Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.319/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
4A_319/2015

Arrêt du 5 janvier 2016

Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes les Juges Kiss, présidente, Hohl et Niquille.
Greffier: M. Carruzzo.

Participants à la procédure
A.________ SA,
représentée par Mes Nicolas C. Ulmer et Elodie Delacombaz, avocats,
recourante,

contre

B.________ SA,
représentée par Me Vanessa Liborio Garrido de Sousa, avocate,
intimée.

Objet
arbitrage international; ordre public,

recours en matière civile contre la sentence finale rendue le 11 mai 2015 par
le Tribunal arbitral CCI.

Faits:

A. 
B.________ SA (ci-après: l'intimée) est une société de droit... spécialisée
dans les travaux routiers.
A.________ SA (ci-après: la recourante) est une société d'État en charge des
autoroutes et routes nationales de....

Le 9 mars 2009, la recourante et l'intimée ont conclu un contrat portant sur la
conception et la construction d'une autoroute en.... Ce contrat, incluant une
clause compromissoire, était régi par le droit....

Le 28 mars 2011, l'intimée a résilié ledit contrat. La recourante en a fait de
même les 8 et 19 avril 2011. Il en est résulté un différend entre les parties
au sujet de la validité de ces résiliations.

B. 
Le 19 décembre 2011, l'intimée a déposé une requête d'arbitrage auprès du
Secrétariat de la Cour d'arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale
(CCI) aux fins d'obtenir le paiement d'un montant total de... à divers titres.
La recourante, quant à elle, a conclu au rejet intégral de la demande et a
formé une demande reconventionnelle.

Un Tribunal arbitral de trois membres a été constitué, son siège fixé à Genève
et l'anglais désigné comme langue de l'arbitrage. Il a rendu sa sentence finale
le 11 mai 2015. Au point  viii du dispositif de celle-ci, il a rejeté, à la
majorité, la demande reconventionnelle de la recourante tendant à faire
infliger à l'intimée une pénalité de....

C. 
Le 17 juin 2015, la recourante a formé un recours en matière civileen vue
d'obtenir l'annulation partielle de ladite sentence, plus précisément des
chiffres  xiii (recte:  viii),  xvet  xxxvii (recte:  xxvii) de son dispositif.

Dans sa réponse du 21 septembre 2015, l'intimée a conclu au rejet du recours.

Se référant, dans sa réplique du 13 novembre 2015, à un addendum du 12 octobre
2015 par lequel le Tribunal arbitral a modifié notamment les chiffres  xvet 
xxvii de sa sentence du 11 mai 2015, la recourante a retiré les griefs formulés
dans son recours en ce qui concerne ces chiffres-là.

Le même jour, l'intimée, sans y avoir été invitée, a déposé une duplique au
terme de laquelle elle a maintenu ses précédentes conclusions.

Considérant en droit:

1. 
D'après l'art. 54 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral rédige son arrêt dans une
langue officielle, en règle générale dans la langue de la décision attaquée.
Lorsque cette décision a été rendue dans une autre langue (ici l'anglais), le
Tribunal fédéral utilise la langue officielle choisie par les parties. Devant
le Tribunal arbitral, celles-ci se sont servies de l'anglais, tandis que, dans
les mémoires qu'elles ont adressés au Tribunal fédéral, elles ont employé
toutes deux le français. Conformément à sa pratique, le Tribunal fédéral
rendra, par conséquent, son arrêt en français.

2. 
Dans le domaine de l'arbitrage international, le recours en matière civile est
recevable contre les décisions de tribunaux arbitraux aux conditions fixées par
les art. 190 à 192 LDIP (art. 77 al. 1 let. a LTF). Qu'il s'agisse de l'objet
du recours, de la qualité pour recourir, du délai de recours ou encore des
motifs de recours invoqués, aucune de ces conditions de recevabilité ne fait
problème en l'espèce. Rien ne s'oppose donc à l'entrée en matière.

3. 
La recourante a expressément retiré les griefs, tirés de la violation de
l'interdiction de statuer  ultra ou extra petita (art. 190 al. 2 let. c LDIP),
qu'elle avait formulés initialement en rapport avec les chiffres  xvet  xxvii
 de la sentence attaquée. Par conséquent, la Cour de céans n'examinera que le
seul grief restant.

4. 
Invoquant l'art. 190 al. 2 let. e LDIP, la recourante dénonce une violation de
l'ordre public matériel en raison de l'atteinte prétendument portée par la
sentence du 11 mai 2015 au principe de la fidélité contractuelle.

4.1. Une sentence est contraire à l'ordre public matériel lorsqu'elle viole des
principes fondamentaux du droit de fond au point de ne plus être conciliable
avec l'ordre juridique et le système de valeurs déterminants; au nombre de ces
principes figurent, notamment, la fidélité contractuelle, le respect des règles
de la bonne foi, l'interdiction de l'abus de droit, la prohibition des mesures
discriminatoires ou spoliatrices, ainsi que la protection des personnes
civilement incapables (ATF 132 III 389 consid. 2.2.1).

