties. En
conséquence, pour autant que la convention d'arbitrage ne restreigne pas la
mission du tribunal arbitral aux seuls moyens juridiques soulevés par les
parties, celles-ci n'ont pas à être entendues de façon spécifique sur la portée
à reconnaître aux règles de droit. A titre exceptionnel, il convient de les
interpeller lorsque le juge ou le tribunal arbitral envisage de fonder sa
décision sur une norme ou une considération juridique qui n'a pas été évoquée
au cours de la procédure et dont les parties ne pouvaient pas supputer la
pertinence (ATF 130 III 35 consid. 5 et les références). Au demeurant, savoir
ce qui est imprévisible est une question d'appréciation. Aussi le Tribunal
fédéral se montre-t-il restrictif dans l'application de ladite règle pour ce
motif et parce qu'il convient d'avoir égard aux particularités de ce type de
procédure en évitant que l'argument de la surprise ne soit utilisé en vue
d'obtenir un examen matériel de la sentence par l'autorité de recours (arrêt
4A_634/2014 du 21 mai 2015 consid. 4.1 et les arrêts cités).
Cette jurisprudence ne concerne pas l'établissement des faits. En ce domaine,
le droit d'être entendu permet certes à chaque partie de s'exprimer sur les
faits essentiels pour la sentence à rendre, de proposer ses moyens de preuve
sur les faits pertinents et de prendre part aux séances du tribunal arbitral.
Il n'exige pas, en revanche, des arbitres qu'ils sollicitent une prise de
position des parties sur la portée de chacune des pièces produites, pas plus
qu'il n'autorise l'une des parties à limiter l'autonomie du tribunal arbitral
dans l'appréciation d'une pièce déterminée en fonction du but assigné par elle
à cet élément de preuve. Aussi bien, si chaque partie pouvait décider par
avance, pour chaque pièce produite, quelle sera la conséquence probatoire que
le tribunal arbitral sera autorisé à en tirer, le principe de la libre
appréciation des preuves, qui constitue un pilier de l'arbitrage international,
serait vidé de sa substance (arrêt 4A_538/2012 du 17 janvier 2013 consid. 5.1
et les références).

4.2. Avant d'examiner les mérites du double grief formulé par la recourante et
pour en saisir la portée, il sied de résumer, à titre liminaire, les motifs
exposés par le Tribunal arbitral dans le passage de sa sentence consacré aux
questions litigieuses, à savoir le chapitre VII, intitulé "  Counterclaim for
the shortfall under the 1978 oil contract " (sentence, n. 145 à 224), et le
chapitre XI, intitulé "  Quantum of the 1978 shortfall claim " (sentence, n.
374 à 542).

4.2.1. Appliquant le droit iranien, le Tribunal arbitral a constaté, tout
d'abord, que, lors d'une réunion tenue le 4 décembre 1978 à Téhéran, Z.________
et X.________ étaient convenues de modifier le contrat de 1978 en ce sens que
toute quantité résiduelle de pétrole y relative qui n'aurait pas été livrée en
décembre 1978 le serait en 1979, aux conditions dudit contrat.
Le Tribunal arbitral a examiné ensuite la question de l'impact de la force
majeure - à savoir l'impossibilité pour Z.________ d'honorer ses engagements
contractuels du 1er novembre 1978 au 4 mars 1979, liée aux événements survenus
en Iran à l'époque de la révolution islamique - sur l'obligation de livrer la
quantité résiduelle afférente au contrat de 1978. Il est arrivé à la conclusion
que Z.________ était, en principe, tenue d'exécuter cette obligation dès le
moment où la situation de force majeure avait disparu, c'est-à-dire à partir du
5 mars 1979.
Dans l'étape suivante de son raisonnement, le Tribunal arbitral s'est demandé
quelle pouvait être l'incidence, sur ladite obligation, du défaut de paiement
par X.________ des 50 livraisons de pétrole intervenues de septembre à décembre
1978 au titre du même contrat. Il a relevé, à cet égard, que chacune des
parties invoquait l' exceptio non adimpleti contractus pour refuser de
s'exécuter: Z.________, pour différer la livraison de la quantité résiduelle
jusqu'au paiement du pétrole livré; X.________, pour retenir ce paiement au
motif que le Premier Ministre d'Iran, Chapour Bakhtiar, avait déclaré, le 11
janvier 1979, quatre jours avant la date d'échéance du paiement de la première
des 50 livraisons de pétrole, que son pays ne fournirait plus de pétrole à
Israël, déclaration que X.________ assimilait à une rupture anticipée du
contrat. Le Tribunal arbitral a commencé par l'examen de ce dernier argument.
Il l'a écarté, après avoir analysé les avis des experts des deux parties
concernant le droit iranien, du fait qu'il n'était pas certain, selon lui, que
les déclarations de Chapour Bakhtiar aient visé aussi les obligations de
livraison existantes. A ses yeux, X.________ ne pouvait donc pas retenir le
paiement des factures en souffrance qui étaient devenues exigibles durant la
période de force majeure, si bien que Z.________, de son côté, était en droit
de refuser la livraison de la quantité résiduelle du contrat de 1978. Cela
posé, le Tribunal arbitral a toutefois observé qu'une décision concernant les
obligations réciproques des parties devait prendre en considération les
événements survenus après la fin de la période de force majeure. Sur ce point,
il a fait référence expresse à un passage du mémoire après enquêtes de
X.________ dans lequel cette partie avait fait valoir que peu de temps après la
fin de la période de force majeure et au plus tard le 28 juin 1979, il était
devenu évident que Z.________ ne lui fournirait plus de pétrole quand bien même
elle accepterait de lui payer les 50 livraisons déjà effectuées. Le Tribunal
arbitral a alors passé en revue les communications échangées par les parties du
6 mars 1979 au 28 juin 1979, date à laquelle les représentants de celles-ci
s'étaient rencontrés à Londres, pour déterminer si l'affirmation de X.________
était avérée, ce qui l'a conduit à admettre en ces termes que ces
communications réciproques avaient atteint le niveau d'une répudiation
inconditionnelle de Z.________ de son obligation de livrer la quantité
résiduelle due selon le contrat de 1978, si bien que X.________ avait acquis,
au plus tard le 28 juin 1979, une prétention en dommages-intérêts de ce chef
(sentence, n. 203) :

