Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.1091/2014
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
6B_1091/2014

Arrêt du 24 novembre 2015

Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et
Oberholzer.
Greffière : Mme Kistler Vianin.

Participants à la procédure
X.________, représenté par Me Marino Montini, avocat,
recourant,

contre

Ministère public de la République et canton de Neuchâtel,
intimé.

Objet
Actes d'ordre sexuel et tentative de contrainte sur une personne dépendante,
gestion déloyale, etc. ; arbitraire, présomption d'innocence, principe in dubio
pro reo,

recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de
Neuchâtel du 8 octobre 2014.

Faits :

A. 
Par jugement du 3 avril 2013, le Tribunal de police des Montagnes et du
Val-de-Ruz a notamment condamné X.________ à une peine privative de liberté de
vingt mois, avec sursis durant trois ans, pour actes d'ordre sexuel avec une
personne dépendante (art. 188 CP), tentative de contrainte (art. 181 et 22 CP),
détournement de valeurs patrimoniales mises sous main de justice (art. 169 CP),
gestion déloyale (art. 158 CP), gestion fautive (art. 165 CP), violation de
l'obligation de tenir une comptabilité (art. 166 CP), détournement de retenues
sur les salaires (art. 159 CP), escroquerie (art. 146 CP) et infractions aux
art. 87 al. 3 LAVS, 70 LAI, 6 LACI et 76 al. 3 LPP.

B. 
Par jugement d'appel du 8 octobre 2014, la Cour pénale du Tribunal cantonal
neuchâtelois a partiellement admis l'appel formé par X.________. Elle a libéré
ce dernier de la prévention de détournement de retenues sur les salaires (art.
159 CP) et de la prévention de violation des art. 87 al. 3 LAVS, 70 LAI et 6
LACI pour la période de mars à octobre 2008. En conséquence, elle a réduit la
peine privative de liberté à dix-huit mois, avec sursis pendant trois ans. Pour
le surplus, elle a confirmé le jugement attaqué.

C. 
Contre ce dernier jugement, X.________ dépose un recours en matière pénale
devant le Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à son acquittement des
préventions retenues à son encontre et, à titre subsidiaire, à l'annulation du
jugement attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour une nouvelle
décision. En outre, il sollicite l'assistance judiciaire.

Considérant en droit :

1. 
Le recourant conteste sa condamnation pour actes d'ordre sexuel avec une
personne dépendante (art. 188 CP).

1.1. La cour cantonale a retenu que le recourant avait emmené A.________, sa
jeune employée (née en 1990), dans un appartement situé en dessus des locaux
commerciaux de la société B.________ SA, dont il était l'administrateur,
prétextant lui proposer une solution de logement compte tenu des conflits
qu'elle avait avec son père. Verrouillant la porte de l'appartement une fois à
l'intérieur, tout en laissant les clés à la porte, il a offert à la jeune fille
de boire du champagne, ce qu'elle a accepté. Il lui a ensuite caressé les seins
sous ses vêtements, lui a tiré le col de son pull et lui a embrassé les seins
et le ventre, alors que la jeune fille se débattait. Il l'a également embrassée
sur la bouche. Pendant ces attouchements, il a demandé à la jeune fille de lui
frotter son sexe avec sa jambe par-dessus son pantalon. Il lui a ensuite donné
200 fr., qu'elle a acceptés, car il insistait.

1.2. Le recourant s'en prend à l'appréciation des preuves et à l'établissement
des faits, qu'il qualifie d'arbitraires. En outre, il dénonce la violation de
la présomption d'innocence.

1.2.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle
les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les
constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins
que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière
manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir de
façon arbitraire (art. 9 Cst.; cf. ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266). Pour
qu'il y ait arbitraire, il ne suffit pas que la décision attaquée apparaisse
discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable
et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (sur la
notion d'arbitraire, cf. ATF 140 I 201 consid. 6.1 p. 205; 139 II 404 consid.
10.1 p. 445; 137 IV 1 consid. 4.2.3 p. 5).

