Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.706/2014
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
5A_706/2014

Arrêt du 14 janvier 2015

IIe Cour de droit civil

Composition
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
Marazzi, Hermann, Schöbi et Bovey.
Greffière : Mme Mairot

Participants à la procédure
1. A.A.________,
2. B.A.________,
tous deux représentés par Me Baudouin Dunand, avocat,
recourants,

contre

Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, place du
Bourg-de-Four 1, 1204 Genève,
intimée.

Objet
divorce (compétence),

recours contre l'arrêt de la Chambre civile
de la Cour de justice du canton de Genève
du 6 août 2014.

Faits :

A.

A.a. A.A.________, née en 1967 à Genève, et B.A.________, né en 1978 à Humin
(Népal), tous deux originaires de Genève et Gurzelen (Berne), se sont mariés à
Cologny (Genève) en 2003. Les époux ont soumis leur union au régime matrimonial
de la séparation de biens du droit suisse.

Trois enfants sont issus de cette union, soit C.________, né en 2002 à
Chêne-Bougeries (Genève), D.________, né en 2004 à          Chêne-Bougeries
(Genève), et E.________, née en 2009 au Népal.
Les époux ont vécu à Genève au début de leur union conjugale, puis ont
transféré leur domicile à V.________ (Népal), pays dans lequel est né leur
troisième enfant en 2009. Ils se sont séparés en 2012, le mari restant dans
l'ancien domicile conjugal à V.________, tandis que l'épouse établissait son
domicile à W.________ (Thaïlande). Elle y vit désormais avec les trois enfants
du couple, qui sont scolarisés dans cette ville.
Le mari, qui a acquis la nationalité suisse et les droits de cité de son
épouse, dont celui de Genève, exerce les professions d'homme d'affaires,
d'agent et de musicien à V.________. Il est notamment propriétaire et directeur
d'une société. L'épouse, qui vit et travaille en Thaïlande, est administratrice
de sociétés. Elle est propriétaire d'un bien immobilier sis à Genève, où elle
ne réside pas, ainsi que de la société qui détient le bien immobilier situé à
W.________ dans lequel elle habite avec ses enfants. Les conjoints n'ont jamais
cotisé auprès d'une institution de prévoyance professionnelle obligatoire (2 ^
ème pilier) de droit suisse au cours de leur mariage.

A.b. En date du 1 ^er novembre 2013, les époux ont déposé au greffe du Tribunal
de première instance du canton de Genève une requête commune en divorce,
assortie d'une convention sur les effets accessoires de celui-ci. Ladite
convention prévoyait notamment l'attribution des droits parentaux sur les trois
enfants à la mère, l'octroi d'un large droit de visite au père, le versement
par celui-ci de contributions à l'entretien de chacun des enfants s'échelonnant
de 500 à 700 fr. par mois, ainsi que la possibilité de remplacer ces
contributions par le versement unique d'une somme de 300'000 fr. Les époux
convenaient par ailleurs de renoncer à toute contribution à leur propre
entretien et à toute prétention réciproque au titre de la liquidation de leur
régime matrimonial.

A.c. Par ordonnance du 3 janvier 2014, le Tribunal de première instance a
limité la procédure à la question de savoir si et dans quelle mesure il était
compétent à raison du lieu pour prononcer le divorce et statuer sur les effets
accessoires. Les parties ont déposé des observations tendant en substance à
admettre la compétence à raison du lieu des tribunaux genevois, motif pris de
la nationalité suisse commune des deux époux et des trois enfants, dont deux
étaient nés à Genève. Les époux ont également invoqué le fait que leurs
domiciles situés dans deux pays différents (Thaïlande et Népal) rendrait
«quasiment impossible» la mise en oeuvre de leur volonté de divorcer de façon
consensuelle, expliquant ignorer la législation applicable à une procédure de
divorce à l'amiable dans l'un ou l'autre de leurs pays de domicile.

B. 
Par jugement du 10 février 2014, le Tribunal de première instance s'est déclaré
incompétent  ratione loci pour statuer sur la demande en divorce et en
règlement des effets accessoires de celui-ci formée le 1er novembre 2013 par
les époux et l'a en conséquence déclarée irrecevable.

Saisie d'un appel de ceux-ci, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé
ce jugement par arrêt du 6 août 2014.

