Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.22/2015
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
4A_22/2015

Arrêt du 11 mai 2015

Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Kiss, présidente, Kolly et Hohl.
Greffier : M. Ramelet.

Participants à la procédure
1. A.A.________,
2. B.A.________,
3. C.A.________,
tous trois représentés par Me Marc Mathey-Doret,
recourants,

contre

B.________ SA, représentée par Me Jacques Berta,
intimée.

Objet
contrat de bail à loyer, congé annulable,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton
de Genève, Chambre des baux et loyers, du 24 novembre 2014.

Faits :

A. 

A.a. Par contrat du 12 janvier 1996, B.________ SA (bailleresse) a remis à bail
au gastroentérologue et interniste A.________ à partir du 1er février 1996 un
local commercial dont la surface est de 206 m2, situé au 1er étage de
l'immeuble sis 1 rue xxx, à Genève, pour qu'il y exploite son cabinet médical.
Le bail, conclu pour une durée initiale de dix ans, se renouvelait tacitement
de cinq ans en cinq ans, sauf résiliation signifiée six mois avant l'échéance.
Par formule officielle du 6 juillet 2004, une nouvelle échéance du bail a été
proposée au 31 janvier 2010, avec reconduction de cinq ans en cinq ans. Le
médecin A.________ n'a pas contesté cette modification du bail.
Le loyer annuel se montait en dernier lieu à 41'124 fr., charges de 2'400 fr.
par an non comprises.
A.________ est décédé le 12 août 2011; il a laissé pour seuls héritiers ses
filles A.A.________ et B.A.________, ainsi que son fils C.A.________ (les
héritiers ou les locataires).
Requis par la bailleresse, selon pli du 12 septembre 2011, d'indiquer les
intentions des héritiers quant au contrat de bail dont leur père était
titulaire, C.A.________, à une date indéterminée, a pris langue
téléphoniquement avec la régie immobilière en charge du bâtiment et lui a
demandé notamment si le versement aux héritiers d'une indemnité en cas de
résiliation anticipée du bail de leur part pouvait être envisagé. Une soeur du
prénommé a également téléphoné à la régie immobilière à une date inconnue, mais
le contenu de la conversation n'a pas pu être établi.
Par formule officielle du 6 octobre 2011, la bailleresse a résilié le bail pour
le 31 janvier 2015. Dans la lettre d'accompagnement du même jour, elle a écrit
que le congé était motivé par son souhait de reprendre la libre disposition du
cabinet médical.

A.b. Le 11 octobre 2011, les héritiers en qualité de vendeurs, d'une part,
l'Institut C.________ SA (ci-après: C.________) et le docteur D.________ en
qualité d'acquéreurs, d'autre part, ont signé un contrat portant sur la reprise
par les seconds du cabinet médical du défunt père des premiers; la validité de
l'accord était subordonnée à la condition qu'un nouveau bail à loyer soit
conclu entre les acquéreurs (ou l'un d'entre eux) et la bailleresse ou à ce que
celle-ci donne son accord au transfert du bail existant; le prix de reprise du
cabinet était fixé à 126'000 fr.
Le même jour, les vendeurs et les acquéreurs ont conclu un contrat de reprise
du mobilier pour le prix de 6'000 fr.
Par courrier du 13 octobre 2011, C.A.________, agissant au nom de la
succession, a indiqué à la bailleresse qu'il avait l'intention de remettre le
bail de son défunt père à C.________, qu'un contrat de remise de cabinet avait
été signé et qu'il sollicitait l'accord écrit de la bailleresse au transfert du
bail.
Invitée par C.A.________ le 19 octobre 2011 à motiver la résiliation du bail,
la bailleresse a confirmé dans une lettre du 24 octobre 2011 qu'elle souhaitait
reprendre la libre disposition du cabinet médical, que, dès l'instant où le
congé du 6 octobre 2011 était maintenu, un transfert de bail n'avait pas lieu
d'être, mais qu'elle ne s'opposait pas à ce que les héritiers sous-louent le
cabinet à C.________ jusqu'à l'échéance du bail, soit le 31 janvier 2015.
Le 25 novembre 2011, les locataires ont conclu avec C.________ et D.________ un
avenant au contrat du 11 octobre 2011, selon lequel en particulier le prix de
reprise du cabinet médical était ramené à 50'000 fr. si le congé était confirmé
pour le 31 janvier 2015 et qu'il augmenterait de 10'000 fr. par année de
prolongation du bail, jusqu'en 2021 le cas échéant.
Par pli du 1er décembre 2011, C.A.________ a informé la régie immobilière que
les locaux remis à bail étaient dorénavant sous-loués à C.________ et
D.________ (art.105 al.2 LTF).