La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP et 32 al. 1 Cst.,
ainsi que son corollaire, le principe " in dubio pro reo ", concernent tant le
fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. Lorsque, comme en
l'espèce, l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont
critiquées en référence au principe " in dubio pro reo ", celui-ci n'a pas de
portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 138 V 74 consid. 7 p.
82).

1.2.2. La cour cantonale a retenu que le recourant avait abusé sexuellement de
sa jeune employée, en se fondant sur les déclarations de cette dernière. Elle a
estimé que ces déclarations étaient fiables en raison des éléments suivants:
ces déclarations étaient cohérentes et ne comportaient pas de contradictions.
La victime a décrit les locaux (couleur de la porte d'entrée, la cuisinière
n'était pas encastrée, les portes d'armoire étaient blanches ou vert clair,
l'appartement était vide, il n'y avait ni savon ni linge dans les toilettes).
Il était peu vraisemblable que les employés de l'entreprise aient eu
connaissance de l'existence de l'appartement (un au moins avait déclaré ignorer
l'existence de cet appartement) et encore moins de l'existence de la clé
ouvrant l'appartement en question, incorporée à un trousseau, trouvé dans les
locaux de l'entreprise. En revanche, les déclarations du recourant comportaient
des incohérences (notamment quant à la raison de l'engagement de la victime et
de son propre emploi du temps).

Dans son argumentation, le recourant se borne à contester les éléments retenus
par la cour cantonale. Il soutient que tous les employés pouvaient disposer du
trousseau de clé qui se trouvait sur la table de la cafétéria. Il fait valoir
qu'un seul employé (et non tous les employés) aurait déclaré ignorer
l'existence de l'appartement. Enfin, selon lui, la description de l'appartement
de la victime serait vague. Par ces arguments, le recourant ne démontre
toutefois pas que la cour cantonale serait tombée dans l'arbitraire en retenant
les déclarations de la victime plutôt que les siennes. Si tous les employés
pouvaient disposer du trousseau de clé, encore fallait-il qu'ils sachent que le
trousseau en question incorporait une clé d'un appartement situé en dessus des
locaux de l'entreprise. Le fait qu'un employé, nommé par la cour cantonale, ne
connaissait pas l'existence de l'appartement montre bien que n'importe quel
employé de l'entreprise ne pouvait pas aller dans l'appartement comme le
soutient le recourant. Contrairement à ce que prétend le recourant, la jeune
fille a donné des informations précises et détaillées sur l'appartement. Pris
dans leur ensemble, les éléments retenus par la cour cantonale conduisent donc
à retenir de façon soutenable la version de la victime, même si, pris
isolément, certains ne seraient pas suffisants. Dans la mesure de leur
recevabilité, les griefs soulevés par le recourant doivent être rejetés.

1.3. Le recourant conteste que les éléments constitutifs de l'infraction
d'actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes (art. 188 CP) soient
réalisés. En particulier, il soutient que la victime ne se trouvait pas dans un
rapport de dépendance, en raison de la courte durée des rapports de travail, de
son âge et de son caractère fort et indépendant.

1.3.1. Selon l'art. 188 CP, celui qui, profitant de rapports d'éducation, de
confiance ou de travail, ou de liens de dépendance d'une autre nature, aura
commis un acte d'ordre sexuel sur un mineur âgé de plus de 16 ans ou celui qui,
profitant de liens de dépendance, aura entraîné une telle personne à commettre
un acte d'ordre sexuel, sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans
au plus ou d'une peine pécuniaire.