C. 
Par acte posté le 15 septembre 2014, les conjoints exercent un recours en
matière civile à l'encontre de cet arrêt. Ils concluent à sa réforme en ce sens
que l'affaire est renvoyée au Tribunal de première instance pour qu'il soit
statué au fond sur leur requête commune en divorce du 1 ^er novembre 2013.
Subsidiairement, ils sollicitent le renvoi de la cause à la Cour de justice
pour nouveau jugement dans le sens des considérants.

Des observations n'ont pas été requises.

Considérant en droit :

1.

1.1. Le recours a été déposé dans le délai légal (art. 100 al. 1 et 46 al. 1
let. b LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF; arrêts 5A_235/2012
du 31 août 2012 consid. 1.1; 5A_659/2011 du 5 avril 2012 consid. 1.1 et les
références) rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité
cantonale de dernière instance statuant sur recours (art. 75 LTF). La décision
attaquée a pour objet la compétence (internationale) à raison du lieu pour
prononcer le divorce, en sorte que l'affaire est de nature non pécuniaire
(arrêt 5A_659/2011 précité consid. 1.1). Les recourants, qui ont été déboutés
de leurs conclusions par l'autorité précédente, ont qualité pour recourir (art.
76 al. 1 LTF).

1.2. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) sans
être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des
parties; il peut donc admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments
que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une
substitution de motifs (ATF 133 III 545 consid. 2.2). Toutefois, compte tenu de
l'obligation de motiver qui incombe au recourant en vertu de l'art. 42 al. 2
LTF, il n'examine pas toutes les questions juridiques qui peuvent se poser,
mais seulement celles qui sont soulevées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2;
134 III 102 consid. 1.1; 133 III 545 consid. 2.2; 131 III 26 consid. 12.3 et
les références). En outre, il ne connaît de la violation des droits
fondamentaux que si ce grief a été soulevé et motivé par la partie recourante
(art. 106 al. 2 LTF; ATF 137 II 305 consid. 3.3; 133 II 249 consid. 1.4.2). Si
celle-ci se plaint de la violation de tels droits, elle doit ainsi satisfaire
au principe d'allégation, en indiquant précisément quelle disposition
constitutionnelle a été violée et en démontrant, par une argumentation précise,
en quoi consiste la violation (ATF 133 IV 286 consid. 1.4; 133 II 249 consid.
1.4.2). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 133 II 396
consid. 3.1).

1.3. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont
été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion
d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353
consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al.
2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la
cause (art. 97 al. 1 in fine LTF). Le recourant qui entend invoquer que les
faits ont été établis de manière arbitraire (art. 97 al. 1 LTF) doit satisfaire
au principe d'allégation en démontrant, par une argumentation précise, en quoi
consiste la violation de l'art. 9 Cst.

En l'espèce, les faits que les recourants relatent aux pages 2 et 3 de leur
recours seront ignorés en tant qu'ils s'écartent de ceux contenus dans l'arrêt
attaqué et que les recourants n'invoquent pas leur établissement arbitraire.

2. 
Constatant que les époux étaient tous deux domiciliés à l'étranger, la cour
cantonale a considéré sans être contredite que la question de la compétence à
raison du lieu pour prononcer le divorce et régler les effets accessoires de
celui-ci devait - en l'absence de conventions internationales ratifiées par la
Thaïlande et le Népal, d'une part, et la Suisse, d'autre part - être examinée
au regard de la LDIP, soit en l'occurrence de l'art. 60 de cette loi (for
d'origine). Après avoir rappelé la teneur de cette disposition et ses
conditions d'application, les juges précédents ont estimé que les parties
n'avaient ni allégué ni démontré qu'il leur serait impossible ou extrêmement
difficile d'accéder au juge du divorce au for du domicile de l'une ou de
l'autre d'entre elles, rejetant par là même leur argument consistant à soutenir
que cette condition n'aurait pas à être réalisée lorsque les deux époux
possèdent la nationalité suisse.

