Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.390/2013
Zurück zum Index I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2013
Retour à l'indice I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2013


Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente
dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet.
Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem
Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
                                                               Grössere Schrift

Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
1B_390/2013

Arrêt du 10 janvier 2014

Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
Karlen et Chaix.
Greffière: Mme Kropf.

Participants à la procédure
A.________, représentée par Me Sébastien Desfayes, avocat,
recourante,

contre

Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213
Petit-Lancy.

Objet
Séquestre pénal,

recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de
la République et canton de Genève du 7 octobre 2013.

Faits:

A. 
Le 1 ^er novembre 2011, la banque X.________, à Genève, s'est adressée au
Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent pour l'informer
qu'en date du 12 août 2011, B.________, ayant droit économique du compte
bancaire de la Fondation Y.________ (ci-après: la Fondation), avait fait
transférer le solde de ce compte (USD 512'000.-) sur celui ouvert le 19 octobre
2010 au nom de la société A.________ (n ^o xxx) et dont l'ayant droit était la
mère du prénommé, C.________. Se référant au jugement grec rendu en 2011 -
reconnaissant B.________ coupable de fraude qualifiée et contre lequel, avec
son co-prévenu, il a fait appel -, la banque a relevé que la période de
commission des infractions (1999 à 2004) coïncidait avec ou précédait
l'ouverture de comptes dans son établissement par le prévenu (1999, 2000, 2001
et 2010). Dès lors, elle soupçonnait l'argent qui y avait été déposé d'être le
fruit des infractions commises.
Par décision du 7 novembre 2011, le Ministère public de la République et canton
de Genève a notamment ordonné le séquestre auprès de X.________ des avoirs de
A.________. Par courrier du 2 décembre 2011, les représentants de la banque ont
averti le Procureur que B.________ était décédé le 27 novembre 2011.
L'interdiction d'informer la société concernée par le séquestre ayant été
levée, le Procureur lui a expliqué le 16 mai 2012 les motifs du séquestre de
son compte bancaire, ainsi que les mesures d'instruction qu'il allait
entreprendre. Cette autorité a ensuite entendu en qualité que témoins
C.________ le 9 octobre 2012, puis l'ancien employé de banque en charge du
compte saisi le 3 décembre suivant.
Le 16 mai et le 27 juin 2013, A.________ a requis la levée du séquestre. Par
décision du 3 juillet 2013, le Ministère public a maintenu cette mesure,
précisant qu'une commission rogatoire afin de déterminer l'éventuelle origine
criminelle de l'argent en cause allait être décernée rapidement.
Par arrêt du 7 octobre 2013, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice
de la République et canton de Genève a rejeté le recours intenté par la société
intéressée.

B. 
Par mémoire du 7 novembre 2013, A.________ forme un recours en matière pénale à
l'encontre de ce jugement, concluant à son annulation. Elle requiert la levée
du séquestre sur les avoirs de son compte n ^o xxx et la constatation de la
prescription de l'action pénale pour blanchiment d'argent. A titre subsidiaire,
elle demande le renvoi de la cause pour nouvelle décision au sens des
considérants.
Invités à se déterminer, le Procureur a conclu au rejet du recours, tandis que
la cour cantonale a renoncé à présenter des observations. La recourante n'a pas
déposé de détermination complémentaire.

Considérant en droit:

1. 
Le recours en matière pénale (art. 78 ss LTF) est ouvert contre une décision de
séquestre prise au cours d'une procédure pénale et confirmée en dernière
instance cantonale (art. 80 LTF). La décision ordonnant une telle mesure a un
caractère incident (ATF 128 I 129 consid. 1 p. 131 et les références). Selon la
jurisprudence, le séquestre de valeurs patrimoniales cause en principe un
dommage irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, car le détenteur se
trouve privé temporairement de la libre disposition des valeurs saisies (ATF
126 I 97 consid. 1b p. 101; voir également ATF 133 IV 139 consid. 4 p. 141; 128
I 129 consid. 1 p. 131). En tant que titulaire du compte séquestré et ayant
participé à la procédure devant l'autorité cantonale, la recourante a qualité
pour agir (art. 81 al. 1 LTF). Le recours a été déposé en temps utile (art. 100
al. 1 LTF) et les conclusions qui y ont été prises sont recevables (art. 107
al. 1 LTF). Il y a donc lieu d'entrer en matière.

2. 
Invoquant les art. 26 al. 1, 36 al. 1 à 3 Cst., 70 al. 1 CP et 263 CPP, la
recourante soutient en substance que le maintien du séquestre sur ses avoirs
serait disproportionné en raison de l'écoulement du temps depuis son prononcé
et de l'absence de renforcement des soupçons de la commission d'une infraction.

