Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.583/2013
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
8C_583/2013

Arrêt du 4 février 2014

Ire Cour de droit social

Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux Leuzinger, Présidente, Frésard et Maillard.
Greffière: Mme von Zwehl.

Participants à la procédure
Ville de Genève, Palais Eynard, rue de la Croix-Rouge 4, 1204 Genève,
recourante,

contre

F.________,
représentée par Me Christian Reiser, avocat,
intimée.

Objet
Droit de la fonction publique (récusation d'un juge suppléant),

recours contre le jugement de la Chambre administrative de la Cour de justice
de la République et canton de Genève, du 11 juin 2012.

Faits:

A. 
F.________ a été nommée par le Conseil administratif de la Ville de Genève au
poste de cheffe de service à X.________ dès le 1 ^er août 2008. Par lettre du
16 décembre 2008, elle a résilié ses rapports de service avec effet au 31 mars
2009. Le 19 décembre 2008, la Direction des ressources humaines de la Ville a
pris acte de cette démission en précisant toutefois que les rapports
prendraient fin au 31 janvier 2009, conformément à l'art. 7 al. 6 du Statut du
personnel de l'administration municipale. A la suite d'une nouvelle
correspondance de l'intéressée, le Conseil administratif de la Ville lui a
écrit, le 14 janvier 2009, pour lui confirmer que la démission prendrait effet
au 31 janvier 2009.

B. 
Le 28 avril 2009, F.________ a saisi le Tribunal administratif de la République
et canton de Genève (depuis le 1 ^er janvier 2011: la Chambre administrative de
la Cour de justice) d'une action pécuniaire tendant au paiement de deux
salaires mensuels de 13'705 fr. 65 chacun pour les mois de février et mars
2009, d'un montant de 7'029 fr. 60 au titre d'indemnité pour cumul de fonctions
et d'une somme de 1'000 fr. au titre de réparation morale. La Ville a conclu à
l'irrecevabilité de la requête et, subsidiairement, à son rejet.
Par arrêt du 11 juin 2013, la Chambre administrative, après avoir considéré la
demande comme un recours dirigé contre la décision du Conseil administratif du
14 janvier 2009, a annulé cette décision en tant qu'elle mettait fin aux
rapports de service au 31 janvier 2009. Elle a arrêté la fin des rapports de
fonction de l'intéressée au 31 mars 2009, et renvoyé la cause au Conseil
administratif "pour qu'il arrête le montant du traitement net du salaire dû à
Madame F.________ en fonction du droit aux vacances et au treizième salaire au
31 mars 2009, sous déduction des charges sociales". La Cour était composée des
juges T.________, président, H.________, D.________ et V.________, ainsi que du
juge suppléant N.________.

C. 
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la Ville de Genève
demande au Tribunal fédéral, principalement, d'annuler l'arrêt de la Chambre
administrative et de renvoyer la cause à celle-ci pour nouvelle décision au
sens des motifs. Elle requiert, au préalable, l'effet suspensif.
F.________ a conclu au rejet de la requête d'effet suspensif. Au principal,
elle conclut à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.
La juridiction cantonale s'est également déterminée sur le recours. Elle a
conclu à son rejet.

D. 
Par ordonnance du 18 novembre 2013, le juge instructeur a accordé l'effet
suspensif au recours

Considérant en droit:

1.