L'autorité cantonale a par ailleurs fait sienne l'opinion du premier juge selon
laquelle la seule ignorance par les parties des règles juridiques applicables
au divorce de ressortissants étrangers dans leurs États de domicile respectifs
ne constituait pas un cas d'impossibilité ou de difficulté excessive d'obtenir
le divorce dans l'un de ces États. Il en allait de même de la constatation
faite par ce magistrat que, selon des sources juridiques publiquement
accessibles, la Thaïlande dispose d'une législation de droit international
privé admettant notamment la possibilité pour des époux étrangers de saisir le
juge du pays de résidence d'une demande en divorce, même par consentement
mutuel, pour autant, dans cette dernière hypothèse, que cette institution soit
admissible au regard du droit d'origine de chaque époux, ce qui est bien le cas
du droit suisse. Il était ainsi en l'espèce possible d'agir en divorce au for
du domicile de l'épouse. Les parties ne le contestaient pas; elles ne
soutenaient pas non plus que le résultat auquel conduirait une telle procédure
serait d'une quelconque manière inéquitable. L'autorité cantonale a encore
relevé que l'éventuelle méconnaissance de la langue ne saurait constituer un
obstacle insurmontable, compte tenu du fait que les parties exercent chacune
une activité lucrative dans leur pays de domicile. Il pouvait raisonnablement
être attendu d'elles qu'elles sollicitent le concours d'un conseil du pays
considéré ou des autorités locales pour disposer des renseignements ou de
l'aide nécessaires. Forts de ces motifs, les juges précédents ont considéré que
les conditions prévues par l'art. 60 LDIP n'étaient pas entièrement réalisées
et que les parties, qui avaient quitté la Suisse depuis plusieurs années et ne
possédaient plus d'attaches significatives avec le pays en dehors de leur
nationalité, ne pouvaient se prévaloir du for d'origine prévu par cette
disposition.

3. 
Les recourants font grief à la cour cantonale d'avoir nié l'existence d'une
lacune de la loi. Ils soutiennent que, lorsque deux époux de nationalité suisse
résidant à l'étranger, mariés en Suisse et ayant vécu dans ce pays leurs
premières années de vie conjugale, forment une requête commune en divorce avec
accord sur les effets accessoires, la compétence des tribunaux de leur lieu
d'origine doit être admise sans qu'il y ait lieu d'appliquer la condition
restrictive liée à l'impossibilité ou la grande difficulté d'accéder à la
justice de leur pays de domicile prévue par l'art. 60 LDIP.

3.1. La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation
littérale). Si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de
rechercher la véritable portée de la norme, en la dégageant de sa relation avec
d'autres dispositions légales (interprétation systématique), du but recherché,
singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de
la volonté du législateur telle qu'elle ressort des travaux préparatoires
(interprétation historique). Le sens que prend la disposition dans son contexte
est également important. Lorsqu'il est appelé à interpréter une loi, le
Tribunal fédéral adopte une position pragmatique en suivant une pluralité de
méthodes, sans soumettre les différents éléments d'interprétation à un ordre de
priorité (ATF 140 V 227 consid. 3 et les arrêts cités). Par ailleurs,
l'autorité a le droit - et éventuellement le devoir (ATF 118 Ib 187 consid. 5a)
- de déroger au sens littéral d'un texte apparemment clair, par la voie de
l'interprétation, lorsque des raisons objectives révèlent que ce texte ne
restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. De tels motifs
peuvent ressortir des travaux préparatoires, du but de la règle et de ses
rapports avec d'autres dispositions (ATF 140 II 202 consid. 5.1; 139 III 478
consid. 6; 138 II 440 consid. 13). En revanche, le Tribunal fédéral ne peut,
sous peine de violer le principe de la séparation des pouvoirs, s'écarter d'une
interprétation qui correspond à l'évidence à la volonté du législateur, en se
fondant, le cas échéant, sur des considérations relevant du droit désirable ( 
de lege ferenda ); autrement dit, le juge ne saurait se substituer au
législateur par le biais d'une interprétation extensive (ou restrictive) des
dispositions légales en cause (ATF 133 III 257 consid. 2.4; 130 II 65 consid.
4.2; 127 V 75 consid. 3; arrêt 2C_10/2014 du 4 septembre 2014 consid. 4.1).
L'interprétation de la loi peut conduire à la constatation d'une lacune. Une
lacune proprement dite (art. 1 al. 2 CC) suppose que le législateur s'est
abstenu de régler un point alors qu'il aurait dû le faire et qu'aucune solution
ne se dégage du texte ou de l'interprétation de la loi. En revanche, si le
législateur a renoncé volontairement à codifier une situation qui n'appelait
pas nécessairement une intervention de sa part, son inaction équivaut à un
silence qualifié. Quant à la lacune improprement dite, elle se caractérise par
le fait que la loi offre certes une réponse, mais que celle-ci est
insatisfaisante. D'après la jurisprudence, seule l'existence d'une lacune
proprement dite appelle l'intervention du juge, tandis qu'il lui est en
principe interdit, selon la conception traditionnelle qui découle notamment du
principe de la séparation des pouvoirs, de corriger les silences qualifiés et
les lacunes improprement dites (cf. ATF 131 II 562 consid. 3.2; 129 III 656
consid. 4.1; 125 III 425 consid. 3a; arrêt 8C_250/2014 du 2 décembre 2014
consid. 4.1 et la jurisprudence citée).