2.1. Le séquestre, comme mesure restreignant le droit de propriété, n'est
compatible avec la Constitution que s'il repose sur une base légale, est
justifié par un intérêt public suffisant et respecte le principe de la
proportionnalité (art. 26 al. 1 Cst. en relation avec l'art. 36 al. 1 à 3 Cst.;
ATF 130 I 360 consid. 1.2 p. 362; 126 I 219 consid. 2a et 2c p. 221 s.). Ce
dernier exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats
escomptés et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins
incisive; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et
il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou
privés compromis (ATF 136 IV 97 consid. 5.2.2 p. 104 et les arrêts cités).
Le séquestre pénal est une mesure conservatoire provisoire destinée à préserver
les objets ou valeurs que le juge du fond pourrait être amené à confisquer ou
qui pourraient servir à l'exécution d'une créance compensatrice. Elle est
proportionnée lorsqu'elle porte sur des avoirs dont on peut admettre qu'ils
pourront être vraisemblablement confisqués en application du droit pénal. Tant
que l'instruction n'est pas achevée, une simple probabilité suffit car, à
l'instar de toute mesure provisionnelle, la saisie se rapporte à des
prétentions encore incertaines. L'autorité doit pouvoir décider rapidement du
séquestre provisoire (cf. art. 263 al. 2 CPP), ce qui exclut qu'elle résolve
des questions juridiques complexes ou qu'elle attende d'être renseignée de
manière exacte et complète sur les faits avant d'agir (ATF 116 Ib 96 consid. 3a
p. 99 s.). Le séquestre conservatoire peut être maintenu tant que subsiste la
probabilité d'une confiscation, l'intégralité des fonds devant demeurer à
disposition de la justice aussi longtemps qu'il existe un doute sur la part des
fonds qui pourrait provenir d'une activité criminelle (arrêts 1B_175/2012 du 5
septembre 2012 consid. 4.1; 1P.405/1993 du 8 novembre 1993 consid. 3 publié in
SJ 1994 p. 97). En outre, pour que le maintien du séquestre pendant une période
prolongée se justifie, il importe que les présomptions se renforcent en cours
d'enquête (ATF 122 IV 91 consid. 4 p. 95 s.; Lembo/Julen Berthod, in
Commentaire romand CPP, 2011, no 26 ad art. 263 CPP). Selon la jurisprudence,
un séquestre peut apparaître disproportionné lorsque la procédure dans laquelle
il s'inscrit s'éternise sans motifs suffisants (ATF 132 I 229 consid. 11.6 p.
247). Un délai raisonnable peut, cas échéant, être fixé pour qu'il soit procédé
aux actes nécessaires et à la clôture de l'enquête; cette faculté n'est
cependant pas toujours ouverte, en particulier lorsque le retard découle de
résultats de commissions rogatoires à l'étranger (arrêts 1B_458/2012 du 25
novembre 2012 consid. 3.1; 1B_179/2009 du 24 novembre 2009 consid. 3.2).

2.2. En l'occurrence, le séquestre a été prononcé le 7 novembre 2011. Quelques
jours plus tard - le 27 novembre 2011 - est décédé B.________, circonstance
justifiant, au regard notamment des liens de parenté l'unissant à C.________,
de repousser l'audition de cette dernière. Lorsque celle-ci a pu être entendue
en octobre 2012, ses déclarations ont permis d'appuyer, certes dans une mesure
de moindre importance, les présomptions relatives à une possible provenance
criminelle de l'argent saisi; elle n'a en effet pas pu renseigner l'autorité
sur l'origine des fonds se trouvant sur le compte bancaire dont elle est
pourtant l'ayant droit économique. En revanche, l'audition en décembre 2012 de
l'ancien employé de banque n'a, selon la cour cantonale, pas apporté d'élément
supplémentaire déterminant. Il ne peut cependant pas non plus en être déduit
l'absence d'une possible origine criminelle des fonds versés en 2011 à la
recourante, dès lors que l'employé en question ignorait au moment de
l'ouverture du compte en 2010 la procédure pénale ouverte en Grèce contre son
client, a quitté son emploi en juillet 2011 et n'a donc ainsi vraisemblablement
pas eu connaissance du jugement grec rendu le 29 juillet 2011, ainsi que du
virement litigieux qui a été effectué quelques jours après.
Il ne peut ensuite être contesté qu'aucune autre mesure d'instruction n'a été
ordonnée par la suite. Toutefois, la recourante ne s'est plainte des prétendues
lenteurs de la procédure que cinq mois plus tard dans sa requête de levée du
séquestre, sans pour autant alléguer subir un quelconque dommage du fait de la
mesure prononcée à son encontre. Quant à la commission rogatoire annoncée par
le Procureur dès mai 2012 et à laquelle il a été invité de procéder sans retard
par la juridiction précédente, le magistrat a indiqué devant le Tribunal de
céans qu'il attendait l'issue de la présente procédure pour ce faire. Savoir si
le Ministère public prolonge ainsi d'une manière éventuellement contestable la
durée de l'instruction n'est pas déterminant dès lors que la recourante ne
prétend pas que la mise en oeuvre d'une telle commission aurait permis ou
pourrait permettre de clarifier les faits et de lever le séquestre. Elle la
considère au contraire comme une mesure ne pouvant apporter aucun élément
propre à faire avancer le dossier (cf. son mémoire de recours, p. 11),
démontrant ainsi son absence d'intérêt à une organisation rapide de celle-ci.
Il apparaît donc que l'instruction, si elle a peut-être connu certains temps
morts durant ces deux ans, n'a pas pour autant cessé de progresser et les
mesures entreprises à ce jour suffisent, dans le cadre de la procédure de
séquestre, pour conforter l'existence de soupçons que le virement effectué en
août 2011 par la Fondation en faveur de la recourante puisse être constitutif
d'un acte de blanchiment d'argent, dès lors que le compte de la première a été
ouvert et alimenté durant la période retenue par le jugement grec pour la
réalisation des infractions commises par B.________ (1999 à 2004). Les valeurs
saisies restent donc à ce stade de l'instruction susceptibles d'être
confisquées par le juge du fond, le séquestre en vue de leur conservation étant
ainsi justifié.
Partant, le grief relatif à une violation du principe de la proportionnalité
doit être écarté.