Pour que l'auteur soit punissable, il faut qu'il existe un rapport de
dépendance et, en outre, que l'auteur en ait profité. A titre d'exemple, l'art.
188 CP mentionne des rapports d'éducation, de confiance ou de travail. La mise
à profit du lien de dépendance doit être prouvée dans le cas concret. Il faut,
par conséquent, que le mineur, bien qu'opposé aux exigences de l'auteur, n'ose
pas refuser en raison de la position dominante de ce dernier; il n'est pas
nécessaire que l'auteur ait en outre mis le mineur sous pression par des
menaces ou d'une autre manière (ATF 125 IV 129 consid. 2a p. 131). N'importe
quelle infériorité du mineur face à l'adulte ne génère pas une relation de
dépendance. Il faut procéder à un examen des circonstances concrètes: durée de
la relation, autorité qu'elle implique, âge et caractère de la victime ( DUPUIS
ET AL., Petit commentaire du code pénal, 2012, n° 13 ad art. 188 CP). Les
différents éléments entourant la relation entre l'auteur et le jeune de plus de
seize ans relèvent du fait, de sorte qu'ils lient le Tribunal fédéral, à moins
que ceux-ci n'aient été établis de façon manifestement inexacte. En revanche,
dire si ces éléments sont suffisants pour retenir une relation de dépendance
est une question de droit, qui peut être examinée librement par la cour de
céans (ATF 125 IV 129 consid. 2a p. 131).

Sur le plan subjectif, l'infraction réprimée par l'art. 188 CP est
intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant. Il faut donc que l'auteur ait
à tout le moins envisagé et accepté l'éventualité que le mineur ne cède qu'en
raison du rapport de dépendance (arrêt 6S.340/2004 du 3 novembre 2004 consid.
3.1).

1.3.2. Selon les constatations cantonales, la victime était mineure au moment
des faits et était au bénéfice d'un contrat de travail (de durée indéterminée)
auprès de B.________ SA, dont le recourant était l'administrateur président.
Travaillant dans le même bureau que le recourant, elle lui a rapidement confié
les problèmes qu'elle rencontrait avec son père et sa volonté de quitter
rapidement la maison à l'âge de 18 ans. Le recourant lui a alors proposé de la
loger gratuitement dans un petit appartement situé au-dessus des locaux de
travail. L'ensemble de ces éléments permettent de retenir un rapport de
dépendance avec le recourant, puisque la jeune fille avait besoin de lui pour
devenir indépendante et quitter le domicile de ses parents. Le recourant a mis
à profit ce lien de dépendance pour commettre un acte d'ordre sexuel avec la
jeune fille. La cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral en
condamnant le recourant en application de l'art. 188 CP.

2. 
La cour cantonale a condamné le recourant pour tentative de contrainte pour
avoir saisi puis tiré le bras de A.________ et avoir ainsi tenté de l'emmener
de force dans l'appartement à l'étage; la jeune fille s'étant débattue et étant
parvenue à partir, il n'est pas parvenu à ses fins, de sorte que seule une
tentative a été retenue.

2.1. Le recourant qualifie d'arbitraire l'appréciation des preuves, faisant
valoir qu'aucun élément ne vient accréditer les accusations de la jeune fille.
La cour cantonale a expliqué qu'elle tenait pour crédibles les déclarations de
la jeune fille, notamment en raison de leur cohérence et de l'ensemble des
circonstances (notamment que le recourant avait déjà abusé d'elle). Ces
explications sont convaincantes. Le recourant se borne du reste à contester les
déclarations de la jeune fille, sans démontrer en quoi la cour cantonale serait
tombée dans l'arbitraire en les suivant. Dans la mesure de sa recevabilité, le
grief d'arbitraire dans l'appréciation des preuves doit donc être rejeté.

2.2. Le recourant considère que les éléments constitutifs de la contrainte ne
sont pas réalisés, car la violence qu'il a exercée sur la jeune fille n'aurait
pas atteint un degré d'intensité suffisante.
Selon l'art. 181 CP, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au
plus ou d'une peine pécuniaire celui qui, en usant de violence envers une
personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque
autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire
ou à laisser faire un acte. L'usage de la violence doit revêtir une certaine
gravité. N'importe quelle pression de peu d'importance ou bousculade ne suffit
pas. La violence doit être, de par sa nature et son intensité, propre à
entraver la victime, dans sa liberté d'action. L'analyse doit s'effectuer sur
la base de critères relatifs (ATF 101 IV 42 consid. 3a p. 44 s.).