B. 
Les héritiers ont contesté la résiliation du bail par requête du 10 novembre
2011 adressée à la Commission genevoise de conciliation en matière de baux et
loyers, concluant à son annulation et à ce que le transfert du bail soit
autorisé en faveur de C.________ et de D.________.
Non conciliée, la cause a été portée devant le Tribunal des baux et loyers du
canton de Genève le 29 février 2012. Les héritiers (demandeurs) ont conclu
principalement à l'annulation du congé et à ce que le transfert de bail soit
autorisé, subsidiairement à ce que le droit au transfert du bail à C.________
et D.________ soit constaté, le bail étant prolongé de six ans, soit jusqu'au
31 janvier 2021.
La bailleresse (défenderesse) a conclu au déboutement des demandeurs.
Le Tribunal des baux et loyers a entendu plusieurs témoins.
Par jugement du 22 novembre 2013, cette autorité a déclaré valable le congé du
6 octobre 2011 et débouté les demandeurs de leurs conclusions en prolongation
de bail.
Saisie d'un appel des demandeurs, qui reprenaient leurs conclusions de première
instance, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice genevoise, par
arrêt du 24 novembre 2014, a entièrement confirmé le jugement attaqué. La cour
cantonale a considéré que le contrat de bail litigieux n'a pas été résilié
contrairement à la bonne foi, que le congé est ainsi valide et qu'une
prolongation de bail ne doit pas être accordée au vu de l'ensemble des éléments
à prendre en compte.

C. 
Les demandeurs exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Ils
concluent principalement à l'annulation de l'arrêt cantonal et à l'annulation
du congé du 6 octobre 2011. Subsidiairement, ils requièrent le renvoi de la
cause à l'autorité cantonale pour complément d'instruction et nouvelle décision
au sens des considérants et, plus subsidiairement, à ce que le bail soit
prolongé de six ans.
L'intimée propose le rejet du recours en tant qu'il est recevable.
L'effet suspensif requis par les recourants leur a été accordé par ordonnance
présidentielle du 10 février 2015.

Considérant en droit :

1. 

1.1. Lorsque les conclusions principales restées litigieuses devant l'autorité
précédente portaient sur l'annulation d'un congé donné au locataire (in casu
aux héritiers de celui-ci) dans le cas d'un bail de durée indéterminée, la
valeur litigieuse équivaut au loyer de la période minimale pendant laquelle le
contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend
jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné; la durée
déterminante pour le calcul ne saurait être inférieure à la période de trois
ans pendant laquelle l'art. 271a al. 1 let. e CO prévoit l'annulabilité d'une
résiliation signifiée après une procédure judiciaire (ATF 137 III 389 consid.
1.1 p. 390).
Le loyer annuel se montant sans les charges à 41'124 fr., la valeur litigieuse
minimale de 15'000 fr. requise en matière de droit du bail (art. 74 al. 1 let.
a LTF) est atteinte.

1.2. Interjeté pour le reste par les demandeurs qui ont succombé dans leurs
conclusions principales en annulation du congé et subsidiaires en prolongation
du bail (art. 76 al. 1 LTF), dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu
en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur
recours (art. 75 LTF), le recours est par principe recevable, puisqu'il a été
déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par
la loi.