2.3. C'est également en vain que la recourante invoque une violation du
principe de présomption d'innocence (art. 32 al. 1 Cst.).
L'application de l'art. 305bis CP ne présuppose en effet pas de savoir qui a
commis le crime préalable ou d'en connaître les circonstances dans le détail (
ATF 120 IV 323 consid. 3d p. 328 s.; DUPUIS/GELLER/ MONNIER/MOREILLON/PIGUET/
BETTEX/STOLL, Petit commentaire CP, 2012, n ^o 16 ad art. 305bis CP; BERNARD
CORBOZ, Les infractions en droit suisse, 3 ^e éd. 2010, n ^o 11 ad art. 305bis
CP); ce raisonnement vaut à plus forte raison dans le cadre d'une procédure de
séquestre en lien avec la possible commission d'une telle infraction, puisque
cette mesure est fondée sur la vraisemblance (cf. art. 263 al. 1 CPP). Il ne
peut pas non plus être tiré argument de l'absence du caractère définitif et
exécutoire du jugement grec dès lors qu'il importe peu en matière de
blanchiment d'argent que le crime préalable soit poursuivi pénalement (arrêts
1B_190/2011 du 7 juillet 2011 consid. 2.2; 1B_284/2010 du 8 décembre 2010
consid. 3.4; Bernard Corboz, op. cit., no 14 ad art. 305bis CP).

2.4. Partant, la Chambre pénale de recours n'a pas violé le droit fédéral en
confirmant le maintien du séquestre sur le compte bancaire de la recourante.

3. 
Contrairement enfin à ce que soutient la recourante, l'autorité précédente n'a
pas procédé à une constatation manifestement inexacte des faits (art. 97 LTF et
9 Cst.).
En effet, le possible acte d'entrave constitutif d'une infraction de
blanchiment d'argent et examiné par les autorités pénales n'est pas le virement
de 2001 sur le compte bancaire de la Fondation. Le comportement reproché en
l'espèce résulte du transfert de fonds de l'institution susmentionnée en faveur
de la recourante effectué le 12 août 2011. Il en résulte que les arguments en
lien avec la prescription de l'action pénale pour une éventuelle infraction de
blanchiment d'argent sont en l'état dénués de pertinence (cf. art. 305bis CP,
97 et 98 CP). Il n'est au demeurant pas arbitraire, dans le cadre de la
procédure de séquestre, de limiter l'examen de la prescription au comportement
qui pourrait être constitutif d'un acte d'entrave. Il appartiendra ensuite à
l'autorité d'instruction de vérifier si l'infraction principale n'était pas
prescrite au moment de la commission de l'acte constitutif d'un blanchiment
d'argent, cas échéant en déterminant le droit applicable à cette question (ATF
126 IV 255 consid. 3b/bb p. 262 ss; Dupuis/Geller/ Monnier/Moreillon/Piguet/
Bettex/Stoll, op. cit., no 18 ad art. 305bis CP).

4. 
Il s'ensuit que le recours est rejeté. La recourante qui succombe supporte les
frais de procédure (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1. 
Le recours est rejeté.

2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3. 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Ministère
public de la République et canton de Genève et à la Chambre pénale de recours
de la Cour de justice de la République et canton de Genève.

Lausanne, le 10 janvier 2014
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Fonjallaz

La Greffière: Kropf

Navigation

Neue Suche

ähnliche Leitentscheide suchen
ähnliche Urteile ab 2000 suchen

Drucken nach oben