" In the Arbitral Tribunal's view, Z.________'s communications had by the end
of the meeting of June 28, 1979, reached the level of an unconditional
repudiation of its obligation to deliver the balance of the 1978 Contract. As
such they amounted, in the Arbitral Tribunal's view, to a breach of the 1978
Oil Contract. As a result, X.________ acquired at latest by June 28, 1979 a
claim for damages for non-delivery of the 1978 shortfall... ".
Jugeant que les excuses avancées par Z.________ pour se soustraire à son
obligation de livrer cette quantité résiduelle n'étaient pas valables, le
Tribunal arbitral a rejeté l' exceptio non adimpleti contractus à l'égard des
deux parties, admis que chacune de celles-ci avait violé le contrat de 1978 et
dit que cette violation de leurs obligations réciproques avait engendré deux
créances antagonistes: celle de Z.________ au titre du paiement des 50
livraisons et celle de X.________ au titre du préjudice lié à la quantité
résiduelle du contrat 1978 non fournie. Constatant que le montant de la
première créance, soit 445'336'076,36 USD, avait déjà été arrêté dans la
sentence du 17 juin 2003, il a réservé la fixation ultérieure du montant de la
créance de X.________ (sentence, n. 223 s.)

4.2.2. S'agissant du quantum de la créance relative au défaut de livraison de
la quantité résiduelle de pétrole que Z.________ aurait dû livrer à X.________,
le Tribunal arbitral a commencé par résumer l'argumentation des parties. Il a
souligné, à ce propos, qu'aucune de celles-ci n'avait opéré de distinction
entre cette quantité résiduelle et les livraisons qui auraient dû intervenir en
exécution du prétendu contrat de 1979 dont il n'a pas admis l'existence. Puis
il a retenu, sur la base des allégations des deux parties, que la totalité de
la quantité résiduelle dudit contrat, soit 2'884'000 tonnes, aurait dû être
livrée en 1979 et que les livraisons auraient commencé le 5 mars 1979
(sentence, n. 425 à 436).
Le Tribunal arbitral s'est interrogé ensuite sur le point de savoir durant quel
laps de temps les livraisons ayant débuté à cette date auraient été menées à
terme. Cherchant à déterminer quelle eût été la volonté hypothétique des
cocontractantes à ce sujet, il a noté, tout d'abord, que si les intéressées
étaient bien convenues, lors de leur réunion du 4 décembre 1978, que ces
livraisons s'effectueraient aux termes et conditions du contrat de 1978, elles
n'avaient pas conclu un accord spécifique en vertu duquel la quantité
résiduelle de pétrole à livrer serait répartie de manière uniforme (" evenly
spread ") sur toute l'année 1979 conformément à l'une des stipulations de ce
contrat. Du reste, elles avaient raisonné en partant de l'idée qu'à cette
quantité résiduelle serait venue s'ajouter la quantité correspondant aux
livraisons à exécuter sur la base du prétendu contrat de 1979. Cette remarque
liminaire faite, le Tribunal arbitral a expliqué pourquoi, selon lui, une
répartition uniforme, sur le solde de l'année 1979 (i.e. les dix mois courant
de mars à décembre 1979), de la quantité relativement faible à délivrer cette
année-là au titre du contrat de 1978 (2,884 millions de tonnes) n'eût pas été
une solution raisonnable, alors que ledit contrat prévoyait un rythme de
livraison de quelque 3,9 millions de tonnes par trimestre. C'est la raison pour
laquelle il a choisi de se fonder sur le calendrier que les parties avaient
anticipé lors de la réunion du 4 décembre 1978. Ce faisant, il s'est basé sur
un télex du dénommé E.________, représentant de X.________, daté du 6 décembre
1978, dans lequel il était fait état d'un accord des parties, passé à
l'occasion de cette réunion, d'après lequel cinq bateaux de X.________
prendraient livraison d'une partie de la quantité résiduelle - soit 1'030'000
tonnes - en décembre 1978. Le Tribunal arbitral s'est ensuite penché plus avant
sur le témoignage fourni par cette personne, entendue comme témoin de
X.________, qu'il a jugé convaincant. Il en a déduit que le solde de cette
quantité résiduelle (environ 1,9 million de tonnes) aurait été livré en janvier
1979. Considérant que les parties eussent appliqué un calendrier similaire à la
fin de la période de force majeure, il a décidé que 1'030'000 tonnes eussent
été livrées en mars 1979 déjà et le solde de 1'854'000 tonnes le mois suivant,
i.e. en avril 1979. Le Tribunal arbitral a indiqué encore une série de motifs,
tels que la capacité de transport des bateaux de X.________, le niveau de
production de Z.________ et les prix pratiqués sur le marché pétrolier à
l'époque, propres à étayer cette décision. Il est arrivé à la conclusion que
les dommages-intérêts devant être alloués à X.________ correspondaient au
préjudice subi par cette société du fait qu'elle n'avait pas reçu la quantité
résiduelle de pétrole à laquelle elle pouvait prétendre en exécution du contrat
de 1978 dans la période comprise entre le 5 mars et la fin avril 1979, en
précisant que X.________, sur qui pesait le fardeau de la preuve du dommage
allégué, ne pouvait pas exiger une compensation supérieure à celle qui pouvait
être déduite des dépositions de son propre témoin (sentence, n. 425 à 454).
Sur la base de ces prémisses, le Tribunal arbitral a procédé au calcul de la
créance de X.________, qu'il a arrêtée à 99'455'767 USD, intérêts en sus
(sentence, n. 455 à 542). Après quoi, il a encore calculé les intérêts dus sur
la créance de Z.________ (sentence, n. 543 à 598) avant de procéder à la
compensation des créances réciproques, ce qui lui a permis de fixer la créance
résiduelle de Z.________ envers X.________ à la somme de 1'123'709'315 USD
incluant les intérêts dus jusqu'au 31 décembre 2014 (sentence, n. 599 à 628).