1.1. Le jugement attaqué renvoie la cause au Conseil administratif de la Ville
de Genève pour fixation du traitement dû à l'intimée. Le prononcé par lequel
une juridiction cantonale renvoie l'affaire pour nouvelle décision à une
autorité de première instance ou à une autre autorité ne constitue qu'une étape
vers la décision finale, qui ne met donc pas un terme à la procédure en cours
ni ne fixe définitivement le sort du litige. Il ne s'agit en principe pas non
plus d'un jugement partiel - même s'il comporte des instructions sur la manière
de trancher certains aspects du rapport de droit litigieux ou s'il statue
définitivement sur certaines questions préalables -, mais d'un jugement
incident ou préjudiciel qui ne peut faire l'objet d'un recours qu'aux
conditions de l'art. 93 LTF (ATF 133 V 477 consid. 4 p. 480). Néanmoins, si le
renvoi ne laisse aucune latitude de jugement à l'autorité précédente appelée à
statuer (à nouveau), il est assimilé à une décision finale et peut, de ce fait,
faire l'objet d'un recours immédiat au Tribunal fédéral (ATF 135 V 141 consid.
1.1 p. 143; 134 II 124 consid. 1.3 p. 127; 133 V 477 consid. 5.2.2 p. 483). Tel
est le cas en l'espèce, dans la mesure où la décision qui doit être rendue par
la Ville de Genève selon le dispositif du jugement attaqué consiste à chiffrer
sur la base de simples opérations comptables le montant dû à l'intimée sans que
la Ville dispose à cet égard d'une marge de manoeuvre, si minime soit-elle. Le
recours est donc recevable au regard de l'art. 90 LTF.

1.2. Le jugement entrepris a été rendu en matière de rapports de travail de
droit public au sens de l'art. 83 let. g LTF. Contrairement à ce que soutient
l'intimée, la contestation est à l'évidence de nature pécuniaire, de sorte que
le motif d'exclusion prévu par cette disposition n'entre pas en considération.
La valeur litigieuse dépasse par ailleurs le seuil requis de 15'000 fr. (art.
85 al. 1 let. b LTF).

1.3. Enfin, la qualité pour agir de la Ville est donnée au regard de l'art. 89
al. 1 LTF, dès lors que celle-ci est touchée de façon identique ou analogue à
un employeur privé, comme c'est le cas dans les litiges de nature pécuniaire
relevant du droit de la fonction publique (ATF 134 I 204).

1.4. Pour le reste, déposé en temps utile et dans les formes requises le
recours est recevable au regard des art. 42 al. 1 et 2 et 100 al. 1 LTF. La
voie du recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF est donc
ouverte pour contester la décision attaquée.

2.

2.1. Contrairement à ce que paraît soutenir la juridiction cantonale dans ses
déterminations, la Ville de Genève, comme toute partie recourante légitimée à
agir sur la base de l'art. 89 al. 1 LTF, peut invoquer les motifs de recours
énoncés à l'art. 95 LTF, notamment la violation du droit fédéral (p. ex. arrêt
2C_111/2011 du 7 juillet 2011 consid. 2.1). A l'appui de sa conclusion
principale, la recourante se prévaut des art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH. Elle
critique la présence du juge suppléant N.________, avocat pratiquant, dans la
composition de la Cour qui a statué. Elle fait valoir que ce dernier est
intervenu en 2012 et 2013 devant la Cour de justice, en qualité d'avocat comme
conseil d'une partie anciennement employée de la Ville de Genève, dans deux
procédures contentieuses dirigées contre la Ville. La première concernait un
recours de cet employé contre une décision du Conseil administratif relative à
une suspension de l'activité et de traitement (recours qui a fait l'objet d'un
arrêt de la Chambre administrative du 17 avril 2012). Un deuxième recours de ce
même agent était dirigé contre une décision du Conseil administratif prononçant
la résiliation immédiate des rapports de service de l'intéressé (recours qui a
fait l'objet d'une décision de la Chambre administrative sur effet suspensif du
3 juillet 2012 et d'un arrêt au fond du 28 mai 2013). A chaque fois, le
fonctionnaire a été débouté de ses conclusions.

2.2. Dans ses déterminations, la Chambre administrative ne conteste pas ces
faits. Elle précise que l'arrêt relatif à la décision de licenciement a été
délibéré le 28 mai 2013 et reçu le 7 juin 2013 par M ^e N.________. Elle
souligne que cette affaire avait un autre objet que la présente cause, qui
porte sur le droit au salaire d'une ancienne employée.

3.