3.2. Selon l'art. 60 LDIP, lorsque les époux ne sont pas domiciliés en Suisse
et que l'un d'eux est suisse, les tribunaux du lieu d'origine sont compétents
pour connaître d'une action en divorce ou en séparation de corps, si l'action
ne peut être intentée au domicile de l'un des époux ou si l'on ne peut
raisonnablement exiger qu'elle le soit. Cette règle a transformé l'ancien for
ordinaire du lieu d'origine (art. 7g de la loi fédérale du 25 juin 1891 sur les
rapports de droit civil des citoyens établis ou en séjour [LRDC; RO 1890-92 p.
337]) en un for subsidiaire; elle concrétise un principe général applicable aux
Suisses de l'étranger, également consacré dans d'autres domaines du droit de la
famille (art. 47, 67, 76 LDIP) et en matière de successions (art. 87 LDIP). Le
législateur est en effet parti de l'idée que les Suisses vivant à l'étranger
doivent s'adresser en priorité aux autorités compétentes de leur pays de
domicile. Le for d'origine ayant été auparavant conçu comme un for ordinaire,
accessible sans autre condition que celle de la nationalité suisse (art. 7g al.
1, art. 8 LRDC), la nouvelle conception, plus restrictive, a donné lieu à un
vif débat aux Chambres fédérales. Le législateur a donné sa préférence à une
solution étroitement axée sur les besoins réels de protection. En effet, il n'y
a guère d'intérêt pour la Suisse à favoriser sans réserve des procédures
judiciaires se déroulant dans ce pays devant des tribunaux souvent fort
éloignés du lieu des faits pertinents, ce d'autant plus que les jugements ainsi
prononcés en Suisse risquent de ne pas être reconnus et exécutés dans le pays
étranger du domicile des parties, en particulier lorsque l'une d'elles
seulement est de nationalité suisse. Le for fondé sur la seule nationalité
constitue un for exorbitant; il s'impose donc d'en réduire la portée aux
hypothèses où il existe concrètement des intérêts dignes de protection (cf.
Message du 10 novembre 1982 concernant une loi fédérale sur le droit
international privé [loi de DIP], FF 1983 I 347 ch. 235.2; Bucher, Droit
international privé suisse, Tome II: Personnes, Familles, Successions, 1992
[ci-après: DIP], n° s 18, 19 et 20 p. 26; Bucher/Bonomi, Droit international
privé, 3e éd. 2013, n° 578 p. 164/165). Le for au lieu d'origine ne peut être
envisagé que si les deux époux ne sont pas domiciliés en Suisse ou si, en
l'absence d'un domicile en Suisse et à l'étranger, ils n'ont pas de résidence
habituelle en Suisse (art. 20 al. 2 LDIP). L'un des époux au moins doit avoir
la nationalité suisse, celle-ci l'emportant en cas de double nationalité suisse
et étrangère (art. 23 al. 1 LDIP). Le droit d'agir au for d'origine est
également accordé au conjoint étranger d'un époux suisse ( BUCHER, in
Commentaire romand, Loi sur le droit international privé - Convention de
Lugano, 2011 [ci-après: Commentaire romand], n° 2 ad art. 60 LDIP; VOLKEN, in
Zürcher Kommentar zum IPRG, 2e éd. 2004, n° 6 ad art. 60 LDIP; BOPP, in Basler
Kommentar, Internationales Privatrecht, 3e éd. 2013, n° 3 ad art. 60 LDIP).