4.3. En premier lieu, la recourante expose que le Tribunal arbitral a calculé
le dommage résultant du défaut de livraison de la quantité résiduelle due en
vertu du contrat de 1978 à compter du 5 mars 1979, date à laquelle les
livraisons de pétrole auraient pu reprendre à la fin de la période de force
majeure, tout en fixant au 28 juin 1979 la date à laquelle Z.________ avait
répudié le contrat de 1978, en violation de ses obligations. Selon elle,
semblable argumentation recèlerait une contradiction irréductible, impossible à
prévoir pour les parties. Aussi le Tribunal arbitral aurait-il dû l'interpeller
pour lui permettre de fournir un calcul du dommage basé sur l'hypothèse d'une
date de livraison (le 28 juin 1979) postérieure à la date de la violation
contractuelle (le 5 mars 1979), calcul qui eût révélé un préjudice deux fois
plus élevé que celui retenu par les arbitres majoritaires.
Bien qu'elle s'en défende et comme les intimées le soulignent à bon droit, la
recourante simplifie à l'excès, sinon déforme, le raisonnement tenu par le
Tribunal arbitral lorsqu'elle affirme que celui-ci a retenu que Z.________
aurait dû livrer la quantité résiduelle afférente au contrat de 1978 en mars et
avril 1979 déjà, tout en constatant par ailleurs qu'elle n'avait aucune
obligation de le faire avant qu'elle ne violât ledit contrat, le 28 juin 1979,
en le répudiant. Il suffit de lire le résumé de la sentence, tel qu'il a été
effectué ci-dessus, pour s'en convaincre. De surcroît, la recourante fait fi de
l'expression "  at latest " précédant l'indication de la date du 28 juin 1979
dans le passage précité du n. 203 de la sentence.
Quoi qu'il en soit, sous l'angle du droit d'être entendu, peu importe de savoir
si le Tribunal arbitral s'est contredit ou non dans l'argumentation qu'il a
retenue, ce qui ne suffirait d'ailleurs pas non plus à fonder le grief de
violation de l'ordre public au sens de l'art. 190 al. 2 let. e LDIP, eût-il été
invoqué (arrêt 4A_150/2012 du 12 juillet 2012 consid. 5.2.1). Fût-elle
insoutenable, la motivation de la sentence sur ce point échapperait du reste
aussi à toute sanction. Seule est, dès lors, déterminant son éventuel caractère
imprévisible dans l'acception restrictive donnée à cet adjectif par la
jurisprudence fédérale susmentionnée. Or, sans être sérieusement contredites
par l'intéressée, les intimées démontrent de façon convaincante, sous n. 66 à
74 de leur réponse, que le raisonnement du Tribunal arbitral prend appui sur
les propres affirmations de la recourante. Il appert, en particulier, de cette
démonstration que la recourante elle-même avait vu dans le 28 juin 1979 la date
à laquelle le refus de Z.________ de lui livrer la quantité résiduelle du
contrat de 1978 avait été définitivement établi. En tout état de cause, c'est
en vain qu'elle plaide l'effet de surprise sur ce point. Que le Tribunal
arbitral retînt l'une ou l'autre des différentes dates qui étaient susceptibles
d'entrer en ligne de compte en l'espèce n'avait, au demeurant, rien d'insolite,
s'agissant d'une affaire complexe et d'une durée peu ordinaire qui commandait
aux parties d'examiner tous les scénarios envisageables. A cet égard, on est
bien loin ici des situations dans lesquelles la jurisprudence a admis
l'argument tiré de l'imprévisibilité (cf., par ex., l'ATF 130 III 35 consid.