3.1. Selon un principe général, la partie qui a connaissance d'un motif de
récusation doit l'invoquer aussitôt, sous peine d'être déchue du droit de s'en
prévaloir ultérieurement (ATF 138 I 1 consid. 2.2 p. 4 et les arrêts cités). Il
est, en effet, contraire aux règles de la bonne foi de garder en réserve le
moyen tiré de la composition irrégulière du tribunal pour ne l'invoquer qu'en
cas d'issue défavorable de la procédure. Cela ne signifie toutefois pas que
l'identité des juges appelés à statuer doive nécessairement être communiquée de
manière expresse au justiciable; il suffit que le nom de ceux-ci ressorte d'une
publication générale facilement accessible, par exemple l'annuaire officiel. La
partie assistée d'un avocat est en tout cas présumée connaître la composition
régulière du tribunal. En revanche, un motif de prévention concernant un juge
suppléant peut, en principe, encore être valablement soulevé dans le cadre
d'une procédure de recours, car le justiciable pouvait partir de l'idée que la
juridiction inférieure statuerait dans sa composition ordinaire (ATF 139 III
120 consid. 3.2.1 p. 124).

3.2. En l'espèce, la recourante affirme - sans être contredite - n'avoir appris
qu'à réception de l'arrêt présentement attaqué que l'avocat N.________ avait
statué sur le litige en tant que juge suppléant, conjointement avec quatre
autres juges ordinaires. Son droit d'invoquer la récusation de ce juge n'est
donc pas périmé.

4.

4.1. L'avocat qui exerce les fonctions de juge apparaît objectivement partial
non seulement lorsque, dans le cadre d'une autre procédure, il représente ou a
représenté une des parties à la procédure dans laquelle il siège, mais
également lorsqu'il représente ou a représenté récemment la partie adverse de
cette partie (ATF 139 III 433 consid. 2.1.4 p. 437, 120 consid. 3.2.1 p. 124;
139 I 121 consid. 5.1 p. 126; 138 I 406 consid. 5.3 et 5.4).

4.2. En l'espèce, l'arrêt attaqué a été rendu le 11 juin 2013, soit quelques
jours à peine après que la Chambre administrative a délibéré et statué sur le
litige en matière de résiliation des rapports de travail opposant la Ville à
l'un de ses agents, représenté par M ^e N.________. Une telle circonstance est
objectivement de nature à susciter des doutes quant à l'impartialité du juge en
question à l'égard de la recourante. Comme l'a récemment souligné le Tribunal
fédéral, l'expérience enseigne, en effet, qu'une partie à un procès reporte
souvent ses sentiments négatifs contre sa partie adverse sur l'avocat de
celle-ci au point de le considérer comme un adversaire, à l'égal de cette
partie. Aussi est-il compréhensible qu'une partie n'attende pas d'un juge
suppléant qu'il se comporte soudainement en toute impartialité envers elle,
alors qu'il la combat ou l'a combattue dans une autre procédure en sa qualité
de représentant de sa partie adverse (ATF 139 III 120 consid. 3.2.2 p. 125).
Contrairement à ce que soutient la Chambre administrative, il n'est nullement
décisif que les deux litiges n'aient pas un objet identique (ATF 139 III 433
consid. 2.1.4 p. 437). Au reste, le présent litige et celui dans lequel est
intervenu l'avocat N.________ concernent tous deux, sur le fond, une personne
employée par la Ville dans un domaine relevant du droit de la fonction
publique. Le mandat de M ^e N.________ comme avocat et la cause dans laquelle
il est intervenu en tant que juge suppléant sont donc de même nature.

4.3. Le moyen tiré de la violation de la garantie d'un tribunal indépendant et
impartial se révèle bien fondé. Cette garantie revêtant un caractère formel, sa
violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment
des chances de succès et des moyens que le recourant soulève dans la procédure
au fond (ATF 139 III 120 consid. 3.2.2 in fine p. 125 et la jurisprudence
citée).

5. 
Vu l'issue du litige, l'intimée, qui succombe, supportera les frais de justice
(art. 66 al. 1 LTF). La recourante, contrairement à ses conclusions, n'a pas
droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1. 
Le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la
Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève pour qu'elle
statue à nouveau dans une composition régulière.

2. 
Les frais de justice, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre administrative de
la Cour de justice de la République et canton de Genève.

Lucerne, le 4 février 2014
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Leuzinger

La Greffière: von Zwehl

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