L'art. 60 LDIP ne prévoit aucune distinction selon qu'un seul des époux ou les
deux possèdent la nationalité suisse, pas plus qu'entre le divorce sur demande
unilatérale et celui sur requête commune. Contrairement à ce que prétendent les
recourants, ce silence n'est toutefois pas dû à une lacune de la loi. Il
s'explique par le fait que le législateur a considéré comme allant de soi que,
même dans ces cas, l'accès au for d'origine en Suisse devait être soumis à un
besoin de protection. La subsidiarité de la compétence suisse de l'origine est
du reste également consacrée en matière d'effets généraux du mariage (art. 47
LDIP, disposition également applicable au régime matrimonial en vertu de l'art.
51 let. c LDIP), d'établissement de la filiation en général (art. 67 LDIP),
d'adoption (art. 76 LDIP) et, sous une forme un peu différente, pour les
successions (art. 87 LDIP).

 S'agissant en particulier des divorces consensuels, les recourants font valoir
que, dans son Message du 9 janvier 1996 concernant la révision du Code civil
suisse, le Conseil fédéral a indiqué qu'il était évident que les art. 59 ss
LDIP engloberaient aussi désormais, dans la notion d'action en divorce, le
divorce sur requête commune au sens des art. 111 ss CC, précisant qu'il avait
été renoncé à adapter formellement ces dispositions pour ne pas alourdir le
texte légal (cf. FF 1996 I 183 ch. 263). Pour les recourants, force serait de
constater que le législateur, en renonçant à adapter plus en détail, pour des
raisons purement formalistes, les dispositions de la LDIP en matière de
divorce, «s'en est remis à la jurisprudence en ce qui concerne la portée et
l'interprétation des art. 59 et 60 LDIP dans le cas d'un divorce par
consentement mutuel». S'il est vrai qu'il ne s'agit pas  a priori d'un silence
qualifié de la loi, on ne saurait pour autant conclure à l'existence d'une
lacune proprement dite, que le législateur aurait omis de régler et à laquelle
le juge devrait remédier. Il convient bien plutôt de considérer qu'en renonçant
à inclure expressément le divorce sur requête commune dans la notion d'action
en divorce mentionnée de façon générale aux art. 59 et 60 LDIP, le législateur
est parti de l'idée qu'il n'y avait pas lieu de soumettre l'accès au for
d'origine à des conditions différentes selon que dite action est introduite par
une demande unilatérale ou une requête commune.

 S'appuyant sur un passage du Message du 10 novembre 1982 concernant la LDIP
précité (FF 1983 I 347 ch. 235.2), les recourants soutiennent en outre que
l'octroi sans réserve d'une compétence au lieu d'origine du Suisse de
l'étranger, prévu à l'art. 7g LRDC, n'a été supprimé que dans la mesure où
cette réglementation ne prenait pas en considération les intérêts de l'autre
conjoint également suisse, ce risque d'avantager l'un des époux par rapport à
l'autre étant cependant inexistant en cas de divorce à l'amiable. Cet argument
n'est pas déterminant. L'art. 60 LDIP a pour but de prévoir le for d'origine,
au premier chef, lorsque les époux ou l'un d'eux sont confrontés à
«l'impossibilité» ou à une «grande difficulté» d'accéder à la justice dans le
pays de leur domicile. La condition du besoin de protection, introduite par
cette disposition, peut aussi se comprendre par référence au contenu du droit
applicable, qui peut notamment empêcher l'action d'aboutir, ou encore à
l'absence de reconnaissance de la décision en Suisse (Bucher, in Commentaire
romand, n° 6 ss ad art. 60 LDIP, et DIP, nos 28 ss p. 28 à 32; Volken, op.
cit., n° s 8 ss ad art. 60 LDIP; Bopp, op. cit., nos 6, 7 et 8 ad art. 60
LDIP). Ainsi défini, ce besoin de protection, qu'il soit juridique ou de fait,
peut donc concerner aussi bien les époux qui déposent une requête commune en
divorce que ceux qui agissent par demande unilatérale.