En l'espèce, la jeune fille se trouvait dans un rapport de dépendance avec le
recourant, qui avait déjà abusé d'elle. Dans ces circonstances, le fait de
prendre la jeune fille par le bras et la tirer de force pour l'emmener était
propre à l'entraver dans sa liberté d'action. Le grief soulevé doit donc être
rejeté.      

3. 
La cour cantonale a condamné le recourant pour détournement de valeurs
patrimoniales mises sous main de justice (art. 169 CP). Il est reproché au
recourant, en qualité d'administrateur président de la société B.________ SA,
avec signature individuelle, d'avoir disposé arbitrairement et sans droit des
biens, propriété de la société, saisis par l'Office des poursuites, selon
décision d'exécution de saisie du 2 décembre 2008, en les vendant à la société
C.________ Sàrl pour une somme de 25'000 francs.

Le recourant fait valoir que la cour cantonale a versé dans l'arbitraire en
retenant que les biens vendus appartenaient à la société B.________ SA. Selon
lui, ces biens lui appartenaient et ne pouvaient dès lors pas faire l'objet
d'une saisie et d'une réalisation forcée. Ne comprenant pas bien le français,
le recourant n'aurait pas été en mesure de s'apercevoir de l'erreur commise par
l'Office des poursuites. Sur la facture, libellée au nom de B.________ SA,
établie sur du papier de l'entreprise, il aurait au demeurant ajouté qu'il
agissait personnellement. Croyant que ces biens lui appartenaient, il n'avait
eu aucune intention de soustraire ces valeurs aux créanciers, mais avait
simplement voulu disposer de ce qui lui appartenait.

Le jugement attaqué retient que l'Office des poursuites, selon décision
d'exécution de saisie du 2 décembre 2008, avait saisi les biens en question.
Dans cette mesure, le recourant ne pouvait pas en disposer. Si les biens en
question lui appartenaient, il devait faire valoir ses droits dans la procédure
de poursuite selon les règles de la LP (art. 106 ss LP). Sur le plan subjectif,
la cour cantonale a retenu que le recourant connaissait l'exécution de la
saisie et savait qu'il n'était pas autorisé à disposer des biens de B.________
SA. Lorsqu'il prétend le contraire, il s'écarte de manière inadmissible de
l'état de fait cantonal, sans pour autant en démontrer l'arbitraire, de sorte
que son grief est irrecevable.

4. 
La cour cantonale a condamné le recourant pour gestion déloyale (art. 158 CP).
Elle lui reproche d'avoir encaissé pour le compte de la société B.________ SA
le prix de la vente des biens saisis par l'Office des poursuites à C.________
Sàrl, à savoir 25'000 fr., et d'avoir utilisé sans raison liée à l'exploitation
et la gestion de la société, la somme encaissée, remettant 14'000 fr. à son
épouse et utilisant 11'000 fr. pour des dépenses personnelles.

Le recourant fait valoir que les biens vendus lui appartenaient, de sorte que
la cour cantonale a retenu à tort une quelconque violation d'un devoir de
gestion ou de sauvegarde. En outre, il soutient que l'élément subjectif ne
serait pas réalisé, faute d'intention de léser les intérêts de la société
B.________ SA. Par cette argumentation, le recourant s'écarte de l'état de fait
cantonal, sans soulever le grief d'arbitraire. Cette argumentation est
irrecevable.

5. 
Le recourant a été condamné pour gestion fautive (art. 165 CP) pour avoir omis
d'aviser le juge, alors que la société B.________ SA, dont il était
l'administrateur, se trouvait en situation de surendettement.