6.2 et l'arrêt 4A_400/2008 du 9 février 2009 consid. 3.2).

4.4. Dans sa seconde branche, le grief considéré porte sur le calendrier des
livraisons de la quantité résiduelle de pétrole au titre du contrat de 1978. La
recourante reproche au Tribunal arbitral d'avoir omis d'interpeller les parties
quant à leur réelle et commune intention au sujet de ce calendrier, après qu'il
eut constaté qu'elles avaient omis de traiter cette question et, partant,
d'avoir déterminé de manière totalement inattendue leur volonté hypothétique
sur un point primordial pour le calcul du dommage.
Le reproche formulé par la recourante est dénué de tout fondement, tant il est
vrai que l'argumentation du Tribunal arbitral à cet égard, telle qu'elle a été
résumée ci-dessus (cf. consid. 4.2.2), ne comporte rien d'imprévisible pour les
parties, et singulièrement pour la recourante, quelle qu'en soit la pertinence
d'ailleurs. Si tant est que l'intéressée n'ait pas pu la prévoir, ainsi qu'elle
le soutient aujourd'hui, c'est son manque d'imagination  pendente lite qu'elle
doit blâmer au lieu de chercher à en reporter les effets sur le Tribunal
arbitral et, par voie de conséquence, sur les intimées. Il est constant que les
parties se sont exprimées sur la question du calendrier hypothétique des
livraisons de pétrole à effectuer par Z.________ en 1979. Ce faisant, elles
n'ont toutefois pas distingué entre la quantité résiduelle du contrat de 1978
(environ 2,9 millions de tonnes) et la quantité qui aurait dû être livrée en
exécution du prétendu contrat de 1979 (une quinzaine de millions de tonnes). Et
c'est uniquement en fonction de cette hypothèse - i.e. des livraisons
intervenant tout au long de l'année 1979 au double titre du contrat de 1978
(quantité résiduelle) et du prétendu contrat de 1979 - qu'elles avaient admis
l'application du principe de la répartition uniforme des livraisons pour toutes
celles qui seraient effectuées en 1979. Or, Z.________ avait d'emblée contesté
l'existence, alléguée par X.________, du contrat de 1979, et le Tribunal
arbitral lui a d'ailleurs donné raison sur ce point (sentence, n. 293). Aussi
la recourante devait-elle d'emblée envisager l'hypothèse dans laquelle
l'existence dudit contrat ne serait pas reconnue et, partant, se demander
quelle incidence cet état de choses pourrait avoir sur le calendrier de
livraison de la quantité résiduelle du contrat de 1978. Analysant ce cas de
figure, elle ne pouvait pas exclure que le Tribunal arbitral fût enclin à
considérer que cette quantité-là, relativement faible par rapport à la quantité
totale prévue par le contrat en question, aurait dû être livrée en priorité,
dans le plus court laps de temps possible, une fois terminée la période de
force majeure, autrement dit à compter du 5 mars 1979. Elle le pouvait d'autant
moins que l'idée d'une livraison rapide, en deux fois, des quantités
résiduelles correspondait à l'expectative des parties à la date du 4 décembre
1978, ainsi que l'avait exposé son propre témoin, M. E.________, sur les dires
duquel il était possible, sinon certain, que le Tribunal arbitral se baserait
pour fixer le calendrier de cette livraison, s'agissant d'une preuve dont le
fardeau incombait à X.________. Dès lors, c'est en vain que la recourante
plaide l'effet de surprise à ce propos.