 Il découle de ce qui précède qu'aucun motif objectif ne commande de s'écarter
de l'interprétation littérale claire selon laquelle les conditions de l'art. 60
LDIP  in fine s'applique indifféremment en cas de divorce sur demande
unilatérale ou sur requête commune, et ce même si les deux époux sont de
nationalité suisse. Cette interprétation exclut en conséquence l'existence
d'une lacune proprement dite sur ce point. Par ailleurs, quand bien même les
considérations des recourants relatives au droit comparé et à un développement
législatif futur devraient-elles faire apparaître que cette interprétation
conduit à un résultat insatisfaisant, la prétendue omission qu'ils invoquent
devrait être qualifiée de lacune improprement dite (cf. supra consid. 3.1).
Enfin, il n'y a pas lieu d'examiner les allégations des recourants selon
lesquelles rien ne s'oppose à ce que le juge du divorce suisse statue sur
l'intégralité de leur requête commune en divorce, en particulier s'agissant de
la protection des enfants et des obligations alimentaires en leur faveur, cette
argumentation n'étant pas pertinente pour déterminer si l'art. 60 LDIP présente
une lacune au sens de l'art. 1 al. 2 CC.

4. 
A titre subsidiaire, les recourants soutiennent que l'autorité cantonale a
sous-estimé les difficultés que représenterait pour eux une demande de divorce
à l'étranger. Cette juridiction aurait ainsi abusé de son pouvoir
d'appréciation et rendu une décision arbitraire en considérant que la condition
de l'art. 60 LDIP n'était pas réalisée.
A l'appui de leur grief, ils exposent que l'épouse vit en Thaïlande avec les
enfants, sans y être toutefois domiciliée, depuis la séparation des parties
seulement, et qu'aucun des conjoints ou des enfants ne maîtrise la langue
locale. De plus, le mari continue de résider au Népal, ce qui de toute évidence
ne facilite pas les procédures devant les autorités de l'un ou de l'autre de
ces deux pays. Un jugement de divorce thaïlandais ou népalais devrait quoi
qu'il en soit faire l'objet d'une procédure de reconnaissance en Suisse. Quant
à l'affirmation de l'autorité cantonale selon laquelle les conjoints ne
possèdent plus d'attaches significatives avec la Suisse en dehors de leur
nationalité, elle ne ressortirait nullement des pièces produites ou des
écritures des parties. Sur ce point, les recourants soutiennent que l'épouse
passe chaque année les vacances scolaires d'été avec ses enfants dans la maison
dont elle est propriétaire à X.________ (Genève), que, durant ces périodes, le
mari s'y rend aussi régulièrement pour rendre visite aux enfants, qu'elle est
administratrice d'une société à Genève dont les revenus sont soumis aux impôts
suisses, et que ses parents sont domiciliés en Suisse: ces allégations sont
essentiellement de nature appellatoire, de sorte qu'elles ne peuvent être
prises en compte; pour le surplus, les recourants se bornent à faire valoir
leur propre appréciation de la situation. Dans la mesure où ils prétendent par
ailleurs, en relation avec le principe de l'unité du jugement de divorce, qu'il
existe un risque important que les juridictions de leurs pays de résidence
respectifs n'admettent leur compétence que pour une partie des questions liées
au divorce et renvoie les parties à agir devant les juridictions du pays dont
elles partagent la nationalité, voire même se déclarent complètement
incompétentes, ils ne cherchent nullement à démontrer leurs affirmations. En
particulier, ils ne remettent pas en cause la constatation de l'autorité
cantonale, selon laquelle le Tribunal de première instance a correctement
relevé que la Thaïlande dispose d'une législation de droit international privé
admettant notamment la possibilité pour des époux étrangers de saisir le juge
du pays de résidence d'une demande en divorce, même par consentement mutuel,
pour autant, dans cette dernière hypothèse, que cette institution soit
admissible au regard du droit d'origine de chaque époux, ce qui est bien le cas
du droit suisse (arrêt querellé p. 7).

Dès lors, on ne voit pas en quoi la cour cantonale aurait fait preuve
d'arbitraire ou violé le droit fédéral en considérant, pour les motifs exposés
plus haut (cf. consid. 2), notamment celui de la possibilité d'intenter une
action en divorce par consentement mutuel au domicile de l'épouse, que les
conditions prévues par l'art. 60 LDIP n'étaient pas entièrement réalisées.
Autant qu'il est suffisamment motivé (art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF), le moyen
est par conséquent infondé.

5. 
En conclusion, le recours se révèle mal fondé et doit par conséquent être
rejeté, dans la mesure où il est recevable. Les recourants, qui succombent,
supporteront solidairement les frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il
n'y a pas lieu d'allouer de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis solidairement à la charge
des recourants.

3. 
Le présent arrêt est communiqué aux recourants et à la Chambre civile de la
Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 14 janvier 2015

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : von Werdt

La Greffière : Mairot

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