Selon l'art. 165 CP, le débiteur qui, de manières autres que celles visées à
l'art. 164 CP, par des fautes de gestion, notamment par une dotation
insuffisante en capital, par des dépenses exagérées, par des spéculations
hasardeuses, par l'octroi ou l'utilisation à la légère de crédits, par le
bradage de valeurs patrimoniales ou par une négligence coupable dans l'exercice
de sa profession ou dans l'administration de ses biens, aura causé ou aggravé
son surendettement, aura causé sa propre insolvabilité ou aggravé sa situation
alors qu'il se savait insolvable, sera, s'il a été déclaré en faillite ou si un
acte de défaut de biens a été dressé contre lui, puni d'une peine privative de
liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

La faute de gestion peut consister en une action ou en une omission. L'omission
ne peut être reprochée que s'il existait un devoir juridique d'agir. C'est en
fonction des dispositions spécifiques qui définissent les devoirs de l'auteur
qu'il faut déterminer si celui-ci a usé des précautions commandées par les
circonstances et sa situation personnelle (ATF 115 IV 38 consid. 2 p. 41). Dans
la gestion d'une société anonyme par exemple, on doit examiner si l'accusé a
violé un devoir prévu par le Code des obligations compte tenu du rôle dévolu à
chaque organe (cf. ATF 116 IV 26 consid. 4b p. 29 s.). Ainsi, l'administrateur
qui néglige de donner l'avis d'insolvabilité prescrit à l'art. 725 al. 2 CO se
rend coupable de gestion fautive (cf. ATF 115 IV 38). Seules des perspectives
d'assainissement concrètes et réalisables à court terme peuvent justifier, le
cas échéant, que le juge ne soit pas immédiatement avisé d'une situation de
surendettement (ATF 127 IV 110 consid. 5a p. 113).

Il est admis - et non contesté par le recourant - que la société B.________ SA
se trouvait en situation de surendettement et que, en violation de l'art. 725
al. 2 CO, le recourant a omis d'en aviser le juge. La cour cantonale a retenu
qu'il n'existait aucune perspective d'assainissement concret réalisable à court
terme. Lorsque le recourant soutient que la situation pouvait être redressée,
il s'écarte de l'état de fait cantonal, sans soulever le grief d'arbitraire;
son argumentation est donc irrecevable. L'omission d'avertir le juge a entraîné
une aggravation de la situation de surendettement. La cour cantonale a retenu
que le total des poursuites au 8 mai 2009 s'élevait à 569'866 fr. 33, précisant
toutefois que ce montant devait être quelque peu réduit car il pouvait
concerner des poursuites non fondées. Le recourant estime que ce montant
n'était que de 60'000 fr.; mais il n'allègue ni n'établit que le montant retenu
par la cour cantonale serait arbitraire; son grief est donc irrecevable.

6. 
Le recourant conteste sa condamnation pour violation de l'obligation de tenir
une comptabilité (art. 166 CP). 

Selon l'art. 166 CP, le débiteur qui aura contrevenu à l'obligation légale de
tenir régulièrement ou de conserver ses livres de comptabilité, ou de dresser
un bilan, de façon qu'il est devenu impossible d'établir sa situation ou de
l'établir complètement, sera, s'il a été déclaré en faillite ou si un acte de
défaut de biens a été dressé contre lui, puni de l'emprisonnement ou de
l'amende. L'obligation de tenir une comptabilité est violée lorsqu'aucune
comptabilité n'a été tenue ou quand la comptabilité n'a pas été conservée ou
encore dès que, sur la base des livres existants, un expert ne peut pas
acquérir une vue d'ensemble de la situation réelle ou ne le peut que moyennant
un sacrifice de temps considérable (arrêt 6S_142/2003 du 4 juillet 2003 consid.
4; SCHUBARTH/ALBRECHT, Kommentar zum schweizerischen Strafrecht, vol. 2, Berne
1990, n. 16 ad Art. 166 StGB).