1.3. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont
été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion
d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353
consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al.
2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la
cause (art. 97 al. 1 LTF). La partie recourante qui soutient que les faits ont
été constatés d'une manière arbitraire doit satisfaire au principe d'allégation
(art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire soulever expressément ce grief et exposer
celui-ci de façon claire et détaillée (ATF 139 I 229 consid. 2.2 p. 232). Le
Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature
appellatoire (ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261/262; 125 I 492 consid. 1b p.
495).

2. 
Les recourants soutiennent qu'à plusieurs égards les faits ont été établis
arbitrairement.

2.1. Une décision est arbitraire, au sens de l'art. 9 Cst., lorsqu'elle est
manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe
juridique clair et reconnu, ou encore heurte de manière choquante le sentiment
de la justice et de l'équité. Il ne suffit pas que sa motivation soit
insoutenable; encore faut-il que la décision apparaisse arbitraire dans son
résultat. A cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue
que dans la mesure où celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction
manifeste avec la situation effective, adoptée sans motif objectif et en
violation d'un droit certain. Il n'y a pas arbitraire du fait qu'une autre
solution pourrait entrer en considération ou serait même préférable (ATF 140
III 16 consid.2.1 p. 18 s.; 138 III 378 consid. 6.1 p. 379 s.).
De jurisprudence constante, le Tribunal fédéral se montre réservé en matière de
constatation des faits et d'appréciation des preuves, vu le large pouvoir qu'il
reconnaît en la matière aux autorités cantonales (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p.
40; 104 Ia 381 consid. 9 p. 399 et les arrêts cités). Dans ce domaine,
l'autorité verse dans l'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en compte, sans
raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision,
lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore
lorsqu'elle tire des conclusions insoutenables à partir des éléments recueillis
(ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 265; 137 III 226 consid. 4.2 p. 234).

2.2. 

2.2.1. Pour les recourants, la cour cantonale est tombée dans l'arbitraire en
ne retenant pas que le motif réel du congé était d'éviter un transfert du bail
et que la volonté exprimée par la bailleresse de récupérer les locaux n'était
que la conséquence de cet objectif. Ils se réfèrent à une prétendue déclaration
de la bailleresse, - protocolée dans le procès-verbal d'audition du Tribunal
des baux et loyers, daté du 8 février 2013 -, qui constituerait " un véritable
aveu judiciaire ", et à la déposition d'un employé de la régie immobilière en
charge de l'immeuble, à savoir celle de E.________.

2.2.2. La première déclaration à laquelle se rapportent les recourants dans
leur mémoire de recours, figurant dans le " procès-verbal de l'audience de
débats " qui s'est tenue le 8 février 2013 devant le Tribunal des baux et
loyers, n'émane aucunement d'un représentant de la bailleresse, mais d'un
employé, dénommé F.________, de la société anonyme mandatée pour gérer
l'immeuble, qui devait être entendu en qualité de témoin. Or cette personne
morale n'est pas partie au présent procès. Partant, aucun aveu judiciaire ne
peut résulter du témoignage de cet employé.
Le témoin F.________ a affirmé le 8 février 2013 que la bailleresse a notifié
le congé litigieux aux recourants, car elle n'entend pas poursuivre le bail
avec des locataires qu'elle n'a pas choisis et désire rénover entièrement les
locaux, puis les relouer "à un locataire de son choix ".
Pour sa part, le témoin E.________, " responsable gérance " pour la régie
immobilière, a exposé que comme les recourants n'étaient pas médecins et
n'avaient pas l'intention de continuer le bail, la bailleresse a pris la
décision de le résilier; il a encore précisé que la politique de l'assurance
bailleresse est aujourd'hui d'avoir uniquement des immeubles d'habitations et
non commerciaux et de rénover systématiquement les locaux après 20 ans.
A considérer ces dépositions, il n'apparaît pas que la volonté de la
bailleresse de reprendre la libre disposition du cabinet médical, telle qu'elle
a été constatée par la cour cantonale, reposait sur l'idée d'empêcher un
transfert de bail, mais bien plutôt sur celle de rénover les locaux et de les
relouer au locataire qu'elle aura choisi.
Le motif réel du congé, défini comme le souhait pour la bailleresse de pouvoir
choisir elle-même son locataire, n'a pas été déterminé arbitrairement par les
magistrats genevois.