5. 
La recourante se réfère, par ailleurs, à une prétendue pratique, instaurée par
feu l'ancien président du Tribunal arbitral, consistant à poser des questions
aux parties. Elle reproche ainsi au Tribunal arbitral, présidé par un nouvel
arbitre, de ne s'être point conformé à cette pratique, relativement aux deux
questions développées par elle sous l'angle de la violation du droit d'être
entendu, d'autant plus que, de son propre aveu, le nouveau président de la
formation arbitrale avait dû relever un véritable défi, eu égard au volume du
dossier et à la complexité de l'affaire.
Les allégations de la recourante sur ce point apparaissent, pour l'essentiel,
dans la réplique et revêtent à l'évidence un caractère appellatoire, si bien
que leur recevabilité est déjà sujette à caution (cf. consid. 2.2.3 ci-dessus).
Quoi qu'il en soit, elles ne suffisent pas à établir l'existence d'une
véritable pratique allant bien au-delà des questions que tout tribunal arbitral
est amené à poser aux parties dans le cours normal d'une procédure longue et
complexe comme celle qui a été close par la sentence attaquée. Au demeurant,
quand bien même l'usage allégué se serait-il transformé en véritable règle de
procédure, sa méconnaissance ne tomberait pas nécessairement sous le coup de
l'art. 190 al. 2 let. d LDIP. Cette disposition, en effet, ne sanctionne pas la
violation de n'importe quelle règle de procédure; encore faut-il, pour qu'elle
trouve à s'appliquer, qu'il y ait eu une violation du droit d'être entendu sous
l'une des formes admises par la jurisprudence (BERNARD CORBOZ, in Commentaire
de la LTF, 2e éd. 2014, n° 147 ad art. 77 LTF et les arrêts cités). Or, cette
condition n'est pas réalisée en l'espèce, dès lors qu'il a été démontré, plus
haut, que le Tribunal arbitral pouvait renoncer à interpeller les parties avant
de trancher les deux questions litigieuses.

6. 
Au terme de cet examen, il y a lieu de rejeter le recours. La recourante, qui
succombe, devra payer les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 LTF) et
verser des dépens aux intimées (art. 68 al. 1 et 2 LTF), lesquelles en seront
créancières solidaires. L'indemnité allouée à ces dernières sera prélevée sur
les sûretés fournies par la recourante.

7. 
L'attention des parties est attirée sur le fait que la créance solidaire des
intimées à l'encontre de la recourante, à tout le moins dans la mesure où
Z.________ en est cotitulaire, pourrait tomber sous le coup de l'une ou l'autre
des dispositions de l'ordonnance du Conseil fédéral suisse du 11 novembre 2015
instituant des mesures à l'encontre de la République islamique d'Iran (RO 2016
59 ss). Dès lors, une copie du présent arrêt sera communiquée au Secrétariat
d'Etat à l'économie (SECO) à titre d'information.

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1. 
Le recours est rejeté.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 200'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 
La recourante versera aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de
250'000 fr. à titre de dépens; cette indemnité sera prélevée sur les sûretés
déposées à la Caisse du Tribunal fédéral.

4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au président du
Tribunal arbitral. Il est également communiqué au Secrétariat d'Etat à
l'économie (SECO) à titre d'information.

Lausanne, le 27 juin 2016

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Kiss

Le Greffier: Carruzzo

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