En l'espèce, il ressort de l'arrêt attaqué que la comptabilité de B.________ SA
a été tenue jusqu'à la fin octobre 2007, mais que les documents réunis par
l'Office des faillites ne permettaient pas, sans procéder à une reconstitution
longue et fastidieuse, d'établir la comptabilité pour la période postérieure à
cette date. Au vu de ces constatations, le recourant soutient qu'il était dès
lors possible de reconstituer la comptabilité pour la période du 1er novembre
2007 au 13 mai 2009 (même si cette tâche était longue) et que, partant, les
éléments constitutifs de l'infraction de l'art. 166 CP ne sont pas réalisés.
Par cette argumentation, il méconnaît toutefois la jurisprudence, selon
laquelle l'infraction est déjà réalisée dès qu'un expert ne peut qu'à grand
peine rétablir la situation financière exacte. Le grief soulevé est donc
infondé.

7. 
Le recourant critique sa condamnation pour les infractions définies aux art. 87
al. 3 LAVS, 70 LAI et 105 LACI. Il est reproché au recourant, en qualité
d'administrateur président de la société B.________ SA, avec signature
individuelle, d'avoir déduit, en juillet et de septembre à décembre 2007, des
salaires des employés de la société B.________ SA les cotisations sociales et
de les avoir utilisées à payer d'autres dettes.

Selon l'art. 87 al. 3 LAVS, est punissable celui qui, en sa qualité
d'employeur, aura versé à un salarié des salaires dont il aura déduit les
cotisations et qui, au lieu de payer les cotisations salariales dues à la
caisse de compensation, les aura utilisées pour lui-même ou pour régler
d'autres créances. Cette disposition s'applique également en matière
d'assurance invalidité, à la suite du renvoi de l'art. 70 LAI aux art. 87 à 91
LAVS. Il en va de même pour l'assurance chômage (renvoi fait par l'art. 6
LACI). Selon la jurisprudence, il faut se demander si, au moment où l'employeur
effectue la retenue en versant le salaire, il avait des actifs correspondant à
la somme retenue; s'il n'avait en réalité pas les ressources nécessaires, la
retenue était purement comptable et aucune somme disponible n'était retenue
pour payer ultérieurement le tiers; une telle situation, faute d'une véritable
retenue, exclut d'emblée l'infraction (cf. ATF 122 IV 270 consid. 2c p. 274;
117 IV 78 consid. 2d/aa p. 81).

En l'espèce, il a été retenu que, bien que surendettée, la société B.________
SA avait encore des activités et qu'il résultait de l'extrait des poursuites
que durant cette période plusieurs poursuites avaient été payées. Elle avait
donc effectué les retenues nécessaires, mais avait privilégié le paiement
d'autres dettes. Le recourant s'écarte de cet état de fait, mais sans soulever
le grief d'arbitraire, lorsqu'il soutient que la société B.________ SA se
trouvait alors dans une situation d'insolvabilité, et qu'elle était dans
l'impossibilité d'effectuer le paiement des cotisations sociales, pour la
période antérieure au mois de mars 2008 et que la société n'a aucunement
privilégié le paiement d'autres dettes. Pour le surplus, il n'y a aucune
contradiction lorsque la cour cantonale retient qu'il n'y avait plus de
nouvelles commandes dès octobre 2007, mais que la société avait encore des
activités à fin 2007. Dans la mesure de sa recevabilité, le grief soulevé doit
être rejeté.

8. 
Le recourant conteste sa condamnation pour escroquerie (art. 146 CP). Il est
reproché au recourant, bénéficiaire de l'aide sociale, d'avoir omis d'informer
le service social régional de sa commune qu'il avait perçu les 2 août 2011, 9
septembre et 3 octobre 2011, des revenus, pour un montant total de 44'300 fr.
et d'avoir néanmoins perçu des prestations de l'aide sociale, estimées à
hauteur de 30'809 francs. Le 24 octobre 2011, le recourant a indiqué à
l'autorité d'aide sociale que sa situation n'avait pas changé. Quelques mois
plus tard, en février 2012, il a expliqué à l'assistante sociale que toutes ses
démarches pour reprendre une activité indépendante échouaient et qu'il lui
fallait en tout cas 100'000 fr. pour relancer une affaire, mais que, dans sa
situation, il était impossible de trouver un financement (jugement de première
instance p. 32).