2.3. Les recourants prétendent que c'est arbitrairement qu'il n'a pas été
relevé que la résiliation de bail du 6 octobre 2011 a été reçue par
C.A.________ le 17 octobre 2011, soit postérieurement à la signature du contrat
de reprise du cabinet médical, intervenue le 11 octobre 2011.
Ainsi que les recourants le concèdent d'ailleurs, on ne voit pas que ce fait,
fût-il avéré, puisse influer sur le sort de la querelle. Si les recourants
entendent soutenir que le congé leur a été donné pour les punir d'avoir demandé
à la bailleresse le transfert du bail commercial en application de l'art. 263
CO, cette thèse se heurte à la constatation qu'il n'a pas été prouvé que
celle-ci avait connaissance du projet de transfert de bail au moment où elle a
résilié ledit contrat.

2.4. Les recourants soutiennent qu'il était insoutenable pour l'autorité
cantonale de ne pas retenir que la bailleresse avait été informée de
l'imminence de la demande de transfert de bail lorsque le contrat a été
résilié. Ils font valoir que la bailleresse, par l'entremise de la régie
immobilière qui la représentait, a eu vent avant de donner le congé du 6
octobre 2011 qu'une requête de transfert allait être formulée. Ils invoquent
les téléphones passés à la régie avant la date en cause par C.A.________ et par
une soeur de ce dernier.
La cour cantonale a constaté, sans se voir reprocher l'arbitraire, que
C.A.________, à une date demeurée indéterminée, a téléphoné à la régie pour
s'enquérir en particulier de la possibilité pour les héritiers de percevoir une
indemnité s'ils résiliaient le bail de manière anticipée; elle a encore relevé
qu'une soeur du précité a pris contact téléphoniquement avec la régie à une
date inconnue et que le contenu de la conversation n'avait pas été établi.
L'allégation d'après laquelle C.A.________ a informé la régie immobilière par
téléphone que les recourants s'apprêtaient à requérir l'autorisation de
transmettre le bail n'est étayée par aucun moyen de preuve. Les recourants
n'invoquent en effet que la déclaration de l'intéressé figurant au
procès-verbal de l'audience organisée le 8 février 2013. Mais il s'agit là de
la déclaration d'une partie, qui n'est pas propre, si elle n'est pas corroborée
par d'autres éléments probatoires, à emporter la conviction, de sorte qu'il
n'est pas arbitraire de ne pas en tenir compte.
Pour le reste, les recourants se bornent à présenter leur propre vision des
choses et du cours des événements. De telles critiques, purement appellatoires,
ne répondent pas au principe d'allégation (art. 106 al. 2 LTF) et sont
conséquemment irrecevables.

3. 
Les recourants se prévalent ensuite d'une violation de l'art. 271 al. 1 CO. Se
référant à l'arrêt 4A_397/2013 du 11 février 2014, partiellement reproduit in
SJ 2014 I p. 413, ils allèguent que le motif du congé relève du simple caprice,
que le congé ne répond à aucun intérêt objectif digne de protection, que la
volonté de louer des locaux à une personne indéterminée dans un lointain futur
ne saurait être qualifiée d'intérêt actuel et sérieux et que la bailleresse
entend récupérer la libre disposition des locaux à seule fin d'empêcher les
recourants d'exercer leur droit au transfert du bail. Ils prétendent en outre
que le fait d'être devenus titulaires du bail par succession n'est pas un motif
de congé digne de protection, puisque cette transmission n'est que la
conséquence légale du décès de l'ancien locataire.