Le principe de la fidélité contractuelle, rendu par l'adage  pacta sunt
servanda, au sens restrictif que lui donne la jurisprudence relative à l'art.
190 al. 2 let. e LDIP, n'est violé que si le tribunal arbitral refuse
d'appliquer une clause contractuelle tout en admettant qu'elle lie les parties
ou, à l'inverse, s'il leur impose le respect d'une clause dont il considère
qu'elle ne les lie pas. En d'autres termes, le tribunal arbitral doit avoir
appliqué ou refusé d'appliquer une disposition contractuelle en se mettant en
contradiction avec le résultat de son interprétation à propos de l'existence ou
du contenu de l'acte juridique litigieux. En revanche, le processus
d'interprétation lui-même et les conséquences juridiques qui en sont
logiquement tirées ne sont pas régis par le principe de la fidélité
contractuelle, de sorte qu'ils ne sauraient prêter le flanc au grief de
violation de l'ordre public. Le Tribunal fédéral a souligné à maintes reprises
que la quasi-totalité du contentieux dérivé de la violation du contrat est
exclue du champ de protection du principe  pacta sunt servanda (arrêt 4A_634/
2014 du 21 mai 2015 consid. 5.1.1).

4.2.

4.2.1. Dans la procédure arbitrale, la recourante, se fondant sur une
disposition particulière d'une loi ressortissant au droit public..., a réclamé
à l'intimée le paiement de la somme précitée de... à titre de pénalité. Le
Tribunal arbitral, dans sa majorité, a jugé que les conditions d'application de
cette disposition étaient en principe réalisées, mais que l'application de deux
articles du Code civil... justifiait d'écarter la prétention litigieuse
(sentence, n. 1683 à 1695).

Forte de l'avis de l'arbitre minoritaire résumé dans le corps de la sentence
(n. 1696 et 1697), la recourante, soulignant le caractère impératif de la
disposition légale que les deux arbitres majoritaires ont renoncé à appliquer
et plaidant l'inapplicabilité,  in casu, des dispositions du Code civil...
invoquées par ces derniers, reproche au Tribunal arbitral d'avoir violé le
principe  pacta sunt servandaet, plus généralement, d'avoir rendu une sentence
incompatible avec l'ordre public matériel.

4.2.2. Semblable argumentation est tout à fait impropre à établir une
quelconque incompatibilité de la sentence incriminée avec l'ordre public
matériel au sens de l'art. 190 al. 2 let. e LDIP, tel qu'interprété par la
jurisprudence susmentionnée, et singulièrement au regard du principe de la
fidélité contractuelle.

D'abord, la recourante oublie, lorsqu'elle fait sien l'avis de l'arbitre
minoritaire, qu'une opinion dissidente ne fait pas partie de la sentence,
qu'elle y ait été formellement intégrée ou non, si bien qu'elle demeure un avis
indépendant n'ayant aucune portée juridique propre (arrêt 4P.23/1991 du 25 mai
1992 consid. 2b et les références; voir aussi l'arrêt 4A_584/2009 du 18 mars
2010 consid. 3.3). Cette remarque vaut aussi en ce qui concerne l'argument tiré
de la prétendue mauvaise foi de l'intimée, s'agissant du moment où celle-ci
avait formulé des demandes d'acomptes supplémentaires (recours, n. 47),
argument que la recourante fonde également sur l'opinion dissidente exprimée à
ce propos par l'arbitre minoritaire (sentence, n. 1697).

Ensuite, le caractère "impératif" ou de "règle légale stricte" de la
disposition du droit public... entrant en ligne de compte n'est nullement
démontré par la recourante, laquelle ne fait que reprendre le qualificatif " 
mandatory " utilisé par l'arbitre minoritaire sans accompagner pareil renvoi de
références jurisprudentielles et/ou doctrinales.

Enfin et surtout, quand bien même la nature juridique de cette disposition
correspondrait à celle que lui prête la recourante, cette dernière ne pourrait
rien en tirer en sa faveur. C'est, en effet, le lieu de rappeler que le motif
de recours prévu par l'art. 190 al. 2 let. e LDIP ne vise pas à sanctionner le
défaut d'application ou la mauvaise application du droit étranger applicable au
fond du litige, fût-il impératif (ATF 132 III 389 consid. 2.2.2 p. 394).

Cela étant, le présent recours ne peut qu'être rejeté.

5. 
La recourante, qui succombe, devra payer les frais de la procédure fédérale
(art. 66 al. 1 LTF) et verser des dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 

 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1. 
Le recours est rejeté.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 25'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 30'000 fr. à titre de
dépens.

4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au président du
Tribunal arbitral CCI.

Lausanne, le 5 janvier 2016

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Kiss

Le Greffier: Carruzzo

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