Conformément à l'art. 146 al. 1 CP, est puni d'une peine privative de liberté
de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire celui qui, dans le dessein de se
procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura
astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses
ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans
son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables
à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.

Il y a tromperie astucieuse, au sens de l'art. 146 CP, lorsque l'auteur recourt
à un édifice de mensonges, à des manoeuvres frauduleuses ou à une mise en
scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur
vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut
raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de
vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le
faire (ATF 135 IV 76 consid. 5.2 p. 81 s. et les arrêts cités). L'astuce n'est
toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum
d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait
attendre d'elle. Il n'est cependant pas nécessaire qu'elle ait fait preuve de
la plus grande diligence ou qu'elle ait recouru à toutes les mesures de
prudence possibles pour éviter d'être trompée. L'astuce n'est exclue que si la
dupe est coresponsable du dommage parce qu'elle n'a pas observé les mesures de
prudence élémentaires qui s'imposaient. Une coresponsabilité de la dupe
n'exclut l'astuce que dans des cas exceptionnels (ATF 135 IV 76 consid. 5.2 p.
81). En matière d'aide sociale, l'astuce est admise lorsque le bénéficiaire ne
déclare pas un gain ou un revenu et que l'assistant social n'est pas en mesure
de vérifier l'obtention de celui-ci dans les comptes ou les documents en sa
possession (ATF 127 IV 163 consid. 2b p. 166; arrêt 6B_409/2007 du 9 octobre
2007 consid. 2.1).

L'infraction d'escroquerie se commet en principe par action. Tel est le cas
lorsqu'elle est perpétrée par actes concluants (ATF 140 IV 11 consid. 2.3.2 p.
14). L'assuré qui, en vertu de l'art. 31 de la loi fédérale sur la partie
générale du droit des assurances sociales (LPGA; RS 830.1), a l'obligation de
communiquer toute modification importante des circonstances déterminantes pour
l'octroi d'une prestation, ne respecte pas cette obligation et continue à
percevoir les prestations allouées initialement à juste titre, n'adopte pas un
comportement actif de tromperie. Le fait de continuer à percevoir les
prestations allouées ne saurait être interprété comme la manifestation positive
- par acte concluant - du caractère inchangé de la situation. Il convient en
revanche d'analyser la situation de façon différente lorsque la perception de
prestations est accompagnée d'autres actions permettant objectivement
d'interpréter le comportement de l'assuré comme étant l'expression du caractère
inchangé de la situation. Tel sera le cas lorsque l'assuré ne répond pas ou pas
de manière conforme à la vérité aux questions explicites de l'assureur
destinées à établir l'existence de modification de la situation personnelle,
médicale ou économique; il n'est en effet plus question alors d'une escroquerie
par omission, mais d'une tromperie active (ATF 140 IV 206 consid. 6.3.1.3 p.
209 et les références citées).

En l'espèce, en affirmant que sa situation financière n'avait pas changé, alors
qu'il avait reçu des prêts et gagné à la loterie, le recourant a trompé
l'autorité d'aide sociale. Il s'agit d'une tromperie active, et non d'une
simple omission. C'est en vain que le recourant fait valoir qu'il n'a jamais
fait de fausses déclarations, car les sommes empruntées devaient être
remboursées et servir à régler des dettes. Ces montants étaient propres à
modifier sa situation personnelle et financière, et le recourant ne pouvait pas
affirmer aux services sociaux que sa situation financière était demeurée
inchangée. Le comportement du recourant doit être qualifié d'astucieux, dans la
mesure où l'autorité d'aide sociale ne pouvait pas suspecter le versement de
ces montants. Les conditions de l'escroquerie sont donc réalisées.

9. 
Dans la mesure de sa recevabilité, le recours doit être rejeté.

Comme ses conclusions étaient vouées à l'échec, l'assistance judiciaire ne peut
être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant devra donc supporter les frais
(art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa
situation financière.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 1600 fr., sont mis à la charge du recourant.

4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal
cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 24 novembre 2015

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

La Greffière : Kistler Vianin

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