3.1. La liberté de mettre un terme au contrat de bail est limitée par
l'obligation d'agir conformément aux règles de la bonne foi (art. 271 et 271a
CO). Le congé qui contrevient aux règles de la bonne foi est annulable (art.
271 al. 1 CO). Cette protection procède à la fois du principe de la bonne foi
(art. 2 al. 1 CC) et de l'interdiction de l'abus de droit (art. 2 al. 2 CC).
Les cas typiques d'abus de droit (absence d'intérêt à l'exercice d'un droit,
utilisation d'une institution juridique contrairement à son but, disproportion
grossière des intérêts en présence, exercice d'un droit sans ménagement,
attitude contradictoire) justifient l'annulation du congé. Ainsi, le congé doit
être considéré comme abusif s'il ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et
digne de protection, s'il est purement chicanier ou encore fondé sur un motif
qui n'est manifestement qu'un prétexte (ATF 138 III 59 consid. 2.1 p. 62; 136
III 190 consid. 2 et les arrêts cités). La validité d'un congé doit être
appréciée en fonction des circonstances présentes au moment de cette
manifestation de volonté (ATF 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1
in fine p. 62).

3.2. L'arrêt 4A_397/2013 du 11 février 2014 n'est d'aucun secours pour les
recourants. Dans cette cause, la bailleresse a résilié le bail du locataire
pour obtenir un rendement supérieur de la chose louée (cf. consid. 3.4 dudit
arrêt). Autrement dit, le congé était dicté par des motifs économiques. En
revanche, in casu, il a été constaté que le congé a pour fin de permettre à la
bailleresse de reprendre la libre disposition des locaux commerciaux, de les
rénover, puis de les relouer au locataire qu'elle aura choisi. Cette dernière,
contrairement à ce qui a été constaté dans l'arrêt susmentionné, n'a jamais
fait valoir qu'elle cherchait à obtenir un loyer plus élevé.
Au vu de l'état de fait déterminant (art.105 al.1 LTF), on ne voit pas que le
congé ait été donné sur un coup de tête, de manière irréfléchie, au point
d'être assimilé à un caprice. Le motif invoqué n'est pas un prétexte, du moment
que l'autorité cantonale a pu admettre, sans arbitraire, qu'il était réel.
Une absence d'intérêt à l'exercice du droit de résilier le bail n'entre pas en
ligne de compte, puisque les parties au contrat sont libres de résilier un bail
de durée indéterminée pour le prochain terme légal ou contractuel (art. 266a
al. 1 CO), pour autant que la résiliation ne soit pas donnée au mépris des
règles de la bonne foi (art. 271 al.1 CO).
La poursuite d'un but étranger ne peut pas non plus être admise. De fait, il a
été retenu que le congé n'a pas été signifié pour punir les recourants d'avoir
eu l'intention de requérir un transfert de bail.
Le congé litigieux ne porte pas atteinte aux besoins indispensables des
recourants de se loger, dès l'instant où ces derniers ne résident pas dans les
locaux loués. Aucune disproportion grossière des intérêts en jeu n'est établie.
L'intimée n'a pas exercé son droit de mettre fin au bail sans ménagement,
puisque le congé a été notifié aux recourants plus de trois ans avant le terme
contractuel du 31 janvier 2015.
L'intimée n'a pas adopté une attitude contradictoire. Dans son avis de
résiliation du 6 octobre 2011, elle a fait état de sa volonté de reprendre la
libre disposition du cabinet médical. Invitée à motiver le congé, elle a
réitéré ce motif moins de trois semaines plus tard (i. e. le 24 octobre 2011)
et ne s'est prévalue par la suite d'aucun autre motif.
Enfin, le motif du congé ne réside pas dans la circonstance que les recourants
sont devenus locataires du cabinet médical par succession (cf. art. 266i CO,
ainsi que 560 al. 1 et 2 CC), mais dans la volonté de la bailleresse de
reprendre la libre disposition du cabinet médical.
Il suit de là qu'il n'est pas possible de reprocher à l'intimée d'avoir
enfreint les règles de la bonne foi en signifiant le congé le 6 octobre 2011,
si bien que ladite résiliation est valable, comme l'a jugé la cour cantonale.
Le moyen doit être rejeté.

4. 
Les recourants soutiennent, en indiquant que c'est " à titre subsidiaire ", que
le congé n'était pas motivé, en violation de l'art. 271 al. 2 CO.
A teneur de la norme invoquée, le congé doit être motivé si l'autre partie le
demande.
Requise par un des recourants de motiver le congé du 6 octobre 2011, l'intimée,
par lettre du 24 octobre 2011, a répondu qu'elle souhaitait reprendre la libre
disposition du cabinet médical. Elle avait au demeurant indiqué ce même motif
dans la lettre qui accompagnait la formule officielle de congé.
Il appert ainsi que la bailleresse a donné les motifs du congé. De toute
manière, même non motivé, un congé est a priori valable, l'absence de
motivation pouvant toutefois être un indice que le bailleur ne dispose pas de
motif objectif, sérieux et digne de protection pour mettre fin au bail (ATF 125
III 231 consid. 4b p. 239 s.).
La critique est sans fondement.

5. 
" A titre purement subsidiaire ", les recourants allèguent que le bail devrait
faire l'objet d'une prolongation de six ans en application de l'art. 272b al. 1
CO. Ils affirment que seule une telle prolongation leur permettrait d'obtenir
des sous-locataires la presque totalité du prix de remise du cabinet médical,
fixé par contrats du 11 octobre 2011 à 132'000 fr., reprise du mobilier
incluse.

5.1. L'autorité cantonale a refusé d'accorder une prolongation de bail aux
héritiers. Elle a pris en compte la durée qui séparait la notification du congé
de l'échéance contractuelle, laquelle dépassait trois ans. Ne disconvenant pas
que le père des recourants avait réalisé à ses frais certains investissements
dans les locaux, dont l'ampleur n'a pas pu être établie, elle a observé
qu'étant donné que le congé avait été donné plusieurs années avant l'échéance
du 31 janvier 2015, les héritiers ont été à même de convenir avec les
sous-locataires le versement en leur faveur d'un prix de reprise du cabinet
médical.

5.2. Le locataire peut demander la prolongation du bail lorsque la fin du
contrat aurait pour lui ou sa famille des conséquences pénibles sans que les
intérêts du bailleur le justifient. Il s'agit essentiellement de donner au
locataire qui doit quitter l'objet loué plus de temps pour se reloger (DAVID
LACHAT, Le bail à loyer, 2008, chap. 30, ch. 1.1 p. 765; PETER HIGI, Zürcher
Kommentar, 1996, n° 86 ad art. 272 CO). La prolongation est de six ans au
maximum s'agissant de locaux commerciaux (art. 272 al. 1 et art. 272b al. 1
CO).
En l'espèce, les locataires, qui ne sont pas médecins, ne recherchent pas
d'objet de remplacement.
Certes, il est concevable d'accorder une prolongation d'un bail commercial au
locataire qui n'entend pas poursuivre son activité ailleurs, afin qu'il trouve
une solution lui permettant de remettre le commerce à un tiers dans de bonnes
conditions (cf. LACHAT, op. cit., chap. 30, ch. 3.4 p. 773). Mais si le
locataire, à ses risques et périls, a procédé à des investissements - lesquels
ne sont d'ailleurs pas établis en l'occurrence -, la perte de la possibilité de
les amortir n'est pas constitutive de conséquences pénibles ( COMMENTAIRE SVIT,
Le droit suisse du bail à loyer, 2011, n ^°s 43 et 28 ad art. 272 CO).
Le refus de toute prolongation de bail doit être confirmé par substitution de
motifs.

6. 
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté en tant qu'il est
recevable.
Les recourants, qui succombent, supporteront solidairement les frais et dépens
de la procédure fédérale (art. 66 al. 1, art. 68 al. 1 et 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis solidairement à la charge
des recourants.

3. 
Les recourants verseront solidairement à l'intimée une indemnité de 6'000 fr. à
titre de dépens.

4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève, Chambre des baux et loyers.

Lausanne, le 11 mai 2015
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente : Kiss

Le Greffier : Ramelet

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